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CHAPITRE 2 : MEGHA-TROPIQUES, UN PROJET AMBITIEUX ET COMPLET

2.1 Megha-Tropiques : la mission satellitaire et les campagnes de validation au sol

2.1.1 La mission satellitaire

2.1.1.1 Objectifs de la mission satellitaire

La mission satellitaire Megha-Tropiques s’inscrit dans la continuité de la plupart des projets antérieurs (mentionnés dans l’annexe A de ce manuscrit). En particulier, elle est la suite logique de l’exploitation du satellite TRMM, qui était jusqu’à présent le satellite spécialisé dans l’étude de la région inter-tropicale. En effet, l’orbite de ce dernier n’a pas permis jusque-là d’obtenir une répétitivité de mesures suffisante sur la zone tropicale. Un échantillonnage temporel renforcé s’avère indispensable à une meilleure connaissance de la ceinture tropicale.

Megha-Tropiques est un partenariat franco-indien entre le CNES (Centre National d’Etudes Spatiales) et l’ISRO (Indian Space Research Organization). Le mot Megha signifie « nuage » en sanscrit, l’une des langues officielles indiennes. Lancé avec succès le 12 octobre 2011, ce satellite est dédié à l’étude de l’eau atmosphérique dans la ceinture intertropicale et de sa relation avec le bilan d’énergie (Roca et al., 2010). Les trois objectifs majeurs de la mission Megha Tropiques sont :

- la mesure des bilans d’eau et d’énergie de la région tropicale - l’étude du cycle de vie des orages tropicaux

- l’amélioration de la prévision des cyclones ou d’autres évènements particulièrement intenses.

Pour cela, les mesures de rayonnement effectuées par le satellite permettent d’obtenir des informations simultanées sur la vapeur d’eau, les nuages, et les précipitations. L’orbite du satellite est particulièrement adaptée à cette étude : inclinée de 20° sur l’équateur et située à une altitude de 870 km, elle permet au satellite d’échantillonner la ceinture tropicale de 23°N à 23°S entre trois et six fois par jour. La figure 2-1, tirée de Desbois et al. (2007) représente cette orbite sur une journée. Dans le cas illustré ici, la moitié nord de la ceinture tropicale est observée de jour, tandis que la moitié sud est vue de nuit. Cette situation se décale petit à petit d’un jour à l’autre, avec un cycle d’une durée de 51 jours. C’est donc le temps nécessaire pour que toute la zone couverte par le satellite soit observée à

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toutes les heures de la journée de la même façon. De plus, le satellite possède un phasage (la trace repasse sur elle-même) d’une durée de sept jours.

Ce fort échantillonnage temporel est un élément essentiel pour améliorer les connaissances sur la région tropicale. La collecte de mesures à long terme avec une bonne résolution temporelle et spatiale permet de mieux comprendre les processus relatifs aux systèmes convectifs de méso-échelle et leur cycle de vie. Le projet Megha-Tropiques vise aussi à établir des statistiques significatives sur les MCS, leurs conditions de formation et d’évolution, pour analyser leurs interactions avec la circulation atmosphérique globale et ainsi améliorer les modèles météorologiques et climatiques.

Figure 2-1 : Trace au sol de l’orbite de Megha-Tropiques, pour une durée de un jour. Les heures locales de passage sont repérées par l’échelle de couleurs. D’après Desbois et al. (2007).

2.1.1.2 Les instruments ScaRaB / SAPHIR / MADRAS et le

traitement de leurs mesures

Les instruments présents à bord du satellite Megha-Tropiques ne sont pas inédits. Ils ont déjà été testés et employés sur d’autres plateformes, et ont été choisis pour leur complémentarité, en tenant compte des contraintes du projet (résolutions spatiale et temporelle notamment).

SCARAB

Il s’agit d’un radiomètre multi-spectral passif à scanneur perpendiculaire qui mesure les flux radiatifs sortant au sommet de l’atmosphère et reçus grâce à quatre télescopes indépendants selon quatre canaux différents : un dans le visible (entre 0,55 et 0,65 µm), deux dans le domaine solaire (entre 0,2 et 4 µm et entre 0,2 et 200 µm), et un dans l’infrarouge (entre 10,5 et 12,5 µm) (Desbois et

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al., 2007). La résolution au sol de cet instrument est de 40 km au nadir, puis elle se dégrade aux extrémités de la fauchée, jusqu’à une centaine de kilomètres (figure 2-2).

SAPHIR

Utilisé pour mesurer la distribution de la vapeur d’eau atmosphérique, ce sondeur micro-ondes est basé sur six canaux étroits centrés autour de la raie d’absorption de la vapeur d’eau à 183 GHz

(Brogniez et al., 2013). Ces différents canaux permettent d’obtenir des informations sur une épaisseur importante d’atmosphère, de la surface à environ 12 km d’altitude. La résolution horizontale de SAPHIR est de 10 km au nadir, et de 14x22 km aux extrémités de la fauchée de 1700 km (figure 2-2).

MADRAS

L’imageur hyperfréquence MADRAS mesure les précipitations et les propriétés nuageuses. Selon le canal utilisé et sa polarisation, il permet d’observer des zones de pluies sur les océans (18 GHz), le contenu intégré en vapeur d’eau (23 GHz), l’eau liquide des nuages (37 GHz), les zones de pluies convectives (89 GHz), ou le sommet des nuages glacés (157 GHz). La résolution spatiale de cet instrument diffère selon le canal utilisé, variant de 40 km pour les plus faibles fréquences jusqu’à 6 km pour la fréquence la plus grande.

Outre le projet Megha-Tropiques, l’instrument MADRAS est également associé à la mission GPM (Global Precipitation Mission). Cette constellation de satellites comparable à l’A-TRAIN vise à surveiller les précipitations globales, et MADRAS est utilisé pour couvrir la zone tropicale.

L’imageur MADRAS a cependant été arrêté définitivement en septembre 2013 suite à une anomalie sur le mécanisme de rotation.

L’ensemble des données récoltées par les trois instruments de Megha-Tropiques est l’objet de traitements importants pour être exploitable (Gohil et al., 2013). Il faut d’abord convertir les données brutes en valeurs de radiance étalonnées et bien localisées géographiquement (traitement de niveau 1). Puis on peut aboutir à des produits géophysiques instantanés (traitement de niveau 2). Des traitements de niveaux supérieurs sont également possibles si l’on souhaite par exemple combiner ces mesures avec celles issues d’autres sources satellitaires ou pour réaliser des statistiques spatio-temporelles. Des algorithmes complexes sont utilisés pour aboutir aux produits de niveau 2. C’est le cas de l’algorithme BRAIN (Bayesian Rain Algorithm Including Neural network), décrit par Viltard et al. (2006) et initialement employé pour le satellite TRMM. Cet algorithme est implémenté pour la

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mission Megha-Tropiques afin d’obtenir les taux de pluie instantanés à partir des mesures de MADRAS (Chambon et al., 2013).

Cependant, l’efficacité des différents algorithmes et la précision des nombreux produits satellitaires obtenus méritent d’être testées et évaluées (Aires et al., 2013; Bernardo et al., 2013). Pour cela, le projet Megha-Tropiques comporte également un important plan de validation, grâce à des jeux de données issus de programmes antérieurs (tels que TRMM) (Kirstetter et al., 2013) ou bien grâce à des campagnes de mesures au sol dédiées (Gosset et al., 2013).

Figure 2-2 : Configuration des fauchées des trois instruments embarqués à bord du satellite Megha-Tropiques. D’après Desbois et al. (2007).

2.1.2 Les campagnes de validation microphysique de