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Un modèle théorique

Chapitre XI : Du statut des morts

A. Un modèle théorique

Lastructuresociale, surtoutsielleestfortementhiérarchisée,impliqueengénéraldescodes decomportementet desmodesd’expression –langage, arts–assez différents selonlacatégoriede populationàlaquelleons’intéresse. Enthéorie, cesdifférences sontaussimatériellesetdoncdéce -lables, archéologiquement parlant, grâce aux tracesplus ou moins évidentesqu’elles laissent dans l’architecture,lesnormesspatiales,laculturematérielle,etbiensûrlespratiquesfunéraires(Hendon 1991,894).Maisunefoisdeplus,ilfautalternerentredifférenteséchellespourqueceraisonnement soitpertinent:dansunesociété«stratiiée», pourreprendrel’imagedeGoldman(1955, 685-686), ilexiste desdifférences entreles strates, maisaussià l’intérieurdesgroupes quilesconstituent, ce qu’Hendonqualiiede«rangs».Ainsi,deuxfamillespeuventapparteniràlamêmestrate,maisles membresquilesconstituentontdesrangsdifférentsauseindel’entitéfamiliale.Unindividuestdonc soumisàplusieurshiérarchiesimbriquéesquipeuventrépondreàdescodesdifférents.Onpeutaussi imaginer,sil’onacceptele postulatdeHendon, quel’organisation etlescaractéristiquesphysiques d’uneunité résidentiellerelètentlesdifférences statutaires propresàson organisation internedela mêmemanièrequedeuxunités d’importancedifférentesrelètentleur inégalitéàl’échelledelaso -ciététoutentière.

Pourservir desupport àlarélexion, modélisons cesidéespar unschéma représentantl’or -ganisationdedeuxcitésAetB,enpartantduprincipequelastructuresocialepatrilinéairevirilocale proposée par Haviland est au moins en partie exacte (cf. chapitre I), que celle des strates et rangs utiliséeparHendonl’estégalement,etqu’unemaisonphysiquereprésenteunemaisonentantqu’ins -titutionsociale(InomataetHouston2001,1:10).LacitéAseral’exempleprincipal(Fig.XI.1).

Dans cettecité, il existe troisstrates numérotées de1 à 3.Al’exceptionde la premièrequi représente les élitesroyales, nous préférons nepas leur attribuer de titre ou de fonction :ce serait renforcerl’illusion, déjàsensible surlegraphique, d’une hiérarchieabsolumentrigide alorsquetel n’estsansdoutepaslecas.Ledegrédelibertécroîtsansdouteàmesurequel’ondescendlesstrates.

lonleprinciped’aînesse,saufpourlesélitesroyales,dontlefonctionnementestplusimmédiatement héréditaire.Qu’ilsoitbienclairquecedécoupageartiicielneprétendpasêtreunreletvéridique(ne serait-cequeparlerecoursaumodèleHaviland),etqu’ilesttrèsprobablequel’appartenanceàune stratenesoitmêmepasentièrementconscientedelapartdespersonnesconcernées.

C’estlamanièredontlesunitésdumodèles’exprimentetinteragissentquinousintéresseici.

Chacunepossède,enpremierlieu,unensembledecodesquiluisontpropres.Ilspeuventrésulterde l’éducationoude l’originedesgenss’ils nesontpasde lacité, parexemple. Cescodesinternes ne sontpas forcémentpartagéspar lesunités voisines: entermesde comportement, tellefamillepeut considéreruncomportementcommegrossier etpastelleautre. Dupointdevue descroyances,une piècepeutêtrerigoureusementprohibéepourl’inhumationenraison del’histoirefamiliale.Lahié -rarchieinterneréserverapeut-êtrel’usagedecertainsespacesauxaînés,etc…Cescodesnesontplus valablesen-dehorsdugroupefamilialetpeuventexpliquerunepartiedelavariabilitédespratiques funéraires.Ellescompliquentaussil’interprétationencréantdesdifférencesquinereposentpasfor -cémentsurlestatutdespersonnesmaissurdeshabitudesfamiliales,voiredesvelléitésindividuelles.

Maistoutesces unitésappartiennentconsciemmentounon àunemême strateetauronttrès probablementdescodescommuns:unemanièredes’exprimer,unecroyance,peut-êtreuneactivité.

Cescodescommunspourraientapparaîtreenfouille,àconditionquenoussoyonsenmesured’explo -rerplusieursunitésrésidentiellesdanschaquestrateetd’identiierdescomportementssemblablesen leursein.Onpeutimaginerunquartierrésidentieldanslequellacollectivitéinterditàquiconquede s’asseoiraupiedd’unsanctuaireoùunpersonnageimportantestinhumé.

Auneéchellesupérieureencore,ilexisteprobablementdescodesinter-strate.Eneffet,sil’on acceptel’idéed’unesociétéhiérarchisée(oumêmesimplementdiviséeparcorpsdemétier),onima -ginesanspeinequelamanièredesecomporteravecunmembred’unestratesupérieureouinférieure estdifférente:niveaudelangue,attitude.Maissurtout,ilpeutexisterdesinterditsspéciiques.Dans lespratiquesfunéraires,uneposition,uneorientationouunmatériauspéciiquepourraientêtreréser -vésàunestrateenparticulier.Nousavonsvudansleschapitreprécédentsqueraressontlesindices qui permettent de supposer l’existence de telles normes, mais celles-ci peuvent s’imposer d’elles-mêmes : spondyles et aiguillons de raie n’apparaissent pas dans les contextes les plus modestes.

Mêmelesfauxaiguillons,enos,nesetrouventquedansdessépulturesassezprestigieuses.Or,étant donné quele façonnage de tels objetsest sans doute assezfacile, iln’est pas excessif desupposer qu’ilsnefontpasaussiaisémentpartiedudiscoursfunérairedesstrateslesplusinférieures.

Fig.XI.1. Schéma résumant l’imbrication des codes propres aux différentes composantes d’une société maya théorique. Ces codes comprennent tendu les pratiques funéraires, et tous peuvent s’exercer à un degré ou à un autre sur le rituel, ce qui rend l’identii cation de statuts particuliers dif

situationest unpeu différente.Ellessont engagéesdans deséchangesà longuedistanceet dansun jeupolitique trèscomplexe. En tantqu’unité, la maisonroyaledispose sansdoute elleaussi deses propres codes. Mais elle est contrainte par des exigences diplomatiques et rituelles bien plus pré -gnantesquecellesducommunet,parconséquent,emploiedescodesnettementplusrigides,partagés par les élites de façon plus générale même s’il existe évidemment des variantes locales. Elles ont besoindecescodes communspourinteragiretremplirleursfonctions. Rienn’estplussemblableà unesépultureroyalequ’uneautresépultureroyale;la disposition,lanaturedumobiliersontprévi -sibles,etlaseulevarianteéventuellequantaucadavresera,àderaresexceptionsprès,lapositiondes membressupérieurs. Lesélitesmayas discourentsanscesse, danslavie commedansla mort,mais leursmoyensd’expressionsontforcémentsupérieursàceuxdesautresstrates.

Ilexistenéanmoinsdesbasescommunesquifontdelaculturemayauntoutcohérent,etc’est laraisonpourlaquellenouspensonsquelesfondementsdurituelfunérairesontlesmêmespourtoute lasociété(Goudiaby2016).C’estl’uniqueraisonpourlaquellelesélitespeuventêtreprises,dansune certainemesure,commeunebaseinterprétativepourlespratiquesfunérairesdefaçonplusgénérale– ycomprisencequiconcernelaquestion desancêtres,surlaquellenousreviendronsdansuninstant.

En-dehorsces similitudes, ceschémaa surtoutpour butde montrerla superpositiondesinluences qui s’exercent sur les contextes résidentiels, funéraires ou non. L’intensité de chaqueensemble de codes varie évidemmentd’un site à l’autre, comme nous l’avons vu précédemment(Fig. VIII.14).

Mais,pristousensemble,ilsrendentl’identiicationdestatutsdifférentielsassezdélicate.Ilfautdé -terminerapproximativementle statutdel’unité danssoncontexte local(richesserelative, activités, rangsocial),connaîtrelanormedominante,puisdéterminercommentellesepositionneparrapportà cettedernièreaindetriercequirelèvedevolontésindividuellesdesvéritablescodes, etdéterminer àquelleéchelleceux-cisontvalables.

B. Exemples