I.2. Les Capteurs à Oxydes métalliques
I.2.4 Mode de Fonctionnement
Le choix de la méthode de synthèse et de la technique de dépôt définit la morphologie du matériau et ses propriétés de détection.
Aujourd’hui, et ce depuis quelques années, les méthodes « bottum‐up » sont les plus utilisées en recherche notamment pour réaliser des matériaux nanostructurés (nanoparticules, nanobâtonnets, nanofils) pour obtenir des couches sensibles à forte surface effective.
I.2.4 Mode de Fonctionnement
Comme nous l’avons vu sur la Figure 6, un capteur de gaz à base de semiconducteur est composé d’une partie mesure et d’une partie commande. La partie « Mesure » concerne les électrodes en contact avec la couche sensible. Elles permettent la mesure des caractéristiques électriques du matériau (résistance, conductance, impédance, bruit, …). Pour la mesure de la résistance de la couche sensible du capteur, un conditionnement électronique doit être réalisé pour pouvoir exploiter cette variation de résistance. Les circuits utilisés doivent être capables de mesurer de grandes variations de résistance (jusqu’à 3 ou 4 décades suivant les capteurs). Les montages en pont de Wheatstone ne sont donc pas adaptés d’où l’utilisation de ponts diviseurs ou de montages amplificateurs transimpédance (Figure 8). Classiquement, l’alimentation est en tension et sera fixée dans le second cas (Figure 8 b). D’autres circuits permettent de fixer le courant dans la résistance dite sensible ce qui permet d’éviter les effets d’auto échauffement du matériau.
FIGURE 8 : PRINCIPES DE MESURE CLASSIQUES DE VARIATION D’UNE RESISTANCE POUR UN CAPTEUR DE GAZ SEMI CONDUCTEUR
[64]. A) PONT DIVISEUR B) AMPLIFICATEUR TRANSIMPEDANCE.
La topologie du circuit b) de la figure précédente peut également être utilisée pour mesurer l’impédance globale du capteur plutôt que sa résistance. Il suffira de remplacer la résistance RF par une impédance semblable à celle du capteur mesuré.
Certains circuits de conditionnement utilisent l’approche « oscillateur variable » pour transformer une variation de résistance en une variation de fréquence [65]. Dans le cas de
b) a)
augmenter la sensibilité de la mesure grâce à des facteurs de qualité élevés. Ces mêmes circuits peuvent être utilisés pour mesurer l’impédance totale du capteur plutôt que sa seule résistance.
Une autre approche consiste à mesurer la variation de bruit intrinsèque de la résistance sensible. Dans ce cas particulier, un circuit spécifique de mesure est réalisé pour relever la tension de bruit [66].
La deuxième partie, la « Commande », concerne la plateforme chauffante. Elle permet de fixer la température de la couche sensible par l’intermédiaire d’une résistance chauffante intégrée, ce qui régit, comme nous l’avons déjà dit, les réactions chimiques de surface (donc la sensibilité aux gaz). Il existe deux possibilités pour la commande du capteur :
• Le Mode isotherme : Commande à Température constante
• Le Mode dynamique : Commande à Température modulée ou variable grâce à l’application aux bornes de la résistance chauffante de signaux variables périodiques.
A. Utilisation en mode isotherme
L’utilisation des capteurs de gaz à oxyde métallique en mode isotherme est par sa simplicité le mode le plus répandu (capteurs commerciaux et en R&D). Il s’agit d’appliquer sur la résistance chauffante une tension (ou puissance) constante. Compte tenu du fait que la température de l’élément chauffant dépend linéairement de la puissance appliquée, il faudrait effectuer une commande en puissance rigoureusement constante. Pour des raisons de facilité de mise en œuvre dans un circuit, la commande se fait généralement (capteurs commerciaux) en tension, et assez peu en courant. Dans ce cas, grâce à un étalonnage, cette valeur de tension est associée à une puissance et donc à une température équivalente. Si la valeur de la résistance chauffante évolue ou dérive avec le temps, la puissance appliquée et donc la température de la couche sensible (la sensibilité au gaz) sera affectée, d’où la nécessité d’un étalonnage régulier.
Il existe également une commande en Modulation de Largeur d’Impulsions (Pulse Width Modulation). Cette approche consiste à synthétiser l’équivalent d’un signal continu par des impulsions de largeur ou de rapport cyclique adapté pour une valeur maximale donnée. Ce genre de commande est très adapté pour les systèmes portables car il permet d’économiser de l’énergie d’alimentation. En revanche, si vieillissement il y a, alors il sera accéléré par ce mode « dynamique » rapide (≈10KHz) sachant que les valeurs maximales plus élevées de tension peuvent induire de forts transitoires en courant et donc des risques d’endommagements.
B. Utilisation à température variable (mode dynamique)
Un certain nombre d’études de recherche portent sur la commande en mode dynamique de la résistance chauffante [67‐71]. Le but de ce mode est de commander la résistance chauffante avec un signal variable. La température du capteur change constamment et la couche sensible est mise dans une configuration qui utilise des phénomènes différents du mode statique. Ce mode tend à diminuer les temps de réponse ainsi que la puissance consommée [72‐76]. Il est aussi montré dans la littérature qu’une utilisation dynamique de la température permet d’obtenir de meilleures performances pour le capteur en diminuant les effets de l’humidité et en améliorant la sélectivité [77‐81].
Il existe plusieurs types de signaux applicables sur la résistance chauffante (rectangulaire, sinusoïdal, triangulaire, dent de scie, impulsions,…). Nous les avons classés en deux catégories [82] :
• Signaux lentement variables (plusieurs minutes) ; l’excitation est un signal lent, ce qui laisse le temps au capteur de se stabiliser. Ce sont des phénomènes lents qui sont mis en évidence comme les mécanismes de diffusion.
• Signaux variables rapides (de quelques centaines de millisecondes à quelques secondes) ; l’excitation est un signal périodique rapide, un échelon ou une impulsion.
Des études ont été menées sur la comparaison de plusieurs formes de signaux [83, 84] mais il ne ressort pas de conclusion claire sur l’intérêt d’une forme plutôt qu’une autre.
La Figure 9 illustre un exemple de réponse d’un capteur à base de SnO2 soumis à un transitoire thermique rapide (une seconde) en escalier pour quatre gaz différents [85]. Nous pouvons constater que les formes des réponses sont très différentes suivant le gaz. Ce mode dynamique offre une réponse complexe qui permet d’avoir une signature beaucoup plus spécifique à l’ambiance de mesure. En utilisant ce mode de mesure, ce ne sont plus les phénomènes stationnaires qui sont mis en évidence. Il y a en parallèle des modifications chimiques (chimisorption de nouvelles molécules, désorption de certaines déjà présentes, …), énergétiques (barrières de Schottky, de joints de grains, longueur de Debye, …) et électriques (concentration, mobilité et répartition des porteurs, mode de conduction, …). Pour arriver à exploiter les informations issues des mesures en mode dynamique, il est nécessaire de faire de nombreuses acquisitions pour avoir suffisamment de points à exploiter. Comme nous le verrons plus loin, ce genre de protocole fait appel à des méthodes de traitement du signal pour pouvoir interpréter la grande quantité de données mesurées.
FIGURE 9 : REPONSE EN CONDUCTANCE D'UN CAPTEUR SNO2 DOPE PALLADIUM POUR DES TRANSITOIRES DE 1 SECONDE. LES DIFFERENTS GAZ SONT A) ACETONE, B) FORMALDEHYDE, C) ETHANOL, D) METHANOL [85]