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Modifications post-transcriptionnelles de la protéine Tau

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A. Généralités

6. Problématique de santé publique

2.2. Les dégénérescences neurofibrillaires

2.2.4. Modifications post-transcriptionnelles de la protéine Tau

On retrouve chez les patients atteints de tauopathies plusieurs modifications post- transcriptionnelles de la protéine Tau. Hyperphosphorylation, protéolyse, ubiquitination, glycosylation ou encore glycation sont des processus qui pourraient intervenir dans l'agrégation de la protéine Tau (Wang 2008, pour revue).

2.2.4.1. Phosphorylation

La phosphorylation est un processus impliqué dans la régulation de l'activité de la protéine Tau en conditions physiologiques (Sergeant 2008).

A l’état déphosphorylé, la protéine Tau est fixée sur les microtubules, jouant ainsi son rôle de stabilisateur (Figure 14). Cependant, cette fixation ne peut être permanente car elle est un obstacle pour bon nombre de processus physiologiques tels que le transport axonal le long des microtubules ou encore la plasticité du cytosquelette. Il existe donc une balance entre l'état phosphorylé et l'état déphosphorylé.

Une fois phosphorylée, la protéine Tau se libère des microtubules. Les processus physiologiques précités peuvent avoir lieu, avant une nouvelle déphosphorylation qui permettra la fixation de Tau sur les microtubules. Cette balance permet de garder un équilibre entre stabilisation des microtubules et bon fonctionnement du neurone (Figure 14).

La balance entre phosphorylation et déphosphorylation est régulée par diverses kinases et phosphatases. Plus de 20 kinases différentes sont capables de phosphoryler la protéine Tau. Ces kinases se regroupent en 4 familles :

- les « proline-directed protein kinases » (PDPK) : elles phosphorylent les résidus Serine et Thréonine lorsqu’ils sont suivis d’une Proline. Ce groupe comprend

- Le groupe des non-PDKP comprend la Tau-tubulin kinase 1 et 2, la casein kinase 1, 2 et 1sigma, DYRK, MARK, PKA, PKB/AKT, PKC et PKN.

- Le troisième groupe inclut les kinases qui phosphorylent les résidus Serine et Thréonine, parfois seuls, parfois suivis d’une Proline.

- Le quatrième groupe comprend les Tyrosines kinases telles que Src ou C-abl.

Contrairement aux kinases, les phosphatases ont pour effet de déphosphoryler la protéine Tau. Les phosphatases 1, 2A et 2B (calcineurine) sont présentes dans le cerveau humain et sont capables in vitro de déphosphoryler la protéine Tau. L’utilisation d’inhibiteurs des phosphatases 2A et 2B résulte en une augmentation de la phosphorylation de la protéine Tau.

Figure 14: Balance phosphorylation/déphosphorylation de la protéine Tau

L'association des protéines Tau sur les microtubules est liée à une balance entre phosphorylation et déphosphorylation qui permet la mobilité des éléments intracellulaires sur le cytosquelette. D'après Ballatore 2007.

La phosphorylation pathologique de la protéine Tau regroupe deux processus distincts. D'une part, la protéine Tau est phosphorylée sur des sites qui ne sont pas phosphorylés en conditions physiologiques: il s'agit de la phosphorylation anormale de la protéine Tau. D'autre part, au cours de la MA, certains sites de phosphorylation physiologiques sont phosphorylés de manière plus importante: il s'agit de l'hyperphosphorylation de la protéine Tau.

Il existe 85 sites potentiels de phosphorylation sur l’isoforme de Tau la plus longue (Sergeant 2008). Seuls 71 sites sont effectivement phosphorylés en conditions physiologiques ou pathologiques. Les principaux sites se situent sur des résidus Sérine et Thréonine, la plupart situés à proximité des domaines d’interaction avec les microtubules et en particulier dans la région riche en Proline. La phosphorylation de ces résidus module fortement l’affinité de Tau pour les microtubules. Ainsi la phosphorylation de Tau au niveau des résidus Sérine 262 et 356 et Thréonine 231 situés dans le domaine de liaison des MT inhibe la capacité de la

protéine Tau à se lier aux MT. De la même façon, la phosphorylation pathologique des résidus dans la région riche en Proline diminue fortement la capacité de liaison Tau/MT (Liu 2007, Brandt 2005).

2.2.4.2. Protéolyse partielle

La protéolyse partielle de la protéine Tau pourrait être impliquée dans un processus d'agrégation menant à l'apparition des DNF dans la MA (Meraz-Rios 2010). Ainsi, il a été montré que la protéine Tau pouvait être clivée aussi bien en position N-terminale qu'en position C-terminale. Cette protéolyse partielle induirait des changements conformationnels de Tau conduisant à son agrégation (Binder 2005). D'autres études indiquent que Tau serait substrat des caspases 3 et 6 et que son clivage induirait l'apoptose neuronale (Fasulo 2000, Horowitz 2004). Suivant la sévérité de la maladie, le clivage de la protéine interviendrait à différents niveaux: le clivage aurait lieu dans un premier temps en partie C-terminale au niveau de l'acide aspartique en position 421, puis rapidement l'extrémité N-terminale serait clivée à son tour, et enfin le clivage de la partie C-terminale au niveau de l'acide glutamique en position 391 laisserait un peptide initiant l'agrégation (Binder 2005).

2.2.4.3. Glycosylation

La glycosylation de Tau est une modification post-traductionnelle permettant l'ajout d'oligosaccharides sur les chaînes latérales de la protéine. La N-glycosylation des protéines Tau situées dans les PHF est augmentée par rapport aux protéines Tau normales (Wang 2008). La glycosylation permettrait de faciliter la phosphorylation de Tau par les kinases cdk5 et GSK3β au niveau de différents sites de phosphorylation anormale (Liu 2002).

2.2.4.4. Glycation

La glycation permet d'établir une liaison covalente entre un sucre et la partie N-terminale d'une protéine. La réaction est de type non enzymatique et entraîne la formation de produits finaux de glycation avancée (AGEs pour Advanced Glycation End products). Bien que cette modification ne soit pas exclusive à la MA, ni même à la protéine Tau, la présence d'espèces glyquées au sein des PHF suggère un lien entre la glycation et la formation des DNF (Ledesma 1994). La glycation de Tau au niveau du domaine de liaison aux MT potentialise l'agrégation de la protéine (Ledesma 1998).

2.2.4.5. Ubiquitination

L'ubiquitine est une protéine jouant un rôle de régulation dans les processus de protéolyse de protéines endommagées ou à durée de vie limitée. Ainsi les protéines poly-ubiquitinées sont ciblées pour être ensuite dégradées par l'intermédiaire d'un système ubiquitine-protéasome. L'ubiquitine est fortement liée à la protéine Tau (Manetto 1988). L'ubiquitination de Tau serait due à l'action de l'ubiquitine ligase CHIP sur les formes phosphorylées de la protéine dans les PHF. Etant donné son importance dans la voie de dégradation de la protéine Tau phosphorylée, ce processus pourrait être au cœur de l'agrégation de la protéine Tau. En effet, en cas de défaillance de ce système ou en cas d'augmentation trop élevée de la forme hyperphosphorylée de Tau, la dégradation de Tau est remise en cause et conduit à l'augmentation du nombre de protéines Tau hyperphosphrylées libres (Dickey 2006).

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