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Alors que certains virus sont faciles à isoler et à manipuler dans des modèles de culture cellulaire, le VHC reste difficile à dupliquer in vitro. Ainsi, l’étude complète du VHC reste compliquée en raison de son tropisme restreint. Les cellules sensibles à l’infection naturelle par le VHC sont : les hépatocytes, les lymphocytes, les cellules biliaires et les entérocytes [336]. Actuellement, les modèles in vitro les plus couramment utilisés consistent en l’infection d’hépatocytes humains en culture primaire (HFH, PH), de cellules primaires immortalisées (IHH) et de lignées d’hépatomes humains (Huh7, HepG2, HepaRG, etc.) [51, 337].

• Les cellules et lignées cellulaires utilisées

L’étude de l’infection par le VHC passe par l’utilisation de cultures primaires d’hépatocytes immortalisées (IHH) par l’antigène T du virus SV40 ou des cultures primaires de foie fœtal humain (HFH) [333]. Cependant, des travaux ont montré que les IHH, bien qu’aussi permissives que les Huh7 à l’infection, conduisaient à une production de particules virales très faible [338]. Par ailleurs, l’utilisation courante de HFH reste très limitée en raison du manque de matériel. Pour y remédier, les chercheurs ont généralisé l’utilisation d’hépatocytes primaires humains adultes (PHH) obtenus lors d’une résection chirurgicale. Ce modèle a l’avantage de préserver les fonctions biologiques des cellules (cytochrome P450, enzymes de conjugaison, transporteur, métabolisme lipidique, etc.) [339]. Néanmoins, la réplication aboutit généralement à une production faible de virus infectieux [340]. Ainsi, afin d’étudier tous les aspects de l’infection par le virus de l’hépatite C, l’utilisation de lignées cellulaires (Huh7, HepG2 et HepaRG) restent l’un des meilleurs choix. En effet, ces lignées sont facilement accessibles et directement manipulables. De plus, le fait qu’elles soient immortalisées favorise la reproductibilité des résultats. Cependant, bien que dérivées d’hépatomes humains, elle ne reflètent pas réellement la physiologie et la polarisation des hépatocytes primaires

[332]. Plus récemment, travaux ont fait part de l’utilisation des tranches de foie (350μm) prélevées

lors d’hépatectomies mais ce modèle reste encore à mettre sur pied [341].

Afin d’analyser le cycle complet du VHC, différents modèles d’infections in vitro ont été développés. Ces modèles d’infections comprennent : Les particules dérivées de séra VHC+ (VHCser) ; les modèles réplicons ; les pseudoparticules VHCpp, les particules virales VHC-like particles, les modèles lentiviraux et le modèle d’infection en culture cellulaire VHCcc/JFH1 [51, 329, 342, 343].

2.1- Infection par les particules dérivées de séra de patients infectés par le VHC (VHCser) Il n’existe toujours pas de système de culture cellulaire robuste pour les infections par les séra dérivés de patients VHC+ (VHCser). En effet, la présence d’anticorps neutralisant dans le sérum ainsi que le tropisme viral rendent difficile la mise en place de ce modèle. Néanmoins, en utilisant des traitements lipidiques PIDR (protein intra-cellular delivery reagent), des études montrent une internalisation des VHCser dans les cellules Huh7 [344]. De plus, les VHCser seraient également capable d’infecter les hépatocytes en culture primaire et cette infection serait dépendante de la tétraspanine CD81 [342, 345].

2.2- Infection par les modèles de particules virales semblables au VHC (VHC-LPs)

Des chercheurs ont produit des particules virales infectieuses, semblables aux virions produits après infection par les VHCser. Ces particules virales, appelées « VHC-like particles ou VHC-LPs» ont été produites dans les cellules d’insectes en utilisant le baculovirus comme vecteur d’expression des protéines structurales E1, E2 et Core du VHC [346]. Leurs études ont montré que ces particules HCV-LPs avaient la capacité d’internaliser les hépatocytes humains et les lignées d’hépatomes humains [347]. Par ailleurs, en utilisant le virus recombinant SFV (Semliki Forest Virus) exprimant les gènes codant pour les protéines structurales du génotype 1a ou en utilisant le virus recombinant VSV (Virus Stomatite Vésiculaire) portant les gènes codant les protéines structurales de génotype 1b, d’autres particules virales ont pu être élaborées [348, 349]. Ces particules ont été très utilisées pour l’étude de la structure et de la fonction des protéines d’enveloppe, l’étude de l’assemblage de la particule virale et pour mettre en évidence la fonction des peptidases-signal cellulaires sur le génome viral [347].

2.3- Infection par les pseudo-particules lentivirales ou rétrovirales (VHCpp)

Les pseudo-particules virales VHCpp sont constitués des glycoprotéines d’enveloppe E1 et E2 non-modifiées et assemblées sur des particules rétrovirales ou lentivirales [350, 351]. Elles sont produites dans la lignée cellulaire 293T par transfection de vecteurs plasmidiques d’expression codant pour E1/E2. Ces particules sont également constituées du génome et des protéines tag-pol du virus MLV (mouse leukemia virus) associées à un gène rapporteur GFP ou luciférase. Des études montrent que ces particules virales sont hautement infectieuses et qu’elles peuvent internaliser les hépatocytes humains et les lignées d’hépatomes (Huh7, HepG2 et Hep3b) [352]. Par ailleurs cette internalisation serait dépendante de la présence des récepteurs d’entrée CD81 et SCARB1 [351]. En

effet, la présence de la GFP (green fluorescent protein) ou de la luciférase dans les VHCpp a permis une étude rapide et précise des mécanismes d’entrée des différents génotypes viraux [350, 352]. Par ailleurs, ce système permet d’analyser, efficacement, l’effet des anticorps neutralisants sur le processus d’entrée [353, 354].

2.4- Les systèmes réplicons

Les réplicons sont des molécules d’ARN bi-cistroniques subgénomiques et réplicatives du VHC. Le tout premier réplicon a été développé en 1999 [343]. Ce réplicon était composé de l’extrémité 5’- IRES du VHC, du gène de résistance à la néomycine, de l’IRES du virus EMCV (myocardite encéphalique), des protéines non structurales NS3 à NS5B du VHC et de l’extrémité 3’ du VHC [343, 355]. Dans ce système, l’IRES du VHC favorise la traduction du gène de résistance à la néomycine. L’expression de la néomycine permet de sélectionner les clones résistants après transfection et l’IRES du virus EMCV dirige la traduction des protéines non structurales NS3 à NS5B du VHC (voir figure 21) [343]. La transfection de ce réplicon dans les lignées d’hépatomes Huh7 ou HepG2a permis la sélection de clones résistants, possédant des mutations adaptatives et capables de se multiplier [343]. L’utilisation de ces ARNs a ainsi permis d’observer une réplication virale active [356]. Cependant, celle-ci n’aboutit pas à une grande production de particules virales infectieuses [357]. Ce modèle a servi de base au développement d’autres réplicons rapporteurs fondés plus ou moins sur le même principe [358, 359]. Ainsi, le modèle réplicon constitue une avancée majeure dans l’étude de la réplication virale et de la localisation cellulaire des protéines virales mais n’est d’aucune utilité dans la compréhension des mécanismes de production virale [360]. La figure 21 donne une représentation schématique du tout premier réplicon subgénomique du VHC tel que développé en 1999.

Figure 21 : Représentation schématique du réplicon subgénomique développé pour l’étude du VHC. Ce réplicon est composé de l’extrémité 5’-IRES du VHC, du gène de résistance à la néomycine, de l’IRES du virus EMCV, des protéines non structurales du VHC NS3 à NS5B et de l’extrémité 3’ du VHC. D’après Bartenschlager Ralph, nature reviews drug discovery. 2002.

2.5- Forme soluble de l’ecto-domaine E2 (sE2)

C’est le tout premier outil à avoir été utilisé pour l’étude des récepteurs d’entrée CD81 et SCARB1 du VHC [294, 361]. En effet, la forme soluble de l’ecto-domaine E2 appelée sE2 est dépourvu de la partie transmembranaire de E2 et généralement tronquée au niveau de l’acide aminé 661 [362]. Bien qu’il soit sécrété sous une forme non-associée à E1, sE2 possède une conformation protéique semblable aux immunoglobulines lui permettant d’interagir avec les récepteurs d’entrée [151, 361]. Par ailleurs, des études montrent que sE2 est un agoniste des particules VHCcc pour les récepteurs membranaires [363]. Cependant, ce modèle ne reflète pas l’infection naturelle par le virus du VHC.

2.6- Les particules virales infectieuses produites en culture cellulaire VHCcc

Après des travaux de collaboration, trois laboratoires sont parvenus à créer un système efficace de culture cellulaire pour étudier le cycle complet du VHC mais l’histoire retient principalement les travaux du virologiste Wakita au japon. [51, 364, 365]. En effet, ce dernier a isolé un clone de taille complète de l’ARN du VHC (la souche JFH1) dans le sérum d’un patient japonais VHC+ (32 ans, génotype 2a) qui avait développé une hépatite fulminante. L’ARN ainsi isolé a d’abord été amplifié par RT-PCR puis séquencé afin de déterminer le génome entier. Ils ont ainsi montré que la séquence du JFH1, long de 9678 nucléotides était constituée d’un large cadre ouvert de lecture codant pour 3033 acides aminés [51]. La transfection de ce réplicon subgénomique de taille complète dans les cellules Huh7 a donné un cycle viral complet aboutissant à la production de particules virales infectieuses produites en culture cellulaires appelées VHCcc [51]. Leurs études ont montré que les VHCcc étaient capables d’infecter et de se répliquer dans les hépatocytes primaires, les lignées d’hépatomes, les souris humanisées et les chimpanzés [366]. De plus, les virions excrétés sont hautement infectieux et ne présentent aucune mutation adaptative du génome. Par ailleurs, dans la même étude, ils ont montré que les particules virales pouvaient être neutralisées par l’utilisation des anticorps monoclonaux dirigés contre la gp E2 [51].

L’infectivité des lignées cellulaires a été augmentée grâce au développement de lignées hautement permissives (exemple : Huh7.5) [367]. Par ailleurs, ce modèle a servi à la construction de nombreuse chimères (J6/JFH1, Jc1, etc.) [177, 368]. L’utilisation du modèle VHCcc permet l’étude de tous les aspects du cycle viral. Ce modèle possède tout de même certaines limites. En effet, il est dépendant des lignées d’hépatomes qui ne reflètent pas la physiologie de la cible naturelle de l’infection virale : l’hépatocyte primaire. Néanmoins, ces modèles expérimentaux demeurent des

matériaux essentiels pour effecteur des études virologiques, développer des vaccins ou élaborer des traitements antiviraux efficaces.

Le tableau 7 résume les spécificités de chaque modèle utilisé pour l’analyse in vitro du VHC.

Tableau 7 : Spécificités et particularité des modèles utilisés pour l’étude in vitro du VHC.

D’après Laurissa Ouaguia, 2015.