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dans le monde moderne n’est, par suite, ni normale, ni fonctionnelle, et dont il s’agit de limiter les adeptes et les

Dans le document Habit(at) : espace du corps dans la textilité (Page 124-128)

repousser dans les limbes du système social acutel »

109.

L’image d’un nomadisme infertile est encore très présente dans nos sociétés industrielles et qualifie cette fois-ci une situation subie par des personnes obligées de se déplacer, pour des questions d’instabilité professionnelles. Par exemple en Europe, avec le développement du nucléaire, une catégorie de travailleurs que l’on appelle les travailleurs du nucléaire a émergé. Leur travail leur impose de se déplacer de réacteurs en réacteurs afin de réparer le cœur de ceux-ci lorsqu’il s’est arrêté. Quand il faut intervenir sur un réacteur en panne, ce sont plusieurs dizaines voire centaines de travailleurs qui arrivent en masse et s’installent dans des camps proches de la centrale. Leurs installations sont à la limite de la précarité et ils n’ont pas le temps d’en faire un chez-soi plus appréciable qu’il leur faut déjà changer d’endroit. Mais il existe bien d’autres catégories de travailleurs nomades. A l’opposé des travailleurs du nucléaire se trouvent par exemple les entrepreneurs qui se déplacent pour aller gérer leurs sociétés. Dans ce cas nous ne parlons pas de précarité économique mais au contraire de la conséquence d’une réussite financière, encore que dans ce cas précis, le déplacement perpétuel entraîne la disparition d’un véritable chez-soi. Nous pouvons également penser aux pilotes de ligne et 109 Ibid.

// L’habitat comme enveloppe libérée du sol

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hôtesses de l’air qui passent probablement plus de temps dans des hôtels que dans leur propre « home ». Et puis il y a les travailleurs nomades encouragés par l’usage des nouvelles technologies. Cela concerne toutes les formes de travaux qui sont faits à distance des lieux habituels de l’entreprise, au profit des tiers-lieux. Généralement les espaces privilégiés dans ce cas sont les lieux de co- working, des espaces ouverts dont l’organisation se veut être au carrefour entre le bureau et la maison. On parle aussi de télétravail, c’est-à-dire d’un travail effectué à partir d’un bureau satellite qui peut changer de place à la guise du travailleur. Depuis sa maison, d’un espace partagé, d’un café ou encore de la plage, le travailleur nomade n’a besoin que d’un ordinateur et d’une connexion internet pour assurer ses missions. Ce nomadisme aussi appelé « nomadisme digital » ou «

nomadisme

numérique » découle d’une évolution du rapport entre vie

professionnelle et vie personnelle. Finalement à travers

le travail flexible, le néo-nomadisme s’apparente à une

forme de « transgression visant à dépasser les certitudes

établies

»110, un anticonformisme qui a des répercussions

sur les individus, mais aussi sur les espaces urbains qui tentent de s’adapter à ce phénomène en plein essor.

110 Le néonomadisme, un phénomène bénéfique, [en ligne], http://neonomadisme.canalblog.com/ archives/2013/03/26/26744238.html

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3.1.3. Quel devenir de l’habitat ?

Par l’usage ainsi détourné des espaces de vie, l’architecture est séparées de la fonction, permettant aux néo-nomades d’habiter partout et tout le temps. Mais alors que ces derniers, sont enfin libres de toute attache, où est le véritable chez-soi ? Où est l’habitation qui permet à l’intime de se déployer ? L’habitat ainsi éclaté, et décentré, devient «

une conception « fonctionnaliste » de

la résidence

»111, une sorte de « machine à habiter » pour

reprendre le slogan de Le Corbusier, et dans laquelle le privé se laisse envahir par le public. Dans son Anthropologie de l’habiter, Georges-Hubert de Radkowski pose alors cette question du devenir de l’habitat dans nos sociétés industrielles : allons-nous vers «

[…] l’habitat-œkoumène :

celui qu’exploite la société industrielle (et qui tend à se

confondre avec la surface du globe terrestre)  ? Ou, au

contraire, aboutirons-nous seulement à la « réduction »

de cet habitat-centre à un système minimum […]

.»112. La

sédentarité avait son symbole : le paysan, l’homme du site113, l’illustration même de la symbiose entre l’espace

habité et le milieu naturel environnant qui permet la localisation de cet habitat. A notre époque, si le sédentaire produit les matières premières, l’homme industriel et le nomade contemporain ne font que les exploiter. Nous évoluons en effet dans une culture du jetable,

111 Ibid, p.137. Anthropologie de l’habiter, Vers le nomadisme 112 Ibid. p. 137.

113 Ibid. p.138. Propos tirés d’une note de bas de page

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de la surconsommation et du gaspillage, et la mobilité croissante tend à s’inscrire dans cette logique. De plus en plus d’espaces sont laissés vides et les déplacements perpétuels sont peu économiques. Dans son livre Espèces d’espaces, Georges Perec proposait d’ailleurs que l’on dispose chacun de plusieurs chambres afin d’observer la ville selon différents points de vue : «

Au lieu de vivre dans

un lieu unique, en cherchant vainement à s’y rassembler,

pourquoi n’aurait-on pas, éparpillées dans Paris, cinq ou

six chambres ?

»114.

Face à une telle tendance à la volatilité, à quoi vont ressembler les villes de demain ? Comment penser l’architecture, encore trop associée à l’enveloppe fixe et pérenne dans un monde qui bouge en permanence ? Comment architectes, urbanistes et designers peuvent- ils, avec l’aide des technologies modernes, intégrer la dimension d’obsolescence et d’éphémère dans la conception ? La réponse se trouve peut-être dans la création textile, car s’il y a un domaine qui a compris l’enjeu du jetable et de l’éphémère, c’est bien le monde de la mode, influente et instable.

114 PEREC Georges, Espèces d’espaces, Paris : Galilée, 1974, p.116.

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