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Partie II : Etude expérimentale

II. Matériels et méthodes

2) Les mesures

a) Poids et ingestion

Que ce soit chez les taurillons ou chez les génisses, les pesées des animaux (en kg) ont eu lieu à l’entrée, puis tous les 15 jours environ.

Les quantités ingérées (en kg de MS/j) ont été obtenues pour chaque animal par :  La connaissance des teneurs en MS de l’aliment distribué à l’auge et de celui

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 L’enregistrement des quantités distribuées au GreenFeed.  La pesée quotidienne de l’aliment donné à l’auge.

 La pesée des refus de chaque individu le lundi (refus sur les rations du vendredi, du samedi et du dimanche), le mercredi (rations du lundi et du mardi) et le vendredi (rations du mercredi et du jeudi).

b) Les GreenFeed

Pour mesurer en temps réel le CH4 émis par les bovins, un nouvel appareil, le GreenFeed (GF), a été utilisé. Il nous a été fourni en trois exemplaires par l’entreprise C-Lock Inc., Rapid City, South Dakota, USA. Les atouts et inconvénients de cet outil assez peu coûteux ont été décrits précédemment, et son emploi au cours de notre expérience a apporté de nouvelles informations sur son potentiel d’utilisation.

Le principe est la mesure d’un flux, l’air absorbé étant analysé uniquement si le bovin est assez proche, assez longtemps, dans des conditions optimales, et s’il a été reconnu grâce à sa boucle auriculaire. Des capteurs contrôlent la température et l’humidité ainsi que la position de la tête du bovin. Le fonctionnement est alors le suivant : un système délivre un aliment aux animaux à proximité de la prise de gaz, selon un protocole bien défini (le bovin se présente, il a accès à une tasse de 28g ou 38g toutes les 30 ou 45 secondes selon les cohortes, et ce pendant 4 minutes, puis il ne peut plus revenir pendant 4 à 6 heures). Ce protocole permet d’une part une présence au GF assez longue pendant chaque visite pour mesurer les émissions, ce qui est nécessaire puisque le méthane est émis de façon pulsatile car éructé (contrairement à un gaz respiratoire comme le CO2), d’autre part un temps passé suffisamment court pour laisser les autres animaux venir à leur tour, et enfin une quantité d’aliment ingérée à la machine assez faible pour qu’elle modifie peu la ration de l’individu. Quelques dysfonctionnements se sont produits, mais sans que cela ait eu d’impact sur la capacité du GF à mesurer les taurillons et les génisses.

L’aliment distribué au GF pour les taurillons est le même condensé que celui à l’auge. Pour les génisses, étant donné l’impossibilité de distribuer de l’ensilage au GF, ce condensé a également été utilisé, avec pour objectif d’influencer le moins possible la consommation résiduelle des animaux selon qu’ils se rendent fréquemment au GF ou non (ce qui explique le choix d’un aliment moins riche que les concentrés traditionnels).

Pendant que l’animal s’alimente, il y a capture et déplacement de l’air du mufle au capteur. La ventilation est fixée à 34L/seconde, et le volume du GreenFeed étant de 100L, l’air

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est entièrement renouvelé toutes les 3 secondes environ. Des filtres évitent la poussière, qui abîmerait l’appareil et créerait un biais dans les mesures.

L’émission du CH4 émis à chaque visite par le bovin est donc estimée à l’aide de mesures ponctuelles, avec l’équation fondamentale suivante :

CH4débit = Fc*CR*∑𝑡(∆𝑡 ∗ (𝐶𝐻4𝑚𝑒𝑠 − 𝐶𝐻4 𝑎𝑚𝑏) ∗ 𝑄𝑎𝑖𝑟)

CH4débit est ramené en g/j à chaque mesure, Fc est un facteur dimensionnel, CR est le taux de récupération en %, t

la durée de visite par l’animal (en secondes), ∆𝑡 la période de mesure (=1s), CH4mes la teneur en CH4 mesurée

par le capteur lors de la visite de l’animal, CH4amb la teneur en CH4 dans l’air ambiant et Qair le débit de l’air

passant dans la pompe jusqu’au capteur de mesure de CO2 et de CH4.

Chacune des composantes de la formule est contrôlée. Le ∆𝑡 et le Fc sont des constantes, donc fixées. Un capteur de flux mesure la vitesse de l’air. Enfin, des étalonnages sont nécessaires (figure 36). Pour ce faire, il existe des systèmes de contrôle visant à quantifier l’air capturé et l’efficacité du capteur. En plus du CH4, un autre gaz, qui n’a pas été utilisé pour cette étude, est évalué : le CO2. Le CR est alors estimé par le test de récupération, c’est-à-dire en libérant une quantité de CO2 connue dans l’auge au niveau de la zone de prélèvement des gaz éructés, et la quantité mesurée permet alors, en calculant sa proportionnalité par rapport à la valeur libérée, de connaitre le pourcentage capté par la machine. La calibration, quant à elle, consiste notamment en la libération d’azote pur directement au niveau du capteur pour obtenir la ligne de base « CH4mes = 0 », puis en la libération au même endroit d’un mélange avec des concentrations connues de CO2 et de CH4, permettant un étalonnage précis.

148 Nous pouvons remarquer les lignes représentant les teneurs de l’air ambiant en CO2 (bleu) et en CH4 (rouge),

lorsqu’aucun bovin ne se présente à la machine.

La première observation (cercle marron) est consécutive à un test de calibration au propane, qui est libéré directement au niveau du capteur « CH4 » et qui permet de vérifier que celui-ci fonctionne correctement.

Les deux suivantes (rose) correspondent à un autre test de calibration. De l’azote pur, puis un mélange connu de CH4 et de CO2, sont successivement libérés directement au niveau du capteur. L’azote permet de faire décroitre les

deux courbes aux lignes de bases CH4mesuré = 0 et CO2mesuré = 0. Puis le mélange en proportions connues de CH4

et de CO2 libérés permet d’étalonner les valeurs qui seront mesurées.

Les dernières (vert) font suite à un test de récupération. Du CO2 est libéré en quantité connue au niveau de la zone

de récupération du flux d’air, et la valeur mesurée par la machine permet de connaitre quelle proportion du gaz a été transférée jusqu’au capteur, reproduisant ce qu’il se passe à partir du mufle des bovins.

Figure 36 : Les tests de calibration et de récupération (Interface développée par C-Lock pour les utilisateurs des GreenFeed)

Dans ce système, les mesures sont réalisées à court terme. Par rapport à une chambre respiratoire dans laquelle la totalité du CH4 émis pendant la journée est prise en compte, il existe donc une erreur d’estimation des émissions quotidiennes du fait de l’échantillonnage des visites. Celle-ci peut être atténuée en calculant pour chaque animal une moyenne d’émissions à partir de multiples valeurs quotidiennes, récoltées pendant plusieurs mois. Une valeur seule ne peut donc pas être représentative de l’émission quotidienne de l’animal, mais en multipliant les mesures chaque jour et sur de longues périodes, l’ensemble des valeurs devient représentatif.

c) Mesures complémentaires : temps de rumination, capacité à digérer la MO et « épaisseur de gras »

Ces mesures complémentaires ont été réalisées dans le but d’évaluer leur possible lien avec les émissions de méthane, pour éventuellement les utiliser en tant que « proxy » à l’avenir,

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ce qui contribuerait à diminuer les coûts d’évaluation des émissions entériques individuelles. Seules certaines génisses ont été évaluées. Les temps de rumination, la capacité à digérer la MO, et « l’épaisseur de gras » ont été respectivement mesurés sur 99 (ceux avec des valeurs disponibles sur au moins 51 jours), 100 (absence de donnée pour la cohorte 2012A) et 118 animaux (un animal non évalué).

Les données utiles ont été acquises par l’analyse d’autres chercheurs de l’équipe, voire d’un autre groupe de recherche. Ainsi, seule une description sommaire des moyens d’obtention de ces informations va être réalisée ici :

 Les temps de ruminations ont été obtenus à l’aide des Ruminacts (photographie 7), fournis par Créavia (colliers équipés d’un microphone positionné au contact du cou, enregistrant les bruits de rumination 24h/24, et dont l’aptitude à effectuer ce type de mesure a été prouvée par Lindgren (2009)). Le coût total du dispositif pour un troupeau est de 9 000 euros environ, selon le nombre de colliers nécessaires.

Photographie 7 : Un taurillon charolais équipé d’un collier Ruminact (Collection personnelle)

 Les capacités individuelles à digérer la MO ont été prédites par Virginie Decruyenaere, du Centre Wallon de Recherches Agronomiques, à partir de spectres dans le proche infrarouge révélant la composition des selles (teneur en fibres, etc.), et en tenant compte de celle de l’aliment. Les échantillons ont été récoltés lorsque les animaux étaient mesurés au GF depuis un peu plus d’un mois (1 échantillon), puis dix jours plus tard (1 échantillon).

 Les estimations « d’épaisseur de gras » ont été acquises au moyen des Notes d’Etat Corporel et des résultats de mesures échographiques effectuées à la fesse, aux lombaires et au niveau des côtes, sur chaque animal à l’âge de 22 mois.

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