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Si des résistants réclament vengeance sans noter explicitement leurs raisons ni les personnes qu'elle doit viser, écrivant simplement « vengeance » dans leurs lettres, d'autres au contraire expliquent les raisons de leur courroux et les personnes sur lesquelles il doit s'abattre. Malgré la censure, certains parviennent à exprimer leur ressentiment envers la personne les ayant trahis. Bernard Maitre, relatant à ses parents son comportement en prison, écrit : « Pendant mon écrouement [sic] par eux et par suite de l'infâme traître », le reste de sa phrase est censuré213. Les autorités allemandes prennent soin de caviarder les allusions à la vengeance surtout lorsqu'elles concernent directement une ou des personnes. Les traîtres peuvent continuer à leur être utiles pour infiltrer d'autres mouvements. Il existe en effet différents types de traîtres : les résistants d'origine qui avouent sous la peur, la torture ou les pressions morales (les nazis menacent parfois de s'en prendre à leur famille) et les Vertrauensmänner, Français ou étrangers recrutés par les Allemands pour infiltrer les résistants214. Les uns comme les autres peuvent être utilisés plusieurs fois par les occupants qui ont donc intérêt à limiter la divulgation d'informations à leur égard ou de demandes de vengeance. Le risque d'une trahison est connu par les résistants ; André Postel-Vinay, membre entre autres du réseau Patrick O'Leary, sentant que quelqu'un risque de le trahir se dit que s'il le fait effectivement il le tuera avant de se suicider. Il ne réussit finalement pas à mettre son projet à exécution215. La trahison est d'autant plus irrémissible que, tout en sachant qu'elle est plausible, les résistants ont du mal à l'envisager complètement comme l'explique André Postel-Vinay en narrant la manière dont il est tombé dans le piège tendu par le transfuge :

« Il est d'ailleurs difficile de croire à la trahison parfaite, la trahison idéale, avant d'en avoir vu soi-même un exemple. Le traître idéal vend ses camarades et ses amis pour vivre heureux ; et il vit heureux. Il sait les vendre avec talent, avec le sourire, avec un visage amical. Cette grâce n'est pas donnée à tout le monde. J'imaginais mal un tel diabolisme. J'en admettais intellectuellement la possibilité. Affectivement, le ''traître idéal'' me paraissait mythique216. »

212 Lettre d’André Diez à Charlot, [août 1942]. Consultable sur http://maitron-fusilles-40-44.univ-paris1.fr/spip.php?

article22720&id_mot=10754 Voir annexe p. 125.

213 Lettre de Bernard Maitre à ses parents, 16 février 1944. Consultable dans KRIVOPISSKO Guy (éd.), La vie à en mourir, op. cit., pp. 241-242. Voir annexe p. 125.

214 GRENARD Fabrice, La traque des résistants, op. cit., pp. 10-13.

215 POSTEL-VINAY André, Un fou s'évade. Souvenirs de 1941-1942, Paris, Éditions du Félin, 1997, p. 20.

Les traîtres, en tant que personnes ayant bafoué la confiance des autres et renié leur honneur, sont donc l'une des cibles de la rancœur des résistants. Missak Manouchian indique ainsi : « je pardonne à tous ceux qui m’ont fait du mal ou qui ont voulu me faire du mal, sauf à celui qui nous a trahis pour racheter sa peau et [à]

ceux qui nous ont vendus »217. Certains résistants parviennent, par des messages clandestins, à faire savoir à leurs proches l'identité de ceux qui les ont trahis. Félicien Joly, membre des jeunesses communistes, écrit à sa famille :

« Maurice a trahi la cause pour laquelle nous avions juré de sacrifier notre vie s'il le fallait. Il a donné les adresses de nombreux camarades. Ainsi, il a dit : ''il ne faut pas arrêter Gary pour le moment. Pas mal de copains de ce fait vont donc être connus218. »

L'homme laissé en liberté doit conduire à son insu à la découverte du reste du mouvement. Il est fréquent qu'un ou plusieurs résistants soient laissés en liberté afin qu'ils puissent permettre de démanteler d'autres groupes ou de faire tomber des membres non connus des autorités. Si Félicien Joly ne fait pas d'allusion explicite à la vengeance dans sa lettre, il est possible que ce soit parce que son message a pour principal objectif d'inciter ses camarades de résistance à se cacher et à éviter les filatures. Cependant, il distingue nettement son comportement de celui du traître dans la lettre qu'il fait parvenir à sa famille par la voie officielle notant

« j'aurais pu sauver ma vie en accusant mes camarades ou mon ami, je ne l'ai pas fait » préférant accepter « la peine infligée »219. De même, Marc Riquier, membre du groupe Fer des corps francs Vengeance, écrit à sa femme :

« J’aurais pu éviter cette mort, vois-tu, mais cela m’a été impossible car pour cela il aurait fallu que je fasse comme beaucoup ont fait, faire fusiller une vingtaine de camarades, alors il m’a été impossible d’accepter un tel marché, car si j’avais accepté ce marchandage je n’aurais plus osé regarder personne en face, la honte m’aurait étouffé220. »

Les résistants se montrent intransigeants envers les traîtres en raison de la conscience des conséquences des dénonciations, même faites sous menaces, ainsi que de leur propre sacrifice alors qu'ils pourraient l'éviter en livrant leurs camarades. Eugène Clotrier, arrêté en novembre 1943 alors qu'il se rendait à un rendez-vous, cherche ensuite à savoir à qui il doit son emprisonnement. Une fois qu'il sait avec certitude le nom du délateur il le transmet à sa femme appelant à la vengeance : « C’est bien le Paulo qui nous a tous donnés à son arrestation. Pour celui-là, pas de pitié ; je te laisse avec les copains le soin de lui régler son addition à la prochaine occasion »221. Son ressentiment est durable car le jour même de son exécution il rappelle à sa femme qu'il meurt à cause du traître : « Le Paul C., est seul responsable de tout ce qui arrive, souviens-toi »222. Les résistants ne savent pas forcément s'ils doivent leur arrestation à la traîtrise de l'un des leurs ni dans quelles circonstances elle s'est effectuée s'il y en a eu une. Si toutefois ils en soupçonnent la possibilité, l'identité du traître peut les obnubiler. Jacques Lusseyran, fondateur du mouvement des Volontaires de la Liberté qui est ensuite fusionné avec Défense de la France, évoque l'obsession pour son traître dans la relation de ses

217 Lettre de Missak Manouchian à sa femme, 21 février 1944, let. citée.

218 Lettre de Félicien Joly à sa famille et à ses camarades, 15 novembre 1941. Consultable dans KRIVOPISSKO Guy (éd.), La vie à en mourir, op. cit., pp. 88-89. Voir annexe p. 126.

219 Lettre de Félicien Joly à sa famille, 15 novembre 1941. Consultable dans KRIVOPISSKO Guy (éd.), La vie à en mourir, op. cit., p. 89. Voir annexe p. 126.

220 Lettre de Marc Riquier à sa femme, 19 janvier 1944. Consultable sur https://fusilles-40-44.maitron.fr/spip.php?

article166738&id_mot=10754 Voir annexe p. 128.

221 Lettre d'Eugène Clotrier à sa femme, ses enfants et aux siens, 2 avril 1944, let. citée.

222 Lettre d'Eugène Clotrier à sa femme et ses enfants, 11 avril 1944, let. citée.

souvenirs : « La question que je me posais était monstrueuse : qui m'avait dénoncé ?223 » Connaître l'identité du traître permet aux résistants de mieux comprendre ce qui leur arrive mais aussi d'être rassurés sur des camarades dont ils ne peuvent ou ne veulent soupçonner la traîtrise. La trahison de quelqu'un à qui ils avaient accordé leur confiance leur est d'autant plus pénible224. Un résistant a ainsi inscrit sur un mur de Fresnes qu'il a été « vendu par un copain F. T. P. »225 Parmi les graffitis qu'ils gravent sur les murs des cellules à l'aide d'un outil quelconque, comme une cuillère ou une épingle, plusieurs résistants évoquent la délation dont ils ont été victimes avec, parfois, l'identité du délateur. Un résistant indique ainsi dans la cellule 382 de Fresnes : « B. C.

M. et tout le P. S. vendu par Espiasse dit Loiseau »226. Si les graffitis ne font pas forcément d'allusion littérale à la vengeance, celle-ci est cependant sous-entendue227. En effet, quelques scripteurs prennent soin d'inscrire l'adresse du dénonciateur :

« Thoraval

arrêté le 17-1-44 à Brévannes 5 rue du Tertre pour avoir hébergé des F T P

a été dénoncé par Vignon

surnommé Simmon de la Barre Ormesson Seine et Oise228 »

L'animosité des résistants envers ceux qui ont parlé tient sans doute aussi au fait que leur traître les a fait tomber en même temps que d'autres camarades auxquels ils sont très attachés. Les résistants peuvent demander vengeance en leur nom mais aussi en celui de leurs camarades ; Georges Wodli, résistant communiste, évoque ainsi « la vengeance de ma mort et celle de mes camarades »229. Il est parfois fait directement mention des représailles qui attendent les traîtres : « Mort aux camarades qui dénoncent nous les retrouverons bientôt » est noté dans le quartier des femmes de Fresnes230.

Les agents directs de l'arrestation des résistants sont aussi honnis surtout les Français. Les Allemands sont rarement nommés car ils sont intrinsèquement les ennemis des résistants lesquels, lorsqu'ils souhaitent être vengés, ne jugent donc pas nécessaire de les désigner se contentant de le faire implicitement. En revanche, l'opprobre est jeté sur les policiers français dont les activités ne peuvent pour certains pas être pardonnées ni expliquées étant donné leur nationalité comme le note André Joineau : « Le plus terrible, c’est d’avoir été arrêté par des Français231. » Ce résistant communiste a été arrêté par des membres de la brigade spéciale antiterroriste des Renseignements généraux. La brigade spéciale est instaurée pour lutter contre le communisme après son interdiction au début de la guerre, en mars 1940, et est réemployée à partir de l'été 1941. La section antiterroriste, dite BS2, est créée en janvier 1942232. Les accords Oberg-Bousquet conclus la même année

223 LUSSEYRAN Jacques, Et la lumière fut, Paris, Gallimard, 2016, p. 343.

224 SCHEHR Sébastien, « L'expérience de la trahison », in Traîtres et trahisons de l'Antiquité à nos jours, Paris, Berg International éditeurs, 2008, p. 76.

225 CALET Henri, Les murs de Fresnes 1945, op. cit., p. 45.

226 Ibid., p. 69.

227 BORWICZ Michel, Écrits des condamnés à mort sous l'occupation nazie (1939-1945), Paris, Gallimard, 1973, pp. 216-219.

228 CALET Henri, Les murs de Fresnes 1945, op. cit., p. 77.

229 Lettre de Georges Wodli à un camarade de cachot, [fin mars ou début avril 1943]. Consultable dans DUCLOS Jacques (éd.), Lettres de fusillés, op. cit., pp. 83-84. Voir annexe p. 129.

230 CALET Henri, Les murs de Fresnes 1945, op. cit., p. 109. Des hommes ayant séjourné dans ce quartier avant les femmes, le sexe du scripteur de ce graffiti ne peut être établi avec certitude.

231 Lettre d'André Joineau à sa famille, 7 mars 1944. Consultable sur http://www.mont-valerien.fr/ressources-historiques/le-mont-valerien-pendant-la-seconde-guerre-mondiale/lettres-de-fusilles/detail-lettres-fusiles/lettres-de-fusilles/joineau-andre/?

no_cache=1 Voir annexe p. 129.

232 PESCHANSKI Denis, « La confrontation radicale. Résistants communistes parisiens vs Brigades spéciales », in MARCOT

confirment la collaboration, qui existe déjà de fait, de la police française à la répression. Les différentes

« polices » de l'État Français233 participent à la traque des résistants, à leur arrestation ainsi qu'à leurs interrogatoires lors desquels la torture peut être employée. Les résistants reprochent aux policiers de les poursuivre alors qu'ils luttent contre les envahisseurs de leur pays mais aussi de les livrer aux Allemands voire de s'adonner aux mêmes cruautés qu'eux. Un résistant anonyme résume ces reproches à sa compagne :

« Il faut aussi que tu connaisses les responsables de ma mort, ce sont les policiers français qui, après nous avoir maltraités, cravachés, nous ont livré aux Allemands. N'oublie jamais tous ces lâches, il faut aussi que mes enfants le sachent. Ne pardonne jamais à ceux qui m’ont arrêté et enchaîné devant toi, ils se sont faits complices par leur inconscience et leur lâcheté234. »

Des résistants tentent parfois de convaincre les policiers français de ne pas les remettre aux Allemands.

René Pédrono, membre du Front national pour la libération et l'indépendance de la France et des FTPF, arrêté par des gendarmes à Pontivy, dans le Morbihan, fit cette requête au capitaine de la gendarmerie lequel, après avoir prétendu y accéder, renia finalement sa promesse235. René Pédrono en exprime toute sa rancœur dans une lettre à sa famille : « J’espère que le capitaine de Gendarmerie de Pontivy paiera ses crimes !!!236 » Les résistants savent que s'ils sont remis aux Allemands, ils risquent d'être condamnés à mort par les cours martiales, comme l'indique la lettre d'Albert Abalain : « Ceux qui m'ont livré aux Allemands, les policiers français ou soi-disant tels, qui se sont faits les pourvoyeurs de cours martiales ceux-là auront à rendre compte un jour de leur conduite répugnante »237. Les cours martiales françaises ne sont instaurées que le 20 janvier 1944, une partie des lettres des résistants qui y sont condamnés sont détruites238. Les quelques lettres consultées de ces condamnés ne portent pas de mention de vengeance mais les sentences étant exécutées pratiquement instantanément il doit être plus difficile aux résistants de transmettre des lettres sans passer par la censure. La peine d'être séparés à jamais de leurs proches constitue un autre motif de leur désir de vengeance. Un homme note la détresse dans laquelle le plonge la perspective de ne pas revoir sa famille dans la cellule 85 de Fresnes.

Il insiste sur sa rancœur à l'égard de la femme qui l'a dénoncé en inscrivant qu'il n'oubliera jamais son acte bien qu'il écrive juste avant qu'il a conscience que la mort l'attend.

« Vous ne faites donc rien pour moi. Je vous supplie de venir à mon secours car je vais mourir.

Je me souviendrai toute ma vie des souffrances que j'ai enduré [sic] dans la cellule 85 pour la dénonciation d'une vache de femme qui m'a vendue aux Allemands. Mais j'aurais sa peau

universitaires de Franche-Comté, 2006, pp. 335-349.

233 BERLIÈRE Jean-Marc, « Les ''polices'' de l'État Français : genèse et construction d'un appareil répressif », in GARNIER Bernard, LELEU Jean-Luc, QUELLIEN Jean (dir.), La répression en France, Caen, Centre de Recherche d'Histoire Quantitative, CNRS-Université de Caen Basse-Normandie, 2007, pp. 107-127.

234 Lettre d’un anonyme à son aimée, 19 septembre 1943. Consultable dans KRIVOPISSKO Guy (éd.), La vie à en mourir, op. cit., pp. 188-189. Voir annexe p. 127.

235 PRIGENT Alain, TILLY Serge, « PÉDRONO René, Marie », Le Maitron, consulté le 27/02/2020. URL : https://fusilles-40-44.maitron.fr/spip.php?article166816&id_mot=10754

236 Lettre de René Pédrono à sa mère, ses frères, sa sœur, 21 février 1944. Consultable sur https://fusilles-40-44.maitron.fr/spip.php?

article166816&id_mot=10754 Voir annexe p. 131.

237 Lettre d'Albert Abalain à ses parents, 25 juillet 1943. Consultable sur http://www.mont-valerien.fr/ressources-historiques/le-mont-valerien-pendant-la-seconde-guerre-mondiale/lettres-de-fusilles/detail-lettres-fusiles/lettres-de-fusilles/abalain-albert/?

no_cache=1 Voir annexe p. 132.

238 SANSICO Virginie, La justice du pire. Les cours martiales sous Vichy, op. cit., p. 221.

si j'en sors car j'ai quatre enfants. Peut-être auront-ils pitié pour ces innocents et ma pauvre petite femme de 22 ans qui me pleure nuit et jour Raymonde R. L.239 »

Les conditions de détention constituent un mobile fort de la rancune des résistants. L'emprisonnement est vécu comme une épreuve par nombre d'entre eux. Agnès Humbert, résistante rattachée à la nébuleuse240 du musée de l'Homme, compare la prison à un caveau dans le journal qu'elle publie après-guerre et qualifie la détention de « mort provisoire »241. L'emprisonnement peut marquer durablement les résistants même après la guerre, Jean-Marie Delabre, résistant aux Volontaires de la Liberté puis à Défense de la France, répondant à la question de savoir ce que la Résistance a changé dans sa vie dit : « J’ai horreur de l’idée qu’on met des gens en prison et je considère que c’est un scandale de la manière dont on met des gens en prison préventive. C’est leur faire subir un supplice242. » Les résistants sont généralement mis au secret dans l'attente de leur procès, puis à nouveau après leur condamnation à mort dans l'attente de son accomplissement243. Les visites leur sont souvent interdites ce dont ils souffrent. Les résistants athées sont particulièrement sensibles à la séparation de leur famille car ils ne peuvent espérer la revoir dans un Au-delà. Robert Hamel évoque son désir de vengeance après avoir expliqué à sa femme que ce qui l'afflige le plus est de ne pouvoir la revoir :

« Je n’ai souffert que du manque de nouvelles de toi et aussi de la faim. Tout cela va être fini, mais j’aurais bien voulu te revoir, c’était mon désir le plus cher. Mais il sera dit qu’avant de nous assassiner, nos bourreaux nous feront souffrir jusqu’en nos plus chères affections244. »

Il est de plus fréquent qu'on leur retire tout objet personnel. Félix Cadras, résistant communiste, réussit à écrire quelques mots à sa famille sur un mouchoir qu'il cache dans ses vêtements. Il y note : « Ils nous ont même pris vos lettres, vos photos. N'oubliez jamais245. » La privation de ses lettres et photographies ajoutée à l'interdiction d'écrire à sa famille l'en coupe entièrement. La solitude lui pèse comme il l'écrit plus haut dans sa lettre : « Pas tabac et toujours seul, seul ! » Albert Abalain lie aussi son désir de vengeance à ce qu'il vit en prison. Alors incarcéré à la prison Jacques-Cartier de Rennes, il écrit à ses parents :

« Ce que j'ai pu souffrir par eux, vous ne le saurez jamais. Il est impossible d'imaginer le sadisme de ces chiens de garde du capitalisme ! Privé de nourriture, privé de soins, cravaché jour et nuit, exposé les nuits durant aux courants d'air en novembre, sans paillasse et sans couverture, dans une cellule si petite qu'il n'était pas possible de remuer, pour tanter [sic] de se réchauffer.

J'imaginais mal avant mon arrestation que les Français puissent se conduire ainsi avec de bons patriotes, il est vrai que chez ces tristes individus, tout sentiment patriotique a cessé d'exister, s'il existat [sic] jamais. Peut-être ont-ils pensé que cela leur assurait l'impunité ?246 »

239 CALET Henri, Les murs de Fresnes 1945, op. cit., pp. 111-112.

240 L’expression est de BLANC Julien, Au commencement de la Résistance. Du côté du musée de l'Homme, 1940-1941, Paris, Éditions du Seuil, 2010.

241 HUMBERT Agnès, Notre guerre : souvenirs de résistance, Paris, Émile-Paul frères, 1946, p. 156.

242 Témoignage de Jean-Marie Delabre. URL : https://www.memoresist.org/temoignage/jean-marie-delabre/

243 BESSE Jean-Pierre, POUTY Thomas, Les fusillés, op. cit., p. 134.

244 Lettre de Robert Hamel à sa femme, sans date, let. citée.

245 Lettre de Félix Cadras à sa famille, 29 avril-19 mai 1942. Consultable dans KRIVOPISSKO Guy (éd.), La vie à en mourir, op.

cit., pp. 131-132. Le soulignage est d'origine. Voir annexe p. 133.

Il fait référence, entre autres, à la privation de paillasse et de couverture ce qui peut résulter de sanctions prises à l'encontre du détenu à la suite d'infractions au règlement bien que ce ne soit pas obligatoirement le cas. Des statistiques pénitentiaires ont été retrouvées dans la prison de Fresnes. Des punitions sont notées sur les fiches individuelles de détenus accompagnées parfois de leur motif : « 7 jours sans literie pour transmission journal au voisin. 7 jours sans repas midi »247. Les résistants peuvent aussi être frappés à l'intérieur des prisons lorsqu'ils enfreignent le règlement, d'où la références aux coups subis : « cravaché jour et nuit ». Ils sont également torturés lors des interrogatoires. Selon Alain Guérin, la torture a trois fonctions :

« la fonction policière classique d'obtention des aveux et des renseignements », « la fonction terroriste » et « la fonction de soupape psychologique et sociale » destinée à autoriser aux agents de la répression à « se défouler »248. La torture est utilisée par les Allemands mais également par des policiers français. Paul Thierret, battu par des agents des brigades spéciales puis par des Allemands lorsqu'ils l'interrogent à leur tour, écrit :

« Je devais subir les 11 et 17 juin, puis le 14 juillet, l’interrogatoire par les Allemands. Ce ne fut

« Je devais subir les 11 et 17 juin, puis le 14 juillet, l’interrogatoire par les Allemands. Ce ne fut

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