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CHAPITRE 2 : REVUE DE LA LITTÉRATURE

2.4 L’attachement au lieu

2.4.2 Le concept de l’attachement au lieu

Tout comme le lieu, la définition de «l’attachement au lieu» est sujette à plusieurs interprétations. À quels lieux les individus sont-ils attachés est une question qui revient souvent dans la littérature. En s’appuyant sur la définition de Lewicka (2011) qui fait du lieu un «emplacement significatif », il semblerait que certaines personnes soient attachées à un lieu soit

en raison d’aspects physiques (présence d’un paysage naturel) ou encore d’aspects sociaux (liens serrés avec le voisinage). Dans leur ouvrage, Altman et Low (1992) notent que les définitions de l’attachement au lieu comprennent généralement certaines similitudes telles qu’un sentiment d’attachement, un lieu, des acteurs, des relations sociales et un aspect temporel. Dans une revue de la littérature relatant les travaux récents sur l’attachement au lieu, Trentelman (2009), tente de mettre en lumière les dimensions de ce concept en fonction des intérêts des différentes disciplines qui l’ont étudié telles que la psychologie environnementale, la sociologie et la géographie humaine. Il est donc complexe de définir brièvement l’attachement qu’un individu éprouve pour un lieu puisque cette définition varie selon les disciplines et les types de lieux que l’on aborde. Trentelman note tout de même deux grandes dimensions : celle s’intéressant aux aspects biophysiques du lieu et celle des aspects socio-culturels.

2.4.2.1 L’attachement via les aspects biophysiques du lieu

Cette dimension de l’attachement lie les caractéristiques spécifiques d’un lieu ou d’un type de milieu et les individus par différents processus psychologiques et émotionnels. Les auteurs s’intéressant à la dimension biophysique des lieux voient davantage l’attachement au lieu à travers des modèles intégrant des sous-concepts tels que l’identité au lieu et la dépendance au lieu (Raymond, Brown et Weber, 2010). L’identité du lieu réfère aux dimensions individuelles telles que les sentiments à l’égard d’une construction physique spécifique (un quartier, une ville) créant une connexion symbolique définissant l’identité de chacun (Raymond, Brown et Weber, 2010). Cette idée a d’abord été élaborée par Proshansky (1978) qui affirme que l’identité individuelle est définie par la relation qu’un individu entretient avec son environnement physique immédiat. Pour Korpela (1989), l’environnement n’est pas seulement un médiateur dans la régulation de l’interaction sociale, mais aussi un moyen de créer et de maintenir son identité personnelle. Ainsi, en plus d’être une ressource pour satisfaire les besoins et les buts des individus, un lieu peut être vu comme une partie essentielle de l’individu et résulter d’un attachement émotionnel profond envers certains lieux spécifiques (Korpela, 1989). Le concept de dépendance au lieu, quant à lui, fait référence aux aspects fonctionnels d’un lieu. La forme d’attachement qui s’en dégage est liée au potentiel d’un lieu particulier pour satisfaire les besoins et les aspirations d’un individu et la façon par laquelle ce lieu comparativement aux autres y répond le mieux (par exemple pour des fins récréatives) (Stokols et Shaumaker, 1981).

Ainsi, le lieu répond adéquatement aux besoins de l’individu et il devient inconcevable pour celui-ci de vivre ailleurs.

2.4.2.2 L’attachement via les aspects socio-culturels du lieu

Les chercheurs s’intéressant aux aspects socio-culturels de l’attachement au lieu ont relevé que les individus peuvent s’attacher à des lieux spécifiques grâce à leurs caractéristiques sociales et culturelles. L’importance des relations sociales et de la communauté sur les individus est apparue et différents sous-concepts sont ressortis, comme par exemple, l’attachement communautaire (Raymond, Brown and Weber, 2010). Les études sur l’attachement communautaire ont démontré que l’attachement qu’éprouvent les individus à l’égard de leur lieu de résidence tend à être renforcé selon le nombre d’années de résidence d’un individu à cet endroit (Hummon, 1992). En effet, plus un individu réside longtemps au même endroit, plus celui-ci sera propice à développer des souvenirs, des liens sociaux et ainsi s’impliquer dans son milieu. L’étude d’Hummon (1992) démontre aussi que plus un lieu de résidence à une forte densité de population, moins les individus ont tendance à s’impliquer dans leur milieu et y sont ainsi moins attachés.

Les études sur l’attachement communautaire révèlent aussi que le sentiment est accentué lorsque les individus résident dans un milieu où il y a une homogénéité ethnique. L’étude de Grief (2009), qui compare des quartiers de Los Angeles en fonction de la présence de différents groupes ethniques, démontre une relation négative entre cette variable et le sentiment d’attachement des habitants. Dans cette étude de cas, les Hispaniques et les Noirs se sentiraient moins attachés à leurs quartiers que les Blancs et les Asiatiques. De plus, ce sentiment de «détachement» est plus fréquent chez les immigrants de nouvelles générations que chez les gens installés depuis plus longtemps (Grief, 2009). L’étude de Stolle et al. (2008) ayant eu lieu au Canada et aux États-Unis abonde dans le même sens : il existe une corrélation négative entre l’ethnicité d’un lieu (représenté par le taux d’immigrants de première génération) et le sentiment de confiance des habitants envers ce lieu. Ces constats ont aussi été faits en Australie dans l’étude de Leigh (2006), mais celui-ci tend à démontrer que ce sont davantage les diversités linguistiques qui réduisent le sentiment de confiance envers les autres habitants plutôt que leurs origines ethniques (Leigh, 2006). Par ailleurs, la littérature a recensé des résultats différents comme l’étude de Stolle et al. (2008) qui ont constaté que l’effet négatif à

l’égard du manque de confiance envers ses voisins se dissipe lorsque des relations sociales se créent entre eux (Stolle, Soroka et Johnston, 2008).

Plusieurs autres facteurs peuvent influencer l’attachement au lieu. Afin de les aborder rapidement, nous vous présenterons deux modèles conceptuels imbriquant les grandes dimensions du concept. Le premier, celui de Gustafson (2001), basé sur une étude empirique qualitative, relève différents thèmes qui sont ressortis des discours des entretiens effectués. Le second, celui Scannell et Gifford (2010), est basé sur une revue de la littérature.