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3.3 SimCafé

3.3.2 Modèles des expériences SimCafé

Les expériences SimCafé ont été conçues pour vérifier la validité de modèles de formation des coalitions qui permettent aux producteurs de café de l’état de Veracruz

de mieux satisfaire les offres des acheteurs sur le marché international du café.

Contexte des simulations

Les expériences SimCafé ont été conduites en mai 2003 dans cadre d’un projet relatif au marché électronique du café. Ce projet, financé par le Laboratoire Franco- Mexicain d’Informatique (LAFMI), était coordonné par Amal El Fallah-Seghrouchni et Christian Lemaître Léon. L’objectif du projet était de concevoir et de développer un langage de programmation orienté agents. Ce langage devait servir de fondement à un système de commerce électronique appliqué au marché du café produit dans l’état de Veracruz, au Mexique, et destiné à l’exportation [Suna et al., 2005]. Cet objectif de conception nécessitait de modéliser le marché du café et en particulier le com- portement de ses acteurs. Les expériences SimCafé ont servi à vérifier la validité des modèles des comportements des acteurs, élaborés dans le cadre de ce projet.

Le système cible : la situation des producteurs de café

Connaissances théoriques, observations, hypothèses

Système cible (réalité)

Le Mexique est le sixième producteur mondial de café et, en 1999-2000, l’état de Veracruz représentait 25% de la production nationale, avec 1,56 millions de sacs de 60 kg à 95% destinés à l’exportation. Le marché international du café est divisé en un marché de gros et un marché du café de qualité. L’essentiel de la production de l’état de Veracruz était vendu sur le marché de gros. Le prix de vente sur ce marché s’était récemment effondré, passant de 3,18 USD la livre en 1997 à 0,50 USD la livre en 2002, ce qui est inférieur au prix de revient des producteurs mexicains. Cette situation a poussé un grand nombre d’entre eux à abandonner la production de café et à se reconvertir dans la sylviculture, ou à chercher à passer la frontière avec les

États-Unis [Hernández Navarro, 2004].

Cette collaboration entre le Laboratoire d’Informatique de Paris VI et le Laborato- rio Nacional de Informática Avanzada s’inscrivait dans un projet politique plus large. Les producteurs de café de l’état de Veracruz produisaient peu de café, avaient un faible revenu et étaient nombreux. En 2001, ils ont fondé avec le gouvernement de l’état, un conseil de régulation du café (Consejo Regulador des Café Veracruz). L’objectif était de créer une appellation d’origine contrôlée pour que le café de Veracruz soit vendu sur le marché international du café de qualité, à un prix plus élevé. Cette instance vérifie que le café est produit selon des normes de qualité et d’origine et certifie les sacs de café.

Le modèle du domaine : la production de café

Modèle du domaine

Le modèle de la production de café décrit ici sert de modèle du domaine pour les simulations SimCafé. Ce modèle a été élaboré par Christian Lemaître, chercheur au LANIA, et Edgar Mendoza Flores, étudiant de la Maestría en Ciencias de la Com- putación (Master d’Informatique), et non pas par des spécialistes de la production du café. Edgar Mendoza Flores s’est néanmoins fondé sur des études sur le domaine et nous avons ensemble interrogé des producteurs de trois exploitations différentes, deux exploitations familiales et une grosse exploitation de taille industrielle (figure 3.8).

La production de café se fait en quatre étapes.

Le fruit, appelé cerise (el café cereza), est cueilli une fois par an sur les arbustes. Il est ensuite débarrassé de son écorce et de son enveloppe charnue. Le procédé consiste à frotter les grains entre deux disques métalliques puis à les laisser tremper dans l’eau pendant 24h afin que ce qui reste de chair se désagrège. Ce processus se déroule dans une fabrique appelée “beneficio húmedo”. Le café ainsi produit s’appelle café

pergamino (café parchemin), parce que le grain est toujours entouré d’une pellicule, insoluble dans l’eau, appelée endocarpe ou parchemin. Ensuite, le café pergamino est décortiqué, transformé en café oro ou café verde (selon la couleur du grain) dans des fabriques appelées beneficio seco parce qu’elles n’utilisent pas d’eau. À la fin du processus, le café est torréfié. L’unité de production est le sac, un sac de café pergamino pesant 60 kg.

Les 67 000 producteurs de l’état de Veracruz sont essentiellement des cultivateurs d’arbustes et des journaliers payés pour cueillir le café cereza à la main. Quelques pro- ducteurs possèdent un “beneficio húmedo”. Ils possèdent leurs propres arbustes ou, plus fréquemment, achètent du café cereza aux cultivateurs. Ces producteurs trans- forment le café cereza en pergamino et le vendent à des propriétaires de “beneficio seco”. Les propriétaires de “beneficio seco” vendent le cafe verde ou oro sur le marché international.

D’après les producteurs que nous avons interrogés, l’étape la plus critique de la production de café est la transformation du café cereza en café pergamino. C’est pour cette raison que les producteurs représentés dans le modèle utilisé par SimCafé sont des producteurs de beneficio húmedo. La transformation du café cereza en café per- gamino dure trois jours, le débit d’un beneficio húmedo dépendant de sa taille.

Coalitions

Les producteurs reçoivent des offres d’achat pour du café oro ou pour du café pergamino. À cause des délais de livraison, ces offres sont des offres à terme, et les producteurs ont en général une semaine pour les accepter. Quelques producteurs sont organisés en coopératives (appelées “sociedades” ou “alianzas”).

Le modèle du domaine, tel qu’élaboré par Christian Lemaître et Edgar Mendoza Flores, suppose que des coalitions se forment sur le marché du café. Les producteurs, y compris ceux qui ne font pas partie de coopératives, accepteraient ainsi des offres d’achat pour des quantités supérieures à leur stock et ils achèteraient à d’autres pro- ducteurs une partie du café vendu. Ces comportements ne sont cependant pas admis

FIG. 3.8: Producteurs de café rencontrés à la Feria del Café

par les producteurs qui, lorsqu’ils sont interrogés, nient toute participation à des coali- tions.

Les expériences SimCafé ont été construites pour tester l’hypothèse de la forma- tion de coalitions sur le marché du café. Ces coalitions représentent un comportement collectif qui permet de mieux satisfaire les offres d’achat.