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Dans la littérature un grand nombre de capteurs associés à la technique des MIPs, ont été décrits, et font appel à 3 principaux modes de transduction : optique, électrochimique et piézoélectrique (Figure 22).

Capteur piezoélectrique Capteur électrochimique Capteur optique (A)

Figure 22 : (A) histogramme représentant l’évolution du nombre de publications de capteurs couplés au MIP (B) proportion des MIPs selon le type de transduction entre 1995 et 2006.128

Les capteurs optiques associés au concept d’empreinte moléculaire ont fait l’objet de nombreuses études. Ces dernières reposent généralement sur des mesures de fluorescence.129 Rothbone et al. en 2005, ont développé un MIP ayant une réponse en fluorescence par le biais

42 de la quinine acrylate.130 Le capteur obtenu par Wang et al. montre une augmentation significative de l’intensité de fluorescence lors de l’interaction entre la molécule empreinte et les sites de reconnaissance.131 Les MIPs associés aux transducteurs optiques permettent d’atteindre de très faibles seuils de concentration, de l’ordre du µM comme e.g. la détection à 0,3 µM de la 1-naphtylamine et de la 2-naphtalamine présentes dans l’eau.132 Cependant, cette technique ne permet pas de détection lorsque l’analyte est non-fluorescent, ce qui exige dans la plupart des cas une étape préliminaire de marquage chimique de l’analyte ou du polymère par un marqueur fluorescent.133Un autre mode de transduction optique qui ne nécessite pas de marquage par une sonde fluorescente, la SPR, exploite aussi les MIPs, pour obtenir des films de faible épaisseur et ainsi pouvoir détecter tout accroissement de masse à la surface du support métallique. Un premier capteur associant la SPR aux MIPs pour la détection de théophylline, caféine, et xanthine a été développé par Lai et al. en 1998.134 Suite à ces travaux, d’autres capteurs optiques SPR ont été développés, e.g. celui à lysozyme par Matsunaga dont la fabrication est décrite dans la Figure 23.135

Figure 23 : représentation schématique d’un capteur SPR.

Les capteurs piézoélectriques tels que les microbalances à quartz (QCM) couplées aux MIPs suscitent également un grand intérêt, et sont une alternative très prometteuse en chimie analytique pour la détection des protéines. Ces capteurs permettent d’obtenir des mesures massiques relativement sensibles. Ces dernières sont accompagnées d’une variation de la fréquence vibrationnelle lors de la reconnaissance de l’analyte par la couche de polymères empreintes immobilisée à la surface de la QCM.136 Jenik et al. ont utilisé ce système pour la détection d’allergènes.137 Yao et al. ont développé un MIP pour la détection du carabaryl couplé à la QCM.138 Leur capteur est réutilisable avec une bonne reproductibilité. De plus il présente une grande sensibilité (62 nM) avec une excellente sélectivité.

43 Les capteurs électrochimiques utilisant les MIPs ont été développés au début des années 1990 par l’équipe de Mosbach.139 Les auteurs ont mis en place un capteur, assimilé à un condensateur, dans lequel est intégrée une membrane à empreintes moléculaires de la phénylalanine anilide. Lorsque celle-ci est reconnue par le système, une réduction de la capacité globale de celui-ci est mise en évidence. De nombreux progrès ont été réalisés depuis ces premiers prototypes avec les capteurs électrochimiques, parmi lesquels : ampérométriques, conductimétriques et potentiométriques. L’évolution de ces capteurs tend vers leur miniaturisation avec en particulier, des études sur la conception de nanomatériaux électrochimiques utilisant le principe des MIPs. En effet, les travaux menés par Panasyuk et al. ont permis d’obtenir un film couche mince (<100 nm) de polyphénol imprimé par phénylalanine électropolymérisé sur une surface d’or.140 Les capteurs électrochimiques associés aux MIPs ont également été très utilisés pour la reconnaissance d’un analyte électroactif. C’est le cas des capteurs ampérométriques enzymatiques, où le signal de détection de l’analyte est amplifié par un système d’oxydoréduction parfaitement adapté au transducteur électrochimique.13 Les auteurs ont développé ce type de capteur pour la détection de triglycérides via une électrode modifiée par la glycérol kinase et la glycérol-3-phosphate kinase. Le seuil de détection obtenu est de 0,2 mM. Kroger et al. décrivent un capteur conductimétrique utilisant des membranes contenant des biorécepteurs comme éléments de reconnaissance. Les auteurs ont ainsi associé les polymères empreintes à ce type de transduction sur une microélectrode (Figure 24-A), permettant la détection de pesticides tels que le 2,4-D (acide 2,4-dichlorophénoxyacétique) (Figure 24-B). Ce système aboutit à une gamme de quantification de l’ordre de 10 à 1000 µM et une limite de détection de 9 µM.141-142 Cette limite de détection obtenue reste très éloignée du seuil limite toléré qui est de 50 ng.L-1

Figure 24: (A) microélectrode avec un polymère empreinte à la surface de l’électrode de travail (au centre), la contre électrode petit cercle noir et électrode de référence Ag/AgCl grand cercle gris. (B)

structure de l’acide 2,4-dichlorophénoxyactétique.

44 L’équipe de Qin a récemment développé un capteur potentiométrique pour la détection de la mélamine présente dans le lait.143 Les auteurs ont utilisé une électrode sélective d’ion, modifiée avec une membrane MIPs à base d’acide méthacrylate comme élément de reconnaissance. Leur système permet d’obtenir une gamme de quantification comprise entre 15 µM et 10 mM avec un temps de réponse de 16s et une limite de détection de 6 µM.

L’étude menée par Liu et al. a mis en avant la détection du triclosan.144 Cet agent antibactérien est présent dans des savons, dentifrices et déodorants. Pour ce capteur, les auteurs ont électropolymérisé l’o-phenylenediamine (o-PD) sur une électrode de carbone vitreux en présence de la molécule empreinte et ont obtenu une gamme de quantification comprise entre 0,2 et 3 µM avec une limite de détection de 80 nM. Il s’agit d’un capteur à polymères conducteurs à empreintes moléculaires. Un des principaux avantages de ce type de capteur est de pouvoir contrôler l’épaisseur des films et pouvoir ainsi, améliorer la qualité des couches.

Les capteurs MIPs associés aux transducteurs optiques, piézoélectriques et électrochimiques conviennent à la reconnaissance des petites molécules sans étape de marquage (e.g. fluorescence) comme le montre leTableau 7. Ce sont des systèmes permettant d’obtenir de faibles seuils de détection, de l’ordre du nM. Cependant cette sensibilité est dépendante de la couche chimiosélective intégrée sur le transducteur.

45

Molécule cible

Monomère

fonctionnel

Réticulant

Transduction

Limite de

détection

Référence

morphine acide méthacrylique

triméthylolpropane

triméthacrylate électrochimique 0,3 mM Ho145

glutathion o-phenylenediamine

2-mercaptoethane

sulfonate électrochimique 1,25 µM Yang146

atrazine acide méthacrylique

éthylène

glycol diméthacrylate électrochimique 0,5 µM Prasad147

L-histidine

phenyltrimethoxysilane

Methyltrimethoxysilane tétraéthylorthosilicate électrochimique 25 nM Zhang148

adrénaline

N-isopropylacrylamide

acide acrylique N,N’-methylenebis (acrylamide) optique 5 µM Matsui149

théophylline acide méthacrylique

éthylène

glycol diméthacrylate optique 2 mM Lai134

paracétamol acide méthacrylique

éthylène gylcol

diacétate piézoélectrique 50 nM Tan150

niacinamide acide méthacrylique éthylène gylcol

diaméthacrylate piézoélectrique 5 nM Zhang

151

46 Pour des soucis de miniaturisation, de facilité d’utilisation et de faible coût, de nombreuses études s’orientent aujourd’hui vers les capteurs MIPs associés à la transduction électrochimique. Comme nous l’avons vu, ce type de capteur s’appuie généralement sur le dépôt d’un film de polymères à empreintes moléculaires sur une électrode qui permet d’assurer la transduction. La couche de polymères MIPs greffée sur l’électrode, apporte la spécificité vis-à-vis de la molécule à détecter. Dans ces conditions, la reconnaissance est toujours dépendante soit d’un marquage direct (e.g. propriété redox de l’analyte) ou indirect (sonde greffée sur la couche chiomiosélective e.g. ferrocène). Cette approche limite non seulement l’utilisation de ce type de capteurs à un nombre restreint d’analytes, en particulier en ce qui concerne les analytes de petit poids moléculaire, mais limite aussi leur production et leur utilisation à grande échelle. L’objectif de notre travail a donc été de permettre aux sites de reconnaissance de ces capteurs électrochimiques à empreintes moléculaires, d’assurer à la fois leur rôle de reconnaissance spécifique et de transduction indépendamment des propriétés intrinsèques des analytes ou du marquage indirect des polymères. Nous nous sommes donc tournés vers le développement d’un capteur intégré, spécifique et sensible, dédié à la détection directe et en temps réel de petites molécules organiques reposant sur un nouveau principe de polymères conducteurs à mémoire de forme que nous allons maintenant décrire.

III

Conception d’un capteur à base de polymères à mémoire de

forme

Bien que l’utilisation des polymères à empreintes moléculaires soit aujourd’hui une des stratégies les plus efficaces, en particulier pour les petites molécules, et que cette technologie connaît un essor considérable dans le domaine des capteurs, certains points restent encore à améliorer. En effet, nous avons vu que dans le cas des MIPs, la transduction dépendait des propriétés physiques ou chimiques (e.g. optique, électrochimique) de l’espèce à analyser ou d’une sonde greffée à la surface de la matrice du polymère qui interagit de manière spécifique avec la molécule d’intérêt. Dans ces conditions, le polymère ne joue qu’un rôle de "support" (et aussi dans certains cas de transducteur) dans le phénomène de reconnaissance.

Lorsque le MIP est couplé à un transducteur électrochimique (e.g. transducteur ampérométrique), nous avons vu que nous observions une modification du signal lors de la reconnaissance de la cible qui est généralement liée aux propriétés redox de la molécule cible.

47 Or les polymères conducteurs, contrairement aux polymères classiques peuvent être utilisés à la fois i) comme polymères support des groupes de reconnaissance grâce en particulier à la fonctionnalisation des monomères conducteurs avant polymérisation, mais aussi ii) comme fonction de transduction aboutissant à un signal électrique, facile à enregistrer et permettant de quantifier la reconnaissance. La combinaison de ces deux fonctions des polymères conducteurs avec comme objectif la conception et le développement de nouveaux capteurs chimiques dédiés à la détection des petites molécules est à la base de notre travail. Avant d’aborder cette deuxième partie, nous rappellerons d’abord les propriétés des polymères conducteurs. En effet, le projet de développement d’un capteur électrochimique à base de polymères conducteurs à mémoire de forme, auquel le concept de reconnaissance moléculaire est associé, a été conditionné par leurs propriétés.

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