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2 Résultats et discussion des analyses effectuées sur les races mondiales

2.2 Migration via le Danube

2.2.1 ACP

Les valeurs propres de l’ACP peuvent être visualisées sur la Figure 26. Cet éboulis montre que la première composante contribue très fortement à l’explication du jeu de données. Nous allons alors regarder cet axe par rapport aux axes 2 et 3. En effet, nous prendrons en compte dans cette étude les 3 premiers axes de l’ACP car on observe un décrochement entre le troisième et le quatrième axe.

La visualisation graphique de l’ACP selon les axes 1-2 et 1-3 est présentée à la Figure 27. D’après les deux graphiques, l’axe 1 permet la séparation de la race BOE (Boer), race échantillonnée en Suisse originaire d’Afrique du Sud et représentée par le signe « : » de couleur rouge, des autres races du jeu de données. Cette race possède le plus grand effectif dans notre étude, c’est pourquoi la première composante contribue si largement à l’explication des données.

Sur la représentation des axes 1-2 (Figure 27a), on observe un amas d’individus bien regroupé au centre en bas du graphique, qui correspond aux races iraniennes, turques, avec la race française Angora, de la même manière que dans l’étude précédente. La population de bézoards, représentée par le chiffre « 7 » de couleur jaune, est située proche de cet amas et encore une fois très étalée donc peu homogène en terme de génétique. Le dernier grand groupe de races que l’on peut voir sur ce graphique est le groupe des races européennes qui sont étalées sur l’axe 2, certaines races se chevauchant. Ce graphique ne permet pas de distinguer la migration via la Méditerranée de la migration via le Danube car les races d’Europe du Nord sont chevauchantes avec les races d’Europe du Sud-Ouest (par exemple la race italienne Sarda – SAR –, représentée par un « R » rouge recoupe la race Landrace Goat – LNR – représentée par un « G » jaune, cette dernière étant présente dans les trois pays d’Europe du Nord-Est étudiés).

L’axe 3 (Figure 27b) permet de distinguer les différentes origines de la race LNR. En effet, dans cette étude, la race LNR provient des Pays-Bas (premier amas de 15 individus, proches des autres races d’Europe en bas à gauche du graphique), de la Finlande (deuxième amas de 20 individus), et du Danemark (dernier amas, peu homogène, de 120 individus). Ce qu’il est intéressant de noter sur ce deuxième graphique est la séparation de la race roumaine Carpatian Goat – CRP –, représentée par le symbole « < » de couleur bleue, située en bas à gauche du graphique. En effet, cette race est la seule représentante des races du Centre de l’Europe et pourrait potentiellement être la preuve d’une autre voie de migration que celle méditerranéenne, celle danubienne. Cependant, l’approche par l’ACP reste très difficile à interpréter de cette manière.

2.2.2 Structure de la population

La procédure de validation croisée effectuée sur ce nouveau jeu de données, représentée sur la

Figure 28, nous donne comme nombre de populations K optimal pour l’algorithme le nombre 41. L’erreur de validation croisée est en effet la plus faible pour cette valeur de K.

On visualise sur la Figure 29, pour les mêmes raisons que l’étude précédente, la structuration de la population pour K = 3. À K = 3, on distingue à nouveau trois grands groupes de races, comme pour l’ACP : la race BOE représentée en rouge en quasi-totalité, les races d’Europe en vert, et les races possédant en majorité du bleu qui sont les races turques et iraniennes, ainsi que la race française Angora et la population de bézoards. Le nombre de populations optimal détecté étant 41, cela signifie que génétiquement parlant, il n’y a pas 36 populations différentes dans ce jeu de données mais plutôt 41, en raison de la provenance multiple des races Alpine, Saanen et Landrace Goat.

Rapport de stage de fin d’études Claire OGET

Figure 29 : Représentation graphique pour K=3 de la structuration des populations obtenue avec le logiciel ADMIXTURE sur les races impliquées dans la migration danubienne

Figure 28 : Représentation graphique de la procédure de validation croisée du logiciel Admixture réalisée sur les races impliquées dans la migration danubienne

Figure 30 : Arbre phylogénétique obtenu grâce au logiciel hapFLK sur les races impliquées dans la migration danubienne

Iran/Turquie

+ ANG

Irlande

Europe du Nord

Roumanie

2.2.3 Arbres phylogénétiques

L’arbre phylogénétique obtenu grâce au logiciel hapFLK (Figure 30), ne permet pas de conclure quant aux différentes voies de migration de la chèvre domestique à travers l’Europe. En effet, cet arbre sépare très précocement les races domestiques actuelles présentes dans le berceau de domestication (races turques, iraniennes et Angora, sur l’embranchement en bas) des races européennes et africaines (embranchement du haut). Ce dernier embranchement contient la race BOE qui suit une branche différente des races européennes.

Sur cet arbre, les races européennes sont représentées sous la forme d’un arbre dit « en râteau », c’est-à-dire que la longueur des branches des différentes races est semblable (à l’exception de quelques races) et la distance entre les nœuds est très courte. Cela signifie que les races sont très proches génétiquement les unes des autres.

On peut voir quelques regroupements de race. Par exemple, c’est le cas des races irlandaises BLB, OIG et ARR qui sont issues d’un nœud commun et qui possèdent des longueurs de branches un peu plus longues que les autres races, traduisant peu d’introduction de nouveaux individus et de la dérive génétique. Par ailleurs, les races insulaires CRS (sur l’île française Corse) et SAR (sur l’île italienne Sardaigne) sont également regroupées, comme nous avions pu le voir dans l’étude précédente, ce qui est dû à la proximité de leur berceau d’origine. On peut également remarquer la très grande longueur de branche de la race islandaise ICL qui est connue pour avoir un taux de consanguinité très élevé dans la littérature (Baldursdottir et al. 2012).

En revanche, la race roumaine CRP est située au milieu des races italiennes et françaises, de même que les races d’Europe du Nord-Est. Cet arbre est donc peu indicateur concernant les différentes voies de migration de la chèvre domestique à travers l’Europe.

L’arbre phylogénétique obtenu grâce au logiciel TreeMix (Annexe 2a) possède la même organisation que l’arbre précédent puisque l’on observe également un arbre « en râteau » pour les races européennes. Les résidus de cet arbre (Annexe 2b) permettent de mettre en lumière la mauvaise explication des races islandaise Icelandic Goat – ICL – et LNR vis-à-vis des races actuelles du berceau de domestication, ainsi que celle de la race roumaine CRP vis-à-vis des races italiennes MLT et MLS (chèvres maltaises), situées très proches sur l’arbre de la CRP. Les résidus indiquent donc une place inappropriée pour ces races, ce qui va constituer une piste intéressante à suivre dans notre étude.

Afin d’obtenir quelques éléments de réponse, j’ai ajouté un, deux et trois évènement(s) de migration dans le logiciel TreeMix. La première migration (résultats non montrés) est symbolisée par une flèche partant d’un ancêtre commun aux races domestiques (européennes, africaines et du berceau de domestication) et allant vers un ancêtre commun aux races LNR et ICL. On peut interpréter cette migration comme une origine différente des races nordiques par rapport aux races d’Europe du Sud. On peut alors assimiler cela à la présence d’une autre voie de migration, ou d’une autre vague de migration. La deuxième migration proposée par TreeMix (résultats non montrés) est une migration partant des races italiennes maltaises vers la race italienne SAR. Cette migration permet de corriger la localisation au sein de l’arbre de la race SAR car ces deux races sont des races du Sud de l’Italie et génétiquement proches. La troisième migration (Figure 31) que l’on observe est très intéressante dans notre étude. Elle est représentée par une flèche allant du centre de l’arbre « en râteau » des races d’Europe vers la race roumaine CRP qui est située cette fois au sein des races du berceau de domestication. De plus, cette flèche est de couleur plus foncée que les précédentes, ce qui indique un poids concernant cette migration plus important. On peut interpréter cette migration de la même

Rapport de stage de fin d’études Claire OGET

Tableau 6 : Caractéristiques des races françaises étudiées *valeur calculée sur les individus ayant une ascendance connue

**valeur calculée sur les individus ayant une ascendance connue du jeu de données initial

Race Effectif Consanguinité pedigree Consanguinité génomique Alpine 45 0,017 -0,022 Angora 29 0,059* 0,005 Corse 29 NC 0,002 Fossés 19 0,037** -0,007 Poitevine 27 0,032** -0,005 Provençale 19 0,032* -0,024 Pyrénéenne 17 NC 0,019 Saanen 38 0,024 -0,028

Figure 31 : Arbre phylogénétique obtenu grâce au logiciel TreeMix sur les races impliquées dans la migration danubienne avec trois évènements de migration

Iran/Turquie

Angora

Irlande

Roumanie

manière que pour celle concernant les races nordiques, c’est-à-dire comme la preuve d’une autre voie de migration ou d’une autre vague de migration.

2.2.4 Discussion

L’interprétation sur ce jeu de données est difficile. On cherche à identifier différentes voies de migrations de la chèvre domestique à travers l’Europe avec des races inégalement réparties à travers l’Europe. En effet, au sein de ce jeu de données, les races d’Europe du Sud issues de la voie de migration méditerranéenne sont bien représentées par les races italiennes, françaises, suisses et irlandaises. En revanche, peu de races prouvant une migration danubienne sont présentes puisque seule une race de Roumanie est disponible. Par ailleurs, les trois pays étudiés du Nord-Est de l’Europe (Pays-Bas, Danemark et Finlande) proposent la même race caprine, la LNR ce qui n’est pas représentatif de la diversité génétique de ces pays. Ainsi, mettre en évidence la voie danubienne s’avère être très hypothétique dans notre étude. C’est pour ces raisons que les deux premières analyses réalisées (Figures 27 et 29) nous donnent peu d’indices sur ces différentes voies de migration. Finalement, seul les arbres estimés par TreeMix nous permet de faire des hypothèses d’origines différentes des races d’Europe grâce à ces évènements de migration qui relient l’ancêtre domestique aux races de l’Europe de l’Est.

Certaines races de pays européens (Pays-Bas, Finlande, Danemark et Roumanie) de notre jeu de données possèderaient en effet des origines ancestrales différentes des autres races d’Europe. Cela peut hypothétiquement traduire la présence de plusieurs vagues de migration de la chèvre domestique en Europe : une première vague dont les individus auraient été ensuite remplacés par une seconde vague ultérieure au cours de l’histoire évolutive, quelques individus originaux dans des régions assez isolées étant alors les seuls témoins de la première vague (dans notre étude les races des Pays-Bas, de Finlande, de Danemark et de Roumanie). Cela avait été le cas chez le mouton (Chessa et al. 2009).

Une autre interprétation possible du manque de preuves de la voie danubienne de migration dans cette étude est que les races de l’Est ayant une origine différente des races de l’Ouest auraient été de nombreuses fois croisées aux races sélectionnées de l’Ouest, plus productives. Les races locales rustiques peuvent avoir ainsi été délaissées et avoir perdu une partie de leur diversité génétique, en les rapprochant génétiquement des races de l’Ouest, ce qui expliquerait leur insertion au sein de ces races dans les arbres phylogénétiques. Ceci reste bien évidemment qu’une hypothèse.

3 Résultats et discussion des analyses effectuées sur les races françaises

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