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Techniques actives d’imagerie très haute dynamique

I.4.4 La modulation spatiale des speckles

défocus et d’astigmatisme comme différence de phase entre les deux images.

Bordé and Traub (2006) utilise lui un modèle linéaire pour encoder temporellement les spe-ckles. En partant d’un état inconnuΦ0, il applique deux phases connues sur un miroir en plan pupille : la phase devient successivementΦ0`δφ10`δφ2, avec les phasesδφiréelles et connues. Les imagesIΦ0,Iδφ1,Iδφ2 du plan focal après coronographe sont tour à tour enregistrées. Dans le cas de petites aberrations, il obtient alors, après soustraction deux à deux des images, un système linéaire d’équations d’inconnuesΦ0 etΦ˚

0 (où˚ désigne le complexe conjugué). Sous réserve que ce système linéaire soit inversible (ce qui produit des contraintes sur les δφi appliqués), il peut ainsi remonter à la phase et à l’amplitude produisant les speckles observés en plan focal. En construisant une matrice d’interaction, on peut enfin mesurer et corriger les aberrations sur tout le chemin optique, en boucle fermée.

L’electrical field conjugation (EFC,Give’On et al.,2006,2007) apporte des améliorations au concept pour pouvoir corriger les speckles dus au second ordre (développements que je n’ai pas considérés dans cette thèse). Une recherche des phasesδφi à appliquer pour obtenir la meilleure modulation est aussi effectuée dans ces articles.

I.4.4 La modulation spatiale des speckles

Je décris maintenant les méthodes pour mesurer l’amplitude complexe des speckles dans le plan focal en une seule image. Pour cela, il est nécessaire d’introduire une modification du plan pupille pour moduler spatialement les speckles. Parmi ces méthodes, la technique d’Asymmetric Pupil Fourier Wavefront Sensor (Martinache, 2013) permet de lever l’incertitude sur le signe dont j’ai parlé au début du paragraphe précédent par l’introduction d’une asymétrie dans la pupille. Cependant, une partie de la pupille étant masquée par l’asymétrie, il est tout de même nécessaire de faire plusieurs images pour obtenir la correction complète.

La self-coherent camera, proposée parBaudoz et al.(2006), repose sur le principe de cohérence de la lumière stellaire : en créant des franges sur les speckles de la lumière stellaire, on les module spatialement ce qui permet leur mesure. Le principe de cette technique sera présenté dans les paragraphes suivants.

I.4.4.1 Principe de la self-coherent camera

Le principe de la self-coherent camera est illustré par le schéma de la figureI.4.3. Comme dans Guyon (2004), une voie de référence, filtrée de la lumière du compagnon, permet d’obtenir des franges sur le champ de speckles. Pour obtenir cette voie,Galicher et al.(2010) propose d’utiliser une partie de la lumière diffractée hors du Lyot par le coronographe avec un montage de type trous d’Young. On ajoute donc, dans le plan de Lyot, un diaphragmeR, appelé diaphragme de référence, circulaire et de diamètreDR.

D’une part, la lumière de la planète, qui n’est pas diffractée par le masque coronographique ne passe pas par ce diaphragme, qui ne sélectionne donc que de la lumière stellaire. D’autre part, la lumière du compagnon ou du disque n’est pas cohérente avec celle de l’étoile. Les speckles du plan focal vont donc être frangés, ce qui n’est pas le cas de la planète. La figure I.4.3 montre des simulations du plan focal d’un coronographe avec (centre) et sans (gauche) diaphragme de référence.

Je définis le rapport entre la taille du diaphragme de référence et celle du Lyotγ “ DL{DR. On aγ ą 1 pour des raisons qui seront explicitées dansMazoyer et al.(2013a). La distance centre-à-centre de ces deux diaphragmes est notée ~ξ0. Enfin, j’introduisAR, l’amplitude complexe de la voie de référence dans le plan focal. En utilisant les équationsI.3.18etI.3.19, et en introduisant

Chapitre I.4. Techniques actives d’imagerie très haute dynamique Lumière stellaire Lumière diffractée

A

S Masque de Lyot modifié Pupille d’entrée Lumière de la planète Détecteur

Plan pupille Plan focal Plan focal

Télescope

Plan pupille

Masque coronograpique

A

R

Figure I.4.3 – Principe de la self-coherent camera : on modifie le masque de Lyot en lui ajoutant un diaphragme de référence pour créer des franges sur les speckles stellaires du plan focal.

des interférences entre les diaphragmes de Lyot et de référence pour la lumière stellaire seulement, je déduis donc l’image produite par la self-coherent camera dans le plan focal du détecteur :

Ip~x,λq “ |ASp~x,λq|2` |ARp~x,λq|2` ICp~x,λq ` 2<rASp~x,λq A˚

Rp~x,λqs cos´´2π~x. ~ξ0 λ

¯

, (I.4.1) oùA˚ et <rAs désignent respectivement le conjugué et la partie réelle de A. Cette équation peut aussi s’écrire sous la forme :

Ip~x,λq “ |ASp~x,λq|2` |ARp~x,λq|2` ICp~x,λq `A˚Sp~x,λq ARp~x,λq exp´´2iπ~x. ~ξ0 λ ¯ ` ASp~x,λq A˚ Rp~x,λq exp´2iπ~x. ~ξ0 λ ¯ , (I.4.2)

De la même manière que pour les autres amplitudes complexes en plan focal, j’introduis l’intensité de la lumière stellaire dans le plan focal issue du diaphragme de référence, égale à :

IR“ |AR|2 . (I.4.3)

J’introduis aussi les notations suivantes2 : $ & % Icent “ IS` IR` IC I` “ A˚ SAR I´ “ ASA˚ R (I.4.4)

L’équation I.4.2est déjà présente dans Baudoz et al.(2006) et Galicher and Baudoz(2007). Les trois premiers termes sont les intensités stellaires issues du Lyot et du diaphragme de référence et la lumière planétaire, et donne seulement accès au module au carré des amplitudes complexes. Les deux derniers termes, issus de la modulation spatiale des franges, dépendent directement de l’amplitude complexe de AS etAR. Je vais maintenant expliquer comment l’information sur le champ complexe est analysée dans le paragraphe suivant.

2. Attention, j’ai noté ces fonctions comme des intensités mais I` et I´ ne sont pas réelles. 78

I.4.4. La modulation spatiale des speckles

Figure I.4.4 – Simulations du plan focal d’un coronographe avec (centre) et sans (gauche) dia-phragme de référence. Je prend ensuite la transformée de Fourier de l’image centrale (droite). Figure tirée deMazoyer et al.(2013b).

I.4.4.2 Extraction du champ complexe

En prenant la transformée de Fourier de l’image du plan focal (équation I.4.2), j’obtiens : F rIs “ FrIS` IR` ICs ` F rI`s ˚ δp~ξ ´ ~ξ0{λq ` F rI´s ˚ δp~ξ ` ~ξ0{λq , (I.4.5) ce qui donne trois pics centrés en0, ~ξ0{λ et ´ ~ξ0{λ. Cette transformée de Fourier est représentée sur la figure I.4.3, droite. J’appelle ce plan le plan de Fourier ou plan de corrélation. A partir du plan de Fourier, l’un des pics secondaires (F rI´s ˚ δp~ξ ` ~ξ0{λq) est sélectionné, recentré et l’on prend sa transformée de Fourier inverse. J’obtiens alors une mesure deI´. A partir de cette mesure, deux estimateurs sont possibles pour obtenir une correction active en boucle fermée des speckles du plan focal. Ces deux méthodes, qui seront décrites précisément dans la partie III, utilisent toutes les deux une matrice de contrôle, que l’on construit en utilisant des techniques empruntées à l’optique adaptative (voir paragrapheI.3.7.4).

On remarque que l’on a une condition sur ~ξ0 pour que les trois pics dans le plan de Fourier (figure I.4.3, droite) soient bien séparés dans le plan focal, rendant l’information accessible. En effet, le pic central est la superposition de trois pics (F rISs, F rIRs et F rICs) d’auto-corrélation de rayon DL{λ (pour F rISs et F rICs) et DR{λ (pour F rIRs), et est donc de rayon DL{λ. Les deux pics latéraux sont des pics de corrélation entreAS etA˚

R et ont donc des rayons de taille pDL` DRq{p2λq. Au final, pour éviter toute superposition, on doit avoir :

| ~ξ0| ą DL 2 ˆ 3 `1 γ ˙ » 3 2DL pour γ ąą 1 . (I.4.6)

Cette équation, donnant la distance minimum entre les centres des deux diaphragmes en fonction du diamètre du diaphragme de Lyot, doit être prise en compte lors de la définition de la taille du plan de Lyot et des optiques présentes en aval. J’introduirai dans la partieIII une méthode pour réduire légèrement cette taille.

I.4.4.3 La self-coherent camera comme technique post-traitement

Avant d’être une méthode d’analyse du front d’onde pour la correction active, la self-coherent camera a été originellement développée comme une technique de post-traitement dans Baudoz

Chapitre I.4. Techniques actives d’imagerie très haute dynamique

et al. (2006) et Galicher and Baudoz(2007).Galicher et al. (2008) a montré que cette méthode peut être utilisée aussi bien comme technique post-traitement utilisant la cohérence de la lu-mière qu’en correction active avec un miroir déformable. J’ai étudié spécifiquement le mode de correction active durant ma thèse, mais je rappelle tout de même ici le principe de l’estimation du compagnon dans une image de la self-coherent camera.

Le fait que la planète ne soit pas frangée dans un champ de speckles qui l’est permet de développer un estimateur de celle-ci. En repartant des définitions de l’équationI.4.4, on remarque que l’on a :

I´I`“ ISIR . (I.4.7)

On note que puisqueI´ etI` sont conjuguées, cette valeur est réelle. On enregistre des imagesI pendant une observation.IRest l’intensité de la référence qui est peu dépendante des aberrations du banc siγ ąą 1 (voir partie III). On enregistre donc sa valeur à la fin de la correction, de la même façon que l’on enregistre des images stellaires de référence dans les autres techniques de post-traitement. Je note cette estimée de la fonction d’étalement du point de la référenceIR,ref3. On déduit enfin pour toutes nos images :

IC “ Icent´ IR´ I´I`

IR,ref , (I.4.8)

dans toutes les zones où IR,ref n’est pas nulle. On peut ainsi traiter toutes nos images en post-traitement pour faire apparaitre une image d’un compagnon ou d’un disque ou de tout autre objet dont la lumière n’interfère pas avec celle de l’étoile sur l’axe. Des méthodes utilisant ce modèle ont été récemment développées pour obtenir, par minimisation d’un critère au sein d’un espace de paramètres, la position et l’intensité la plus probable d’un compagnon potentiel (Baudoz et al., 2013).

Je donne dans le prochain paragraphe quelques éléments de comparaison entre les méthodes de modulation temporelle et spatiale.

I.4.5 Comparaison de ces méthodes de modulation temporelle et

spatiale

La comparaison des méthodes de correction de speckles par modulation temporelle et spa-tiale n’a jamais à ce jour été faite sur un même banc. Cette comparaison serait cependant très instructive pour le développement des futurs instruments présentés dans la partie suivante. Je me contenterai pour le moment d’avancer quelques éléments de comparaison.

– La modulation spatiale des speckles nécessite plus de pixels parλ{D pour pouvoir distinguer les franges, donc des images sur-échantillonnées. Cependant, ce sur-échantillonnage n’est pas limitant si l’on utilise un détecteur à bruit de lecture négligeable.

– La modulation temporelle nécessite plusieurs images pour effectuer une correction et ob-tenir une image de science. Au contraire, la modulation spatiale permet dans une même image d’effectuer une correction et l’enregistrement de données scientifiques. Cette pro-priété peut s’avérer particulièrement utile dans les cas d’observations nécessitant de très longs temps de pose (pour de petits télescopes spatiaux collectant peu de photons par unité de temps par exemple).

3. Il s’agit donc d’une intensité de la référence de référence, mais je n’utiliserai pas cette terminologie. 80