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Potentiel prolifératif

Kératine 15 / 19 Composant des filaments

C. MODELE SUR SUPPORT POREUX

Le premier modèle a été développé à partir d’un substrat dermique à base de collagène bovin de type I et III et de chondroïtine sulfate, réticulés par le glutaraldéhyde (Yannas et al., 1980). La réticulation permet de garantir l’absence de rétractation du DE. Elle s’effectue après lyophilisation du gel et permet de lier les molécules de collagène entre elles par des liaisons covalentes, ce qui rend le collagène insoluble et apporte une solidité au DE. Après colonisation du DE par les fibroblastes, l’ensemencement des kératinocytes à la surface et enfin l’élévation à l’interface A/L, on obtient un ensemble dermo-épidermique vivant très proche de la peau normale (Boyce et al., 1990). Cependant, le glutaraldéhyde étant toxique il a vite été remplacé par une réticulation avec d’autres procédés de nature physiques (Koide et al., 1993), chimiques (Ebersole et al., 2010; Tiollier et al., 1990) ou ionique (Echinard et al., 1989).

Un nouveau modèle de collagène réticulé ioniquement a été développé et breveté dans notre laboratoire. Il est constitué de collagène bovin de type I, de chondroïtine 4- et 6-sulfate, et de chitosan. Le chitosan est un polysaccharide polycationique composé de N-acétyl-D-glucosamine, qui permet d’établir des liaisons ioniques avec le collagène et les chondroïtines sulfates.

Les fibroblastes ensemencés à la surface du substrat dermique migrent dans la structure poreuse et synthétisent une MEC riche et abondante. L’épiderme présente une organisation physiologique avec les 4 couches exprimant spécifiquement les diverses protéines (kératines, loricrine, involucrine, filaggrine, …), ainsi qu’une JDE (composée de collagène type IV, VII et laminine 3.3.2, hémidesmosomes) très proche de celle de la peau normale (FIGURE 27).

Toutes les protéines de la MEC du derme recherchées ont été retrouvées dans ce modèle, mais surtout avec une organisation ultrastructurale proche de la peau humaine: fibres de collagène regroupées en faisceaux (Berthod et al., 1996), dépôts de collagène de type I, III, IV, V, VI, XII, XIV, de fibronectine, décorine, acide hyaluronique (Berthod et al., 1996; Metral et al., 2014; Dos Santos et al., 2015), élastine (Cerimele et al., 1990), fibulline-5, fibrillin-1 et, enfin, lysyl oxydases LOX et LOXL (Noblesse et al., 2004). Ce modèle est donc considéré comme un modèle de référence car très proche d’un point de vue de sa composition, de sa physiologie et de son organisation de la peau normale humaine. Sa culture peut être prolongée pendant 4 mois permettant ainsi d’obtenir un modèle de sénescence in vitro très proche du vieillissement in vivo.

Figure 27 : protocole simplifié de la production des peaux reconstruites selon le modèle sur éponge de GAG-Collagène I-chitosan (panel de haut). Images représentatives de l’histologie de l’épiderme, du derme et de la jonction dermo épidermique (panel du bas)

Ce modèle est évolutif puisqu’il peut être enrichi avec l’ajout de cellules cutanées autres que les kératinocytes ou les fibroblastes. Ainsi, incorporés à l’épiderme, les mélanocytes permettent d’avoir de la peau reconstruite pigmentée PRP (Nakazawa et al., 1997, 1998), les cellules de Langerhans provenant de différenciation de cellules souches hématopoïétiques (CSH) CD34+ donnent de la peau reconstruite immunocompétente PRI (Dezutter-Dambuyant et al., 2006). Dans le derme, des cellules endothéliales provenant de la différenciation des CSH du cordon ombilical permettent d’avoir une peau reconstruite endothélialisée PRE dans laquelle les

1. Eponge composée de Collagen - GAG - chitosan 2. Ensemencement des

fibroblastes 3. Derme Equivalent 4. Ensemencement des

kératinocytes 5. Interface A/L : Peau

reconstruite Fibroblasts Keratinocytes Collag ène I Collagène III C o l VII Lam 3.3.2 Co l I V Ki 67 F illa g rin e Lor ic rin Keratohyaline granules stratum corneum E p i d e r m e J o n c t i o n d e r m o é p i d e r m i q u e D e r m e

cellules se regroupent en structures tubulaires (Auxenfans et al., 2012). Aujourd’hui, des cellules endothéliales micro-vasculaires sont utilisées (Black et al., 1998; Hudon et al., 2003).

Ce modèle versatile permet plusieurs alternatives pour étudier le vieillissement cutané:

ᆗ La culture prolongée de ce modèle permet de mettre en évidence certaines caractéristiques du vieillissement chronologique sans variations interindividuelles

(FIGURE 28).

Si l’on s’intéresse dans un premier temps à l’épiderme, on retrouve à partir de 60 jours la diminution du nombre de cellules exprimant Ki67, PCNA, P63, marqueurs de cellules prolifératives, associé à la diminution de l’épaisseur de l’épiderme. A ces diminutions, s’associent des anomalies de la différenciation terminale dont l’expression de l’involucrine, la filaggrine, et la loricrine dans les couches suprabasales. Dans notre modèle, l'altération du processus de différenciation kératinocytaire entraine une altération de la fonction barrière de la couche cornée, phénomène également retrouvé in vivo durant le vieillissement de la peau (Cerimele et al., 1990; Roskos and Guy, 1989).

Concernant la JDE, la structure reste bien conservée jusqu’au 120ème jour où l’on observe alors une duplication de la lamina densa, altération typique d’une peau âgée (Makrantonaki and Zouboulis, 2007; Hull and Warfel, 1983).

Comparativement à ce qui a été décrit in vivo, nous avons observé une augmentation de l’expression de p16INK4a dans les couches basale et suprabasales de l’épiderme (Dos Santos et al., 2015), supportant le processus de sénescence cellulaire est bien retrouvé dans notre modèle (Ressler et al., 2006; Sharpless, 2004; Waaijer et al., 2012).

Figure 28: Caractérisation histologique des peaux reconstruites sénescentes entre j42 et j120, suivie par la morphologie de la peau, la prolifération des cellules de l’épiderme, l’expression de protéine d’adhésion, de différenciation et de sénescence (Dos Santos et al., 2015).

Ces résultats confirment que ce modèle obtenu par rallongement du temps de culture permet d’imiter fidèlement le vieillissement chronologique observé dans une peau humaine normale prise comme témoin. Ce modèle est donc pertinent pour étudier les processus biologiques impliqués dans le vieillissement ainsi que pour tester de nouvelles molécules anti-vieillissement.

ᆗ L’utilisation de cellules (kératinocytes et fibroblastes) issues de donneurs d’âges différents est une possibilité mais la très grande variation interindividuelle provenant du patrimoine génétique des cellules de donneurs différents est un biais potentiel qui limite leur utilisation.

En effet, chaque individu possède son propre background génétique et épigénétique, processus non contrôlable et qui pourrait influencer les réponses biologiques obtenues. De plus, le mode de vie, le climat, l’hygiène de vie, l’exposition aux UV ou au tabac, interviennent sur la « qualité » des cellules. C’est pourquoi, les cellules provenant de 2 donneurs différents du même âge peuvent évoluer différemment en culture. Pour être fiable, il faudrait pouvoir

MORPHOLOGIE PROLIFERATION ADHESION DIFFERENTIATION

Épaisseur de l’épiderme Ki67 Collagen VII Filaggrin

SENESCENCE p16INK4a Culture immergée Culture émergée

Fibroblastes Kératinocytes Air/liquide interface

D120 J75 D100

Extension du temps de culture Senescence

J42

J0 J21 J28 Peau reconstruite

analyser les réponses des cellules obtenues avec un grand échantillonnage de donneurs de chaque âge.

De façon globale, la « destinée » d’une PR est son vieillissement, la variable est la vitesse à laquelle la sénescence est atteinte. La sénescence réplicative démontrée avec les cellules de donneurs d’âge différent a pu être confirmée avec les cellules d’un même donneur qui a eu le courage de prélever des biopsies de sa peau au cours de sa vie et d’en extraire les fibroblastes. Il a été démontré que les fibroblastes ont un doublement de population cumulé (CPD) qui diminue lorsque l’âge augmente (Kaji et al., 2009).

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