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Le modèle d'accord manza

D. Bawassan explique avec des gestes que les lames sont trop proches les unes des autres;

2.3.3. Le modèle d'accord manza

La grandeur des intervalles constitutifs du système d'accord manza a été vérifiée, et les deux premières règles du modèle d'accord manza ont été validées. Malgré la faible distance qui sépare les trois intervalles constitutifs, leur opposition est attestée par l'indétermination des réponses lorsqu'une valeur donnée se situe exactement entre deux intervalles constitutifs, du fait de leur marge de réalisation. Les deux premières règles du modèles sont validées.

1 Nous avons en effet pu observer que d'autres musiciens, même non xylophonistes, recourent au

La troisième règle nécessite d'être modifiée, puisque la limite supérieure de l'ambitus est inférieure à 960 cents, sauf dans le cas de l'accord équipentatonique qui en est la seule exception. Nous avons aussi pu déterminer que c'est la prégnance conceptuelle de la structure équidistante qui en est l'origine.

On comprend mieux maintenant l'importance donnée à l'ambitus dans le jugement des musiciens, en même temps que la disposition particulière des lames du xylophone manza (cf. Introduction : Les xylophones centrafricains) : la seule vérification de la grandeur de l'ambitus permet aux musiciens de savoir si la grandeur et le nombre des intervalles constitutifs est respectée. Fonction qu'on mettra en relation avec la position contiguë des deux lames permettant de faire entendre l'ambitus lorsqu'on joue les lames conjointement lors d'un jugement de conformité. Il s'agît donc d'une règle ayant trait directement aux modalités de réalisation du système que transcende le concept d'équidistance (d'où l'exception de l'accord équipentatonique). La limite supérieure sera fixée à 940 cents en tenant compte des marges de réalisation possibles des trois intervalles constitutifs.

Les règles n°4, 5 et 6 ont été infirmées dans la plus grande partie de leur énonciation. L'un des intervalles des trois constitutifs peut ne pas réalisé, ou être réalisé autant de fois que possible si la grandeur de l'ambitus soit respectée. Il n'y a donc aucune contrainte de plus que celle de l'ambitus quant au de nombre de fois que doit être réalisé chaque intervalle constitutif. La règle n°3 relève donc plus des modalités de réalisation des intervalles constitutifs que de leur grandeur.

Il existe trois contraintes quant aux modalités de combinaison des intervalles constitutifs, et concernent toujours l'intervalle de 280 cents. Celui-ci ne peut en effet être situé entre les deux lames les plus aiguës du xylophone d'une part, ne peut pas succéder ni précéder un intervalle de 240 cents lorsqu'il est entre les deuxième et troisième lames ("époux" et "fils").

Nous énoncerons les règles du modèles comme suit :

Deux règles définissent la grandeur des intervalles constitutifs de l'accord manza :

1) le système d'accord du xylophone manza est fondé sur une combinatoire de trois grandeurs minimales d'intervalles de 200, 240 et 280 cents;

2) la marge de réalisation des intervalles constitutifs est de l'ordre de ±15 cents; Seul l'ambitus restreint le nombre de réalisations de chacun des intervalles constitutifs :

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3) l'ambitus de xylophone ne peut être inférieur à 900 cents, ni dépasser 940 cents. Il limite le plus grand nombre des combinaisons possibles et admet une exception dans le cas de l'accord équipentatonique, dont la structure équidistante est plus prégnante que celle de l'ambitus.

Il existe deux règles de combinaisons des intervalles :

4) l'intervalle de 280 cents ne peut être situé entre les deux lames les plus aiguës du xylophone;

5) l'intervalle de 280 cents ne peut succéder ni précéder un intervalle de 240 cents lorsqu'il est entre "l'époux" et le "fils".

On remarquera que ces deux dernières règles ont en commun de ne pas créer de trop grands intervalles disjoints dans le registre haut de l'instrument, ce qui n'est vraisemblablement pas sans rapport avec le chant : les quatre lames les plus aiguës correspondent le plus souvent à la partie soliste du chant1, et ces règles permettent

ainsi d'éviter de grands intervalles dans le registre haut du chanteur soliste. La substitution de la seconde majeure par la tierce se situera donc principalement, dans le chant, dans la partie du choeur, et dans l'accord du xylophone, entre les lames plus graves.

* * *

Ce système d'accord est parfaitement original puisque l'association des trois intervalles qui le constituent n'a jamais été observée ultérieurement, ni dans d'autres traditions musicales. La possibilité que l'intervalle équipentatonique a d'être associé à d'autres intervalles non-équidistants suscite de nouvelles réflexions sur la nature des échelles équidistantes : aucun cadre théorique n'avait envisagé une telle possibilité. La situation est ici d'autant plus paradoxale que le xylophone manza, composé de cinq lames, ne fait jamais intervenir l'octave alors même que l'intervalle équidistant résulterait, par définition, d'une division de l'octave. C'est donc bien la définition même de l'intervalle équipentatonique qui est mise en cause à travers ce système d'accord.

L'étude des procédures de réaccord et les réaccords n°2 de D. Bawassan et n°7 de D. Moussafont apparaître que la réalisation de l'intervalle équidistant ne fait pas

appel à une division, mais aux intervalles conjoints ascendants (il s'agît de l'accord de la lame 3) :

Réaccord n°7, bande Manza 1989-5

0:39:32:02 D. Moussa joue 12345, 1234, 123, 3 et agit sur le curseur (sans jouer la lame), joue 123,3 et accorde encore :

0:39:45:00 tandis qu'il joue : 123, 455555

0:39:47:19 -"ma bé" /c'est bien/, gestes et jeu : si 3 - 8tu

ceci, pour obtenir un intervalle de 230 cents (cf. 2.1.3.3.), soit à cinq centièmes de ton de l'intervalle équipentatonique1. Il y a donc lieu de penser que l'intervalle

équipentatonique est réalisé dans la succession, soit par addition, de deux intervalles conjoints, et non par la division de l'octave. Mais les intervalles de 200 et 280 cents sont accordés selon le même procédé, avec la même précision. Ceci rend l'explication de leur formation encore problématique, mais élimine toute hypothèse fondée sur les théories de la fusion ou da résonance.

1On notera que l'intervalle situé antre les lames les plus aiguës (lames 3 et 4) ne sont pas jouées

pendant ce réaccord. Or cet intervalle présentait un grand écart + 17 cents que nous avions eu du mal à interpréter. Il apparaît ici que la valeur de cet écart n'est pas pertinente, comme nous avons été amenés à le croire ensuite, dans la mesure où il n'a pas été entendu.