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Le traumatisme psychique

4- Les modèles explicatifs du trauma :

Le traumatisme psychique a suscité l’intérêt des praticiens et des chercheurs des différentes disciplines et chacun a tenté d’expliquer le traumatisme psychique au prisme de ses approches et théories.

4-1- La thèse organique ou biologique :

-L’origine organique des premières névroses :

Cette thèse défend l’hypothèse selon laquelle les premières névroses déclenchées suite aux accidents de chemins de fer sont d’origines post commotionnelle, la commotion causerait soit des hémorragies soit des lésions des neurones.

Cette thèse fut relancée lors de la première guerre mondiale et la pathologie appelée « shell-shock » est déterminée par l’effet mécanique du souffle de l’explosion ce qui entraîne des lésions des méninges, des vaisseaux cérébraux, de l’encéphale ou de la moelle épinière.

4-1-2 -le modèle bio-neuro-physiologique du stress :

Les travaux neurophysiologiques du stress surtout du célèbre chercheur Selye ont marqué les troubles post- traumatiques mais seulement l’aspect neurophysiologique du stress et en omettant les phénomènes que représentent le trauma, comme on l’a vu ci-dessus la réaction de stress est une réaction neurophysiologique qui met l’organisme en état de se défendre ou d’affronter le danger.

4-2- Le modèle comportemental et cognitiviste :

Pavlov en 1924 lors d’une crue qui a envahi son laboratoire, a observé des bouleversements post-émotionnels des conditionnements acquis survenus chez ses chiens ; parmi ces bouleversements il a noté :

- désorganisation paradoxale : les animaux réagissent beaucoup plus aux stimuli faibles qu’aux stimuli forts

- réaction ultra paradoxale : les conditionnements positifs deviennent négatifs. - excitation paroxystique : ressemblant aux réactions hystériques chez l’homme

Ces réactions d’alarme qui ont modifié tous les conditionnements acquis antérieurement sont d’après Pavlov comparables à la névrose traumatique chez l’homme.

De son cote Mowrer (1960) considère que le traumatisme est une situation d’horreur qui engendre des réactions émotionnelles angoissantes sur les plans (moteurs, physiologiques et cognitifs) ce qui favorise l’installation du post traumatique stress disorder ; donc de nombreux stimuli sont associés à l’événement traumatique et vont provoquer la même réponse anxieuse que l’évènement déclenchant.

4-2-1 Les modèles cognitivistes :

Selon Horowitz (1986) les symptômes du post traumatique stress disorder sont une réaction de l’invasion d’informations reçues lors de l’évènement traumatisant et leurs maintien est dû à la difficulté de les intégrer dans un schémas cognitifs antérieurs.

Pour Barlow et Jones (1992) le post traumatique stress disorder résulte de l’interaction de cinq facteurs essentiels ; le premier concerne la prédisposition biologique du sujet celle ci englobe une vulnérabilité génétique et psychologique et aussi le rôle des antécédents psychiatriques.

Le deuxième facteur à trait aux caractéristiques de l’évènement traumatique (intensité, imprévisibilité, gravite) ; pour qu’il y ait post-traumatique stress disorder le sujet guette les comportements appris « alarme apprise »(troisième facteur) lors de l’évènement traumatisant « alarme vraie » par une série de réactions émotionnelles et cognitives ce qui engendre une hyper vigilance source d’une augmentation de l’anxiété (quatrième facteur).

Barlow et Jones proposent un dernier facteur qui consiste dans le rôle du soutien social ainsi que la capacité du sujet de gérer son stress.

Tous ces facteurs jouent un rôle dans le déclenchement et le maintien du post traumatique stress disorder.

4-3- Le modèle de Janet :

Janet présenta sa théorie sur la névrose traumatique en 1919 dans son ouvrage « les médications psychologiques » ; selon Janet la névrose traumatique se caractérise par une dissociation de la conscience, une partie de la conscience est obnubilée par l’idée fixe : vague souvenir de l’évènement traumatisant qui dans un espace de la conscience agit a la manière

d’un parasite provoque des images, des pensées, des gestes archaïques automatiques alors que l’autre partie de la conscience continue de fonctionner normalement.

4-4 Les modèles psychanalytiques : 4-4-1 La théorie freudienne :

Freud entre 1895 et 1897 considérait qu’à l’origine de toute névrose, il y a un traumatisme survenu dans l’enfance du sujet pour cela deux conditions sont nécessaires :

Il faut que l’évènement en cause ait été de nature sexuelle, précisément une séduction exercée par un adulte sur l’enfant, secundo le choc doit être précoce.

Selon Freud, l’enfant est effrayé par des comportements incompréhensibles, pour lui le choc initial surviendrait à un stade potentiel jusqu’à la puberté avec l’avènement de la sexualité il lui donne son sens réel.

Ainsi le traumatisme agit en deux temps :

Le premier temps l’enfant subit une expérience de nature sexuelle de la part d’un adulte ou d’un enfant plus grand, cette expérience est incompréhensible pour lui ; le deuxième temps survient avec l’avènement de la puberté et lors d’un évènements nouveaux, vient évoquer la première expérience et lui donne son sens réel, et c’est le souvenir ou le sens de ce premier temps qui devient traumatique.

Après des observations cliniques et analytiques des malades hystériques, Freud renonça a cette conception sexuelle du traumatisme et accepta l’idée d’une conception fantasmatique comme il l’affirme lui même dans une lettre a Fliess datée du 21/09/1897 « il faut que je te confie tout de suite le grand secret qui s’est lentement fait jour au cours de ces derniers mois, je ne crois plus a ma neurotica ». (Cité par Roudinesco E et Plou M, 1997 p 437)

Durant la première guerre mondiale (1914-1918) et les traumatismes provoqués, Freud que les sujets traumatisés restent fixés à un pan de l’évènement traumatique, fixation qui apparaît essentiellement dans les rêves ce qui va a l’encontre de sa conception initiale du rêve ;

Mais le grand pas se fera a partir de 1920 dans « au delà du principe de plaisir » après avoir découvert la compulsion de répétition chez ces patients et l’établissement de la distinction ente la peur, l’angoisse et la frayeur. Freud adopte une nouvelle conception économique du trauma (1978, p 36) « nous appelons traumatiques les excitations extérieures assez fortes pour rompre la barrière représentée par le moyen de protection ».

Considéré alors comme une effraction de la barrière de défense par la violence des excitations liées à l’évènement traumatisant qui pénètrent au sein du psychisme et à l’image

d’un parasite continue ses effets nocifs et provoque de la part de l’organisme de vrais efforts d’assimilation ou d’expulsion.

Dés lors la conception freudienne du traumatisme est de nature économique et sa survenue dépend à la fois de la violence de l’événement, de l’état constitutionnel et conjoncturel des défenses du sujet.

4-4-2 Le modèle de Ferenczi

Ferenczi, psychanalyste hongrois et disciple de Freud a dirigé un service de neurologie lors de la première guerre mondiale, ces observations l’ont amène a assimiler les symptômes présentés par les soldats à l’hystérie de conversion.

Ferenczi se démarqua de Freud sur l’origine réelle du traumatisme sexuelle et ses conséquences immédiates au niveau du moi des enfants dans un article intitulé « confusions de langue entre les adultes et l’enfant » en 1932 ; il considérait le traumatisme comme un choc ou une commotion qui fait éclater la personnalité, la première réaction au choc est une psychose passagère, une rupture avec la réalité, le sujet réagit par clivage psychotique, une partie de la personnalité est morte, tuée par la violence du choc ( destruction des sentiments de soi, des défenses, paralysies de l’activité psychique de la motilité, de la pensée… ; et l’autre partie continue de vivre normalement

4-4- 3 Le modèle lacanien :

Selon Lacan, ce qui fait trauma c’est la rencontre avec le réel de la mort en l’absence d’un écran protecteur et le sujet se trouve désarmé face la crudité du réel de la mort ; le réel traumatique c’est l’indicible, l’impossibilité de représentation suite a un trou dans le signifiant.

4-4-4 Modèle de Fenichel :

Le modèle de Fenichel se rapproché de la thèse freudienne, selon Fenichel, il a trois possibilités :

- le sujet est sain et reposé et par conséquent son pare excitation sera en mesure de juguler l’afflux des excitations de l’évènement.

- Le sujet est sain mais conjecturalement épuisé, son pare excitation est incapable de faire face aux agressions ce qui donne lieu à une névrose traumatique pure.

- Le sujet est déjà névrosé et dont son énergie est utilisée pour maintenir ses refoulements névrotiques, alors le sujet développe une névrose traumatique colorée des symptômes de la névrose antérieure

4-5- Thèses phénoménologiques : 4-5-1 Le modèle de Barrois :

Barrois (1988, p 170) définit le trauma comme une rupture des liens avec le monde, rupture de sens « le traumatisme psychique fruit de la rupture des liens avec le monde, puis les névroses traumatiques brisent aussi la relative unité de l’individu, du sujet et du moi dans la personne: individu sans groupe auquel s’opposer, ni s’appuyer, sujet sans deuxième, ni troisième personne, pour soutenir son discours, il est réduit a une intériorité envahie par l’angoisse du vide » .

Dans son expérience traumatique, le sujet découvre le réel de la mort, la mort de soi au sujet de laquelle aucune représentation n’existe dans son psychisme.

4-5-2 Le modèle de Crocq :

Pour Crocq, le trauma est échafaudé sur les points suivants :

4-5-2-1 L’aliénation traumatique :

Pour signifier les bouleversements et les remaniements que subisse la personnalité des sujets traumatisés, changements dans la manière de voir et de concevoir, de raisonner, d’aimer…la personnalité après le trauma n’est plus comme avant , elle est régressive, pusillanime, blocage des fonctions d’amour, de présence et de filtrage.

4-5-2-2 Le bouleversement de la temporalité :

Chez le sujet traumatisé, le temps s’est arrêté au moment de l’évènement ou de l’expérience traumatique, le présent est figé, l’avenir est bouché et le passé c’est l’expérience traumatique.

4-5-2-3 Le non –sens :

Pour Crocq, le trauma est un non-sens, un chaos, l’expérience traumatique a bouleversé la vie du sujet, ses convictions et ses croyances, ses valeurs, ses principes …tout cela remplacées par l’incohérence, le non -sens .