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2.4 Migration cellulaire spontan´ee

2.4.1 Motivation

La migration cellulaire est un processus hautement int´egr´e o`u la dynamique de polym´erisation / d´epolym´erisation de l’actine, la contractilit´e de l’actomyosine et la dynamique des adh´esions sont ´etroitement li´ees. Nous avons propos´e un mod`ele compu-tationnel pour ´etudier le couplage entre ces diff´erents ´el´ements dans le contexte de la mi-gration cellulaire spontan´ee, c’est `a dire non stimul´ee par les conditions environnemen-tales. Dans ce contexte particulier, les mouvements membranaires sont des oscillations qui r´esultent de la comp´etition entre la pression hydrostatique et la contractilit´e des fibres d’actine comme nous l’avons vu pr´ec´edemment. Des points d’adh´esions peuvent se former au cours des oscillations sous certaines conditions et les forces contractiles peuvent les amener `a maturer en adh´esions focales. La polym´erisation active de l’actine sur le front cellulaire, qui vient renforcer la protrusion due `a la pression hydrostatique, permet de g´en´erer la force de traction n´ecessaire `a la cellule pour se transloquer et avancer. Les simulations num´eriques de ce mod`ele ont tout d’abord pour but de mon-trer qu’il est possible de reproduire certains aspects les plus caract´eristiques de la migration de fibroblastes. Sur la base de ce pr´e-requis, il devient possible d’´etudier plus sp´ecifiquement l’impact des diff´erents param`etres temporels du mod`ele, tels que le temps de recyclage des prot´eines d’adh´esion apr`es translocation et les temps de vie des diff´erentes adh´esions, sur la vitesse de migration cellulaire et sur la nature de la trajectoire.

Cette ´etude est importante dans la mesure o`u elle ´etudie la migration non-induite. Elle contribue `a une meilleure compr´ehension du potentiel de r´eaction de la cellule lorsqu’elle est soumise `a un stimulus.

2.4.2 Hypoth`eses du mod`ele

La migration est un processus typiquement d´ecrit en 3 `a 5 ´etapes selon le niveau de d´etail consid´er´e. Nous consid´erons ici trois ´etapes principales qui sont (1) la protrusion membranaire, (2) l’adh´esion au substrat, (3) la translocation. Le mod`ele computation-nel propos´e se fonde sur l’int´egration de ces trois processus pour permettre `a la cellule d’explorer son environnement, que nous supposons ici parfaitement uniforme. Cette condition permet de s’affranchir de la description explicite du substrat.

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Le mod`ele computationnel hybride est construit sur la base du mod`ele continu d´ecrivant les d´eformations membranaires et d´ecrit pr´ec´edemment. Les ´el´ements dis-crets, principalement pour g´erer la formation ponctuelle des adh´esions, sont int´egr´es comme il suit :

– la formation d’une adh´esion est mat´erialis´ee par un accroissement du frottement de la membrane sur le substrat et s’exprime par δ(a) = a + αδadh. α est un coefficient de friction et δadh = δA+ δF X+ δF A avec δX = 1 ou 0 selon s’il y a ou non une adh´esion de type X au point consid´er´e,

– la protrusion membranaire est primairement due `a la pression hydrostatique β renforc´ee par la pression due `a la polym´erisation des filaments qui poussent la membrane au voisinage des adh´esions focales (FA). La force protrusive r´esultante s’exprime par Fout = β + β(a)δF A (Fig. 2.15),

– la r´etraction membranaire est due `a la traction des filaments d’actine sur la membrane. L’intensit´e de cette force est suppos´ee ici lin´eairement proportionnelle `a la concentration d’actine et s’exprime par Fin = −γLa o`u γ est le coefficient d’´elasticit´e du r´eseau d’actine,

– le terme de tension membranaire κ reste inchang´e par rapport au mod`ele de r´ef´erence pr´ec´edemment d´efini.

L’´equation d´ecrivant les mouvements membranaires s’expriment alors : (a + αδadh)∂L

∂t = β + β(a)δF A− γLa + κ. (2.7)

Figure 2.15: Profile de contractilit´e de l’actomyosine σ(a) = ψa2e−a/asat (courbe rouge). La contractilit´e augmente jusqu’`a atteindre la densit´e de saturation (asat). Au del`a de ce point, la contractilit´e d´ecroˆıt en raison de l’effet de compaction des filaments. Profile de la pression qui s’exerce sur la membrane et qui est due `a la combinaison de la pression hydrostatique β et de la pression induite par la polym´erisation des filaments β(a) (courbe bleue).

Nous faisons l’hypoth`ese que la probabilit´e de former une adh´esion est plus grande dans une zone protrusive (telle que le lamellipode) puisque la surface de contact entre la cellule et le substrat est plus grande. Cela se traduit dans le mod`ele par l’identifica-tion de la zone o`u l’extension membranaire est maximum (Lmax) et ce maximum doit

´egalement ˆetre associ´e `a une concentration d’actine suffisante (athr).

Chaque type d’adh´esion correspond `a un niveau de maturation caract´eris´e par sa dur´ee de vie et sa r´esistance `a la traction. Si la force de tension r´esultante (RF) exerc´ee sur le site adh´esif est positive (c’est `a dire si la force est une traction) alors AP mature en FX. Si cette condition n’est pas satisfaite durant la dur´ee de vie de l’adh´esion AP, alors l’adh´esion se d´etache. De fa¸con similaire, la maturation de FX en FA se pro-duit si RF appliqu´ee sur l’adh´esion atteint le seuil Rthr avant que la dur´ee de vie de l’adh´esion n’expire. Une fois FA form´ee, l’actine est recrut´ee autour de cette adh´esion pour former et renforcer les fibres de tension. Les fibres en se contractant permettent de tirer la cellule en avant. La translocation n’est suppos´ee se produire que lorsque la force exerc´ee par les filaments atteint le seuil Tthr suffisant pour arracher la cellule aux adh´esions p´eriph´eriques. Avant qu’un nouveau cycle protrusion-adh´esion-translocation ne commence, les prot´eines d’adh´esion doivent ˆetre recycl´ees. Pendant cette p´eriode de recyclage dite ”r´efractaire”, la cellule ne peut pas former de nouvelles adh´esions.

Afin que l’automate puisse d´eterminer si une adh´esion peut croˆıtre ou non, un crit`ere de force est d´efini. On calcule pour cela la force r´esultante RFi, t) qui s’exerce au temps t sur chaque adh´esion i. Cette force r´esultante correspond `a la somme des contributions de toutes les forces individuelles F (θj, t) qui ´equilibrent les mouvements de la membrane dans toutes les directions θj. Ces forces sont alors projet´ees sur la direction θi correspondant `a l’adh´esion i (θi = 2πi/m, avec m le nombre de points d´efinissant le contour membranaire), c’est `a dire :

RFi, t) =

m

X

j=0

F (θj, t) cos(θj− θi), (2.8) avec F (θj, t) telle que a∂L

∂t + F (θj, t) = 0. (2.9) F (θj, t) est d´eriv´ee de l’´equation d’´equilibre des forces sur la membrane, n´egligeant le terme κ li´e `a la courbure membranaire puisque sa contribution est faible au regard des autres forces impliqu´ees qui sont : (i) le terme de friction qui correspond `a un accrois-sement de la tension au point d’adh´esion, (ii) la tension passive des filaments d’actine modul´ee par l’extension membranaire et par la densit´e d’actine au point consid´er´e, et (iii) la pression qui tend `a repousser le corps cellulaire du site d’adh´esion. F (θj, t) au site j et au temps t s’exprime par :

F (θj, t) = δadhj, t) γ2[L(θj, t + ∆t) − L(θj, t)]

| {z }

tension li´ee `a l’adh´esion

+ γL(θj, t)a(θj, t)

| {z }

tension passive des filaments

− [β + β(a)δF Aj, t)]

| {z }

pression

(2.10)

2.4 Migration cellulaire spontan´ee 33

Figure 2.16: Diagramme d’inf´erence pour simuler la migration cellulaire. Les voies condui-sant `a la translocation cellulaire, c’est `a dire `a un pas en avant pour la cellule, sont figur´ees en noir. Les voies correspondant aux conditions alternatives sont figur´ees en gris.

fortement de la nature du site j. Par exemple, si j n’est pas un site d’adh´esion alors seule la contribution passive demeure, c’est `a dire F (θj, t) = γL(θj, t)a(θj, t) − β.

Le mod`ele suppose que les fibres de tension lient selon une direction radiale l’adh´esion focale au corps cellulaire. La translocation, c’est `a dire le d´eplacement du centro¨ıde de la cellule, et la direction de migration θM r´esultent de la comp´etition entre les forces de traction exerc´ees par chaque fibre de tension sur les adh´esions focales. La force de traction r´esultante TF port´ee par chaque fibre i est calcul´ee `a partir de l’expression :

TFi, t) = m X j=02[L(θj, t + ∆t) − L(θj, t)] | {z }

li´e `a l’adh´esion

+ γL(θj, t)a(θj, t)

| {z }

li´e aux fibres

F Aj, t) cos(θj− θi) (2.11) Le d´eplacement not´e r du centro¨ıde est simplement donn´e par r = TFM, t)/k. Cela correspond `a un rappel ´elastique, avec k le coefficient ´elastique, par lequel les fibres de tension tirent brusquement une fois atteint le seuil de traction Tthr n´ecessaire `a la translocation.

Figure 2.17: Image extraite d’une simulation montrant les 3 types adh´esifs (AP, FX et FA) form´es `a la p´eriph´erie cellulaire. Seules les adh´esions FA contribuent au calcul du d´eplacement cellulaire. Le centro¨ıde de la cellule est tir´e dans la direction θM qui correspond `

a la direction de plus grande traction de la part des filaments ancr´es aux FA. Le vecteur r repr´esente le d´eplacement effectif du centro¨ıde depuis sa position initiale (gris sombre) `a sa position finale (gris clair).

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