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Chapitre I : Géodynamique cénozoïque de la Méditerranée occidentale

I- 6. Mise au point terminologique

Les termes délamination (en anglais delamination), détachement de slab (slab detachment), rupture de slab (slab beakoff), déchirure de slab (slab tearing), et retrait de slab (slab rollback) sont les principaux processus profonds qui ont conduit au passage rapide du contexte de compression à un régime de distension généralisée en Méditerranée à partir de 30 Ma.

Compte tenu du rôle primordial joué par tous ces processus profonds dans l’histoire cénozoïque des orogènes alpins et bassins méditerranéens, il est nécessaire de les définir brièvement :

6.1. Délamination

La délamination est le processus à travers lequel le manteau lithosphérique plus froid et plus dense est désolidarisé de la croûte continentale sus-jacente et plonge par la suite de façon verticale dans l’asthénosphère (Bird, 1979).

6.2. Rupture de slab

Alors que le processus de délamination n’est pas restreint uniquement aux zones de subduction, la rupture et le plongement d’un slab lithosphérique subduit est généralement appelé rupture de slab (slab breakoff) (Von Blanckenburg et Davies, 1995).

6.3. Détachement de slab

Le terme de détachement de slab est pour certains auteurs synonyme de rupture de slab (slab breakoff) (Gerya et al., 2004) mais il est communément définit comme le processus qui conduit à la rupture de slab (slab breakoff) par la propagation latérale d’une déchirure horizontale (Wortel et Spakman, 2000).

6.4. Déchirure de slab

La déchirure de slab (slab tearing) est définit dans la littérature comme le processus de propagation de la déchirure dans un slab. La déchirure peut être verticale (fig. 7b) ou horizontale (fig. 7c). Le processus de déchirure de slab tel que décrit dans Rosenbaum et al.

(2008) est associé à des déchirures verticales qui se propagent le long de failles de type STEP faults (Subduction Transform Edge Propagator (Govers et Wortel, 2005).

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Fig. 7 : Illustrations schématiques (Rosenbaum et al., 2008) des processus impliquant la déchirure (tearing) et/ou la rupture (breakoff) de slabs subduits. (a) rupture de slab lié au détachement d’un slab lithosphérique. La rupture de slab (slab breakoff) intervient généralement suite aux processus de collision et est parfois définit comme un processus de délamination post-collisionnelle. (b) cas d’une propagation verticale de la déchirure. (c) cas d’une propagation horizontale de la déchirure. (d) structure 3D d'une déchirure lithosphérique séparant deux segments subduits. La flèche indique la remontée de matériel asthénosphérique chaud, à l’origine du magmatisme. (e) cas de deux failles de déchirement (tear faults) (indiquées par les flèches double) reliant trois segments d'un système de subduction caractérisé par différentes vitesses de retrait de slab (slab rollback) (VRB (b) > VRB (a) > VRB (c)). Les triangles indiquent la vergence de la subduction et les flèches simples indiquent la direction de retrait de slab.

L’arrivée de la lithosphère continentale dans une zone de subduction induit un changement drastique dans la dynamique du système convergent. Le passage de la subduction océanique à la collision continentale est un processus complexe qui peut évoluer selon trois différents scénarios (fig. 8).

 La première possibilité est le détachement par découplage mécanique du manteau lithosphérique et de la croûte continentale (Bird, 1979; Capitanio et al., 2010; Chemenda et al., 1996) ;

 Le deuxième scénario possible est que la lithosphère océanique à flottabilité négative exerce de fortes contraintes de traction et se détache de la partie continentale à flottabilité négative (Davies et von Blanckenburg, 1995 ; van Hunen et Allen, 2011) ;  La troisième possibilité est que le matériel continental est entrainé à des profondeurs

importantes par les forces de traction négative exercées par la lithosphère océanique subduite, et ce en dépit de la flottabilité positive du matériel continental (Ranalli et al., 2000; Toussaint et al., 2004).

Ces différents scénarios de subduction continentale sont à l’origine de la multitude des styles de la déformation à la surface. Dans le scénario de collision suivi de la rupture de la lithosphère, la fosse avance (Magni et al., 2012; Royden, 1993b) et les forces de compression horizontale induisent un raccourcissement significatif. Dans le cas d’une délamination, le slab

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qui consiste en un manteau lithosphérique dense se détache de la croûte et recule (slab rollback) (Royden, 1993b). Ceci est l’origine de l’extension qui s’exprime dans la plaque supérieure. Lequel de ces scénarios a lieu dépend de plusieurs facteurs comprenant le taux de convergence des plaques, les caractéristiques rhéologiques et physiques ainsi que la structure thermique de la lithosphère continentale.

Fig. 8 : Diagrammes schématiques des différents scenarios de subduction continentale : Délamination - rupture

de slab.

I-7. Extension en bassins d’arrière-arcs et magmatisme associé

Les bassins arrière-arcs ou bassins marginaux se forment en contexte convergent à l’arrière du système de subduction. Leur formation est cinématiquement liée soit au retrait de slab (ex. bassins du Japan, Lau-Kermadec et Philippines), soit au recul de la plaque supérieure par rapport au front de subduction (ex. îles Mariannes).

Les premières études géochimiques du magmatisme des bassins arrière-arcs ont démontré que la génération des laves de bassins arrière-arcs (BABB) est contrôlée par les mêmes processus qui sont à l’origine de la fusion partielle dans les rides médio-océaniques, et ce en se basant sur leurs compositions très comparables (Hart et al., 1972). Les études ultérieures ont indiqué que les processus pétrogénétiques des basaltes de rides médio-océaniques (MORB) ne permettent pas d’expliquer toutes les particularités géochimiques des magmas des bassins arrière-arcs et que leur composition géochimique est intermédiaire entre les basaltes de type MORB et les basaltes d'arcs insulaires IAB (Gill, 1976).

Les basaltes de bassins arrière-arcs ont été décrits dans le détail par Sinton et Fryer (1987), où les principales différences de composition entre les BABB et les MORB ont été largement discutées. Ultérieurement, l'étude des bassins arrière-arcs partout dans le monde a contribué à développer notre compréhension de l’origine des BABB. Des compilations sur les compositions en éléments majeurs des BABB ont été présentées par Taylor et Martinez

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leurs compositions isotopiques et en éléments traces. Selon ces différents auteurs, la genèse des BABB serait liée aux processus suivants : (1) remontée asthénosphérique sous la région de manteau qui subit la fusion partielle dans la zone arrière-arc ; (2) interaction de cette même région mantellique d’arrière-arc avec la zone de subduction; (3) combinaison des deux processus 1 et 2 ; et (4) fusion partielle et fractionnement des magmas durant leur remontée vers le plancher océanique.

Ces différents processus expliquent le caractère transitionnel des basaltes d’arrière-arc entre les basaltes océaniques ou MORB (issus de la fusion par décompression) et les basaltes d’arcs insulaires ou IAB (résultant de la fusion du coin mantellique provoquée par les fluides métasomatiques issus de la lithosphère subduite). Comparés aux N-MORB, les BABB tendent à avoir des teneurs en SiO2, Al2O3, et Na2O légèrement plus élevées et légèrement plus basses en TiO2, FeO, et MgO (Langmuir et al., 2006). Ils contiennent jusqu'à 2,5 % en H2O (Langmuir et al., 2006) et montrent un enrichissement notable en éléments à grand rayon ionique (LILE), en Sr et en Pb, et un appauvrissement en "high field strength elements" (HFSE ; Pearce et Stern, (2006)).