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CHAPITRE 2 : REVUE DE LA LITTÉRATURE

2.2 Les modèles théoriques expliquant les comportements en lien avec la santé

2.2.3 Les modèles écologiques du comportement

Les modèles de type écologique s’intéressent aux interactions entre les individus et leur environnement (Richard, Gauvin et Raine, 2011). Le concept central des modèles écologiques est que le comportement (son adoption ou son changement) est influencé par des variables à différents niveaux. Ceux-ci incluent souvent des niveaux individuels tels que la génétique, mais aussi des niveaux interpersonnels, environnementaux, organisationnels, etc. (Sallis, Owen et Fisher, 2008).

L’un des fondateurs du courant écologique, Bronfenbrenner, a ainsi mis l’accent sur la notion d’interdépendance entre différents systèmes dans lequel l’individu interagit. Comme le démontre la figure 6, chaque système s’emboîte en débutant par une échelle macro afin de culminer à une échelle micro, soit l’individu (Bronfenbrenner, 1979, 1986). Le macrosystème consiste en l’environnement de contexte. Nous retrouvons dans cette sphère les valeurs, la culture, le contexte politique, etc. Bien souvent, le macrosystème exerce une influence sur les individus sans qu’ils ne s’en aperçoivent, car il les conditionne depuis leur enfance. L’exosystème touche des domaines qui peuvent avoir des impacts directs sur les individus. Les politiques mises en œuvre, de même que les services de santé, d’éducation et les lois se retrouvent dans l’exosystème. Le mesosystème englobe différentes sphères que l’individu côtoie quotidiennement soit l’emploi effectué, la famille éloignée et le quartier. Finalement, dans le microsystème il y a les enfants ou les parents, les collègues de travail, les médias, etc. Ce sont des sphères qui ont un impact direct sur l’individu. L’individu se retrouve ainsi au centre de ces différentes sphères qui exercent leurs influences sur celui-ci à différentes intensités. L’approche écologique repose sur cette idée principale qu’en mettant en place des interventions tant au niveau individuel qu’environnemental, il serait possible d’apporter des changements majeurs dans les comportements de santé adoptés au sein d’une population (Sallis, Owen et Fisher, 2008).

Figure 6 : Les systèmes selon Bronfenbrenner (1979)

Source : É.Carrier adaptation de Bronfenbrenner (1979)

Le modèle structurel des comportements de santé proposé par Cohen et al. (2000) est un autre exemple de modèle écologique. Cohen et al. (2000) ont créé ce modèle car ils ont jugé que la plupart des interventions au niveau sanitaire visaient seulement les individus. De plus, Cohen et al. (2000) signalent que les modèles écologiques construits à ce jour n’avaient pas de méthodes concrètes et appliquées afin de les mettre en pratique. Leur modèle est composé de quatre facteurs interreliés: l’accessibilité au produit, les structures physiques, les structures sociales et les messages médiatiques et culturels. L’analyse de ces quatre facteurs permet de cibler les niveaux où les interventions auprès d’une population doivent être effectuées.

Figure 7 : Structures étudiées dans le modèle de Cohen et al. (2000)

Cohen et al. (2000) définissent l’accessibilité comme étant l’accès que les consommateurs ont à un produit et à sa distribution. Ils supposent que plus un consommateur a un accès facile, plus il a de probabilités de l’utiliser et donc, d’adopter le comportement qui y est relié. Les auteurs donnent comme exemple la réglementation pour la distribution des produits du tabac. L’accessibilité aux produits du tabac peut ainsi être contrôlée de deux façons. D’une part, pour qu’un individu ait accès à ces produits, celui-ci doit avoir l’âge légal pour se les procurer (législation en conséquence). D’autre part, le fait de dissimuler les produits du tabac de la vue des consommateurs est un moyen d’en réduire l’accessibilité (comme par exemple les politiques gouvernementales régissant la publicité concernant ces produits). La seconde dimension du modèle est constituée des structures physiques représentées par l’environnement bâti entourant les individus, qu’il favorise ou non l’adoption d’un comportement de santé. L’exemple d’un quartier favorisant la marche est repris dans l’article de Cohen et al. (2000) : la qualité et le design d’un quartier ou d’un tronçon de rue peuvent inciter positivement ou non une personne à marcher. Les structures sociales, quant à elles, sont représentées de façon générale par l’influence de nos pairs, qu’ils encouragent ou non le comportement ciblé. En reprenant l’exemple du tabagisme, les travaux ont démontré qu’un individu aura plus de chance de commencer à fumer si son entourage a un tel comportement. Les lois québécoises interdisant de fumer dans les lieux publics réfèrent aussi à ce facteur de structures sociales puisque l’individu y est moins exposé socialement. Enfin, les messages médiatiques et culturels regroupent toutes les stratégies de communication dirigées vers la population afin d’encourager ou de dissuader l’adoption de certains comportements. Selon les problèmes de santé qu’une population connaît, certains comportements seront favorisés tandis que d’autres s’avéreront proscrits par les autorités, via les médias, comme par exemple l’obligation du port de la ceinture de sécurité en voiture.

Ainsi, chacune des structures de leur modèle peut avoir une influence sur l’adoption ou non d’un comportement. Comme le présente la figure 8, deux issues sont possibles pour chaque « structure » faisant en sorte de faciliter ou non les choix que les individus peuvent faire. De façon générale, si l’environnement dans lequel vit un individu rend l’adoption d’un comportement spécifique plus difficile, les chances pour que cette personne choisisse tout de même de l’adopter sont réduites.

Figure 8 : Modèle structurel de Cohen et al. (2000)

Source : É. Carrier adapté de Cohen et al. (2000)

Notre recension des écrits ne nous a pas permis de trouver d’études analysant le don de sang à partir de modèles écologiques, bien que ce comportement ait une portée considérable en santé publique. Les comportements les plus fréquemment étudiés à partir de modèles écologiques sont le tabagisme, l’activité physique et les rapports sexuels à risques (Agence de santé publique du Canada, 2002). Considérant le manque d’études à partir d’approches autres qu’individuelles, nous proposons ici d’examiner le don de sang à partir d’un modèle de type écologique s’inspirant en partie de celui de Cohen et al. (2000). L’utilisation des quatre facteurs proposés dans le modèle structurel écologique de Cohen et al. (2000), nous permettra de dresser un meilleur portrait de la situation actuelle et ainsi, de mieux comprendre les variations comportementales d’un milieu à l’autre.