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Mod´elisation de l’instabilit´e

Le but de cette section est de construire un mod`ele du m´ecanisme de couplage r´esonant qui conduit `a des oscillations auto-entretenues `a partir des indications exp´erimentales pr´ec´edentes. On a montr´e que cette instabilit´e r´esulte de l’interaction de la flamme avec la plaque coupl´ee `a la r´esonance acoustique du brˆuleur.

V.4.1 Le r´esonateur de Helmholtz zone 1 zone 2 zone 0 0 1 z S0 S1 S(z) plaque

Fig.V.7 – Sch´ema utilis´e pour la mod´elisation acoustique du brˆuleur.

La g´eom´etrie du brˆuleur axisym´etrique peut ˆetre mod´elis´ee par son volume V et sa section transverse S(z) qui varie r´eguli`erement de la section S0 du corps du brˆuleur `a la section de sortie S1. Puisque les longueurs d’onde acoustique consid´er´ees sont bien plus grandes que les dimensions du dispositif, le brˆuleur peut ˆetre assimil´e `a un r´esonateur de Helmholtz (Munjal 1987). En notant v1 la vitesse moyenne de l’´ecoulement dans la section de sortie S1 et en supposant une ´evolution isentropique des fluctuations de la pression interne p0 `a l’int´erieur du corps du brˆuleur, un bilan de masse permet de relier les fluctuations de la pression interne p0 aux perturbations acoustiques externes p

1 et v

1 `a la sortie du brˆuleur (zone 1 de la Fig V.7) : V c2 dp0 dt = −S1v1 c2 p 1− S1ρv1 (V.2)

o`u c est la vitesse du son dans le m´elange r´eactif de densit´e ρ. Les quantit´es moyennes sont not´ees ( ¯ ) et les quatit´es fluctuantes (). Le rapport des deux contributions du membre de droite de l’´equation (V.2), v1/ρ c2

p1/v1, est petit car le nombre de Mach de l’´ecoulement moyen M = v1/c reste faible dans nos exp´eriences (M < 10−2). Dans ce cas l’expression (V.2) est r´eduite `a :

V c2

dp 0

V.4. MOD ´ELISATION DE L’INSTABILIT ´E 155

Dans la limite des petits nombres de Mach, la fluctuation de pression p

0 dans le brˆuleur est donc en quadrature avec la fluctuation de vitesse v1. En n´egligeant la compressibilit´e de l’air et en n´egligeant la vitesse de l’´ecoulement `a l’int´erieur du volume, un bilan de masse coupl´e `a l’´equation de Bernoulli instationnaire donne :

ρLedv 1 dt + ρ v1v 1+ p1= p0 (V.4)

Dans cette expression Le =R1

0 [S1/S(z)] dz + a (Hirschberg 2001) est une longueur effective qui rend compte de l’inertie de la masse de gaz dans le convergent et a est une correction d’extr´emit´e qui correspond `a l’adaptation d’imp´edance entre l’´ecoulement `a la sortie du brˆuleur et l’atmosph`ere au repos (Rienstra 1983). Dans notre cas a est pris ´egal au rayon r de sortie du brˆuleur (Hirschberg 2001). En combinant les ´equations (V.2) et (V.4), on obtient une relation pour les fluctuations de vitesse `a la sortie du brˆuleur :

Md 2v1 dt2 + Rdv 1 dt + kv 1 = −S1 dp1 dt (V.5)

Dans cette expression R = ρ v1S1 repr´esente l’amortissement du syst`eme et k = ρ c2S2 1/V la raideur de la colonne de gaz de volume V agissant comme une force de rappel sur la masse d’air effective M = ρS1Le. La dynamique du brˆuleur est d´ecrite par un syst`eme masse-ressort-amortissement (membre de gauche Eq. (V.5)) excit´e par une force externe (membre de droite Eq. (V.5)). Le syst`eme poss`ede une fr´equence de r´esonance naturelle f0 donn´ee par :

(2πf0)2 = k M =

c2S1

V Le (V.6)

On retrouve l’´equation (V.1).

Selon l’expression (V.5), les fluctuations de pression externe p

1 sont responsables de l’exci-tation du r´esonateur. L’origine de ces perturbations de pression est maintenant examin´ee.

V.4.2 M´ecanisme de couplage

On a montr´e dans le chapitre IV que l’interaction d’une flamme instationnaire et d’une paroi froide constitue une source sonore puissante lorsque des portions de surface de flamme s’´eteignent suite aux pertes de chaleur `a la paroi. La fluctuation de pression p r´esultant de cette interaction est proportionnelle au taux de variation de la fluctuation de surface de flamme A(t) :

p3(r, t) = K(r)  dA dt  t−τ23 (V.7) Ici, τ23est le d´elai requis pour la propagation des fluctuations de pression de la source proche de la paroi (zone 2, Fig. V.7) vers le d´etecteur M3 ´eloign´e d’une distance r = 69 cm. Le coefficient K(r) d´efinit l’amplitude du champ rayonn´e. Il est estim´e `a partir des enregistrements temporels, comme ceux pr´esent´es sur la figure V.5. La perturbation produite `a la p´eriph´erie de la flamme en contact avec la paroi rayonne dans tout l’espace et en particulier vers la sortie du brˆuleur. La pression induite p1 dans la zone 1 est donc proportionnelle `a la fluctuation de la pression issue de la zone 2, p2(t − r21/c), o`u r21 est la distance s´eparant la source du bruit (zone 2, Fig. V.7) et la sortie du brˆuleur (zone 1, Fig. V.1). La fluctuation de pression r´esultante `a la sortie du brˆuleur p1 apparaˆıt donc comme la source d’excitation du r´esonateur de Helmholtz (Eq. (V.5)). Il en r´esulte une fluctuation de la vitesse d´ebitante v1 qui induit `a son tour une fluctuation A de la surface de flamme et donc du d´egagement de chaleur.

Il reste `a ´etablir le lien entre la fluctuation du d´egagement de chaleur, ou encore de la surface de flamme A, et la perturbation de vitesse `a la sortie du brˆuleur v1. Cette relation d´epend `a priori

156 CHAPITRE V. INTERACTION FLAMME-PAROI : R ´EGIME AUTO-ENTRETENU

de la richesse du m´elange Φ, de la distance brˆuleur-paroi z, des pertes thermiques `a la paroi (donc de la temp´erature `a la paroi Tw), de la vitesse moyenne v1et fluctuante v

1de l’´ecoulement, et de la pulsation ω de l’oscillation. Dans nos exp´eriences, la temp´erature de la plaque Tw et le m´elange de richesse Φ sont maintenus constants. Pour de petites perturbations de l’´ecoulement, on consid`ere la fonction de transfert de la flamme F sous la forme (cf. chapitre I) :

A A = v1 v1F  ωz v1, v1 SL  (V.8) o`u SL est la vitesse de flamme laminaire. En combinant les ´equations (V.5), (V.7) et (V.8), on obtient la fermeture du syst`eme pour les perturbations de vitesse `a la sortie du brˆuleur :

d2v1 dt2 + 2δdv 1 dt + ω 2 0v1 = −N d 2 dt2  F  ωz v1, SL v1  v1  t−τ21 (V.9) Dans cette expression δ = R/(2M ) est le coefficient d’amortissement du r´esonateur, le coefficient N = (S1K(r21)A)/(M v1) caract´erise l’interaction acoustique-combustion et τ21est le d´elai acous-tique requis par la perturbation de pression pour se propager de la zone de combustion (zone 2, Fig. V.7) vers la sortie du brˆuleur (zone 1, Fig. V.7). Il faut maintenant donner la forme de la fonction de transfert F de la flamme sous la plaque.

V.4.3 Choix de la fonction de transfert

La r´eponse d’une flamme aux perturbations de l’´ecoulement incident a fait l’objet du chapitre I pour des flammes de pr´em´elange inclin´ees par rapport `a l’´ecoulement en l’absence de paroi. La situation est plus complexe en pr´esence d’une paroi `a cause de la forte d´eflexion de l’´ecoulement. On dispose toutefois de mod`eles simples bas´es sur une approche ph´enom´enologique du probl`eme. Deux mod`eles sont test´es ci-dessous dans le cas de l’interaction brˆuleur-flamme-paroi.

Mod`ele (n, τ )

Ce mod`ele suppose que la fluctuation de la vitesse v

1 se propage `a la vitesse moyenne de l’´ecoulement v1 le long du front de flamme vers la plaque. Lorsque la perturbation de vitesse atteint la plaque au bout d’un temps de convection τc, elle provoque une fluctuation de la surface de flamme A(t). Les fluctuations A(t) de la surface de flamme sont donc reli´ees aux fluctuations v

1 de la vitesse `a la sortie du brˆuleur par une relation du type (Crocco 1951; Crocco 1952; Candel 1992) : A A(t) = n  v 1 v1  t−τc (V.10) o`u n caract´erise le couplage entre la fluctuation A de surface et la perturbation v1 de vitesse. Pour des fluctuations harmoniques de forme g´en´erale x(t) = ex exp(iωt), la fonction de transfert F du mod`ele (n, τ ) s’´ecrit :

F = n exp(−iωτc) (V.11)

En combinant les ´equations (V.9) et (V.11), on obtient la fermeture du syst`eme pour les pertur-bations de vitesse `a la sortie du brˆuleur. Celles-ci doivent satisfaire :

ω2[1 + N1exp(−iωτ)] − 2iδω − ω20 = 0 (V.12) Cette expression est semblable `a celle obtenue par Crocco (1965) dans l’´etude des instabilit´es basse fr´equence des propulseurs `a ergols liquides. Le coefficient N1 = nN est un coefficent d’interaction acoustique-combustion normalis´e et τ = τ21+ τc est le temps de retard cumul´e du syst`eme. La stabilit´e du syst`eme brˆuleur-flamme-paroi est d´etermin´ee par le comportement de l’expression (V.12) en fonction des param`etres (N1, τ ) du mod`ele.

V.4. MOD ´ELISATION DE L’INSTABILIT ´E 157

Filtre du premier ordre

Dans l’analyse pr´ec´edente, la r´eponse de la flamme ne d´epend pas de la fr´equence d’exci-tation. Or, de nombreuses ´etudes exp´erimentales (Merk 1956; Baade 1978; Ducruix et al. 2000) et l’analyse men´ee dans le chapitre I montrent qu’une flamme de pr´em´elange se comporte comme un filtre passe-bas vis `a vis des perturbations de l’´ecoulement incident. Il est donc int´eressant d’introduire un second mod`ele de fonction de transfert qui tient compte de ce m´ecanisme filtrant. Le mod`ele le plus simple consiste en un filtre passe-bas du premier ordre, souvent utilis´e dans les analyses th´eoriques de la dynamique des flammes pour sa simplicit´e (Fleifil et al. 1996; Dowling 1999). Pour des perturbations de vitesse de la forme v1(t) = ˜v1exp(iωt), la fonction de transfert de la flamme s’´ecrit F = ( eA/A)/(˜v1/v1) avec :

F (ω) = 1

1 + iωτf (V.13)

Le temps caract´eristique τf > 0 correspond `a l’inverse de la fr´equence de coupure de la flamme au-del`a de laquelle elle ne r´epond plus aux perturbations de l’´ecoulement (cf. chapitre I). Avec les conventions adopt´ees, le signe “plus” apparaˆıt au d´enominateur de l’´equation (V.13) et traduit le fait que la r´eponse de la flamme est en retard par rapport `a la perturbation incidente. En combinant les ´equations (V.9) et (V.13), les fluctuations de vitesse v1 `a la sortie du brˆuleur doivent cette fois-ci satisfaire : ω2  1 + Nexp(−iωτ21) 1 + iωτf  − 2iδω − ω02= 0 (V.14)

Cette expression est `a rapprocher de l’´equation (V.12) obtenue avec le mod`ele (n, τ ). La diff´erence essentielle est l’apparition d’un d´enominateur qui d´epend de la fr´equence dans le membre de gauche. Pour des fr´equences d’excitation ´elev´ees, les effets de la combustion ne se font plus sentir et l’´equation d´eg´en`ere en celle d’un oscillateur harmonique amorti. Il faut noter que l’exponentielle de l’´equation (V.12) fait intervenier le d´elai global τ = τ21+ τc, somme des d´elais acoustique τ21 et du temps convectif τc. Dans l’´equation (V.14), seul le retard acoustique τ21 apparaˆıt dans l’exponentielle. Le nombre de Mach de l’´ecoulement M = v1/c ´etant faible, la contribution de τ21 au retard du syst`eme est faible, et donc τ21 sera n´eglig´e dans ce qui suit.

La stabilit´e du syst`eme brˆuleur-flamme-paroi vis `a vis des perturbations de la vitesse `a la sortie du brˆuleur peut maintenant ˆetre analys´ee `a partir des expressions (V.12) ou (V.14).

ω/ω0 (p 0 /p1 ) 2 /(p 0 /p1 ) 2 ma x 0.5 1.0 1.5 0.0 0.5 1.0 ∆ω=2δ

Fig. V.8 – R´eponse th´eorique du brˆuleur soumis `a une excitation ext´erieure p

1 = ep1exp(iωt) en l’absence de combustion. La largeur `a mi-hauteur vaut ∆ω = 2δ lorsque δ/ω0≪ 1.

158 CHAPITRE V. INTERACTION FLAMME-PAROI : R ´EGIME AUTO-ENTRETENU