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2. Description du processus de compréhension de l’oral

2.1. Le modèle sémasiologique

Ce modèle décrit la compréhension de l’oral comme un processus à quatre étapes dont les deux premières constituent ce que l’on appelle la discrimination c’est-à- dire la compréhension au niveau formel et les deux dernières s’intéressent à la compréhension au niveau conceptuel, ce qui est appelé l’appréhension. D’abord, l’auditeur isole la chaîne phonique du message et identifie les sons. Puis, il délimite les mots, les groupes de mots, les phrases que représentent ces sons. Ensuite, il attribue un sens à ces mots. Et enfin, il construit une signification globale du message.

Selon Henri HOLEC, chacune de ces étapes présuppose celle qui la précède et exerce sur elle une influence en retour1. Il décrit les processus qui se déroulent au cours de chaque étape comme suit :

a)La perception :

Durant cette étape, les signaux perçus sont analysés en bruits non pertinents et signaux informatifs. Ces derniers sont les seuls retenus par l’auditeur. Parmi eux, les signaux linguistiques qui se représentent sous forme d’un continuum phonique. Ils sont perçus comme une succession d’unités distinctives dont l’unité minimale est la syllabe car certaines expériences de phonétique acoustique montrent que les consonnes sont reconnues autant à partir de leurs caractéristiques propres qu’à partir des « déformations » qu’elles entraînent sur les caractéristiques des voyelles qui les suivent.

b)La segmentation

C’est l’étape durant laquelle le continuum phonique est découpé en segments formels successifs correspondant aux unités significatives (mots ou groupes de mots). A la fin de cette opération, l’auditeur arrive à structurer les signaux informatifs en signes formels pertinents et à retrouver leurs organisations syntaxiques.

c)L’interprétation

Les unités significatives relevées dans l’étape précédente sont interprétées. C’est durant cette étape que l’aspect sémantique du lexique, de la morphosyntaxe, de la phonétique et de la ponctuation est appréhendé.

1 HOLEC, H, (1970). « Compréhension orale en langue étrangère », in Mélanges Pédagogiques CRAPEL.

1970 [En ligne]. URL : ˂http://www.revues.univ-nancy2.fr/melangesCrapel/IMG/pdf/holec.pdf˃, consulté le 05 février 2010. p 3

d)La relativisation

C’est la dernière étape de la compréhension pendant laquelle l’auditeur fait des opérations de relativisation. Parmi elles, la synthèse de données en termes grammaticaux, passage au niveau du groupe, de la proposition et de la phrase. Il met des relations avec le contexte, avec l’expérience personnelle. De même, il établit des relations entre les différents signaux c’est-à-dire entre le signal linguistique et non linguistique. Et à la fin, il hiérarchise les informations reçues selon leur degré d’importance. C’est au terme de cette opération que l’objectif de la compréhension orale est atteint.

Ce modèle donne la priorité à la perception des signifiants du message. En effet, tout signifiant non discriminé et segmenté échappe à l’interprétation et laisse un vide de sens ; et tout signifiant mal segmenté conduit à un contresens. Cela veut dire que l’auditeur qui se trouve incapable d’identifier différents sons et de segmenter les énoncés oraux d’un message n’arrive pas à en décoder le sens.

En outre, ce modèle de réception orale présente une conception linéaire du processus de compréhension orale c’est-à-dire la construction du sens d’un message sonore se réalise en sens unique, du texte à l’auditeur d’où l’appellation bas-haut. L’auditeur reçoit au fur et à mesure le contenu du message sonore. Cela montre clairement que l’apprenant-auditeur est un acteur actif dans le processus de compréhension. Son rôle, lors de la phase de discrimination et de segmentation, ne se délimite pas dans l’enregistrement des formes sonores mais plutôt dans la reconnaissance de ces formes. Et dans la phase d’interprétation, c’est lui qui attribue un sens aux formes sonores.

De plus, il est nécessaire de rappeler que le système auditif conserve très peu de temps pour recevoir l’information1

car le processus d’écoute passe par le repérage de l’information, l’analyse et le traitement de cette dernière et enfin son stockage. Ce qui implique l’intervention de la mémoire de l’auditeur qui se trouve face à deux types de compréhension : analytique et synthétique. La démarche analytique fait appel à la mémoire à court terme parce qu’il s’agit d’identifier par exemple un son, de repérer un mot. La démarche synthétique fait appel à une opération mentale plus complexe concerne surtout la synthèse des résultats recherchés. Et par la suite, l’auditeur arrive à la phase d’appropriation des informations notamment celles qui seront mémorisées et stockées dans la mémoire à long terme.

En revanche, l’analyse du processus de compréhension orale faite par Henri HOLEC et Marie-José GREMMO s’appuient surtout sur les recherches précédentes des psycholinguistes2 qui ont montré les limites de ce modèle notamment celles de Ronald MILER et Walter ISARD (1963) qui affirment que la perception des mots est plus basse lorsque l’énoncé est grammaticalement incorrect et sémantiquement ininterprétable. Quant aux Irwin POLLACK et James PICKETT (1964), ils soulignent que les mots qui composent un discours spontané ne sont pas perçus ni comme mal prononcés ni comme déformés à cause du bruit qui accompagne la parole. Et en ce qui concerne WARREN (1970), il montre que l’auditeur se trouve incapable de remarquer les élisions lorsque les sons d’un énoncé sont remplacés par un bruit.

En fait, Henri HOLEC montre clairement les insuffisances du modèle sémasiologique qui décrit la compréhension orale comme étant une activité envisagée en elle-même en dehors de la situation de communication dans laquelle elle s’effectue.

1

DOMINGOS, C. « En route pour la compréhension orale », in Synergies Canada. N °1. 2009, [En ligne]. URL : ˂http://www.synergies.lib.uoguelph.ca/article/viewPDFInterstitial/954/1563˃, consulté le 06 février 2010. p 2

2 GREMMO, M-J ; HOLEC, H. « La compréhension orale : un processus et un comportement », in Le

Français dans le Monde, Recherches et Applications. N° spécial Fév/Mars. 1990, [En ligne]. URL :

Il souligne que l’auditeur ne pourrait pas dégager les signaux informatifs du bruit. De plus, la relativisation implique la mise en jeu des aptitudes intellectuelles et psychologiques comme l’attention et la mémoire et sont toutes liées à l’intérêt ainsi que la capacité de déduction, d’induction et de classification. D’où la nécessité d’établir un autre modèle de compréhension orale plus performant.