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Microbiote intestinal

II . Matériels et Méthodes

1. Microbiote intestinal

1.1 Méthodes traditionnelles

Les recherches sur la flore microbienne intestinale remontent à la fin du 19ème siècle, mais l’intérêt n’a grandi que vers le début des années 1960 [6]. Il a été estimé que cette flore microbienne comporte 10 fois plus de cellules procaryotes (la plupart bactérienne) que de cellules (eucaryotes) du corps humains [7]. Ces premières estimations de la composition de la flore intestinale ont été retenues grâce à des techniques traditionnelles de bactériologie telles que la culture, la microscopie et l’étude de la fermentation des sucres des bactéries isolées de selles humaines [8, 9].

Rapidement, il est apparu que le microbiote (la communauté bactérienne) intestinal possédait d’autres rôles tels que la protection des cellules épithéliales intestinales, la régulation du stockage des graisses mais aussi une interaction avec le système immunitaire et donc potentiellement responsable de pathologie humaine. Ces constatations ont été la base de plusieurs études durant ces 10 dernières années.

Etant donné qu’une grande proportion des bactéries intestinale estimée à 80% est non cultivables [9], l’avènement de nouvelles techniques moléculaires a permis donc une analyse plus complète de la composition de cette flore.

1.2 Apparition des méthodes moléculaires

En effet, dès la fin des années 1980, Carl Woese[10] a révélé qu’une petite sous unité ribosomal (ARN16s dans le cas des bactéries) contenait des régions de séquences nucléotidiques qui sont hautement conservées et qu’elles sont entrecoupées de régions hypervariables [10]. Ces régions hypervariables contiennent la signature du groupe et de l’espèce phylogénétique. Grâce au développement de ces techniques, mais aussi à la prise de conscience que la santé humaine dépendait de la flore qui se trouve à l’extérieur et à l’intérieur du corps humain, l’étude de la microbiologie intestinale a connu une renaissance dans la dernière décade.

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Les premières études moléculaires ont combiné la PCR (polymerase chain reaction) et une méthode d’électrophorèse en gel couplé avec un gradient dénaturant (DGGE : Denaturing Gradient Gel Electrophoresis), permettant une comparaison entre les microbiotes intestinaux. Puis, une technique d’hybridation (FISH, Fluorescent In Situ Hybridation) a permis de détecter environ 32 espèces différentes de bactéries intestinales. Cette dernière technique possède une très bonne spécificité mais il faut connaître dans un premier temps les séquences que l’on veut observer pour pouvoir choisir les amorces.

Cette première évaluation de la flore a permis de constater que la famille des

Bacteroidetes et celle des Firmicutes (clostridium) constituaient pour plus de la moitié du

microbiote. Une autre approche a été d’observer directement les produits biochimiques du métabolisme microbien par spectrométrie de masse.

Cette méthode n’est utilisée qu’en complément de techniques traditionnelles de séquençages. La première tentative pour déchiffrer la diversité du microbiote intestinal revient à un groupe de scientifique de l’université de Stanford qui a créé un programme d’analyse des produits de séquençages [9].

Cette analyse a été réalisée sur 13355 séquences de gènes de procaryotes du tissu muqueux et des selles de 3 adultes sains. Les résultats ont montré que sur 13 355 séquences, 11 831 appartenaient aux bactéries (395 espèces phylogénétiquement différents) et 1 524 aux

Archea. Et ainsi, 301 des espèces bactériennes sur les 395, appartiennent à la famille des Firmicutes et les 65 restantes à la famille des Bacteroides. Ces résultats ont été confirmés par

une étude de cohorte sur 124 échantillons de selles humains qui a révélé la présence de 1000 à 1150 espèces différentes dans le pool de selles et au moins 160 espèces différentes dans chaque selle.

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1.3 Avènement de la métagénomique

Il s’est avéré que l’étude phylogénétique n’était pas suffisante et ne répondrait pas à toutes les questions. Après la découverte de la totalité du génome humain, Julian Davies signalait que le décodage du génome humain était insuffisant pour bien comprendre la biologie humaine puisque la flore microbienne affectait de façon importante la vie humaine. En effet, il prédit que ces bactéries pourraient être porteuses de 2 à 3 millions de gènes non caractérisés ajoutés aux 30 000 gènes humains.

Un peu plus tard, Relman and Folkow lancent un second projet portant sur le génome humain pour exécuter une étude métagénomique des communautés bactériennes des différentes parties du corps (peau, l’appareil reproducteur et le tube digestif de la bouche jusqu’à l’anus). En même temps, Handlsman et Joshua Lederberg inventent succéssivement les termes métagénome et microbiome. Et qui désignent l’ensemble du génome de tous les membres de la communauté bactérienne.

1.4 Projets en cours

Au cours des dix dernières années, d’importants projets menés aux États-Unis, en Europe et en Asie ont permis d’enrichir considérablement nos connaissances sur ce mystérieux microbiote intestinale.

Le Dr Joël Doré Directeur de Recherche à l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA), indique que « les outils que nous utilisons pour évaluer le microbiome et comprendre la symbiose « homme-microbiote » ont gagné en résolution et sensibilité. » Aux yeux du Pr James Versalovic, pathologiste en chef de l’Hôpital pour enfants du Texas et professeur de pathologie à la faculté de médecine Baylor, aux ÉtatsUnis, « le Projet Microbiome Humain dirigé par les États-Unis (The US Human Microbiome Project) nous a offert une nouvelle perspective du corps humain sain à travers l’étude de l’association entre ses microorganismes. Chaque partie du corps humain, comporte une communauté bactérienne qui lui est propre, y compris l’intestin ».

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Ainsi le corps humain parait incomplet sans ses microbes en particulier les microbes intestinaux. Et certains scientifiques ont considéré le microbiote intestinal comme un « super-organe », pour lequel on doit s’intéresser comme n’importe quel autre super-organe compte tenu de ses effets et fonctions uniques qu’il effectue.

« Le microbiote intestinal est indispensable, au développement parfait de l’intestin, des systèmes immunitaire, vasculaire et nerveux, pour l’Homme ainsi que pour tous les mammifères» exprime Versalovic. « D’une autre façon, être « complètement humain » exige avoir un microbiote intestinal diversifié et pleinement fonctionnel. » Il est devenu donc illogique de parler de santé humaine sans insister sur le rôle du microbiote intestinal dans le maintien et le rétablissement de la santé humaine. » [11].