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1. LE CONCEPT DE L’INCLUSION

1.2 Différents modèles de l’inclusion

Comme il est déjà possible de le constater à la lumière des éléments de définition de l’inclusion présentés plus haut, ce concept est loin d’être univoque : différentes conceptions, définitions et façons de l’appliquer existent (Doré, Wagner et Brunet, 1996; Odom, 2000; Vienneau, 2002; Winzer, 1997). Les critères pour définir les situations d’inclusion varient largement selon les auteurs. Selon Odom (2000), il arrive que l’inclusion soit limitée par certains aux cas où le ratio d’enfants présentant des incapacités dans le milieu reflète celui observé dans la population (ou ne le dépasse pas - c’est le cas notamment pour Thomazet, 2009). Pour d’autres, cet aspect revêt peu d’importance et l’inclusion a lieu même si le ratio d’enfants ayant des besoins particuliers dépasse largement celui observé en général dans la population. Certains précisent qu’il s’agit d’inclusion dès qu’au moins la moitié des enfants du milieu ne présentent pas d’incapacités, ce qui permet aux enfants ayant des besoins particuliers de participer à des activités régulières avec d’autres enfants sans incapacités. Enfin, plusieurs ne s’attardent pas au ratio et s’entendent pour dire que pour qu’il y ait

inclusion, l’enfant présentant des besoins particuliers doit fréquenter exactement le même milieu que les enfants qui n’ont pas de particularités dans leur développement.

Vienneau (2002) précise les différentes visions de l’inclusion au niveau des modalités de soutien en notant que, pour certains, elle implique l’absence de tout service d’aide relevant de l’éducation spécialisée alors que d’autres « proposent le maintien des interventions d’éducateurs spécialisés, pourvu qu’elles s’effectuent à l’intérieur de la classe ordinaire et qu’aucun élève n’en soit privé » (p. 275).

Nous présenterons ici deux conceptions de l’inclusion qui selon nous sont complémentaires. Elles correspondent à la vision que nous avons de l’inclusion de l’enfant présentant un TSA en CPE. Le premier modèle a été présenté par Giangreco, Cloninger, Dennis et Edelman aux États-Unis en 1994. L’autre modèle a été élaboré en 2002 par Raymond Vienneau, de l’Université de Moncton au Nouveau-Brunswick.

Le modèle de l’inclusion de Giangreco et ses collaborateurs (1994, dans Giangreco, Baumgart et Doyle, 1995) s’appuie sur la présence, sur une base quotidienne, de cinq caractéristiques :

1. Tous les enfants fréquentent le même milieu;

2. Le ratio d’enfants présentant des incapacités est le même que ce que l’on retrouve dans la population;

3. Les enfants partagent des contextes d’apprentissage communs, mais poursuivent des objectifs qui leur sont propres, tout en ayant accès au soutien et aux accommodements dont ils ont besoin;

4. Les contextes d’apprentissage communs se déroulent dans des milieux réguliers; 5. Les contextes d’apprentissage orientés vers les objectifs de vie de la personne visent

La conception de l’inclusion selon Vienneau (2002) s’appuie elle aussi sur cinq composantes essentielles qui ont été développées en lien avec le milieu scolaire, mais qui peuvent selon nous s’appliquer également au contexte de l’inclusion en CPE. Il s’agit de :

1. la normalisation optimale de l’expérience [éducative de chaque enfant]; 2. la participation pleine et entière de chaque enfant à la vie de sa

communauté d’appartenance, y compris à sa communauté d’apprenantes et apprenants […];

3. l’individualisation optimale du processus enseignement-apprentissage; 4. la reconnaissance de la contribution unique et irremplaçable de chacune

et de chacun au développement et à l’épanouissement de cette communauté d’apprenantes et d’apprenants, et

5. l’accès de chaque [enfant] aux ressources et aux milieux d’apprentissage les plus favorables à son développement intégral en tant que personne. (Ibid., p. 275).

Chacune des composantes du modèle de Vienneau (2002) comporte des implications éducatives, qui rejoignent à certains égards la vision de Giangreco et ses collaborateurs. Ainsi, la normalisation suppose la fréquentation des mêmes milieux par tous les enfants et l’accessibilité de l’enfant qui présente des incapacités à l’ensemble des activités communautaires, sociales, culturelles, sportives, etc. offertes dans ces milieux. La notion de participation renvoie à la participation de l’enfant tant à la vie communautaire et sociale de son milieu qu’aux activités d’apprentissage qui y sont réalisées. L’individualisation implique pour sa part d’adapter les contenus d’apprentissage et les stratégies éducatives pour chaque enfant. L’unicité implique notamment de sensibiliser les autres enfants aux difficultés qui peuvent être vécues par celui qui présente des besoins particuliers, de valoriser le caractère unique et les particularités de chacun. Enfin, l’intégralité implique un équilibre entre les types de savoirs, entre l’autonomie et la socialisation et entre les différentes sphères du développement de l’enfant.

Bien que l’inclusion puisse être conceptualisée et comprise de différentes façons, nous constatons qu’une vision commune émerge tout de même : l’enfant qui présente des incapacités et les autres enfants sont égaux et devraient avoir accès aux mêmes milieux et aux mêmes expériences, et ce peu importe leurs particularités.

Compte tenu des définitions de l’inclusion que nous venons de présenter et de ce que nous observons en majorité dans les CPE, nous utiliserons le terme “inclusion” dans le cadre de ce travail pour définir les pratiques mises en place dans ces milieux. Nous sommes conscientes qu’une réelle inclusion n’est pas nécessairement en place dans tous les CPE et la totalité du temps, mais nous croyons que les pratiques observées tendent tout de même vers ce concept, raison pour laquelle nous privilégierons ce terme.

L’inclusion du jeune enfant en service de garde présente quelques caractéristiques particulières que nous exposerons dans la section qui suit.