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L’enveloppe des mycobactéries est constituée schématiquement de l’intérieur vers l’extérieur, d’une membrane plasmique, d’une paroi et d’une capsule. La caractérisation structurale des constituants de l’enveloppe mycobactérienne a fait l’objet d’abondants travaux

Acides Mycoliques Capsule Membrane plasmique Lipides Extractibles Arabinogalactane Peptidoglycane Périplasme

Figure 2 : Modèle d’organisation de l’enveloppe des mycobactéries (d’après Zuber et al., 2008 et

Daffé & Draper 1998)

Au niveau de la mycomembrane, les acides mycoliques sont modélisé en Noir, en bleu foncé : les phospholipides (longueur 16- à 18- carbone), en bleu clair : les GPLs, en gris clair : les porines, en orange : les dimycolate de tréhalose, en rouge : les monomycolate de tréhalose. Les acides mycoliques et les mycolates de tréhalose sont repliés selon la conformation proposée par Villeneuve et collaborateurs (Villeneuve et al., 2004 et 2007). Les phospholipides de la membrane plasmique sont représentés en orange et marron.

Paroi

Membrane externe

ou

proposés (Barksdale and Kim, 1977) ; (Minnikin, 1982) ; (Brennan and Nikaido, 1995). La technique de cryo-microscopie électronique en section vitreuse (CEMOVIS, Cryo-Electron Microscopy of VItreous Sections) a récemment permis de visualiser la structure fine de l’enveloppe et de mettre en évidence une bicouche lipidique appelée mycomembrane (ou membrane externe) (Zuber et al., 2008) ; (Hoffmann et al., 2008). L’épaisseur de la mycomembrane ou membrane externe a été estimée à 7-8 nm pour les mycobactéries. Ces valeurs sont compatibles avec les données structurales obtenues sur les protéines formatrices de canaux ioniques supposées être présentes dans cette membrane externe (Mahfoud et al., 2006) ; (Faller et al., 2004), mais ne correspondent pas à la taille d’un acide mycolique linéaire (Zuber et al., 2008). Un repliement tridimensionnel des acides mycoliques en W (Villeneuve et al., 2005) ; (Villeneuve et al., 2007) a été proposé pour rendre l’épaisseur de la mycomembrane compatible avec la taille des acides mycoliques (Zuber et al., 2008). Cette structure conformationnelle particulière des acides mycoliques permet de schématiser la mycomembrane sous forme de bicouche lipidique (Figure 2) (Zuber et al., 2008). Ce modèle d’organisation de la mycomembrane associé aux données antérieures a permis de proposer une représentation plus fidèle de la complexité de l’architecture de l’enveloppe mycobactérienne (Figure 2).

III.B.1.

La membrane plasmique

La membrane plasmique des mycobactéries est similaire à celles des autres bactéries. Elle est composée de lipides à tête polaire, principalement des phospholipides assemblés en bicouche lipidique en association avec des protéines pour constituer une barrière perméable entourant le cytosol. Les phospholipides de la membrane plasmique des mycobactéries sont constitués d’une extrémité polaire hydrophile et de deux chaînes d’acide gras. Les acides palmitique (C16:0), oléique (C18:1) et 10-méthyl octadécanoïque (ou tuberculostéarique C19r)

sont les principaux acides gras qui entrent dans la composition de la membrane plasmique. Les principaux phospholipides présents au niveau de la membrane sont le phosphatidylinositol mannoside (PIM), le cardiolipide, le phosphatidylglycérol, le phosphatidylinositol et la phosphatidyléthanolamine. La membrane plasmique, bien que vitale pour les mycobactéries, joue peu de rôle dans les processus pathologiques. Des études ont montré qu’il n’existait pas de différence majeure entre la composition de la membrane plasmique des bactéries à croissance rapide et celle des bactéries à croissance lente (Minnikin, 1982).

III.B.2.

La paroi

La paroi est séparée de la membrane plasmique par un espace périplasmique dont l’existence fut proposée par Daffé et Draper en 1998 et démontrée récemment grâce à l’utilisation de la cryo-microscopie électronique qui a permis de confirmer sa présence au sein de l’enveloppe (Zuber et al., 2008) ; (Hoffmann et al., 2008). La paroi est constituée du squelette pariétal (cell-wall skeleton : CWS) associé à une grande variété de molécules liées de manière non-covalente dont la majorité sont des lipides et des glycolipides (Daffé and Draper, 1998) (Figure 2).

Le squelette pariétal définit la forme et la taille de la bactérie, il se compose du peptidoglycane lié de façon covalente à l’arabinogalactane, lui-même estérifié par les acides mycoliques. Au dessus de l’armature constituée par le squelette pariétal repose une deuxième couche de lipides de natures diverses appelés « lipides extractibles » (car non covalemment liés) formant avec les acides mycoliques, une pseudo-bicouche lipidique appelée mycomembrane (Figure 2).

III.B.2.a Le peptidoglycane

Le peptidoglycane est un hétérodimère de glycoaminopeptides qui confère rigidité et forme aux bacilles. Le domaine glycane est composé d’unités alternées de N-acétyl-β- glucosamine et d’acide muramique, pouvant être N-glycosylées ou N-acétylées, liées en β- 1→ 4. La présence de résidus d’acide N-glycosyl muramique est spécifique aux mycobactéries (Petit et al., 1969; Petit et al., 1975). La fonction carboxyle des acides muraniques est liée à un tétrapeptide.

Des ponts tétrapeptide (L-alanyl-D-isoglutaminyl-méso-diaminopiményl-D-alanine) liés à l’acide muramique permettent d’associer les chaînes glycanes entre elles et composent un réseau assurant la rigidité du peptidoglycane. Le peptidoglycane est lié par une liaison phosphodiester à l’arabinogalactane via un phosphodisaccharide « linker » (Lederer et al., 1975) ; (McNeil et al., 1990).

III.B.2.b L’arabinogalactane

L’arabinogalactane est le composé pariétal majeur (35% du poids sec) dont la structure a été déterminée pour la première fois chez M. tuberculosis (Daffé et al., 1990). Cet hétéropolysaccharide se compose d’une chaîne galactane principale constituée d’un polymère formé de D-galactofuranosyles liés alternativement en β-(1 5) et β-(1 6) sur laquelle sont

Phtiocérol Acides mycocérosiques

B

A

OH COOH

C

Figure 3 : Structure de lipides spécifiques du bacille tuberculeux.

(A) Acide mycolique dicyclopropanique (ou α-mycolate) de M. tuberculosis.

(B) DIM A de M.tuberculosis (adapté Daffe & Laneelle, 1988). Les DIM sont formés d’un β- diol à longue chaîne carbonée (le phtiocérol) estérifié par deux chaînes d’acides gras polyméthyles ramifiés, les acides mycocérosiques.

(C) PGL-tb de M. canetti (Daffe et al., 1987). Le PGL possède une structure comparable à celles des DIMs, excepté la présence supplémentaire d’un noyau phénol reliant la chaîne de phtiocérol à un trisaccharide, le 2,3,4-tri-O-méthyl L-fucopyranosyl α(13)L- rhamnopyranosylα(13) 2-O-methyl αL rhamno-pyranosyl.

ramifications en positions 3 tous les 4 résidus environ) au nombre de 3 chez M. tuberculosis. Les domaines arabinanes se terminent par un motif hexaarabinofuranosyl dont 2/3 des extrémités pentaarabinosyl non-réductrices sont estérifiées par des acides mycoliques chez M.

tuberculosis (McNeil et al., 1991).

III.B.2.c La mycomembrane

La mycomembrane est une pseudo-bicouche lipidique composée des acides mycoliques (Figure 3 A) estérifiés à l’arabinogalactane (« lipides liés ») (le feuillet interne) et des lipides dits « extractibles » (le feuillet externe) (Figure 2). Les lipides « extractibles » ne sont pas liés de manière covalente à l’armature pariétale mais simplement associés par interaction hydrophobe et peuvent être extraits par les solvants organiques. La composition des lipides extractibles varie selon les espèces ; on trouve entre autres chez M. tuberculosis :

o Des lipides à tréhalose, comme les mono et dimycolates de tréhalose (MMT et DMT), les diacyltréalose (DAT), les polyacyltréhaloses (PAT) et les sulfolipides.

o Des cires constituées de phtiocérol et dérivés comme les dimycocérosates de phtiocérol (DIM) et les dimycocérosates de phénolphtiocérol glycosylé, également appelés phénolglycolipides ou PGL-tb chez certaines espèces (Figure 3 B & C). Les DIM sont rencontrés principalement chez les mycobactéries pathogènes (Daffé and Laneelle, 1988). La description d’une souche naturellement déficiente en DIM, dont la virulence était atténuée chez le cobaye (Goren et al., 1974), a permis d’associer très tôt ce composé à la pathogénie du bacille tuberculeux. Ces lipides contribuent à la barrière de perméabilité de l’enveloppe et à la virulence (Astarie-Dequeker et al., 2009) ; (Camacho et al., 2001) ; (Cox et al., 1999) ; (Rousseau et al., 2004).

o Des lipides à mannose sont présents dans l’enveloppe comme le phosphatidylinositol mannoside (PIM), le lipomannane (LM) et le lipoarabinomannane (LAM).

III.B.3.

La couche externe ou capsule

La couche la plus externe de l’enveloppe des mycobactéries est appelée capsule chez les espèces pathogènes. Elle a été mise en évidence, de manière indirecte (présence d’un halo) en 1959 (Chapman 1959). Depuis, de nombreuses études ont permis de préciser la composition de cette capsule qui varie selon les espèces. La capsule de M. tuberculosis est composée de polysaccharides (majoritairement l’α-D-glucane) (30-55%), de protéines (40-55%) et de lipides (3-8%) (Daffé and Draper, 1998). La capsule serait impliquée dans la pathogénie des mycobactéries (Gagliardi et al., 2007) ; (Geurtsen et al., 2009) et dans leur résistance active aux mécanismes microbicides de l'hôte, en jouant le rôle d’une barrière passive faisant obstacle à la diffusion de macromolécules vers les parties intérieures de l'enveloppe (Daffé and Etienne, 1999).

Figure 4 : Structure des acides mycoliques(adapté de Marrakchi et al., 2008)

(A) Schéma illustrant la pyrolyse d’un acide mycolique en « méroaldéhyde » (chaîne principale ou chaîne méromycolique) et en acide gras (ou chaîne alpha) par une réaction similaire à l’inverse de la condensation de type Claisen.

(B) Structure d’acide corynomycolique en C32 de Corynebacterium diphtheriae. La pyrolyse libère un acide gras en C16 et un « méroaldéhyde » en C16 .

(C) Structure d’acide mycolique dicyclopropanique (ou α-mycolate) de M. tuberculosis. La pyrolyse de cet acide gras en C80libère principalement un acide gras en C26et un « méroaldéhyde » en C54.

R indique la stéréochimie des carbones 2 (ou α) et 3 (ou β). D et P indiquent, respectivement, les

positions distale et proximale des groupements fonctionnels.

OH COOH Chaîne méromycolique Chaîne alpha R R D P α β

Pyrolyse

O H O

R

R'

OH O

R

H O

R'

OH

"méro"-aldéhyde

acide gras

OH COOH R R

A

B

C

IV. Les acides mycoliques, armature essentielle de