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La mise en place d’institutions représentatives du personnel complémentaires ou alternatives

Section 2 : L’encadrement conventionnel de la représentation du personnel

B) La négociation des commissions spécialisées

II. La mise en place d’institutions représentatives du personnel complémentaires ou alternatives

Par application de l’ordonnance « Macron » n°2017-1386 du 22 septembre 2017, un accord collectif peut mettre en place des représentants de proximité (A) et/ou transformer le CSE en conseil d’entreprise (B). C’est une source de flexibilité qui donne aux entreprises toutes les clés pour véritablement adapter la représentation du personnel en fonction de leurs besoins.

A) La mise en place facultative de représentants de proximité

Depuis l’ordonnance « Macron » n°2017-1386 du 22 septembre 2017, les délégués du personnel, représentants au plus proche des salariés dans l’entreprise, ont disparu. Afin de pallier cette disparition, les ordonnances ont créé les représentants de proximité. Cependant, leur mise en place est entièrement facultative. En effet, l’article L.2313-7 du code du travail dispose qu’un accord d’entreprise peut les mettre en place et qu’il doit définir notamment leur nombre, leurs attributions et les modalités de désignation. Concernant ce dernier point, la loi prévoit toutefois que ces représentants seront soit des membres du CSE soit désignés par lui pour un mandat dont la durée est égale à celle des mandats des élus du CSE340. Par ailleurs, il convient de noter que ces représentants de proximité pourront devenir membres des commissions du CSE dès lors qu’ils ont été désignés parmi les membres de ce dernier341. Le législateur a donc donné un maximum de liberté aux partenaires sociaux en renvoyant à l’accord collectif le soin de déterminer les modalités de fonctionnement de ces représentants. Mais il faut tout de même rappeler que l’accord permettant de les instituer ne peut être que majoritaire au sens strict342.

Certaines entreprises décident de mettre en place des représentants de proximité. Il s’agit davantage d’entreprises à structure complexe ou ayant un effectif important. En effet, selon un sondage CSA effectué du 14 mai au 4 juin 2018, seuls 5% des dirigeants songeaient à mettre en place de tels représentants au sein de leur entreprise mais ils étaient plus nombreux (11%) à

340 C. trav., art. L.2313-7, al. 3.

341 Question n°87, CSE : 100 questions-réponses, Min. Trav., 19 avr. 2018. 342 C. trav., art. L.2313-7, al. 1.

l’envisager au sein des entreprises d’au moins trois cents salariés343. Pour autant, 24% des IRP le souhaiteraient dans les entreprises de moins de trois cents salariés et 47% dans les entreprises d’au moins trois cents salariés344.

La loi ne pose aucune condition de périmètre pour leur mise en place. Ainsi, ils sont généralement désignés au niveau d’un établissement distinct345. Il arrive qu’ils soient désignés au sein de certains établissements uniquement346, par exemple pour intervenir auprès d’une catégorie précise du personnel qui est sous-représentée au sein du CSE347. On peut considérer que dans cette dernière hypothèse les partenaires effectuent une sorte de « ciblage » en fonction des besoins de l’établissement348. D’autres accords prévoient la possibilité de mettre en place ces représentants dans l’entreprise, sans pour autant fixer leur nombre ou leur périmètre, en renvoyant à la négociation d’établissement le soin de les instituer s’ils sont localement nécessaires349.

Les partenaires sociaux délimitent leurs attributions et on se rend compte qu’ils ont surtout des missions en matière de santé et de sécurité et d’amélioration des conditions de travail. Parfois, ils bénéficient également des anciennes attributions des délégués du personnel, comme l’examen des réclamations individuelles et collectives ou encore le droit d’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes350. Ainsi, ils peuvent être considérés comme des relais du CSE chargés d’effectuer certaines missions pour son compte351. Certains accords prévoient également que ces représentants auront accès à la BDES352 ou que l’un d’entre eux sera désigné

343 Question 14, Evaluation du niveau de connaissance des ordonnances travail et perception de leur

déploiement, CSA, juin 2018, étude n°1800160, p.33.

344 Question 19, Evaluation du niveau de connaissance des ordonnances travail et perception de leur

déploiement, CSA, juin 2018, étude n°1800160, p.33.

345 Accord relatif au dialogue social et économique, Total, art. 16. ; Accord relatif au dialogue social,

Gan Assurances, art. 4.6.1.

346 Accord relatif au dialogue social et économique, Total, préc.

347 Accord collectif relatif à l’aménagement conventionnel du fonctionnement du CSE, Micromania

(UES), art. 7.

348 RIOCHE, S. « CSE et représentants de proximité : un kaléidoscope conventionnel », JCP S 2018,

1343.

349 Dans l’accord du groupe Renault, ce sont des accords d’établissement majoritaires qui pourront

mettre en place les représentants de proximité en déterminant leur périmètre et leur nombre. (Accord relatif au dialogue social et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales, Renault SAS, art. 1.3.3)

350 Accord relatif au dialogue social et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités

syndicales, Renault SAS, préc.

351 FAVENNEC-HERY, F. et ROZEC, P. « Les missions du comité social et économique », JCP S

2018, 1225.

comme étant « secrétaire chargé des relations avec la direction »353. La totalité de leur mode de fonctionnement est issue de la négociation et les innovations sont donc nombreuses.

Il peut également être constaté que les partenaires sociaux rapprochent souvent le mode de fonctionnement de ces représentants à celui des institutions existantes ou des anciens délégués du personnel. Ainsi, ils peuvent bénéficier d’un crédit d’heures mensuel, variant entre 5 et 10 heures, ou de la mutualisation des heures de délégation des représentants titulaires du CSE354.

L’accord de l’entreprise Manpower France souhaite instituer une commission de représentants de proximité afin de faire le bilan chaque trimestre355. Cette pratique n’est pas isolée puisque l’accord de Renault met également en place des « commissions de proximité »356. Elles sont composées des représentants de proximité et de « désignés de proximité » chargés d’épauler les représentants dans leurs missions. Ces derniers sont mis en place dans les établissements où l’effectif est le plus élevé357. Il s’agit de salariés dont le nombre est déterminé par un commun accord entre l’employeur et les OSR des établissements sans pour autant pouvoir aller au-delà du nombre de représentants de proximité dans l’établissement. Ils sont ensuite répartis entre les organisations selon des critères tenant notamment à leur taux de représentativité. Ils ne bénéficient pas d’un crédit d’heures spécifique mais ils ont le droit de bénéficier du crédit d’heures global octroyé à l’organisation de laquelle ils dépendent. D’autres accords mettent en place des « chargés de proximité » qui seront des membres du CSE, titulaires ou suppléants, et qui devront s’occuper des réclamations individuelles et collectives concernant notamment les conditions de travail et de sécurité mais aussi les sujets RH358.

La mise en place de ces représentants permet d’assurer un dialogue social de proximité, notamment dans les entreprises à structure complexe. Ainsi, ils vont pouvoir gérer les questions individuelles et quotidiennes des salariés de l’entreprise. En effet, les CSE étant mis en place de manière prioritaire au niveau de l’entreprise, l’institution de tels représentants permet aux salariés de retrouver des représentants au plus proche d’eux. Cette volonté de maintenir un lien

353 Accord relatif au dialogue social et économique, Total, préc.

354 Accord relatif à la mise en place des comités sociaux économiques d’établissement (CSE) et du

comité social et économique central (CSEC), Manpower France, Titre 3, art. 3.4.

355 Accord relatif à la mise en place des comités sociaux économiques d’établissement (CSE) et du

comité social et économique central (CSEC), Manpower France, Titre 3, art. 3.5.

356 Accord relatif au dialogue social et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités

syndicales, Renault SAS, art. 1.3.3.

357 Accord relatif au dialogue social et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités

syndicales, Renault SAS, art. 2.2.4.

358 Accord relatif à une nouvelle dynamique du dialogue social, La Manufacture Française des

de proximité entre les salariés et les représentants conduit parfois les entreprises à désigner des salariés comme les relais des représentants.

Ainsi, les entreprises peuvent décider de mettre en place les représentants de proximité en complément du CSE mais elles peuvent également décider de transformer ce dernier en un conseil d’entreprise.