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2.2 Etude des instabilités Raman

2.2.4 Modèle temporel simple

Pour expliquer le comportement du Raman avant4 dans le cas des impul-

sions longues (τc > 1 ps), j’ai développé un modèle purement temporel [Faure

et al. 2001] dans lequel on néglige les effets liés à la propagation du laser. Le champ laser incident est décrit par l’équation 2.4 que nous rappelons :

Einc(t) = E0exp h − 2 ln 2t τc 2 + i(ω0t + bt2) i

L’onde plasma excitée par le Raman avant a une croissance purement tem- porelle, donnée par le taux de croissance non relativiste à 4 ondes : γ0(t) =

a0(t)ωp2/(

8ω0). L’onde plasma peut également être amortie par l’instabilité

modulationnelle dans le régime supersonique [Zakharov 1972, Mora et al.

1988, Amiranoff et al. 1992]. Le taux de croissance de cette instabilité est :

(2.11) α0(t) = ωpi √ 6 c vth δ(t)

où vthest la vitesse thermique des électrons et δ l’amplitude de l’onde plasma.

4Le Raman de côté à 30a un comportement complètement similaire a celui du Raman

Pour prédire l’évolution de l’onde plasma, on utilise une équation d’enve- loppe heuristique :

(2.12) ∂

∂tδ = γ0(t)δ − α0(t, δ)δ

Le premier terme de droite représente donc la croissance de l’onde plasma due au Raman avant ; le deuxième terme est un terme phénoménologique qui simule l’amortissement de l’onde plasma sur les ondes ioniques avec un taux de croissance qui dépend de l’amplitude de l’onde et donc du temps.

Comme nous l’avons vu plus haut, on fait l’hypothèse que la longueur d’interaction est la longueur de Rayleigh car nous sommes dans un cas où il n’y a pas d’autofocalisation. On peut alors écrire le champ électrique sortant, après interaction :

(2.13) Esort(t) = Einc(t) exp (iφ(t))

où φ représente la phase accumulée par l’impulsion laser au cours de sa traversée dans la zone d’interaction :

(2.14) φ(t) = πδ(t)ωp ω0

zR

λp

sin(ωpt)

En réalisant la transformée de Fourier de Eout(t), on peut alors calculer le

spectre de l’impulsion après interaction.

Ce modèle n’est valable que sous les hypothèses suivantes :

– Il n’y a pas d’autofocalisation ; la longueur d’interaction est la longueur de Rayleigh : L = zR.

– On néglige les effets spatio-temporels : cτc  zR.

– Le taux de l’instabilité Raman est non relativiste : a0  1.

– L’instabilité est dans son régime linéaire : δ  1.

– L’instabilité doit être suffisamment faible pour ne pas modifier sévère- ment l’impulsion pompe : γ0/ωp  1.

Toutes ces conditions sont vérifiées pour les données que nous sommes en train de considérer, et ce modèle peut raisonnablement être appliqué. La figure2.15 représente le résultat d’un calcul de spectre Raman avant pour les mêmes paramètres que ceux de la figure 2.11. Les spectres calculés sont en très bon accord avec les spectres expérimentaux : les positions des satellites sont reproduites à 2 nm près. De même, le rapport de l’amplitude de la raie laser aux satellites est de 2.5 − 4 × 10−2 expérimentalement, et le calcul donne 3.5 × 10−2. Pour le calcul, la perturbation de densité initiale est prise égale à l’expression 1.42 : δn0 = 0.9πa20/(τcωp)2.8. Notons que le seul paramètre

10-1 100 -1.5 -1 -0.5 0 0.5 1 1.5 intensit (u. a.) (ω−ω 0)/ωp ω- ω+ ωp ωp ωp ωp ωt

Fig. 2.15 – Spectres Raman simulés. Les paramètres sont les mêmes que

ceux de la figure 2.11 : ne = 3 × 1018cm−3, avec une impulsion τc = 4.2 ps et

I = 1.2 × 1017W.cm−2. Pour le calcul, on a supposé Te= 200 eV. Trait plein

(pointillé) : chirp positif (négatif).

libre du calcul est la température électronique Te = mevth2 . Ce paramètre

(non mesuré dans l’expérience) a un impact sur le taux d’amortissement de l’onde plasma. Sur la figure 2.16, nous montrons cependant que la position des satellites Raman n’est pas grandement influencée par la température. En effet, en variant la température de 50 eV à 1 keV, les satellites Raman ne se déplacent que de 4 nm (soit 4 × 10−2 en unité de (ω − ω0)/ωp).

Finalement, sur la figure 2.17, on présente une comparaison théorie ex- périence des temps de maximum de diffusion pour le Raman avant. Lorsque l’amortissement par l’instabilité modulationnelle n’est pas pris en compte (lo- sanges noirs), on constate que le modèle ne reproduit pas bien l’expérience. Cela signifie que si l’onde plasma n’était pas amortie, elle continuerait d’être amplifiée tout le long de l’impulsion et la diffusion serait maximale en fin d’impulsion. Par contre, lorsque l’instabilité modulationnelle est utilisée dans le modèle (triangles noirs), on observe un très bon accord avec l’expérience. La croissance des ondes ioniques a le temps de se développer lorsque l’im- pulsion est assez longue (τc > ω−1pi ). Le modèle montre alors que les ondes

plasma électroniques saturent à des amplitudes δ < 5%. Sur la figure 2.18, on a tracé l’évolution de l’onde plasma. L’amortissement devient important dès que l’amplitude de l’onde plasma atteint 1%. Lorsque l’on ne prend pas en compte l’amortissement par l’instabilité modulationnelle, l’onde plasma

700 705 710 715 720 725 730 735 -8 -6 -4 -2 0 2 4 6 8 T e=50 eV T e=200 eV T e=1 keV λ - (nm) τc(ps)

Fig. 2.16 – Calcul de la position du satellite anti-Stokes en faisant l’hypothèse

de différentes températures électroniques.

-0.5

0

0.5

1

1.5

-8

-6

-4

-2

0

2

4

6

8

t/τ

c

τ

c

(ps)

chirp n gatif chirp positif

I (W/cm

2

)

8 1016 1.2 1017 2 1017 2 1017 1.2 1017 8 1016

Fig. 2.17 – Comparaison des temps de diffusion maximale. Carrés blancs :

expérience ; triangles noirs : modèle avec amortissement par l’instabilité mo- dulationnelle ; losanges noirs : modèle sans amortissement.

10-10 10-8 10-6 10-4 10-2 100 102 -10 -5 0 5 10 δ n/n t (ps)

Fig. 2.18 – Illustration de la saturation de l’onde plasma par l’instabilité

modulationnelle dans un plasma de ne = 3 × 1019, avec une impulsion de

4.2 ps et I = 1.2 × 1017W.cm−2. Trait pointillé : profil de l’impulsion ; trait discontinu : évolution de l’onde plasma sans amortissement (croissance en

exp Γ(t)) ; trait continu : évolution de l’onde plasma avec amortissement.

L’amplitude sature à δ = 5%.

croît comme exp Γ(t), avec :

(2.15) Γ(t) = Z t −∞ γ0(t)dt ∝ √ τc  1 + erf(t/τc √ 2 ln 2)

On voit donc que pour une valeur de t/τc donnée, l’onde plasma atteint

une amplitude plus importante pour une impulsion longue (Γ ∝ √τc). Cela

explique que pour une impulsion longue, l’amortissement par l’instabilité mo- dulationnelle ait lieu plus tôt que pour une impulsion courte. Par conséquent, on comprend maintenant le fait que le temps de diffusion ait lieu plus tôt lorsque les impulsions sont longues (voir les points à τc = 7 ps sur les figures 2.11 et 2.14). On peut expliquer le comportement de la figure 2.14 avec les mêmes arguments : lorsque la densité augmente, le Raman de côté croît plus vite et est donc amorti plus tôt. Ceci, corrélé avec le fait qu’à haute densité ωpiest plus grand, fait que l’amortissement des ondes plasma se fait d’autant

plus tôt que la densité est élevée. Remarquons que dans le cas haute densité (ne = 6 × 1019cm−3), l’amortissement a lieu très tôt quand la durée d’im-

pulsion est τc = 7 ps . Ce cas n’est pas facile à interpréter, car comme nous

le verrons au chapitre suivant, des électrons relativistes ont été mesurés lors de ces tirs. Le piégeage de particules peut également contribuer à l’amortis- sement de l’onde par effet Landau, ce dont on ne tient pas compte dans le modèle actuel.