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ment sous le coup de cet article, car elles sont révocables et justement suspectes ; peu importe d'ailleurs, étant donnés

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les termes généraux de l'art. 564, que la donation ait été

laite ou non pendant la période suspecte de l'art. 446, G. co.

L'art. 564 est-il applicable à l'assurance sur la vie et dans quelle mesure? Nous distinguerons deux hypothèses : Le

mari en faisant son assurance avoulu frauder ses créanciers et détourner une partie de l'actif; dans ce cas, les créanciers

trouvent le remède dans le droit commun de l'art. 1167 et dans l'art. 446 du Gode de commerce; il ne peut y avoir de

doute sur ce point qui est universellement admis par les législations étrangères.

Mais telle n'est pas la généralité des cas : on ne peut présumer que lorsque le mari a contracté, il ne le faisait

que pour frauder ses créanciers; bien, au contraire, il a agi

en honnête homme et en bon père de famille, il s'est assuré

parce que les ressources dont il disposait à ce moment le

lui permettaient, il a fait un acte de prévoyance qui, loin

d'être répréhensible, mérite hautement d'être loué.

Quels seront les droits de ses créanciersau casde faillite?

Pourront-ilsprétendre au capitalassuré si leur débiteur vient

à décéder? C'estce que certains auteurs, etavec euxla juris¬

prudence, ontlongtemps soutenu. C'est ainsi qu'un arrêt de Paris, du 1er août1879 (S.,80. 2, 249),décidait que la stipu¬

lation au profit de la femme constitueune libéralité soumise

aux règles des donations; qu'ainsi, en casde faillite du mari,

la veuve perdait le droit de réclamer au détriment de la

masse la libéralité que lui avait faite son mari, et qu'il y avait lieu d'étendre à ce mode de libéralité l'art. 564 C. co.

lequel visant les avantages portés au contrat de mariage était, à plus forte raison, applicable aux libéralités faites

durant le mariage.

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Nous rejetons cette théorie : le capital assuréne constitue

pas une libéralité et ne saurait rentrer dans les avantages

contre lesquels la loi commerciale avoulu défendre les créan¬

ciers du failli. Ainsiquel'a dit fortjustementM.Thaller, l'art.559

est dirigé contre une manœuvre bien connue consistant à

simuler un apport pécuniaire de la femme dans un contrat

en réalité c'est le mari qui fait les fonds. Ce que la loi

veutréprimer, c'est undétournement de l'actif,gage commun des créanciers. Or, ceux-ci pouvaient-ils compter sur le

montantdel'assurance?Non, puisque le droit dubénéficiaire

est en même temps que la créance même, et que cette

dernière n'a jamais fait partie du patrimoine de l'assuré,

c'estce que décide la jurisprudence depuis l'arrêt de cassa¬

tion du 2 juillet 1884. (Dalloz, 1885. 1, 150). C'est ainsi qu'un arrêt de cassation du 7août1888. (S. 89.1, 97) décide

que les dispositions des art.559 et504 du Code decommerce

nesauraient s'appliqueràune assurance surla vie contractée

directement au profit de la femme du failliet n'ayant jamais

fait partie du patrimoine du stipulant. De même, un autre

arrêt du 23juillet 1889 (S. 90.1, 5)déclare que la stipulation

écrite dans un contrat d'assurance sur la vie au profit de la

femme d'un commerçant failli, ne rentre pas dans les avan¬

tages prévuspar les art. 559 et 564 du Code decommerce et

et qui doivent être rapportés à la faillite.

Les dernières décisions de la jurisprudence sur ce point

sontconformes à cellesqui précèdent. Cf. Paris,4mai 1893 (G. des Trib., 24 août 1893), Grenoble, Il décembre 1894 (J. des dss., 1895. p. 228). Douai, 14 mars 1895 [J. des Âss., 1896. p. 19).

Au fond, la jurisprudence actuelle considère que notre

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contrat est bien une donation, mais qu'elle ne rentre pas dans le cas des art. 559 et 5G4. Nous n'admettons pas cette opinion et nous pensons que la femme bénéficiaire reçoit le capital assuré à titre d'indemnité, mais qu'elle est donataire

des primes. Quel sera donc le droit des créanciers à l'égard

de ces primes? D'accord avec lajurisprudence,nouscroyons

qu'il faut faire une distinction : les primes, dit la Cour de cassation, ne devront être restituées que suivant les circons¬

tances; si elles sont restées dans les limites d'une simple

consommation de revenus, elles n'ont pas appauvri enfaitle patrimoine du mari souscripteur de l'assuranceetlerapport n'en est pas du à lafaillite; si, au contraire, par son chiffre,

la prime doit être considérée comme une partie du capital

du failli, le rapport en sera du. (Cf. Cass, 22 février 1888.

S., 88. 1, 121).

Nousnous sommesplacésjusqu'ici dansle casoù le capital

assuré est rendu exigible par le décès du souscripteur. Les créanciers n'ont-ils aucun droit du vivant de leur débiteur ? Nous écartonsbien entendule cas de fraude. Peuvent-ils, en

se fondant sur l'art. 1166, exercer le rachat? Nous ne le croyons pas; il faudrait pour cela qu'ils puissent révoquer

Yattribution bénéficiaire; or, ce droit est personnel à celui qui a fait la libéralité. Il y a bien là, sans doute, un droit pécuniaire etun droit cessible,mais il y aavant toutundroit personnel : l'assuré a entendu se réserver à lui-même et pas à d'autres, pas même à seshéritiers, le droit de révoquer

l'attribution bénéficiaire. Le droitderachatse rattache donc à un ordre de faits et de sentiments il paraît impossible d'admettre que la volonté d'un tiers puisse devenir prépon¬

dérante et se substituer à la volonté du père de famille.

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