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Le sol : Un écosystème complexe et hétérogène

1. Une matrice complexe

Le sol est un habitat complexe qui présente des niches écologiques très diverses. A l’interface entre l’air et la roche sous-jacente, le sol est une matrice hétérogène où des gradients apparaissent.

1.1. Texture du sol

La texture est la propriété du sol qui traduit de manière globale sa composition granulométrique. Elle conditionne directement la structure, la porosité et le régime hydrique du sol, et reflète la part respective des constituants minéraux et des constituants organiques. Les triangles des textures minérales et organiques permettent notamment de caractériser les sols suivant la proportion de ces constituants (Figure 5).

Les constituants minéraux issus de la désagrégation physique et de l’altération chimique des roches peuvent être considérés comme le squelette du sol. En fonction de leur taille, ces constituants se répartissent en plusieurs fractions. Les sables grossiers et fins (50-2000 µm) représentent la fraction la plus grossière des constituants minéraux, suivi des limons grossiers et fins (2-50 µm) et des argiles (< 2 µm). La surface des argiles est chargée négativement ; pour cette raison la teneur en argile influence les échanges ioniques et la capacité d’échange cationique (CEC) du sol par fixation des cations. Les argiles servent également de réserve hydrique. En effet, les feuillets d’argile constituent un important réseau permettant la pénétration ou la libération de l’eau. Enfin, les argiles influencent la structure du sol. En fonction des forces de répulsion et d’attraction qui s’exercent entre les particules, les argiles peuvent se présenter sous forme de mélange homogène avec l’eau (état dispersé) ou sous forme d’agrégats (état floculé).

Les constituants organiques, formant l’humus, sont issus de l’accumulation des déchets et sécrétions des êtres vivants ainsi que de la décomposition de la matière organique. Ils représentent une source d’énergie essentielle pour les organismes du sol. La première catégorie de matière organique est la litière. Elle comprend tous les organismes qu’ils soient végétaux, animaux ou microbiens, aériens ou souterrains, ainsi que leurs déchets et les composés émis directement dans le milieu. Les macromolécules représentent la deuxième fraction de la matière organique du sol. La majorité provient du sol (exsudats racinaires, parois cellulaires, cellules ou bois) et dérivent de processus chimiques et biochimiques constituant l’humification. Les principaux types de macromolécules sont les saccharides, parmi lesquels la cellulose et la chitine sont les plus abondants, les lignines, les lipides et les composés azotés. Ces derniers peuvent constituer plus du tiers de la matière organique du sol.

1.2. Complexe argilo-humique

Le complexe argilo-humique ou complexe adsorbant est une matrice organo-minérale qui permet la cohésion des micro-agrégats du sol. A l’échelle moléculaire, la stabilité de ce complexe est assurée par des liaisons chimiques entre les feuillets d’argile et les molécules d’humus. Ces liaisons peuvent se faire via :

(i) des ponts calciques. Le complexe humus-calcium-argile est le plus solide des complexes. Le calcium assure des liaisons stables empêchant la minéralisation de l’humus et la dispersion des argiles.

(ii) des ponts constitués d’hydroxyde de fer et d’alumines. Le complexe humus-fer-argile est moins stable que le complexe humus-calcium-humus-fer-argile.

Figure 6. Schématisation du complexe argilo-humique et l’adsorption des cations et groupements anioniques du sol.

(iii) des ponts aluminium.

Les complexes formés permettent la fixation des cations tels que Mg2+, Ca2+, K+ ou Na+ (Figure 6) qui deviennent ainsi accessibles comme nutriments ou comme fixateurs d’anions ou de groupements anioniques. Cette capacité à fixer les cations du sol a également une importance écotoxicologique. En effet, ces complexes peuvent fixer et donc stabiliser des métaux lourds (Hg++, Pb++…) qui ne sont alors plus solubles dans l'eau ou dans l'air.

1.3. Solution et eau du sol

La solution du sol est constituée de l’eau et de toutes les substances qui y sont dissoutes. Elle permet la solubilisation des constituants minéraux et organiques ainsi que leur circulation, elle est essentielle à l’activité des microorganismes et des plantes. Elle est aussi l’habitat de nombreux représentants de la microfaune du sol.

Dans le sol, l’eau se répartit en trois catégories définies par le degré de disponibilité pour les organismes. L’eau de gravité, également appelée eau libre, est la forme la plus mobile et disponible. Elle remplit les macroporosités du sol et s’écoule par gravitation. Elle n’est donc présente dans le sol que quelques heures après la fin de la pluie. L’eau utilisable remplit les pores dont le diamètre est compris entre 0,2 et 50 µm et forme des films à la surface des particules. Elle est par définition la source d’eau pour les microorganismes, la faune et les végétaux. Enfin, l’eau inutilisable est contenue dans les pores les plus fins et/ou retenue sous forme de films très minces autour de certains constituants minéraux. Elle est présente dans le sol même à des températures élevées mais est inaccessible pour les organismes.

1.4. Échanges ioniques et capacité d’échange cationique

La concentration en ions dans la solution du sol est en équilibre avec la quantité d’ions fixés par le complexe argilo-humique. En cas d’apport extérieur, le déplacement des ions se fera de la solution du sol vers le complexe et inversement en cas de prélèvement. Cependant, tous les complexes adsorbants ne présentent pas la même capacité à fixer les ions. La capacité d’échange cationique (CEC) représente la quantité de cation que le complexe adsorbant peut retenir à un pH donné. Elle dépend directement de la quantité d’argile et de matière organique ainsi que du pH du sol. Chaque sol possède une CEC spécifique.

1.5. Atmosphère du sol

Dans le sol, l’air occupe les espaces abandonnés par l’eau. Il permet les échanges à l’intérieur du sol mais aussi avec l’air extérieur. La composition de l’atmosphère du sol varie en fonction de la texture, de la teneur en eau et de l’activité des organismes du sol. Suivant la structure du sol (aéré ou compact), les proportions en oxygène et en azote varient respectivement de 0 à 20% et de 78 à 80%. La proportion en gaz carbonique de l’atmosphère du sol est nettement supérieure à celle de l’air (entre 0,2 et 3,5% contre 0,03%) et atteint jusqu’à 10% dans la rhizosphère où les échanges gazeux sont intenses. La teneur en oxygène conditionne certains processus, notamment la respiration aérobie. La respiration des racines, de la microflore aérobie et de la faune entraine une diminution de l’oxygène et une augmentation du gaz carbonique alors que la fixation d’azote et la dénitrification bactérienne modifient les concentrations en azote (N2O, NO). Les organismes de la macrofaune et de la mésofaune peuvent se déplacer si l’oxygène se raréfie. Cependant, pour d’autres organismes incapables de se déplacer (végétation) ou pour lesquels les déplacements sont lents (microfaune, microorganismes) éviter une chute de la teneur en oxygène devient difficile.

1.6. pH

En fonction de la nature du sol, le pH peut être compris entre 2 et 10 mais la majorité des sols possède un pH compris entre 4 et 7,5. Des variations importantes de pH peuvent également exister au sein d’un même sol. La dégradation de la matière organique du sol est également dépendante du pH. D’une part, au travers de l’activité microbienne qu’il module, et d’autre part, en modifiant la vitesse de transformation des carbonates.