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Mod´eliser et d´etecter une non-lin´earit´e

4.3 Repr´esentations temps-multifr´equence

5.1.5 Mod´eliser et d´etecter une non-lin´earit´e

Dans beaucoup de domaines de la physique, l’approximation lin´eaire est faite, souvent `a bon escient, mais ´egalement souvent par souci de sim- plicit´e. Toutefois, des probl`emes curieux ne peuvent ˆetre trait´es dans cette approximation, et des mod´elisations non lin´eaires doivent ˆetre adopt´ees. A titre d’exemple, examinons le doublement de fr´equence en optique [78].

Lorsque la lumi`ere traverse un mat´eriau, le champ ´electrique exerce une force de polarisation sur les ´electrons (cet effet joue surtout sur les ´electrons de valence, ou ´electrons assurant la liaison entre atomes). Lorsque la source lumineuse est peu puissante, la polarisation est en g´en´eral lin´eaire en fonction des champs, soit P = χ1E o`u χ1 est appel´ee susceptibilit´e ´electrique. L’effet

est ici une petite perturbation sur le champ liant l’´electron `a l’atome. Par contre, si le champ ´electrique est puissant, soit de l’ordre de grandeur du champ liant l’´electron `a l’atome, les effets du champ ´electrique ne peuvent plus ˆetre consid´er´es comme perturbations et la loi liant la polarisation au champ ´electrique n’est plus lin´eaire. Les physiciens ont alors mod´elis´e cette loi selon

P = χ1E + χ2EE + χ3EEE + · · · ,

o`u les termes χi sont des tenseurs et o`u EE repr´esente le produit tensoriel de

E par lui-mˆeme. Les ´etudes se limitent souvent `a l’ordre 2, et le d´eveloppement pr´ec´edent se r´e´ecrit pour la i-`eme composante de P

Pi = ) j χ1 i,jEj + ) j,k χ2 i,j,kEjEk.

Cette derni`ere relation n’est autre qu’un filtrage lin´eaire-quadratique !

Si le champ incident est une onde plane de fr´equence ν, la derni`ere ´equation montre que la polarisation va osciller non seulement `a ν mais ´egalement `a 2ν. Or, dans les mat´eriaux l’influence de la polarisation dans les ´equations de Maxwell peut ˆetre vue comme un terme source. Donc, le terme en 2ν de la polarisation “g´en`ere” un terme en 2ν sur le champ ´electrique, terme qui se propagera `a travers le mat´eriau et sera vu en sortie.

Cet exemple montre que les d´eveloppements de Volterra sont utiles pour mod´eliser des non-lin´earit´es et par suite pour les d´etecter. En fait, la d´etection des non-lin´earit´es utilise deux outils. Les filtres de Volterra pour la mod´eli- sation, et les multispectres pour la d´etection. Pour illustrer ceci, nous nous restreignons encore au cas lin´eaire-quadratique.

Soit y(t) la sortie d’un filtre lin´eaire-quadratique attaqu´e par un signal x(t), centr´e, gaussien. Le spectre de y(t) s’´ecrit pour une fr´equence ν non nulle

Sy (2)(ν) = |H1(ν)|2Sx (2)(ν)+

2

!

|H2(ν1, ν − ν1)|2Sx (2)(ν1)Sx (2)(ν − ν1)dν1, (5.7)

et l’interspectre entre x(t) et y(t) est donn´e par

Sy,x (2)(ν) = H1(ν)∗Sx (2)(ν). (5.8)

Nous disposons des outils pour ´evaluer la coh´erence entre x(t) et y(t), grandeur qui chiffre la lin´earit´e entre ces deux signaux. La coh´erence est pour une fr´equence non nulle

γy,x(2)(ν) =

|Sy,x (2)(ν)|2

Sx (2)(ν)Sy (2)(ν). En utilisant les r´esultats pr´ec´edents, elle s’´ecrit γy,x(2)(ν) =

|H1(ν)|2Sx (2)(ν)

|H1(ν)|2Sx (2)(ν) + 2& |H2(ν1, ν − ν1)|2Sx (2)(ν1)Sx (2)(ν − ν1)dν1

. Dans le cas d’un filtre lin´eaire , elle vaut 1, alors que la pr´esence d’un terme quadratique la rend inf´erieure `a l’unit´e. Toutefois, une coh´erence inf´erieure `a 1 ne signifie pas forc´ement pr´esence d’une non-lin´earit´e, car un bruit pol- luant la sortie aurait le mˆeme effet. La coh´erence ne peut donc pas d´eceler les non-lin´earit´es puisqu’en contexte r´eel, un bruit pollueur est toujours pr´esent. Temp´erons en disant qu’une tr`es faible coh´erence doit nous mettre “la puce `a l’oreille” quant `a l’existence d’une non-lin´earit´e de transfert.

Il est un outil mieux adapt´e aux non-lin´earit´es quadratiques, la bi- coh´erence. Sa d´efinition est un prolongement de celle de la coh´erence, puis- qu’elle s’´ecrit

γy,x(3)(ν1, ν2) =

|Sy,x (3)(ν1, ν2)|2

Sx (2)(ν1)Sx (2)(ν2)Sy (2)(ν1+ ν2)

. (5.9)

Dans le cas que nous traitons, Sy,x (3)(ν1, ν2) = 2Sx (2)(ν1)Sx (2)(ν2)H2(ν1, ν2)∗

pas en g´en´eral de forme exploitable, mais une expression agr´eable peut ˆetre obtenue `a partir du spectre de y(t) [116]. En effet, en rempla¸cant dans (5.7) H2(ν1, ν2) par sa valeur, puis en divisant par Sy (2)(ν) on obtient

γy,x(2)(ν) +

1 2

!

γy,x(3)(ν1, ν − ν1)dν1 = 1.

Cette relation montre comment l’´energie se transf`ere de l’entr´ee vers la sor- tie. La contribution du lin´eaire est quantifi´ee par la coh´erence, alors que la contribution du quadratique est quantifi´ee par le second terme. Pour une fr´equence ν de la sortie, il faut sommer toutes les contributions des fr´equences ν1 et ν2 de l’entr´ee qui interagissent quadratiquement pour participer `a la

fr´equence ν = ν1 + ν2 de la sortie. Ainsi, dans le cas lin´eaire-quadratique, la

bicoh´erence permet de quantifier l’importance du quadratique dans le trans- fert. De plus, son comportement est remarquable en pr´esence de fr´equences pures6. Reprenons l’exemple pr´esent´e au paragraphe 5.1.3 concernant le pas-

sage d’une fr´equence pure ν0 dans un filtre quadratique. Si l’on ne s’int´eresse

qu’aux fr´equences positives, une application directe de (5.9) montre que γy,x(3)(ν1, ν2) = δ(ν1− ν0)δ(ν2− ν0).

Ce r´esultat signifie que les fr´equences de x(t) ν1 = ν0 et ν2 = ν0 ont interagi

quadratiquement pour former la fr´equence somme, ici 2ν0. La bicoh´erence est

donc un outil adapt´e pour d´etecter des non-lin´earit´es quadratiques de transfert, et elle sera utilis´ee dans le paragraphe (5.4.2) pour d´emontrer la pr´esence d’une non-lin´earit´e.

Sym´etries de la bicoh´erence La bicoh´erence entr´ee-sortie (5.9) poss`ede les sym´etries de l’interbispectre Sy,x (3)(ν1, ν2) qui sont diff´erentes des sym´etries

du bispectre Sx,3. En effet, les sym´etries sont en nombre plus restreint

puisque les seules relations sont maintenant Sy,x (3)(ν1, ν2) = Sy,x (3)(ν2, ν1) = "

Sy,x (3)(−ν1, −ν2) #

. La premi`ere ´egalit´e induit une sym´etrie par rapport `a la premi`ere bissectrice alors que la deuxi`eme est une sym´etrie centrale par rap- port `a l’origine. Ainsi, la connaissance de la bicoh´erence entr´ee-sortie est totale sur le domaine {ν1− ν2 ≥ 0} ∩ {ν1+ ν2 ≥ 0}. Pour le bispectre (et donc pour

“l’auto”-bicoh´erence) il faut ajouter la condition {ν2 ≥ 0}.

6Lorsque les signaux sont des fr´equences pures, les d´efinitions donn´ees ne sont plus valides. Il faut en toute rigueur donner des d´efinitions en terme de distributions ou d’accroissements harmoniques si une mod´elisation stochastique est adopt´ee. Toutefois, les r´esultats peuvent se d´eduire des d´efinitions pr´esent´ees, les d´emonstrations ´etant faites “avec les mains”. Pour des d´efinitions pr´ecises, voir [66]