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Modèles d’adoucissement volumique basés sur une approche

2.4 Modélisations de l’endommagement d’un matériau ductile

2.4.3 Modèles locaux d’adoucissement volumique pour un matériau ductile

2.4.3.1 Modèles d’adoucissement volumique basés sur une approche

A l’intérieur de l’ensemble de ces modèles, il est encore possible de définir deux sous-catégories. D’un côté, les modèles à l’échelle microscopique sont utilisés pour décrire le comportement d’un Volume Elémentaire Représentatif (VER). Dans ce VER, les pores sont définis par des cavités dans une matrice élasto-plastique. Pour ces modèles, il faut donc définir une méthode d’homogénéisation pour déterminer le comportement macroscopique à partir de la réponse à l’échelle microscopique.

D’un autre côté, les modèles de comportement basés sur une approche micro-mécanique constituent une évolution semi-empirique des modèles purement micro-mécaniques. Ils incluent des descriptions phénoménologiques des processus physiques (nucléation, croissance, coalescence) qu’il n’est pas toujours évident de modéliser à l’échelle micro-mécanique. Ces modèles décrivent chacun de ces phénomènes sans se baser sur une homogénéisation.

2.4.3.1.1 Modèles d’endommagement à l’échelle microscopique

Ces modèles sont basés sur une description à l’échelle microscopique de l’endommagement. Suite à l’homogénéisation des champs mécaniques sur un VER, il est possible de déduire le comportement macroscopique du matériau endommagé. Le modèle le plus connu est le modèle de Gurson qui décrit la croissance des pores préexistants dans une matrice élasto-plastique.

Modèles analytiques de croissance des pores

7. L’échelle microscopique est définie dans ces travaux de thèse comme l’échelle où il est possible de distinguer les cavités sphériques ou ellipsoïdales (pores) de la matrice élasto-plastique continue

[Gurson, 1977] propose un critère de plasticité dépendant de la porosité pour prendre en compte le couplage entre la plasticité et la croissance des pores. Ce modèle repose sur l’homogénéisation du comportement d’une sphère creuse dans une matrice parfaitement plastique. L’idée est que le comportement de cette cavité dans la matrice est identique au comportement d’un volume élémentaire représentatif (VER), contenant des pores de taille et répartition aléatoire, avec la même porosité (Figure 2.4.4). Tout comme [Rice et Tracey, 1969], la déformation de la matrice contenant la cavité sphérique est décomposée en une partie déviatorique liée à la plasticité (sans changement de volume) et une partie volumique qui inclue les variations de volume plastique liées à la croissance des pores.

Dij, σij

Dij, σij

Figure 2.4.4: VER avec des cavités de taille et de forme aléatoire et son approximation par un modèle de sphère creuse (d’après [Czarnota, 2006])

Il établit une relation entre la surface de charge plastique Φ d’un matériau poreux, et la porosité f de la forme présentée dans l’équation 2.4.5. Par ce biais, il obtient ainsi un couplage entre les effets de la plasticité et de l’endommagement à l’échelle microscopique.

Φ(σeq, σkk, f) = σeq2 σ2 0 + 2f cosh1 2 σkk σ0 1 − f2 (2.4.5)

avec σkk la trace du tenseur des contraintes de Cauchy, σkk= −3p, où p est la pression. σ0 est la contrainte d’écoulement de la matrice (constante pour un matériau parfaitement plastique). Cette surface de charge plastique peut également s’écrire en fonction de la pression hydrostatique

p de la matrice. Φ = σeq2 σ2 0 + 2f cosh−3 2 p σ0 1 − f2 (2.4.6)

L’équation de normalité associée est :

Dp= ˙λΦ

∂σ (2.4.7)

où Dp est le tenseur du taux de déformation plastique macroscopique et ˙λ le multiplicateur plastique. L’évolution de la porosité, en l’absence de création de nouvelles cavités, résulte de la

conservation de la masse. En négligeant les déformations élastiques, il vient la relation : ˙f = 3(1 − f)Dm p (2.4.8) où Dm p = 1/3 tr Dp.

Ce modèle de Gurson est fréquemment utilisé pour modéliser l’endommagement ductile. Il inclut notamment une dépendance de la surface de charge plastique à l’exponentielle de la triaxialité des contraintes, ce qui est observé expérimentalement [Hancock et Mackenzie, 1976,Tvergaard et Needleman, 1984]. Il décrit la croissance des pores mais pas la nucléation ou la coalescence.

Modèles de nucléation

Les modèles de nucléation utilisant une approche micro-mécanique sont complexes à mettre en oeuvre car ils dépendent de la microstructure du matériau. Des modèles spécifiques sont introduits pour les inclusions ou les interfaces matrice / inclusion. Souvent, les inclusions sont considérées comme des matériaux élastiques fragiles, en comparaison avec les propriétés de la matrice. Si l’énergie élastique libérée est suffisamment importante et si la contrainte locale est supérieure à une valeur critique, la nucléation se produit. [Goods et Brown, 1979] ont montré que, si les inclusions sont suffisamment grosses, le seuil énergétique du critère est atteint. [Beremin, 1981] propose un modèle analytique simple pour évaluer le maximum de la contrainte principale dans l’inclusion comme une fonction de la déformation plastique équivalente et de la contrainte principale macroscopique, afin d’évaluer le critère de nucléation en contrainte.

Modèles de coalescence

Le modèle de Thomason [Thomason, 1968] décrit la coalescence par "internal necking". Son modèle est basé sur une analyse en chargement limite des ligaments entre les vides.

Des modèles comme [Brown et Embury, 1973] permettent quant à eux de modéliser la coalescence par void sheeting. La phase de coalescence est décrite comme la formation de bandes de cisaillement à 45° reliant deux pores, qui apparaît lorsqu’ils sont suffisamment proches (distance entre les pores de l’ordre de leur taille).

Des simulations multi-échelles peuvent aussi remplacer ce genre de modèle. Un volume appelé "unit cell" est représenté, dans lequel les pores et inclusions sont explicitement représentés. C’est donc la géométrie de la unit cell qui permet de prendre en compte les effets de porosité. Ce genre de simulation est aussi utilisé pour valider les modèles d’endommagement développés à l’échelle microscopique. Des simulations sur unit cell ont été utilisées par [Zhang et al., 2000] pour déterminer la valeur de la porosité au début de la coalescence. Cette valeur critique est ensuite injectée dans le paramètre fc du modèle de Gurson Tvergaard Needlemann (détaillé plus bas).

2.4.3.1.2 Modèles d’adoucissement volumique basés sur une étude micro-mécanique

L’objectif de ce genre de modèle est de se baser sur des calculs micro-mécaniques issus d’une homogénéisation en incluant phénoménologiquement les effets de l’endommagement souvent

inaccessibles par homogénéisation pour définir une formulation macroscopique.

Les modèles détaillés ci-après constituent une adaptation phénoménologique des modèles micro-mécaniques mais ne nécessitent pas de revenir à l’échelle microscopique pour calculer l’endommagement. [Besson, 2010] représente l’effet de la porosité sur l’écoulement plastique par une variable scalaire σ, la contrainte effective. Cette contrainte effective est fonction du tenseur (macroscopique) des contraintes, et éventuellement de la forme ou l’espacement des cavités. Cette contrainte effective prend en compte le fait que, dans un volume contenant des cavités, l’effort macroscopique appliqué sur une surface n’est repris que par la matière contenue dans cette surface. Plus la porosité augmente, moins il y a de matière pour transmettre l’effort à appliquer et donc σ est une fonction croissante de f.

La différence avec les modèles détaillés dans le paragraphe précédent réside justement dans le fait que ces modèles sont construits sur la contrainte effective incluant les effets de la porosité, contrairement au modèle de [Gurson, 1977], qui est construit à partir des contraintes σ.

La surface de charge plastique s’écrit alors :

Φ = σ− R (2.4.9)

avec R qui représente l’écrouissage isotrope de la matrice. Pour des matériaux plastiques, l’écoulement plastique doit satisfaire les conditions Φ = 0 et ˙Φ = 0. La règle de normalité

Dp = ˙λ∂Φ

∂σ est appliquée pour obtenir le tenseur des taux de déformation plastique à partir du multiplicateur plastique et de la surface de charge plastique Φ. On peut alors montrer que le taux de croissance des pores ˙fg est relié au taux de déformation plastique par :

˙fg = (1 − f) tr

Dp (2.4.10)

Cette équation traduit le fait que le changement de volume de la matière. Elle est identique à celle du modèle de Gurson. Partant d’une porosité initiale f(t0) = f0 éventuellement non nulle, l’évolution ˙f de la porosité est décomposée en un terme venant de la nucléation fn et un autre terme lié à la croissance des pores existants fg :

˙f = ˙fn+ ˙fg (2.4.11)

Ayant des modèles d’évolution respectivement pour fn et fg, l’évolution de la porosité globale est immédiate.

Modèles de nucléation

Les modèles de nucléation basés sur des considérations physiques sont encore peu utilisés. La prise en compte de ce phénomène se fait plutôt de manière statistique en considérant qu’une cavité (constituée de vide) apparaît pour une certaine population de défauts lorsqu’un certain critère est vérifié.

Une méthode possible pour prendre en compte la nucléation est de considérer que le phénomène de nucléation est contrôlé par la déformation plastique de la matrice µm. Un taux de nucléation des pores An donne la relation entre le taux de nucléation et la déformation plastique de la matrice (équation 2.4.12).

[Chu et Needleman, 1980] définissent le facteur An à l’aide d’une fonction gaussienne de la déformation plastique de la matrice. [Tvergaard, 1990] propose plutôt un taux de nucléation contrôlé par la contrainte. Dans le même genre d’idée, [Czarnota et al., 2008] considère une distribution de Weibull comme indicateur de la probabilité de nucléation pour une pression seuil donnée. Cette pression est appelée pression de cavitation.

Critères de plasticité adoucissante basés sur le modèle de Gurson

Se basant sur une approche micro-mécanique, de nombreux modèles s’inspirent sur les travaux de Gurson afin de rendre compte du couplage entre la croissance des pores et la plasticité. Parmi eux, [Tvergaard et Needleman, 1984] ont modifié l’expression de la surface de charge de Gurson. La porosité f est introduite afin de prendre en compte une accélération de l’évolution de la porosité lors de la phase de coalescence à partir d’une certaine porosité fc. Ce modèle est ensuite appelé modèle GTN (Gurson - Tvergaard - Needlemann).

Φ = σeq2 R2 + 2q1fcosh12q2σkk R 1 − q2 1f∗2 (2.4.13)

où q1 et q2 sont des paramètres du modèle qui servent à ajuster la dépendance de la contrainte d’écoulement à la porosité. f = f , pour f ≤ fc (2.4.14a) fc+ 1 q1 − fc ! f − fc fR− fc , pour f > fc (2.4.14b)

La rupture se produit pour f = 1/q1. A ce moment là, f = fR la porosité à la rupture, qui est un paramètre du modèle. Ici encore, la surface de charge plastique peut s’écrire en fonction de la pression plutôt que la trace du tenseur des contraintes.

Φ = σeq2 R2 + 2q1fcosh−3 2q2 p R 1 − q2 1f∗2 (2.4.15)

Pour reprendre le formalisme de [Besson, 2010], la contrainte effective σ est alors définie par l’équation implicite 2.4.16.

σ2 eq σ∗2 + 2q1fcosh−3 2q2 p σ 1 − q 1f2 = 0 (2.4.16)

Cette équation est résolue via un algorithme de type Newton Raphson travaillant sur σ pour une valeur donnée de f et σ.

Ce modèle a été largement utilisé mais présente certaines limitations. Une d’entre elle concerne la forme sphérique de la cavité. Il suppose en effet que les cavités restent sphériques au cours du temps. Cette hypothèse est forte pour des taux de triaxialité des contraintes faibles : une élongation des pores est en effet observée dans la direction maximale de traction. Elle est plus acceptable pour des taux de triaxialité importants, puisque les cavités restent davantage sphériques. [Gologanu et al., 1993] ont adapté le modèle GTN pour y inclure l’élongation de la cavité à travers un facteur de forme représentant le rapport des longueurs des axes principaux de l’ellipsoïde formé par la cavité déformée. Ce modèle est appelé GLD.

Par la suite, le modèle GTN a été modifié par [Longère et Dragon, 2013] pour prendre en compte la croissance de l’endommagement en cisaillement en ajoutant un terme pr dans l’équation2.4.13. De plus, le coefficient q2 est fixé à 1. La surface de charge plastique devient :

Φ = σ2eq R2 + 2q1fcosh−3 2 p+ pr