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IV.4 La rétro-action comme moyen de contrôler le faisceau

V.1.3 La combinaison cohérente de QCLs

La première réalisation expérimentale de réseau de QCLs en phase a été reportée dans la littérature en 2011 par De Naurois [235]. L’appellation de micro-stripes QCL (µSQCL) a été donnée à ces composants où la largeur de chaque ruban est faible (inférieure à 4 µm) et où le couplage des rubans se fait par évanescence du champ dans le matériau entre les rubans, de l’InP dopé Fe. De cette façon, des réseaux comportant jusqu’à 16 rubans de 2 µm ont été couplés et ont émis autour de 8,4 µm de longueur d’onde. Malgré une densité de courant de seuil élevée par rapport à des QCL unitaire, typiquement de 7 kA/cm2, ces composants ont tout de même atteint des puissances crête de sortie de l’ordre de 250 mW pour un système de 4 stripes de 2 µm espacés de 8 µm. Comme dans le cas des diodes lasers, le profil du champ lointain obtenu est dans ce cas bi-lobe. Une émission cohérente d’un réseau de 32 éléments a ensuite été démontrée [236], malgré une enveloppe du champ électrique creusée au centre de la facette. Des simulations thermiques ont été menées [237] par la suite pour montrer que la résistance thermique était drastiquement réduite pour ces architectures. En effet, cette étude a montré que la résistance thermique pouvait être diminuée d’un facteur 2 à 3 par rapport à un laser fait d’un unique ruban en utilisant des µSQCLs, à charge thermique égale. Dans ce cas, c’est alors la conductivité thermique de l’embase qui devient limitante pour l’évacuation de la charge thermique. Ces composants ont ensuite été intégrés dans des systèmes de spectroscopie permettant notamment de détecter l’acétone [238]. Pour arriver à cette fin, une des deux lobes d’émission était réinjecté dans le µSQCL dans une configuration de Littrow pour obtenir une raie spectrale d’émission fine et accordable sur 40 cm−1.

Une autre approche a été choisie par Botez qui utilise des rubans plus large, de 15 µm, et qui les couplent entre eux en les faisant fonctionner sur les modes de fuites [239]. On parle alors de réseaux de QCL à antiguidage. Afin d’obtenir un indice de réfraction plus fort entre les rubans, qui est une condition nécessaire pour pouvoir faire apparaître les modes de fuite, une couche d’InP dopé Fe et d’InGaAs dopé n sont recrues entre les rubans, légèrement plus haut que la zone active. Des puissances pics de 5.5 W en régime impulsionnel à 3% ont ainsi été obtenues avec un profil d’émission où environ 80% de la puissance est dans un lobe central, d’angle à mi-hauteur 6.8◦. Suite à cette unique réalisation expérimentale de réseau de QCLs à antiguidage, leur fonctionnement théorique ainsi que leur conception ont été analysés en détail [240] afin de prédire le mode optique favorisé. Ces composants sont dimensionnés pour opérer autour de 4,8 µm, pour des applications de puissance.

D’autre part, l’équipe de Wang [241, 242] a choisi la réalisation de réseau de QCLs couplés en jouant sur le gain de la zone active. En effet, dans ce cas, seule une partie de la couche guidante supérieure est gravée, la zone active n’est pas atteinte,

CHAPITRE V. RÉSEAUX DE QCLS COUPLÉS 122 on parle de gravure shallow. Dans ce cas, la variation d’indice au niveau de la zone active varie peu, mais l’injection du courant étant localisée, on crée ainsi un réseau de QCLs unitaires par le gain. La zone entre les rubans présente tout de même du gain, par diffusion du courant, ce qui vient favoriser un mode optique donnant un champ lointain mono-lobe. Ainsi, 15 éléments ont pu être mis en phase [241] pour une puissance crête de sortie de l’ordre de 4 W, avec un fonctionnement quasi monomode spatial et spectral. Par la suite, un réseau de 100 éléments de 5 µm de large et espacés de 7 µm a été fabriqué [242]. Ce dispositif, bien que non purement mono-lobe en champ lointain (environ 73% de la puissance est toutefois dans le lobe central), a permis d’atteindre des puissances crêtes de l’ordre de 40 W.

Toutes ces approches reposent sur un couplage latéral des QCLs entre eux. Il est également possible d’utiliser un couplage longitudinal. Ainsi, des structures ar- borescentes ont été développées [243, 244, 245]. Celles-ci ont permis d’obtenir un puissance de 1,5 W en CW à une longueur d’onde de 4,6 µm. Une amélioration du profil du champ lointain est toutefois nécessaire avant qu’elles ne puissent répondre aux besoins des DIRCM et de la spectroscopie à distance.

Table V.1: Points forts et points faibles des différentes approches pour coupler mo- nolithiquement des QCLs entre eux.

Couplage par couplage par Gravure

évanescence antiguidage shallow

Qualité du - + +

champ lointain (bi-lobe) (quasi mono-lobe) (quasi mono-lobe)

Dissipation ++ - –

thermique (forte surface de dissip.) (faible cond. de l’InGaAs) (pas de dissip. latérale)

Facilité de - – ++

fabrication (une recroissance) (plusieurs recroissances) (simple gravure)

Capacité de - + -

couplage (couplage série) (couplage parallèle) (couplage série) Les avantages et les inconvénients de chacune de ces trois architectures sont récapitulées dans le tableauV.1. Comme on le voit, bien que désavantagés par une émission bi-lobe et la nécessité d’effectuer une recroissance, les µSQCL restent les seuls dispositifs de la littérature permettant une évacuation thermique assez efficace pour viser un fonctionnement en régime continu. Les autres méthodes sont limitées à un régime impulsionnel, ce qui limite fortement leur puissance optique moyenne.

Dans la sectionV.2, nous commencerons par présenter plus avant les phénomènes de sélection du super-mode optique et de dissipation thermique dans les µSQCL. Ensuite, nous définirons et expliquerons pourquoi nous avons choisi une structure de macro-rubans pour la réalisation de nos composants. Enfin, nous exposerons les résultats que nous avons obtenus à deux longueurs d’onde, 4,6 µm et 8,2 µm.

Dans la sectionV.3, nous détaillerons ensuite une première méthode pour nous affranchir d’un profil d’émission bi-lobe et revenir à un champ lointain mono-lobe. Celle-ci repose sur une structuration non-uniforme des micro-rubans. Après une étude optique et thermique, nous montrerons que cet apport permet bien de reve- nir à un champ lointain mono-lobe. Finalement, nous verrons néanmoins que cette

CHAPITRE V. RÉSEAUX DE QCLS COUPLÉS 123 approche souffre de limitations en ce qui concerne la réalisation technologique des composants ainsi que leur rendement à la prise.

Enfin, dans la sectionV.4, nous présenterons un nouvelle méthode pour réaliser des réseau de QCLs antiguidés. Celle-ci repose sur l’utilisation de silicium amorphe (Si-a) comme matériau de remplissage de l’entre-ruban et a donné lieu à un brevet. Après une introduction à ces composants, nous mènerons une étude approfondie sur le comportement optique du Si-a, en mesurant notamment ses constantes optiques

n et k dans le moyen infrarouge. Par la suite, en nous appuyant sur ces mesures,

nous montrerons les règles de conception pour sélectionner le super-mode optique désiré et réaliser des composants de forte puissance. Nous clôturerons ce chapitre en présentant de premiers résultats de fabrication.