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Chapitre II PERTES PAR BARBOTAGE

II.4 Développement d’un modèle

II.4.2 Modèle [57] [58]

Le paragraphe précédent montre la nécessité de développer un modèle présentant une approche différente. En effet, les modèles de viscosité et de masse volumique prenant en compte l’aération ne permettent pas de traduire les augmentations de pertes par barbotage qui sont mesurées.

Le mélange air-huile constitue un milieu diphasique dans lequel est partiellement immergé le pignon. Aussi ce milieu diphasique est constitué d’un grand nombre de très fines bulles d’air en suspension dans l’huile. L’approche développée ci-dessous s’appuie donc sur l’interaction entre le pignon et les nombreuses bulles qui se trouvent dans le bain d’huile. Plus particulièrement, le pignon, en tournant dans le bain d’huile aérée, va briser certaines bulles d’air qui se trouvent à proximité de la denture. La taille et la forme de ces bulles sont conditionnées par la tension de surface 𝜎 [59]. Ce paramètre ayant la dimension d’une énergie par unité de surface, l’énergie d’interface de chaque bulle pourra être calculée. L’idée générale de ce modèle est donc de considérer que la rotation du pignon dans le bain d’huile aérée va entraîner l’éclatement d’un certain nombre de bulles se trouvant à proximité de la denture. Les bulles ayant une énergie d’interface, leur éclatement par le pignon réclame une énergie égale à leur énergie d’interface. Une formulation en puissance sera donc développée à partir de cette hypothèse.

L’aération de l’huile est constituée de très fines bulles qui seront considérées ici comme sphériques et de rayon 𝑅𝑏. Si on considère maintenant une bulle en particulier, son éclatement donnera naissance à n bulles de rayon 𝑅𝑏𝑖. Lors de l’éclatement de cette bulle, il y a conservation de la masse ; en considérant que la pression et la température restent constantes, le volume est également conservé, la relation suivante entre le rayon 𝑅𝑏 et les rayons 𝑅𝑏𝑖 pourra donc être écrite :

𝑅𝑏3= � 𝑅𝑏𝑖3

𝑛 𝑖=1

(II-14) À partir de l’équation (II-14), il est possible d’écrire l’accroissement de surface qui s’opère lors de l’éclatement de la bulle de rayon 𝑅𝑏 en n bulles de rayon 𝑅𝑏𝑖. Ainsi, l’accroissement de l’interface air/huile ∆𝑆 s’exprime :

Δ𝑆 = 4𝜋 �� 𝑅𝑏𝑖2 − 𝑅𝑏2 𝑛

𝑖=1

À partir de l’équation (II-14), le rayon moyen des bulles ainsi créées 𝑅𝑏 peut être exprimé en fonction du rayon 𝑅𝑏 initial et du nombre de bulles :

𝑅𝑏 = 𝑅𝑏 √𝑛

3 (II-16)

Si l’hypothèse est prise que les rayons 𝑅𝑏𝑖 sont répartis autour de la valeur moyenne 𝑅𝑏, alors on peut écrire la relation (II-17) :

𝑅𝑏𝑖 = 𝑅𝑏(1 + 𝜑𝑖) = 𝑅𝑏 √𝑛

3 (1 + 𝜑𝑖) (II-17)

où 𝜑𝑖 représente un écart à la moyenne. En injectant l’équation (II-17) dans la formulation (II-15), l’accroissement d’interface ∆𝑆 en fonction du rayon de bulle initial 𝑅𝑏 et du nombre de bulles n s’exprime par la relation :

Δ𝑆 = 4𝜋𝑅𝑏2�𝑛−2/3�(1 + 𝜑𝑖)2− 1

𝑛 𝑖=1

� (II-18)

À partir de cet accroissement d’interface et de la tension de surface 𝜎 [59], l’accroissement d’énergie [60] qui s’opère lors de l’éclatement d’une bulle de rayon 𝑅𝑏 en n bulles s’exprime facilement de la façon suivante :

Δ𝐸 = 4𝜋𝜎𝑅𝑏2�𝑛−2/3�(1 + 𝜑𝑖)2− 1

𝑛 𝑖=1

� (II-19)

L’accroissement d’énergie ∆𝐸 lors de l’éclatement d’une bulle est maintenant connu. Il convient alors de définir combien de bulles sont concernées par l’éclatement provoqué par la denture.

Pour cela, le nombre de bulles sera défini au moyen d’un rapport entre un volume d’air 𝑉𝑏 et le rayon des bulles 𝑅𝑏. :

Nb= 3𝑉𝑏

4𝜋𝑅𝑏3 (II-20)

À partir de l’aération du bain d’huile, l’idée consiste ensuite à relier le volume d’air 𝑉𝑏 à un volume d’huile de référence, 𝑉𝑝𝑖𝑔. Ce volume 𝑉𝑝𝑖𝑔 est choisi ici comme étant le volume immergé du pignon. On peut alors écrire le nombre de bulles sous la forme :

Nb = 𝛼1𝑉𝑝𝑖𝑔 𝑅𝑏3

𝐴 − 𝐴0

100 𝐻(𝐴 − 𝐴0) (II-21)

où A est l’aération de l’huile et A0 représente une valeur d’aération à partir de laquelle l’aération génère des pertes non prises en compte dans les modèles (équation (II-8)). Enfin 𝐻(𝐴 − 𝐴0) représente la fonction de Heaviside qui vaut 1 pour A> A0 et 0 sinon.

La Figure II-14 illustre la nécessité de prendre en compte le paramètre 𝐴0. Les résultats présentés ci-dessus montrent qu’en deçà de la valeur A0, le modèle de perte par barbotage retranscrit parfaitement les pertes mesurées bien qu’une aération soit présente dans le lubrifiant. Cette constatation justifie l’emploi de la fonction de Heaviside.

Figure II-14 Mis en évidence du paramètre A0 (pignon n°1, huile n°1, N=6000 tr/mn, h/R=0,5)

Le nombre de bulles impliquées dans l’interaction avec la denture étant maintenant connu, l’énergie dissipée au cours de 𝑁𝑐 cycles peut s’écrire de la façon suivante :

𝐸 = 𝑁𝑐𝑁𝑏𝛥𝐸 (II-22)

Dans le cadre de l’étude des pertes par barbotage, la période de référence peut être choisie comme la période de rotation de rotation du pignon 2𝜋/Ω. Ainsi, la seule période ayant un sens physique ici s’écrira sous la forme 𝛼2/Ω. Exprimée en fréquence, on peut écrire la relation suivante entre le nombre de cycles et la vitesse de rotation :

𝑑𝑁𝑐 𝑑𝑡 =

1

𝛼2Ω (II-23)

Finalement, en combinant les formules (II-21), (II-22) et (II-23), les pertes supplémentaires générées par la présence d’air sous forme de très fines bulles dans le bain d’huile peuvent s’exprimer comme suit :

𝑃𝑎𝑒𝑟𝑎=𝑑𝑁𝑑𝑡 𝑁𝑐 𝑏Δ𝐸 = 𝛼3𝜎𝑉𝑅𝑝𝑖𝑔

𝑏

𝐴 − 𝐴0

100 Ω𝐻(𝐴 − 𝐴0) (II-24)

Le coefficient de proportionnalité 𝛼 est déterminé au moyen d’un essai de référence correspondant aux conditions présentées à la Figure II-14. Le coefficient 𝛼3 est alors choisi afin d’obtenir la meilleure corrélation possible entre les pertes mesurées et la formulation (II-24) sur la plage de température pour laquelle l’aération est supérieure à la valeur 𝐴0= 8 %, soit une plage de température allant de 50 °C à 110 °C. La valeur retenue pour ce coefficient est de 31. En outre si le modèle traduit justement l’influence de l’ensemble des paramètres, la formulation (II-24) agrémentée du coefficient 𝛼3= 31 doit pouvoir s’appliquer à d’autres conditions opératoires, tant en termes de géométrie de pignons que de fluides.

0 5 10 15 20 25 0 100 200 300 400 500 600 700 800 900 1000 10 30 50 70 90 110 Aér at io n ( %) Pe rte s p ar b ar bo ta ge (W) Température d'huile (°C) Pertes mesurées Pertes calculées

Aération de l'huile

On peut alors écrire le modèle de pertes par barbotage prenant en compte l’aération au moyen des équations (II-8) et (II-24) :

𝑃𝑏𝑎𝑟𝑏𝑜 =12 . 𝜌. Ω3. 𝑆𝑚. 𝑅𝑝3. 𝐶𝑚𝑖+ 𝛼𝜎𝑉𝑅𝑝𝑖𝑔

𝑏

𝐴 − 𝐴0

100 Ω𝐻(𝐴 − 𝐴0) (II-25)

Le développement de ce modèle aboutit à une formulation nécessitant la connaissance, soit par des moyens expérimentaux, soit par calculs, d’un certain nombre de paramètres comme l’aération, le paramètre A0, ou encore le rayon moyen des bulles 𝑅𝑏.