Nous avons extrait les paramètres de la BDF générique (avec SOA et avec EDFA) pour pouvoir
exploiter le modèle élaboré dans la partie 2 avec des valeurs numériques qui correspondent aux
valeurs expérimentales. Les différents paramètres sont les suivants :
- les pertes intra-boucle Π,
- le courant de biais de l’amplificateur optique correspondant au seuil laser 𝐼
th,
- la puissance d’injection 𝑃
0,
- le temps que met la lumière pour faire un tour de boucle 𝜏
𝑐,
- la valeur du coefficient de couplage photon/atome 𝜅,
- la relation entre le courant de polarisation 𝐼 de l’amplificateur optique et le taux de pompage
de la boucle 𝑟(𝐼).
3. b. i. Mesure des paramètres 𝚷, 𝑷
𝟎, 𝑰
𝐭𝐡et 𝝉
𝒄Les trois premiers paramètres peuvent être obtenus assez facilement : Π est mesuré avec un
puissancemètre à partir de la réduction de la puissance sur un tour de boucle. 𝑃
0est lui aussi mesuré
avec un puissancemètre. 𝐼
thest noté pour les deux amplificateurs quand le gain de l’amplificateur est
égal aux pertes de la boucle.
𝜏
𝑐est mesuré grâce à l’effet Talbot décrit dans la section 1. c. i. Pour des valeurs entières de 𝑓
𝑠𝜏
𝑐, le
champ en sortie de boucle est un train d’impulsions de période 𝑓
𝑠. On analyse le signal en sortie de la
BDF avec une photodiode rapide et un analyseur de spectre électrique, et on mesure ainsi 𝜏
𝑐pour les
deux amplificateurs optiques.
3. b. ii Mesure de 𝝉
La valeur de 𝜏 pour les EDFA est connue et vaut environ 10 ms [33, 34, 35]. Dans le cas d’un SOA, par
contre, la valeur de 𝜏 peut varier de plusieurs ordres de grandeur, en fonction du semi-conducteur et
du taux de remplissage du niveau 𝐸
2. Dans la littérature, différents mécanismes de recombinaison
radiatifs et non radiatifs pour les semi-conducteurs sont détaillés permettant de quantifier la valeur
de 𝜏 [36]. Cependant, si ces modèles présentent l’avantage de décrire de manière assez complète
l’évolution des grandeurs caractéristiques des semi-conducteurs, ils nécessitent tout de même une
étape de caractérisation pour déterminer les différentes constantes de recombinaison. Aussi, nous
avons préféré adopter une approche expérimentale en caractérisant directement l’évolution de 𝜏 en
fonction de la puissance d’injection et du taux de pompage. Cette démarche permet de connaitre
directement la valeur de 𝜏 correspondant aux paramètres de l’expérience réalisée.
Expérimentalement, la valeur de 𝜏 pour un SOA peut être déterminée en mesurant la fonction de
transfert électrique complexe 𝑆
21 RF(2𝜋𝑓) du SOA dans une liaison optique/hyperfréquence [37]. En
effet, dans une liaison optique/hyperfréquence contenant un SOA (comme présenté en Figure I - 15),
une onde porteuse optique, modulée par un signal RF à la fréquence 𝑓 va entrainer une oscillation
cohérente de la population de porteurs dans le SOA. Cette oscillation de population va entrainer une
certaine modulation du gain du semiconducteur à la fréquence 𝑓.
Figure I - 15 Schéma du banc expérimental de mesure du temps de recombinaison de porteur 𝝉 du SOA. MZM : modulateur de Mach-Zehnder. Att. : atténuateur variable optique. PD : photodiode. BT : T de biais. VNA : analyseur vectoriel de réseau.
En fonction du taux de recombinaison des porteurs, la bande passante de la modulation de gain sera
plus ou moins grande. Plus précisément, le SOA agit comme un filtre quasi passe-haut, où la
fréquence de coupure du comportement passe haut 𝑓
𝑐est donnée par 2𝜋𝑓
𝑐= 1/𝜏 :
|𝑆
21 RF(2𝜋𝑓)|
2= 𝐺
opt2( 𝜏
𝜏
comp)
2
1 + (2𝜋𝑓𝜏
comp)
21 + (2𝜋𝑓𝜏 )
2(I. 46)
avec 𝐺
0le gain optique, et 𝜏
comp, une constante de temps, aussi caractéristique du SOA étudié.
Nous avons utilisé une liaison optique/hyperfréquence composée d’un laser CW, d’un modulateur de
Mach-Zehnder (pour moduler la porteuse optique), du SOA à caractériser, d’un coupleur, d’un
atténuateur variable et d’une photodiode rapide (cf. Figure I - 15). Pour avoir directement la mesure
du 𝑆
21 RF(2𝜋𝑓) du SOA, nous avons utilisé un analyseur de réseau vectoriel (VNA). Celui-ci permet de
mesurer la fonction de transfert électrique 𝑆
21 RF(2𝜋𝑓) entrée/sortie. Après plusieurs étapes de
calibration (câbles hyperfréquences, liaison optique/hyperfréquence sans SOA), nous avons
caractérisé le 𝑆
21 RF(2𝜋𝑓) du SOA pour plusieurs valeurs de pompage et de puissance d’injection. La
Figure I - 16.a montre un exemple de fonction de transfert 𝑆
21 RF(2𝜋𝑓) pour différents courants de
polarisation du SOA et pour une puissance d’entrée de 240 µW. On retrouve bien le comportement
quasi passe-haut du SOA. La Figure I - 16.b montre le temps de recombinaison 𝜏 en fonction du
courant de polarisation du SOA et pour plusieurs puissances d’injection. La valeur de 𝜏 a été extraite
à partir de l’équation (I. 46).
Figure I - 16 (a) Gain de la fonction de transfert électrique complexe |𝑺𝟐𝟏 𝐑𝐅(𝟐𝝅𝒇)|𝟐 du SOA pour une puissance injectée de 240 µW et un courant de polarisation de 100 mA (bleu), 150 mA (rouge), 200 mA (jaune) et 250 mA (violet). Les courbes en pointillé représentent la modélisation quasi passe haut du SOA selon l’équation (I. 46). (b) Temps de vie de porteur 𝝉 du SOA en fonction du courant de polarisation pour une puissance d’injection de 80 µW (bleu), 240 µW (rouge), 800 µW(jaune) et 1.6 mW (violet)
3. b. iii Mesure de 𝜿 et 𝑰(𝒓)
𝜅 est le paramètre le plus complexe à évaluer. De la même manière que pour le temps de vie de
porteur dans le SOA dans la section précédente, une modélisation plus poussée des différents
phénomènes qui impactent la section efficace de l’amplificateur optique est possible (SOA [36] ou
EDFA [34]). Pour les mêmes raisons que précédemment, nous avons opté pour une approche
expérimentale en caractérisant directement la valeur de 𝜅 pour les milieux à gain étudiés.
Dans un premier temps, nous avons estimé 𝜅 à partir de l’équation (I. 36) en utilisant des valeurs
typiques de section efficace pour les SOA [29, 38, 39, 40] et les EDFA [33, 34, 35]. Dans un second
temps, pour avoir une mesure plus précise de la valeur de 𝜅, nous avons placé tour à tour le SOA et
l’EDFA dans la boucle et nous avons effectué une mesure de la réponse dynamique de la BDF pour un
courant de polarisation donné (105 mA pour le SOA et 170 mA pour l’EDFA), comme présenté en
Figure I - 14.a. Ensuite, nous avons confronté les résultats expérimentaux avec le modèle numérique,
en simulant l’évolution de la BDF par calcul des différences finies dans le domaine temporel (FDTD)
des équations (I. 42) et (I. 43) et nous avons réajusté la valeur de 𝜅 et du taux de pompage associé au
seuil de la boucle 𝑟 avec un algorithme d’optimisation.
La relation entre le courant de polarisation (qui correspond au pompage du milieu à gain) et le taux
de pompage associé au seuil de la boucle 𝑟 n’est a priori pas triviale : elle dépend des mécanismes de
pompage du milieu à gain et peut être compliquée à modéliser. Cependant pour l’utilisation optimale
des BDF, le taux de pompage de la boucle est généralement fixé légèrement en dessous du seuil laser
[12]. En effet pour un taux de pompage trop bas, les pertes par tour de boucle sont élevées, et la
largeur du peigne est très réduite (cf. équation (I. 7)). Pour l’étude expérimentale, on se limite ainsi à
une portion réduite du taux de pompage de la boucle (proche de 𝑟 = 1). Dans ce cas, on extrapole la
relation entre le taux de pompage et le courant de polarisation à partir de la valeur seuil 𝐼
thet de
l’ajustement de quelques valeurs de 𝑟 pour différents courants de polarisation à 𝜅 fixé.
Les différents paramètres expérimentaux du modèle pour le SOA et pour l’EDFA sont résumés dans la
Table I 1 ci-dessous.
Table I 1 Paramètres de la BDF (Figure I - 12) utilisés pour le modèle numérique pour le SOA et l’EDFA.