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𝐼 = 2𝜋𝑒 ℏ ∑ 𝑃,𝑆 (𝑓 (𝐸𝑃)− 𝑓(𝐸𝑆))∣ 𝑀𝑃 𝑆2𝛿(𝐸𝑃 − 𝐸𝑆+ 𝑒𝑉 ) (3.1) Où 𝑓(𝐸𝑃) et 𝑓 (𝐸𝑆) sont respectivement la distribution de Fermi-Dirac pour la pointe et la surface. Le problème est essentiellement ramené à déter-miner l’élément de matrice 𝑀𝑃 𝑆.

Bardeen exprime l’élement de matrice 𝑀𝑃 𝑆 =< 𝜓𝑃∣𝐻𝑇∣𝜓𝑆 > à l’aide d’un opérateur courant mélangeant les états Ψ𝑃 et Ψ𝑆. En considérant une surface S entre les deux électrodes, on obtient (equ. 3.2) :

𝑀𝑃 𝑆= 2 2𝑚 ∫ 𝑆 ⃗ 𝑑𝑆[𝜓𝑃∇𝜓 𝑆− 𝜓𝑆∇𝜓⃗ 𝑃 ] (3.2) Cette formulation a l’avantage de ne nécessiter que les expressions des fonctions d’ondes issues de chaque électrode dans la barrière tunnel. L’apport de Tersoff et Hamann consiste à les exprimer dans le cas de la géométrie propre au STM.

3.1.2 Le modèle de Tersoff et Hamann

.

Pour calculer la fonction d’onde évanescente issue de la pointe, Tersoff et Hamann [69] considèrent l’extrémité de la pointe comme un puit de potentiel sphérique centré en r0. La fonction d’onde est alors prise comme une onde évanescente issue de r0 (equ. 3.3).

𝜓𝑃 = 𝐴𝑃𝑒−𝜅

𝑃∣r−r0∣

∣r − r0(3.3)

Où 𝐴𝑃 est une constante de normalisation et 𝜅𝑃 = √

2𝑚𝑒[𝜙−𝐸𝑃]

ℏ2 est l’in-verse de la longueur d’atténuation de l’onde dans le vide, pour un électron d’énergie 𝐸𝑃, mesurée par rapport au niveau de Fermi, et 𝜙 le travail de sortie.

Il reste à exprimer l’onde évanescente issue de la surface. On suppose que l’axe de la jonction étant orienté selon z, la surface est donc parallèle au plan (𝑥, 𝑦) et le reste du cristal, semi infini, occupe la région 𝑧 < 0. La surface étant périodique dans ce plan, on peut donc appliquer le théorème de Bloch et décomposer la fonction d’onde pour 𝑧 = 0 sur les vecteurs du réseau réciproque de la surface. Cette onde de Bloch est pondérée par une composante exponentiellement décroissante dans le vide (equ. 3.4) :

𝜓𝑆= 𝜓k,E = 𝐺 𝐶k∥,G𝑒𝑖(k∥+G)x𝑒𝑥𝑝(−𝛼k+G𝑧) (3.4) avec 3.5 : 𝛼k∥+G= √ ∣ ⃗k∥ + ⃗G∣2+ 𝜅2 𝑆 (3.5)

Où k ∥ est la composante du vecteur d’onde parallèle à la surface, 𝐶k∥,G

sont les coefficients du développement en série de Fourier. 𝜅𝑆 est défini de façon similaire à 𝜅𝑃 : 𝜅𝑆 =

2𝑚𝑒[𝜙−𝐸𝑆]

ℏ2 . 𝛼𝑘est donc l’inverse de la longueur de décroissance de l’onde évanescente. Vu que l’on ne considère que de faibles tensions tunnel devant la hauteur de la barrière, il vient (equ. 3.6) :

𝜅𝑃 = 𝜅𝑆 =√ 2𝑚𝑒𝜙

2 (3.6)

En reportant ces deux expressions dans l’élement de matrice de Bardeen, on obtient (equ. 3.7) :

𝑀𝑃 𝑆=−2𝜋ℏ

2

𝑚 𝐴𝑃𝜓𝑆(r0) (3.7)

Et en réinjectant dans l’expression du courant tunnel, on obtient (equ. 3.8) : 𝐼 = 𝑒(2𝜋) 33 𝑚 ∑ 𝑃 𝑆 ∣𝐴𝑃2∣𝜓𝑆(r0)∣2𝛿(𝐸𝑃 − 𝐸𝐹 + 𝑒𝑉 )(𝑓 (𝐸𝑃)− 𝑓(𝐸𝑆)) (3.8) Le premier terme correspond, à une constante multiplicative près, à la densité d’états de la pointe au niveau de Fermi : 𝜌𝑃(𝐸𝐹). Le second terme correspond à la densité d’états locale de la surface à l’énergie 𝐸𝐹 évaluée

à la position r0 de la pointe. On obtient alors l’expression pour le courant

tunnel (equ. 3.9) : 𝐼 ∝

𝜌𝑃(𝐸 − 𝑒𝑉 )𝜌𝑆(r0, 𝐸)(𝑓 (𝐸− 𝑒𝑉 ) − 𝑓(𝐸))𝑑𝐸 (3.9) Dans cette dérivation, nous avons fait l’approximation que les energies mises en jeu etaient petites devant les échelles décrivant la structure de bande

du matériau, ce qui revient implicitement à formuler que la transparence de la barrière 𝑇 (𝐸, 𝑉, 𝑧), a priori fonction de E et de V, n’en dépend pas. De plus, sur des échelles de plusieurs eV, il est légitime de décrire le métal de la pointe comme un métal normal, avec une densité d’états parabolique, qui est approximée au voisinage de E𝐹 par une constante dans la gamme d’énergie sondée. Il vient donc (equ. 3.10 :

𝐼 ∝ ∫

𝜌𝑆(r0, 𝐸)(𝑓 (𝐸− 𝑒𝑉 ) − 𝑓(𝐸))𝑑𝐸 (3.10) D’où en dérivant par rapport à V (equ. 3.11) :

𝑑𝐼(𝑉 )

𝑑𝑉

+∞ −∞

𝜌𝑠(𝑟0, 𝐸𝐹)𝑔(𝐸− 𝑒𝑉 )𝑑𝐸 (3.11) où 𝑔(𝐸) est la dérivée de la fonction de Fermi-Dirac : 𝑔(𝐸) = ∂𝐸𝑓 (𝐸). Par analogie avec un développement de Sommerfeld, on montre que cette fonction est une courbe en cloche de largeur à mi-hauteur ∼ 4𝑘𝐵𝑇 . La conductance tunnel peut donc être vue comme la densité d’états locale de l’échantillon convoluée par une courbe en cloche de largeur ∼ 4𝑘𝐵𝑇 . Ainsi, la température finie limite la résolution énergétique, en spectroscopie tunnel avec une pointe en métal normal.

La sélection en k

La plupart des résultats STM sont interprétés comme la mesure de la den-sité d’états locale à la surface de l’échantillon. Néanmoins, la denden-sité d’états effectivement mesurée est celle à la position de la pointe, c’est à dire hors de la surface. Il faut donc préciser ce raccordement. On considère d’abord un échantillon ayant une surface de Fermi sphérique, comme celle d’un métal tridimensionnel simple. Du fait du coefficient d’atténuation 𝑒𝑥𝑝(−𝛼k+G𝑧), la probabilité de sonder les électrons d’états k ∼0 est la plus importante. Il en résulte donc une selection en k, et dans le cas d’un métal 3D, le STM sonde essentiellement les électrons ayant un vecteur d’onde normal à la sur-face. Dans ce cas, la densité d’états au point r0 devient (equ. 3.12) :

𝜌𝑆(r0, 𝐸) ∝ 𝑒𝑥𝑝(−2𝜅𝑧)

𝑆

𝑒𝑥𝑝(−𝑘2/𝛽2)𝛿(𝐸𝑆− 𝐸) (3.12) Ou 𝛽2 = 𝜅/2𝑧. Ce sont donc les vecteurs d’onde à l’intérieur d’un cône étroit, d’angle 𝛽 autour de la direction 𝑘 = 0 qui contribuent au courant tunnel. Ceci revient, dans un cone tunnel étroit, à ecrire (equ. 3.13) :

𝜌𝑆(r0, 𝐸) ∝ 𝑒𝑥𝑝(−2𝜅𝑧)( ∂𝑘 ∂𝐸𝑘

)

𝐸𝑘⊥=𝐸

où on a posé 𝐸𝑘= 𝐸𝑘,𝑘∥=0. Le terme ∂𝑘

∂𝐸𝑘⊥ correspond à une constante près à l’inverse de la vitesse de groupe dans la direction perpendiculaire à l’échantillon. Dans le cas d’une surface de Fermi isotrope,la densité d’états ne dépend pas de la direction et on a, à l’élargissement thermique près (equ. 3.14), en prenant toujours le niveau de Fermi comme réference pour les éner-gies :

𝑑𝐼/𝑑𝑉 ∝ 𝑒𝑥𝑝(−2𝜅𝑧)𝑁(𝑒𝑉 ) (3.14)

ce qui est l’approximation implicite couramment faite.

On peut alors considérer le cas d’un matériau qui possède une surface de Fermi composite, comme celle du supraconducteur à deux gaps MgB2, com-prenant simultanément des poches ‘quasi-sphériques’1, ainsi que des feuillets tubulaires. A altitude fixée, et donc à ouverture de cône tunnel fixé, ce sont les états correpondant à la poche sphérique qui vont contribuer majoritaire-ment au courant tunnel. Ainsi, la spectroscopie sur des échantillons de MgB2

orientés selon l’axe 𝑐 montrait essentiellement le petit gap, correspondant aux liaisons 𝜎 du bore [70]. Pour pouvoir ‘intercepter’ les feuillets tubulaires, il est nécessaire d’augmenter l’ouverture du cône tunnel et donc de diminuer la distance pointe-surface ou de changer d’orientation.

Le lien avec la fonction spectrale

Cette présentation intuitive de l’effet tunnel peut être reformulée pour introduire la notion de fonction spectrale, qui correspond à la partie ima-ginaire de la fonction de Green à une particule 𝐺(𝑘, 𝜔). Cette grandeur est accessible directement dans les mesures de photoémission.

Dans une expérience de photoémission, des photons énergétiques sont en-voyés sur le matériau, et des électrons profonds sont arrachés. Ces électrons se propagent dans le matériau et intéragissent avec l’ensemble des autres élec-trons et sont récoltés sur un detecteur. En considérant le cas où un électron est arraché, l’état final du système, initialement à N particules, est mainte-nant décrit par l’hamiltonien à N-1 particules. Ainsi reformulée, la règle d’or de Fermi permet de calculer le moment de transition entre l’état à N et à N-1 particules comme2

[71] (equ. 3.15) : 𝐴(𝑘, 𝜔) =

𝑗

∣ < 𝜓0∣𝑐𝑘∣𝑗 > ∣2𝛿(𝜔− 𝜔𝑗) (3.15)

1. Cette poche a en fait une topologie bien plus complexe, comme illustré sur la figure (3.11). On la considère comme ‘localement quasi-sphérique’, ce qui explique les guillemets employés par la suite

Où les kets ∣𝑗 > correspondent aux états propres de l’hamiltonien à N-1 particules, et 𝜔𝑗 correpond à 𝜔𝑗 = 𝐸𝑗𝑁 −1+ 𝐸0𝑁 − 𝜇 ce qui correspond à la définition de la fonction spectrale retardée 𝐴(𝑘, 𝜔). La densité d’états est en fait à l’intégrale sur 𝑘 de la fonction spectrale (equ. 3.16).

𝜌(𝜔) = ∫

𝑘

𝐴(𝑘, 𝜔)𝑑𝑘 (3.16)

Le problème serait similaire pour sonder des états vides, ce qui corres-pond à ajouter des électrons au système et donc à introduire le spectre de l’hamiltonien à N+1 particules, pour aboutir à la fonction spectrale avancée 𝐴+(𝑘, 𝜔). Néanmoins, l’ajout d’une particule est expérimentalement difficile dans une experience de photoémission3, tandis qu’il suffit dans une expé-rience STM de simplement appliquer une tension positive à la pointe.

Du fait des problèmes de selectivité en 𝑘 la comparaison entre ces deux spectroscopies n’est pas directe, sauf dans le cas d’une surface de Fermi quasi-sphérique. Ainsi, il est difficile de tenir compte dans le STM des effets angulaires, ceux ci sont acessibles dans une expérience de photoémission ré-solue en angle. Néanmoins, la photoémission reste une mesure intégrale qui sonde une surface macroscopique et ne peut sonder que les états pleins. Le STM/STS est lui une mesure locale, qui peut sonder à la fois les états vides et pleins.