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Les missions de la branche (dans le champ des accords ACTES)

3.1. La définition et la rationalisation des missions

La branche joue un rôle régulateur dont l’importance au niveau du secteur d’activité concerné a été rappelée par de nombreux acteurs lors des auditions menées.

Alors que le champ des sujets que doit traiter une branche dans sa convention collective pour pouvoir bénéficier de l’extension est aujourd’hui très large – comme le montre la lecture de l’article L. 2261-27 du code du travail –, il faut recentrer les branches sur quatre missions principales.

Mais avant tout, la branche doit avoir une vision prospective de l’évolution économique et sociale du secteur. Cette vision manque trop souvent.

Il ne faut certes pas méconnaître la difficulté de l’exercice dans un contexte de crise qui rend délicate toute projection à un horizon de plusieurs années. Mais on doit constater que, dans la pratique, les branches sont plutôt en retard par rapport aux entreprises du secteur. Celles-ci tentent en dépit des aléas d’avoir une vision prospective qui permet de faire le lien entre l’économique et le social et qui est le gage de toute bonne négociation collective.

Dans cette même ligne, la branche doit assurer le suivi statistique des métiers, des emplois, des besoins en compétences et formation, comme le prévoit déjà le code du travail avec l’obligation (non effective aujourd’hui) d’avoir des observatoires de branche.

 La première mission de la branche concerne l’ordre public.

C’est à la branche de définir « l’ordre public conventionnel » qui s’applique à l’ensemble des entreprises du secteur et qui est opposable, sous réserve de l’application du principe de faveur, à l’ensemble des accords d’entreprise.

Certaines stipulations des accords de branche relèvent, par nature, de l’ordre public conventionnel en ce qu’elles visent des règles ou des dispositifs qui s’inscrivent dans une régulation au niveau national.

Il s’agit traditionnellement des qualifications, des salaires minima, de la prévoyance et de la formation professionnelle. Il faudrait y ajouter la question de la pénibilité.

Certaines stipulations des accords de branche peuvent, de par la volonté des négociateurs, relever de l’ordre public conventionnel. Il devrait alors être indiqué explicitement que ces stipulations revêtent un caractère impératif s’imposant aux accords d’entreprise.

Pour répondre aux préoccupations d’intelligibilité de la règle de droit qui ne sont pas assurées par les dispositions actuelles de la loi du 4 mai 2004, ainsi que l’a souligné le rapport public du Conseil d’État de 2008, il serait demandé à chaque branche d’établir une liste à jour et mise en ligne à la disposition du public des stipulations d’ordre public que sont tenus de respecter les accords d’entreprise.

Cette liste serait, par ailleurs, déposée aux services du ministère du travail qui en assurerait la diffusion dans les champs relevant de sa responsabilité et notamment auprès de ses services déconcentrés (Direccte) au contact des entreprises.

 La deuxième mission de la branche concerne son rôle de prestataire de services vis-à-vis des entreprises.

La branche doit être en capacité de proposer via des accords des solutions spécialement adaptées aux TPE que ce soit par :

− des accords d’entreprise types laissant au chef d’entreprise et à ses salariés des options claires de choix ;

− des règles d’accès direct à des dispositifs dérogatoires aux salariés des TPE ;

− des exemples de bonnes pratiques concernant notamment le contenu d’accords d’entreprise.

Les branches pourraient aussi, dans ce cadre, développer un rôle de facilitateur du dialogue social, en proposant la mise à disposition de binômes de médiateurs

« employeur/syndicaliste » dans les entreprises qui le souhaiteraient.

Cette mission est déjà assurée par certaines branches ou plus exactement par certaines organisations professionnelles des branches.

L’innovation serait, par rapport à l’existant, double.

D’abord cette mission serait généralisée et inscrite explicitement dans le code du travail.

Ensuite, la prestation de services offerte, par exemple en matière d’accord-type, serait paritaire et présenterait des garanties d’équilibre renforcées par rapport aux prestations émanant des seules organisations professionnelles.

 La troisième mission de la branche serait de définir les stipulations supplétives qui s’appliquent en l’absence d’accord d’entreprise dans les domaines définis par le code du travail (cf. infra sur l’accord d’entreprise).

 Une dernière mission pourrait être une négociation tournée vers l’emploi et la formation en fonction des évolutions prévisibles du secteur. Cette négociation ne viserait pas uniquement les « insiders » mais aussi les « outsiders » en offrant à ces derniers, via

les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), des formations en vue d’embauches futures en adéquation avec les besoins de la branche.

Le principe serait, au-delà de ce que les grandes branches ont déjà réalisé, d’organiser et de rendre systématique une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences au niveau de la branche. Ce dispositif n’aurait bien évidemment pas vocation à se substituer aux mécanismes de gestion de l’emploi en vigueur au niveau des entreprises. Mais il les compléterait utilement par l’approche macroéconomique et prospective sur lequel il reposerait.

Ces missions supposent, pour être effectives, des moyens que la plupart des branches n’ont pas, d’où, une nouvelle fois posée, la question de la restructuration des branches.

3.2. Les implications sur la structuration des branches

Comme cela a été maintes fois souligné dans différents rapports, le paysage conventionnel avec de multiples branches sans moyens et sans stratégie sociale et économique n’est pas à la hauteur de ces défis. Même si l’État a longtemps avalisé ce morcellement, la responsabilité en incombe principalement aux organisations profession-nelles, si promptes par ailleurs à dénoncer chez les autres acteurs l’absence de dynamisme et la méconnaissance des réalités économiques.

Or s’il est un domaine où ces organisations devraient mettre en application le dynamisme des entreprises qu’elles représentent, c’est bien celui de la structuration des branches.

La loi du 5 mars 2014 a donné à l’État et notamment au ministère du travail de nouveaux outils contraignants. La réaction ou plutôt l’absence de réaction des organisations professionnelles concernées ainsi que les réticences de certaines organisations syndicales peuvent légitimement nourrir une grande inquiétude.

Il y a urgence en la matière. La question posée est de savoir s’il ne faudrait pas aller plus loin et plus vite que ce que prévoit la loi du 5 mars 2014. Le gouvernement, de façon volontariste, a confié, pour la mise en œuvre de cette loi, une mission au conseiller d’État Patrick Quinqueton dédiée à cette question. Par ailleurs, la loi du 17 août 2015 sur le dialogue social a renforcé ces dispositions.

Toutefois, en dépit de ces efforts louables, dont l’initiative relève de l’État, le mouvement apparaît beaucoup trop lent au regard des échéances, l’objectif étant une centaine de branches au début des années 2020.

Il faut donc accélérer le mouvement de manière résolue et s’en donner les moyens.

Une solution pourrait être, à l’instar de ce qui a été fait pour les OPCA en matière de formation professionnelle, un mécanisme de rattachement à une convention collective

d’accueil, dans un délai de trois ans, de toutes les branches qui représentent moins de 5 000 salariés et dont la taille ne permet pas de véritable négociation.

Il est vrai que certaines branches de moins de 5 000 salariés sont dynamiques mais cela reste l’exception. D’autres critères auraient été envisageables comme ceux tenant à l’absence de négociation pendant une durée déterminée. Mais l’efficacité du nouveau dispositif passe par l’utilisation d’un critère simple et opérationnel qui ne peut être que celui du nombre de salariés.

Ce chiffre, avec l’exigence qu’il représente, pourrait être substantiellement augmenté dans les deux années suivant ce délai, en fonction des résultats et des mouvements de fusion amorcés ou non.

Proposition n° 32 – Définition des quatre missions de la branche, dans un premier temps, dans les champs prioritaires des accords ACTES.

Proposition n° 33 – Définition, dans un premier temps pour un délai de trois ans, d’un mécanisme de fusion des branches qui représentent moins de 5 000 salariés, avec une convention collective d’accueil.

4. La « régulation de proximité » par les accords d’entreprise