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II.2 Etude bibliographique

II.2.1 Modélisations de la densification de pores modèles

De nombreuses modélisations se sont attachées à décrire le transport réactif et la densification dans un pore cylindrique et rectiligne. En imposant une concentration en réactif à l’entrée du pore modèle et une réaction hétérogène (de dépôt) d’ordre 1, il est possible, moyennant quelques approximations, de décrire le transport réactif de façon analytique. Ainsi, en 1939, Thiele met en évidence la compétition entre réaction chimique hétérogène et diffusion dans un pore modèle [3]. Il montre que le profil de concentration de l’espèce réactive le long du pore prend la forme d’une chaînette (figure 1) :

( )

cosh

( ( ) )

cosh s x L C x C φ φ = (2.1)

où φ est le module de Thiele ainsi défini :

2

2k Lhet

R D

φ = (2.2)

k est la constante de vitesse de la réaction hétérogène, L la longueur du pore, R sonhet

rayon, D le coefficient de diffusion du réactif gazeux dans le pore et C sa concentration ens

entrée de pore (ces résultats s’appliquent également à un pore de longueur 2L avec une concentration Cs à chaque extrémité).

Figure 1 : Profil de concentration de réactif le long d’un pore modèle en fonction du module de Thiele et allure du profil d’épaisseur de dépôt associé

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 C/C(0) z/L φ=3 φ=2 φ=1 φ=0,1 Fond du pore ou axe de symétrie Entrée de pore Dépôt de surface φ =0,1 φ =3 φ =2 φ =1 Surface du dépôt x/L

Thiele étend d’ailleurs la définition de son module à tout type de milieu poreux isotrope : 2 het v eff S k L D φ = (2.3)

où Sv est la surface volumique du milieu poreux considéré et Deff le coefficient de diffusion effectif du gaz (avec en première approximation DeffD) dans le milieu poreux de porosité ε.

Plus le module de Thiele est petit devant 1, plus les profils de concentration et d’épaisseur de dépôt deviennent plats : le contrôle est chimique. Plus le module de Thiele est grand devant 1, plus les gradients de concentration et d’épaisseur de dépôt le long du pore deviennent importants : le contrôle est diffusionnel. Entre les deux, lorsque le module de Thiele est proche de 1, il existe un régime de transition. Sur la figure 1, on peut observer l’allure des profils d’épaisseur de dépôt le long d’un pore modèle en fonction des modules de Thiele associés (ceci est une extension par rapport au travaux de Thiele, car il s’est concentré uniquement sur les problèmes de catalyse).

En 1957, Petersen prend en compte l’évolution du pore, dans le cadre de la gazification de graphite poreux par du dioxyde de carbone (inverse de la densification) [4]. Le profil de concentration du réactif n’est en fait strictement une chaînette qu’à l’instant initial (lorsque le diamètre de pore est constant).

Toujours par des calculs analytiques, Middleman suppose l’existence d’une réaction homogène de décomposition du gaz source A produisant l’espèce B, qui elle mène au dépôt par réaction hétérogène [5]. Il définit un module de Thiele équivalent associé à la réaction homogène : 2 ' hom eff A k L D φ = (2.4)

Il montre que pour certaines valeurs des modules de Thiele φ et φ', on peut obtenir un profil de concentration de l’espèce B inversé, avec un maximum au centre du pore, ou bien un profil uniforme sur presque toute la longueur du pore (figure 2).

Ce résultat s’explique par la notion de maturation de la phase gazeuse : le gaz-source doit avoir subi un certain temps de passage avant de se transformer en une espèce réactive menant au dépôt. De nombreux systèmes chimiques utilisés dans le cadre de la CVI peuvent se ramener à ce genre de schéma, et cette étude montre donc qu’un choix judicieux des conditions opératoire peut conduire à des dépôts uniformes en des temps de densification

Figure 2 : Profil de concentration du précurseur ultime (B) selon les valeurs de (φ,φ') [5] relativement courts. Enfin, Middleman tient compte de l’avancement de la réaction homogène en milieu libre, en aval du pore modèle, et réalise un couplage entre les deux milieux. C’est semble-t-il la première tentative du genre.

Tai et Chou ont étudié la densification d’une mèche de fibres où l’espace poreux est assimilé à des pores modèles. Ils ont mis en évidence l’effet important de la température sur la densification du pore modèle par de l’alumine et du carbure de titane [6, 7]. Une augmentation de la température accélère la cinétique de dépôt et en conséquence diminue le temps total de densification, mais conduit à un bouchage prématuré des pores et donc à une densification peu uniforme. En fait, l’augmentation de température conduit également à une augmentation de la diffusivité du gaz, mais pas suffisamment pour compenser l’appauvrissement du réactif. Ils valident leurs calculs par rapport à des résultats expérimentaux.

Fitzer et al. ont déterminé à l’aide de calculs analytiques itératifs les épaisseurs de SiC déposées dans un pore modèle à partir du précurseur méthyltrichlorosilane (CH3SiCl3 ou

MTS) [8]. Il ont considéré une cinétique de dépôt d’ordre 1, dont les paramètres (facteur

pré-exponentiel et énergie d’activation) ont été déterminés à partir d’études CVD. Les calculs ont été validés par rapport à des densifications expérimentales de vrais pores modèles d’environ 450 µm de diamètre, obtenues par Langlais et al. [9] .

x/L C/C(0)

Les travaux jusqu’ici présentés sont quasiment tous basés sur des calculs analytiques. Ils suffisent pourtant à mettre en lumière les principaux problèmes rencontrés en CVI. Ceux qui suivent sont basés sur des modélisations numériques, ils comprennent donc moins d’approximations et permettent une description plus fine des phénomènes physico-chimiques concernés.

Fédou et al. ont également traité le problème de la densification d’un pore modèle par du SiC à partir du MTS [10,11,12]. La cinétique considérée a été déterminée par Shoch et al. [13]. Un ajustement sur cette cinétique d’ordre 1 a été nécessaire pour un bon accord avec l’expérience, ce qui montre l’influence d’autres réactions chimiques non prises en compte. De même qu’une baisse de la température, une diminution de la longueur du pore mène à une meilleure uniformité du dépôt. Tsai et Desu ont repris les résultats expérimentaux de Fédou et

al. et ont montrés que leur modèle faisant intervenir le dépôt de SiC, soit directement à partir

du MTS, soit à partir d’un intermédiaire réactionnel, donnait des résultats corrects [14].

Grujicic a utilisé une approche tout à fait similaire dans le cas de la densification d’un pore par du TiB2 [15]. Il montre que la diffusion de Knudsen a un rôle important dans les conditions de son étude, et doit donc être prise en compte dans les calculs.

Dekker et al. [16] ont travaillé sur les dépôts de TiN, TiB2 et TiC. Ils ont envisagé plusieurs schémas cinétiques possibles, faisant intervenir ou non des étapes intermédiaires d’adsorption, pour les comparer aux densifications expérimentales de capillaires.

Chang et al. se sont intéressés à l’optimisation de la densification d’un pore par du SiC à partir du précurseur MTS [17]. Ici, le transport diffusif a été modélisé avec une certaine rigueur, en utilisant le Dusty Gas Model (cf. II.2.4.3). Ils ont testé plusieurs modèles chimiques, avec notamment différents ordre réactionnels par rapport au MTS, et montré que le choix du modèle pouvait avoir une influence notable d’une part sur les profils de dépôt calculés, et d’autre part sur la pression optimale déterminée (pour une bonne uniformité en un temps de densification minimum).

Enfin, encore dans le cadre de la CVI du SiC à partie du MTS, Gupte et Tsamopoulos [18] ont montré que l’on peut obtenir un très haut degré de densification en imposant un gradient de température le long du pore. En effet, l’élévation de température vers l’intérieur du pore permet de compenser l’appauvrissement du réactif que l’on observe en conditions isothermes. Ces travaux consacrés à la densification de pores modèles sont d’un grand intérêt, notamment pour étudier l’influence des conditions opératoires sur la cinétique de dépôt, mais ils ont leurs limites. En effet, les préformes fibreuses utilisées dans l’industrie sont des milieux très complexes, qu’un simple pore modèle ne saurait représenter fidèlement. Des modélisations de densification de tels milieux ont donc été entreprises.

II.2.2 Modélisations de la densification d’une préforme