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Modèles murins

Dans le document Huntingtine et développement cortical (Page 48-51)

CHAPITRE 2 : LA HUNTINGTINE

7. Les modèles de la maladie de Huntington

7.2. Modèles génétiques animaux

7.2.3. Modèles murins

Les souris transgéniques sont des modèles permettant l’expression surnuméraire d’une copie complète ou tronquée de la HTT mutée. Du fait d’une insertion aléatoire, la localisation génomique du fragment codant la mHTT n’est pas contrôlée.

R6/1 et R6/2 :

Les modèles R6 ont été les premiers générés après la découverte du gène impliqué dans la MH et sont les plus utilisés à ce jour. Ils expriment tous une copie surnuméraire de l’exon 1 mutant de la HTT humaine tronquée qui ne représente que 3% de sa longueur totale. Les R6/1 et R6/2 portent respectivement une répétition de 116 et 144 CAG sous le contrôle du promoteur humain (Mangiarini 1996). Ces modèles, dans lesquels les premiers symptômes apparaissent de façon précoce (entre γ et 6 mois) ont permis de démontrer que l’exon 1 mutant était suffisant pour reproduire les caractéristiques principales de la MH à savoir les défauts moteurs, les performances cognitives amoindries et une espérance de vie réduite (Davies

1997; Murphy 2000). L’atrophie du striatum et du cortex cérébral est aussi observée ainsi que

la présence d’agrégats nucléaires de HTT dans différents types cellulaires (Davies 1997;

Sathasivam 1999). L’inconvénient majeur de ces modèles réside dans le fait que ces souris

n’expriment qu’un fragment de la HTT mutante et qu’aucune neurodégénérescence n’a été clairement identifiée. Enfin, les R6 ont montré une instabilité élevée du CAG dans les lignées somatiques germinales, avec des colonies de souris pouvant exprimer jusqu’à 400 répétitions de CAG (Dragatsis 2009).

Souris YAC128 et BACHD :

Afin de générer des modèles transgéniques exprimant une HTT mutante complète, des groupes ont tiré parti des technologies de génie génétique que sont les chromosomes artificiels de levures (YAC, pour Yeast Artificial Chromosome) et de bactéries (BAC, pour Bacterial Artificial Chromosome). Ces stratégies présentent l’avantage de pouvoir intégrer des vecteurs artificiels contenant l’intégralité de la séquence exonique et intronique du gène de la HTT

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mutante humaine, ainsi que 24kb de séquence régulatrice en amont et 117kb en aval, assurant ainsi une régulation spatiotemporelle de l’expression de la HTT mutante de manière plus physiologique.Les souris YAC128 expriment une HTT mutante avec 128 répétitions, tandis que les BACHD expriment un variant de 97 répétitions. L’instabilité somatique de la répétition est très limitée dans ces modèles. Les YAC128 et BACHD ont un développement progressif des symptômes moteurs et cognitifs, ainsi qu’une atrophie notable du striatum et du cortex cérébral.

Les YAC128 présentent une diminution du nombre de neurones particulièrement dans les régions latérales du striatum (Hodgson 1999; Slow 2003). Cependant, elles ne présentent pas d’inclusion de HTT démontrant que l’agrégation n’est pas indispensable dans le phénomène de dégénérescence neuronale.

Les BACHD présentent une agrégation de la mHTT. La translocation de la HTT dans le noyau est absente des neurones striataux, suggérant que les processus physiopathologiques peuvent se produire en absence d’accumulation nucléaire de mHTT (Gray 2008). De plus, les défauts moteurs apparaissent progressivement et sont associés à des défauts synaptiques et à une apparition tardive d’atrophie du cortex cérébral et du striatum pouvant atteindre γβ% de perte de volume.

La faiblesse de ces modèles réside dans l’expression surnuméraire d’une copie de la HTT mutante en plus de deux copies sauvages du gène. Les proportions entre HTT normale et mutante ne suivent donc pas celle observée dans la pathologie humaine.

7.2.3.2. Les souris Knock-In

C’est donc par nécessité de générer des modèles dans lesquels la HTT mutée est exprimée de façon endogène, que sont apparus les modèles d’insertion dits « Knock-In » (KI). Les souris knock-in ont été conçues en remplaçant l’exon-1 sain de la souris par l’exon-1 humain pathogène. Son expression est régulée par les séquences régulatrices endogènes du génome murin assurant ainsi une expression temporale et tissu spécifique. Il existe plusieurs modèles dans lesquels la longueur de l’expansion CAG varie de 50 à β00 répétitions (Pouladi 2013).

Les CAG140 et zQ175 :

Le modèle CAG140, dans lequel l’exon-1 muté contient 140 répétitions de CAG, a été très largement étudié, in vitro, sur cultures de neurones corticaux et striataux, et in vivo lors d’études histologiqques et fonctionnelles. Ce modèle présente de nombreuses caractéristiques physiopathologiques de la MH à savoir une présence d’agrégats nucléaires et une atrophie progressive du striatum associées à des déficits moteurs, un poids diminué et une létalité précoce (Menalled 2003).

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La lignée zQ175 a été générée spontanément à partir des CAG140 dont la répétition est très instable dans la descendance. Les souris zQ175 ayant le même fond génétique que les CAG140, elles présentent les mêmes phénotypes que ceux observés dans la lignée CAG140. Cependant ces phénotypes apparaissent plus précocement suggérant un effet dépendant de la longueur de l’’expansion CAG dans la précocité des symptômes, comme observé chez l’Homme (Menalled 2012). Au niveau comportemental, ces souris présentent des atteintes à la fois motrices et psychiatriques, avec l’apparition d’anxiété et de stress (Menalled 2012). Au niveau histologique, le cortex et striatum des souris zQ175, analysé par imagerie à résonnance magnétique, présentent une réduction du volume à partir de 3 mois (Peng 2016) associée à des anomalies de morphologie dendritique des neurones corticaux et striataux. Les propriétés électriques de ces neurones sont affectés (McKinstry 2014). De plus, les neurones corticaux des souris zQ175 produisent moins de BDNF (Yu 2018) et leurs neurones striataux présentent des défauts d’expression de marqueurs d’identité. Plus récemment, il a été mis en évidence que les défauts de la voie indirecte du striatum sont observés chez les souris zQ175 avant l’apparition des défauts moteurs, comme cela est le cas chez les patients HD (Peng 2016;

Sebastianutto 2017). Les souris zQ175 reproduisent par conséquent la physiopathologie de la

MH observée chez l’humain. Ce modèle constitue donc un modèle d’intérêt pour la compréhension du processus physiopathologique de la MH ainsi que pour des essais de molécules à visée thérapeutique.

7.2.2.3. Les modèles de perte de fonction

Dans la MH il est communément admis que le gain de fonction toxique de mHTT et la perte de fonction de la protéine sauvage participe à la pathologie. D’où l’intérêt de générer des modèles murins dans lesquels la HTT est inactivée (KO, Knock-out). De façon intéressante, le modèle complet de la HTT présente une létalité précoce à 7,5 jours de développement embryonnaire (E7.5), soulignant le rôle majeur de la HTT dans le développement embryonnaire précoce (Duyao 1995; Nasir 1995; Zeitlin 1995). Afin de s’affranchir de cette létalité précoce, des équipes ont utilisé le système de recombinaison génétique CRE/LoxP. Ce système permet d’exciser une région d’ADN flanquée de sites LoxP en présence de l’enzyme CRE recombinase (CRE) (Sauer 2002). Ainsi, la génération du modèle murin HdHflox/flox,dans lequel l’exon-1 de la HTT sauvage a été flanqué de sites LoxP qui, croisé à des modèles transgéniques exprimant la CRE recombinase, a permis de contrôler l’inactivation de la HTT de manière spatio-temporelle. (Dragatsis 2000).

Ainsi, en exprimant la CRE sous le contrôle du promoteur de la CAMK2 (pour Calmoduline Kinase 2), spécifiquement exprimée dans le cerveau après la naissance, il a été montré que la déplétion de HTT conduisait à des phénotypes caractéristiques de la MH (Dragatsis 2000).

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L’inactivation de la HTT durant le développement cérébral a permis de caractériser les rôles de la HTT durant les périodes embryonnaires et postnatales. Ainsi l’utilisation des souris exprimant la CRE sous contrôle du promoteur Nestin, (exprimé dans les précurseurs neuronaux et gliaux corticaux), a permis de montrer que la HTT régule l’orientation du fuseau mitotique lors de la prolifération des précurseurs neuraux et gliaux dans le cortex en développement. La déplétion de la HTT favorise une différentiation neuronale précoce (Godin 2010). La lignée HdHflox/flox ;Emx1-CRE a quant à elle permis de montrer que la déplétion embryonnaire et post-natale de la HTT spécifiquement dans le cortex entraîne des défauts anatomiques et/ou fonctionnels des neurones corticaux et striataux chez l’adulte et le jeune adulte (McKinstry 2014). Plus récemment, l’analyse longitudinale de ce modèle chez l’adulte a montré des défauts dans le cortex ainsi que dans le striatum alors que celui n’est pas déplété en HTT démontrant ainsi l’importance de a voie cortico-striatale dans la physiopathologie de la MH (Dragatsis 2018). Ainsi à 12 mois, ces souris présentent : (i) une réduction des volumes cortical et striatal, (ii) une baisse du nombre de neurones, (iii) une baisse des niveaux de BDNF corticaux et (iv) des défauts comportementaux, une perte de poids et une longévité réduite (Dragatsis 2018).

Dans le document Huntingtine et développement cortical (Page 48-51)