VIII. T RACEURS DU TRANSPORT DU GLUCOSE
5. Le 6-déoxy-6-iodo-D-glucose (6DIG)
5.1. Mesure de l’insulino-résistance cardiaque avec le 6DIG
Un protocole de mesure de l’insulino-résistance cardiaque avec le 6DIG par détection
externe de la radioactivité a par la suite été mis en place chez le rat. Brièvement, ce protocole
consistait à suivre les cinétiques sanguines et cardiaques du traceur à l’aide d’une sonde NaI.
Deux acquisitions de la radioactivité de 45 minutes, consécutives à deux injections de 6DIG
étaient réalisées. La première injection de 6DIG était réalisée seule, la seconde injection de
6DIG était précédée de l’injection d’un bolus d’insuline (3UI/kg). Les données biologiques
recueillies étaient ensuite transposées dans un modèle mathématique à trois compartiments.
Ce modèle mathématique permet de prendre en compte plusieurs données biologiques telles
que la cinétique du traceur dans l’organe et la cinétique du traceur dans le sang ; il permet
d’estimer les constantes cinétiques de transfert k(i,j) entre chaque compartiment (Figure 22).
La constante k(2,1) permet d’évaluer l’entrée du traceur dans le muscle cardiaque. Le rapport
k(2,1) mesurée en condition insuline sur k(2,1) mesurée en condition basale permet de
déterminer un index R d’insulino-résistance cardiaque.
Figure 22. Modèle mathématique à trois compartiments pour la mesure de l’insulino-résistance cardiaque
avec le 6DIG.
q1 représente le compartiment plasmatique, q2 le compartiment cardiaque et q3 le compartiment regroupant les
tissus périphériques. Les constantes cinétiques k(i,j) sont déterminées entre chaque compartiment. k(0,1)
représente la fuite, principalement urinaire, du traceur.
La première étude, effectuée sur des animaux nourris avec un régime riche en fructose
(insulino-résistance modérée), des rats Zucker obèses (insulino-résistance sévère), des rats
ZDF diabétiques ainsi que sur leurs contrôles respectifs, a permis de montrer que les index
d’insulino-résistance calculés pour les animaux du groupe Contrôle sont significativement
plus élevés que ceux calculés pour des rats malades, reflétant également des degrés variables
d’insulino-résistance (Briat, 2007). Cette étude a donc permis de montrer pour la première
fois la faisabilité de la mesure de l’insulino-résistance cardiaque in vivo avec le 6DIG.
5.1.2 Validation de la méthode par imagerie scintigraphique
La généralisation des γ-caméras dédiées au petit animal rendu possible l’adaptation du
protocole à l’imagerie scintigraphique. Le protocole expérimental est proche du
précédent mais le temps d’acquisition a été réduit à 20 minutes pour chaque condition (basale
et insuline). D’autre part, la quantité d’insuline injectée est passée de 3UI/kg à 2,5UI/kg pour
s’approcher de modèles plus physiologiques. La radioactivité cardiaque est acquise au moyen
d’une γ-caméra et des prélèvements sanguins réguliers sont réalisés pour établir la cinétique
sanguine du traceur.
Des études de reproductibilité et de sensibilité de la méthode de mesure de
l’insulino-résistance cardiaque ont été réalisées (Thèse de J.Vollaire, 2010). L’étude de reproductibilité a
pour objectif de vérifier que la méthode permet d’obtenir des index similaires lorsque la
mesure est répétée à quelques jours d’intervalle. Les index d’insulino-résistance obtenus à 7
jours d’intervalle sur des rats sains ont permis de montrer une bonne reproductibilité de la
évidence une amélioration de la sensibilité à l’insuline chez des animaux traités avec un
insulino-sensibilisateur. Le protocole de sensibilité a été effectué sur des rats Zucker obèses et
insulino-résistants, traités avec un insulino-sensibilisateur, la rosiglitazone, ou du sérum
physiologique (animaux « placebo » contrôles) pendant 7 jours. Avant traitement, les index
d’insulino-résistance cardiaques sont proches de 1, ce qui témoigne d’une insulino-résistance.
Après 7 jours de traitement (J7), les index d’insulino-résistance cardiaque sont statistiquement
plus élevés (p < 0,05) chez les animaux traités avec la roziglitazone et restent proches de 1
chez les rats contrôles. Cette augmentation de l’index d’insulino-résistance à J7 permet de
mettre en évidence l’amélioration de la sensibilité à l’insuline liée au traitement avec un
antidiabétique oral. Afin de permettre le transfert de la méthode en routine clinique chez
l’homme et son utilisation de cette méthode pour des études répétées chez l’animal, il était
nécessaire de modifier le protocole de manière à s’affranchir des prélèvements sanguins. Un
descripteur empirique basé sur une analyse graphique des courbes d’activité cardiaque a été
développé. Ce descripteur devait répondre aux deux conditions suivantes : permettre de
discriminer une population saine d’une population malade d’une part et présenter une bonne
corrélation avec l’index obtenu grâce au modèle mathématique. Les valeurs de ce descripteur
empirique sont corrélées significativement (r = 0,57 ; p = 0,01) aux valeurs d’index calculées
chez un même animal. Par ailleurs, l’utilisation du descripteur empirique pour estimer
l’insulino-résistance est une méthode sensible et reproductible sur les animaux étudiés. Le
clamp euglycémique hyperinsulinémique étant la méthode de référence de mesure de
l’insulino-résistance in vivo, les index et les descripteurs empiriques ont été comparés aux
valeurs du GIR obtenues sur les mêmes animaux. L’index d’insulino-résistance cardiaque
obtenu par modélisation mathématique est bien corrélé au GIR (r=0,68 ; p=0,02). Le
descripteur empirique ne l’est pas (r=0,51 ; p=0,10), bien que la corrélation entre l’index
d’insulino-résistance et le descripteur empirique soit bonne (r=0,74 ; p=0,01). Ces résultats
peuvent s’expliquer par la grande hétérogénéité des valeurs du descripteur empirique
(coefficient de variation des données estimé à 66 %). La modélisation mathématique,
permettant de calculer l’index cardiaque prenant en compte les échanges sanguins du traceur,
est quant à elle plus précise.
Dans ce protocole, l’acquisition de la radioactivité dans le cœur se fait grâce à une
γ-caméra. Afin d’obtenir les cinétiques cardiaques utilisées pour calculer l’index ou le
descripteur empirique, un traitement d’images est nécessaire : il consiste à placer une zone
d’intérêt de taille fixe sur l’image, de manière à délimiter le muscle cardiaque. Les données
spécifiques à la zone d’intérêt tracée sont ensuite extraites et la cinétique du traceur est
obtenue. Une fois les cinétiques obtenues, le calcul de l’index est le plus possible normalisé.
L’étape du placement de la région d’intérêt est donc déterminante dans le processus de
traitement des données. Une étude de reproductibilité de la méthode a été effectuée avec deux
observateurs différents, sur une série d’animaux sains et sur une série d’animaux
insulino-résistants, et montre une reproductibilité moyenne (test de Kappa).
5.2. Mesure de l’insulino-résistance dans le muscle squelettique avec le