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II.6 Conclusion du chapitre

III.1.3 Mesures thermiques par la méthode 3ω

Deux méthodes ont été utilisées pour quantifier les propriétés thermiques des matériaux constitutifs des QCLs, les mesures par la méthode 3ω et celles par thermo- réflectance. Ces expériences ont été menées en partenariat avec l’équipe “Acoustique pour les nano-sciences” de l’INSP. Nous décrivons dans cette première section la méthode 3ω ainsi que les résultats obtenus pour le SiO2. Ceux-ci seront ensuite comparés à ceux obtenus par thermo-réflectance dans la sectionIII.1.4.

Description générale de la méthode

Le principe général de la méthode est de déposer un transducteur métallique sur l’échantillon à caractériser. Il est composé d’une bande métallique étroite, de l’ordre de 10 µm de large pour 1 à 3 mm de long, et de quatre plots de contact, d’environ 1 mm2. Une vue schématique du transducteur est représentée sur la figureIII.8a.

CHAPITRE III. OPTIMISATION DE LA PUISSANCE ÉMISE PAR UN QCL60

(a) Le transducteur thermo-électrique (b) Deux transduc- teurs sur SiO2

Figure III.8: Vue schématique du transducteur thermo-électrique

L’échantillon est placé dans un cryostat sous vide afin de pouvoir effectuer des mesures cryogéniques si nécessaire et de contrôler la température l’environnant. Le cryostat est scellé par un joint en indium afin de garantir le vide. On vient ensuite chauffer la bande métallique avec un courant sinusoïdal de pulsation ω. En mesurant l’harmonique en 3ω générée par l’échauffement sur la tension, on peut en déduire la conductivité thermique du matériau sous-jacent. L’harmonique en 3ω est mesurée avec un amplificateur à détection synchrone (lock-in amplifier) dont la composante en ω est donnée par le synthétiseur.

Le schéma équivalent du dispositif expérimental permettant la mesure de la composante 3ω est présenté sur la figureIII.9.

Figure III.9: Schéma électrique de l’expérience. Le transducteur est représenté en rouge.

CHAPITRE III. OPTIMISATION DE LA PUISSANCE ÉMISE PAR UN QCL61 par un synthétiseur :

iω(t) = I0cos(ωt) (III.9)

Ce courant provoque un échauffement en traversant le transducteur, proportion- nel à son effet Joule. Le courant étant en ω, le flux thermique créé un échauffement ∆T qui possède à la fois une composante continue et une composante sinusoïdale ∆T2ω, d’amplitude θ, de pulsation 2ω et déphasé de φ par rapport au courant :

∆T2ω= θ cos(2ωt + φ) ∝ Ri2ω (III.10)

où R est la résistance de la piste métallique. L’amplitude θ des oscillations de température sont typiquement de l’ordre de 0.001K à 0.1K. La résistance du trans- ducteur est fonction de la température tel que :

R= R0(1 + α∆T ) (III.11)

Où α est le coefficient thermique de la piste. On lit la tension V au bord du transducteur, qui est le produit de R et iω. La tension possède donc une composante

en ω et une composante V3ω en 3ω, qui reflète l’échauffement. La composante en 3ω s’écrit :

V3ω =

R0I0αθ

2 cos(3ωt + φ) (III.12)

Elle est difficile à récupérer car son amplitude est très faible devant celle du terme en ω. Afin de pouvoir la mesurer, on retranche à V la composante en ω à l’aide de la tension Ve lue aux bornes de la résistance d’équilibrage Re. En réglant le gain de

l’amplificateur k2, on parvient ainsi à rendre Vω faible devant V3ω. L’acquisition des mesures se fait de la manière suivante :

— On mesure la fonction de transfert entre la tension de sortie lue par le lock-in

Vlock et la tension V aux bornes du transducteur en court-circuitant l’ampli-

ficateur opérationnel k2 de la partie supérieure.

— En lisant en sortie la composante en ω, on règle la résistance variable Re de

façon à minimiser ce signal qui peut parasiter la lecture en 3ω, c’est l’équili- brage du pont différentiel.

— on balaye en fréquence, typiquement de 10 Hz à 2 kHz, le signal délivré par le synthétiseur. Le courant est mesuré à l’aide de Rc et adapté pour être

maintenu d’amplitude constante. Pour chacune des fréquences, on mesure la tension en 3ω lue par le lock-in.

— A chaque tension de sortie, on associe la tension V3ω avec la fonction de transfert précédemment mesurée.

— On en déduit ∆T avec la formule III.12.

Ce dispositif expérimental nous permet donc de mesurer l’amplitude et la phase des oscillations de température ∆T . Il faut ensuite les relier aux propriétés ther- miques des matériaux afin d’en déduire les conductivités thermiques.

Cas d’un matériau massif

On se place dans l’hypothèse où l’échauffement est uniforme dans la piste métal- lique. On modélise ainsi le flux thermique par une fonction porte. On peut montrer

CHAPITRE III. OPTIMISATION DE LA PUISSANCE ÉMISE PAR UN QCL62 que pour un matériau massif, l’élévation de température peut alors s’écrire [113]:

∆T(ω) = P πk0 Z +∞ 0 sin2(y) y2 1 q y2+ iy2 0 dy (III.13) où P = RI2

0/L est la puissance électrique linéique avec L la longueur du trans- ducteur, k0 est la conductivité thermique du matériau, y = W λ/2, y0 = W2ω/4D et D est la diffusivité thermique.

Pour des fréquences suffisamment basses, <(∆T (ω)) est linéaire et peut se réduire à : <(∆T (ω)) = P πk0  −1 2ln ω Ω  + η (III.14)

où η = 32 − γ, avec γ la constante d’Euler et : Ω= 4k0

ρCW (III.15)

avec ρ la masse volumique du matériau, C sa chaleur spécifique et W la largeur du transducteur.

Cas d’une couche mince sur un substrat

Dans l’hypothèse d’une couche mince sur substrat semi-infini, on peut écrire [113]: <(∆T ) = P πk  −1 2ln ω Ω  + η+ P t1 W k1 (III.16)

où t1 est l’épaisseur de la couche mince et k1 sa conductivité thermique.

On voit donc que l’effet de la couche mince est uniquement de translater la partie réelle de l’amplitude de l’échauffement vers le haut. En pratique, pour déterminer

k1, on procède donc comme suit :

— on mesure la conductivité thermique du substrat en prenant la pente de <(∆T )

— on fait une hypothèse sur la chaleur spécifique C et la masse volumique ρ du substrat en supposant que C = 0,31 J/gK et ρ = 4,81 g/cm−3.

— on ajuste à la courbe de <(∆T ) mesurée pour le substrat avec couche mince, la courbe calculée de <(∆T ) pour le substrat seul

— on déduit k1 du décalage entre la courbe calculée pour le substrat nu et celle mesurée du substrat avec couche mince

Mesure des propriétés thermiques du SiO2

Afin de simplifier la mise en œuvre des expériences et d’économiser l’utilisation d’un joint en indium, Les échantillons de SiO2 ont été caractérisés avec et sans mise sous vide de la chambre pour étudier si le vide est nécessaire, et quantifier l’erreur si la chambre n’est pas mise sous vide. Le principal risque de casser le vide est de perturber l’évolution thermique de l’échantillon par convection de l’air.

CHAPITRE III. OPTIMISATION DE LA PUISSANCE ÉMISE PAR UN QCL63 Le premier transducteur utilisé, TR1, a une longueur de 750 µm pour une largeur de 9 µm. On considère à titre exemple, le cas où I = 15 m A en étant sous vide, sans circulation d’hélium pour assurer le refroidissement de l’échantillon. Il a une résistance de 11,44 Ω, et la puissance linéique P dissipée est de 3,434 W/m. On mesure dR

dT = 3, 063 × 10

−2 Ω/K. On calcule à partir des mesures les oscillations de température ∆T puis on calcule une courbe d’ajustement pour leur partie réelle, <(∆T ), par la fonction y = A − B ln(x) comme représenté sur la figureIII.10.

10 100 1000 Fréquence (Hz) 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 Re( ∆Τ) (Κ) InP/SiO2 exp. InP/SiO 2 fit InP semi-empirique I = 15 mA y = 0.66534 - 0.0085409 * ln(x) ∆T 01 = 0.5468 K

Figure III.10: Amplitude des oscillations thermique pour l’InP nu et pour l’InP avec un film de 1233 nm de SiO2

Les mesures expérimentales sont en cercle noir et la courbe ajustée en rouge. Afin de réduire des effets de mauvaise thermalisation de l’échantillon qui introduisent des oscillations à basses fréquences, on effectue le fit pour f > 200 Hz. On obtient

A= 0.6653 et B = 8, 541 × 10−3, et comme on a : P

2πk0 = B On en déduit ainsi la conductivité du substrat d’InP :

k0=

P

2πB = 63,99 W/mK

On peut maintenant comparer ces courbes à la courbe calculée correspondant à l’échauffement du substrat sans diélectrique, donnée par l’équation III.14et repré- sentée en bleue sur la figure III.10. On évalue Ω = 2, 119 × 106 s−1.

La différence de température les deux courbes ∆T01 = 0,547 K correspond à la contribution de la couche mince dans l’échauffement. D’après l’équation III.16, on en déduit sa conductivité thermique :

k1 =

P t1

W ∆T01 = 0,873 W/mK (III.17)

La même procédure est répétée pour des courants de 5, 10, 15 et 20 mA, avec et sans mise à vide de la chambre, avec le même transducteur TR1, afin de mesurer la conductivité thermique du substrat et du SiO2. L’ensemble des résultats pour le

CHAPITRE III. OPTIMISATION DE LA PUISSANCE ÉMISE PAR UN QCL64 SiO2 est récapitulé dans l’annexeB.1.1. Les conductivités thermiques k0 du SiO2 et

k1 de l’InP ainsi mesurée sont regroupées dans la figureIII.11.

60 62,5 65 67,5 70 72,5 k 1 (W/mK) k0 sous air k0 sous vide 0 5 10 15 20 25 Courant (mA) 0,8 0,82 0,84 0,86 0,88 0,9 k 0 (W/mK) k 1 sous air k 1 sous vide

Figure III.11: Conductivités thermiques mesurées pour l’InP et le SiO2 en fonction du courant traversant le transducteur

La conductivité thermique mesurée est de 64,00 W/mK avec des variations infé- rieures à 5% pour le substrat d’InP et de 0,864 W/mK avec des variations inférieures à 2% pour le SiO2. Ces valeurs sont en accords avec la littérature, l’InP non inten- tionnellement dopé a une conductivité thermique tabulée de 68 W/mK [114]. Dans notre cas, l’InP est fortement dopé (nd = 9.3 × 1017cm−3). Nous nous attendons

bien à une conductivité thermique plus faible. En effet, la chaleur est majoritaire- ment transportée par les phonons à température ambiante et la présence de dopants vient entraver leurs déplacements. De même, pour le SiO2, on retrouve des valeurs similaires à celle de la littérature [115, 116] et à celle que nous avons mesuré par thermo-réflectance, que nous présenterons par la suite.