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Dispositif expérimental

Ce dispositif expérimental a déjà été utilisé dans plusieurs autres études24, 28, 29. Il a pour objectifs de soumettre les connexions implantaires testées à des contraintes répétitives (forces de fatigue) en reproduisant l’incidence multi-vectorielle des forces actives en bouche.

La « machine de fatigue » utilisée possède un moteur électrique qui, par l’intermédiaire de poulies, met en rotation une pièce munie d’un serrage rapide (vitesse de rotation= 1000 tours/minute); les échantillons (implant/supra-structure/restauration) y sont fixés par leur extrémité « implantaire », les mettant ainsi en rotation selon leur axe longitudinal. Le serrage se bloque sur l’implant au niveau même où l’os devrait se situer cliniquement. A l’extrémité opposée de l’échantillon, un poids (Pb-Zn) est suspendu par l’intermédiaire d’un roulement à bille et d’un ressort à une structure faisant office

« d’analogue de restauration »; une force est ainsi appliquée perpendiculairement à l’axe de l’échantillon créant, grâce à la rotation, une contrainte sinusoïdale (« multi-vectorielle »). Avec ce dispositif, la connexion est soumise alternativement à des forces de tension ou de compression, générant ainsi un champ de forces similaire à celui agissant sur un secteur latéral d’une arcade dentaire. La figure-4 illustre le principe du dispositif expérimental.

Ce principe de cycles tension-compression auxquels les échantillons sont soumis provoque, en fonction de la force appliquée, la fracture des connexions testées. Le but de l’expérience est de déterminer la force avec laquelle 50% des échantillons résistent (et 50% fracturent) après 106 cycles.

Afin d’établir un comparatif entre les différentes connexions et les résultats d’autres études, il est impératif d’assurer une distance (bras de levier) constante entre le point de fixation de l’implant (niveau osseux ») et le point d’application de la force (centre du roulement à bille). La longueur du bras de levier déterminée lors d’une précédente étude (Wiskott, Pavone28) est de 11.3 mm.

L’expérience s’est déroulée de la manière suivante : 1 implant et 5 supra-structures différentes ont été sélectionnées au sein des composants proposés par le système Replace (Nobel Biocare). Ceci a permis de définir 5 groupes (A, B, C, D, E) étant tous caractérisés par une supra-structure différente.

Chacun des groupes comporte 30 échantillons.

Figure-4. Dispositif expérimental pour test de fatigue rotationnelle. (A) Toutes les pièces sont alignées selon un seul axe. (B) Les pièces assemblées sont mises en rotation selon leur axe et la charge est appliquée perpendiculairement à ce dernier. Le bras de levier est dimensionné à 11.3mm. (C) La contrainte développée sur l’échantillon suite à la mise en rotation de ce dernier est « sinusoïdale » (alternance de forces de tension et de compression).

Les connexions des supra-structures avec les implants ont été réalisées selon les indications du fabriquant pour la pratique clinique : les supra-structures ont été vissées sur les implants avec un couple de 35Ncm. Dans les groupes A-B-D-E, les pièces faisant office « d’analogue de restauration » permettant la fixation des roulements à bille et des charges ont été collées aux supra-structures à l’aide d’un ciment à base de résine composite dual (Variolink II ; Ivoclar Vivadent, Schaan, Liechtenstein).

Dans le groupe C, les analogues de restauration ont été vissés avec un couple de 15Ncm à l’aide des vis prévues à cet effet Les échantillons ainsi formés ont été soumis à des contraintes cycliques (fatigue rotationnelle). Les éléments fracturés ont fait l’objet d’observations et de photographies à l’aide d’un microscope à balayage électronique (MEB).

Les implants

L’objectif de cette étude est d’évaluer la résistance d’une sélection de connections du système implantaire Replace Select TM (Nobel Biocare AB, Gothenburg, Sweden). A cet effet, l’implant Replace Select Straight TiU Regular Platform (article N°28954) a été utilisé. L’implant en titane présente une surface poreuse oxydée (Ti-Unite), une longueur de 15mm et un diamètre de 4.3mm. Le design de la connexion est caractérisé par surface plate externe perpendiculaire à l’axe de l’implant. Au centre de l’implant, la stabilité anti-rotationnelle est assurée par 3 rainures verticales semi-circulaires (i.e. cams).

La connexion interne se prolonge apicalement sur 4mm par une cavité cylindrique de 2.7mm de diamètre, puis par un filetage M2. La figure-5 présente les spécifications de l’implant et de sa connexion interne. La table-1 énumère les lots utilisés lors de cette étude.

Lors du test de fatigue rotationnelle, les implants sont fixés au dispositif entraînant la rotation par l’intermédiaire de trois mords métalliques en acier. Ce procédé seul, génèrerait sur les échantillons des concentrations de stress à l’interface avec les « grips », pouvant ainsi produire une fracture du corps de l’implant qui n’est jamais observée cliniquement, donc non significative. L’implant est donc « vissé » dans un tube en aluminium avant d’être fixé au dispositif expérimental, permettant ainsi de répartir les contraintes imposées par le serrage sur toute la surface de l’implant. Les tubes en aluminium ont une épaisseur de 1mm et présentent une ouverture longitudinale de 0.5mm assurant une certaine élasticité lors du serrage.

Figure-5. Spécifications et dimensions de l’implant Replace-Select et de la partie interne de sa connexion.

Les supra-structures

Les cinq supra-structures testées sont représentées schématiquement dans la figure-6 (groupes A-B-C-D-E). Les lots utilisés sont énumérés dans la table-1.

A) Easy Abutment (figure 6a). L’Easy Abutment (article N°29471) est un moignon conique en titane possédant trois rainures verticales. Celui-ci possède une hauteur de 6.5mm et un épaulement situé 1.5mm au-dessus du col de l’implant. Ce moignon est fixé à l’implant par une vis en titane pur (Torq Tite) serrée avec un couple de 35 Ncm. Dans sa portion apicale, le moignon possède un mécanisme anti-rotationnel formé par 3 cames et d’un cylindre central pour le passage de la vis, reproduisant ainsi en négatif la configuration de la connexion interne de l’implant. Ce moignon est utilisé pour des restaurations céramo-métalliques scellées.

B) Easy Abutment avec ablation du mécanisme anti-rotationnel (figure 6b). Afin de tester l’hypothèse que le mécanisme anti-rotationnel ne participe pas à la résistance mécanique du moignon, celui-ci a été précautionneusement éliminé sous microscope grâce à une décolleteuse (Schaublin 102, Bevillard, Suisse). Après ablation des cames, afin de prévenir tout contact avec l’implant, le cylindre résiduel a été réduit à une longueur de 1mm (au lieu de 4mm initialement) et un diamètre 2.4mm (au lieu de 2.7mm initialement). Une élimination complète de ce mécanisme n’a pas été possible, car le cylindre central participe à la rétention de la tête de la vis assurant la fixation du moignon.

C) Multi-Unit Abutment (figure 6c). Le Multi-Unit Abutment est une structure courte utilisée pour la fixation par vissage des restaurations. Sa face supérieure, hexagonale, présente une ouverture permettant le passage de la vis servant à la rétention de ce pilier dans l’implant (couple de serrage de 35Ncm). Cette même vis possède au niveau de sa tête un filetage M1.5. La reconstruction définitive vient se fixer, par l’intermédiaire d’une petite vis en titane (Prosthetic Screw Multi-Unit, article N°29285) dans la tête de la vis précédemment décrite avec un couple de serrage de 15Ncm et se stabilise grâce à l’effet anti-rotationnel imposé par l’hexagone externe du Multi-Unit. La plate-forme du Multi-Unit Abutment utilisé dans notre étude se situe 1mm au-dessus du col de l’implant (article N°29199).

D) Esthetic Alumina Abutment (figure 6d). L’Esthetic Alumina Abutment (article N° 29256) est un moignon conique d’une hauteur de 9 mm essentiellement utilisé pour les restaurations entièrement céramique scellées. Ce moignon se compose de deux parties chassées l’une dans l’autre : la première que l’on qualifiera d’ « interne » est en titane et est similaire à celle du Easy Abutment (présence d’un cylindre central pour le passage de la vis et de cames). La seconde, dite « externe » est en oxyde d’alumine ; elle se caractérise par un épaulement asymétrique qui induit une section « ovale » du moignon à son extrémité coronaire. La fabrication d’analogues de restaurations requiert ainsi des mesures compliquées. Tout comme l’Easy Abutment, ce moignon est fixé à l’implant par une vis en titane pur (Torq Tite) serrée avec un couple de 35Ncm.

E) Esthetic Zirconia Abutment (figure 3e). L’Esthetic Zirconia Abutment (article N°30918) possède un design identique à celui de l’Esthetic Alumina Abutment. Il diffère de ce dernier par le fait que l’oxyde d’alumine est remplacée par de l’oxyde de zirconium. Ce moignon est également utilisé pour les restaurations entièrement céramiques scellées.

Table-1. Matériel : Numéro d’article, description de l’article et numéro de lot.

Nr. article Description de l’article Numéros de lots

28954 Replace Select Straight TiU RP 4.3x15mm Lot N° : 645613 Lot N° : 648888 Lot N° : 649801 Lot N° : 649914

29471 Easy Abutment Select RP 1.5mm Lot N° : 362860

Lot N° : 357155 Lot N° : 366218

29199 Multi-Unit Abutment Select RP 1mm Lot N° : 645352 Lot N° : 650488

29285 Prosthetic Screw Multi-Unit Lot N° : 645488

Lot N° : 646158 Lot N° : 650062

29256 Esthetic Alumina Abutment Select RP 1mm Lot N° : 643273 Lot N° : 650469 Lot N° : 650708

30918 Esthetic Zirconia Abutment Select RP 1mm Lot N° : 640998 Lot N° : 641446

Figure-6. Représentation schématique des 5 supra-structures testées : (a) Easy Abutment, (b) Easy Abutment avec élimination du mécanisme anti-rotationnel, (c) Multi-Unit Abutment, (d) Esthetic Alumina Abutment, (e) Esthetic Zirconia Abutment.

Nombre de cycles et fréquence (durée du test)

Afin de définir un nombre de cycles tension-compression significatif pouvant être associé à la vie d’une structure dentaire, l’estimation suivante peut être calculée : En estimant un nombre de 3 périodes de mastication journalières de 15 minutes à une fréquence de 60 cycles par minute (1 Hz), un individu atteint en moyenne 2700 cycles masticatoires par jour, valeur pouvant être extrapolée à 106 cycles par an30. Si l’on considère que la demi-vie d’une restauration fixe est estimée à 20 ans31, cette structure aura subi 2x107 cycles de stress pendant cette période. Conventionnellement, on peut prétendre que chaque cycle n’est pas « actif » (n’applique pas un stress maximal à la structure), par conséquent le total de 2x107 cycles de mastications précédemment calculé peut être diminué d’un facteur variant entre 5 et 20 si l’on veut obtenir une valeur réaliste. Pour les tests de fatigue appliqués à la sphère buccale, il paraît donc raisonnable de soumettre les échantillons à un minimum de 106 cycles.

Concernant la fréquence des cycles, 1 Hz pour 106 cycles induirait une procédure d’environ 11 jours par échantillon, ce qui rallongerait considérablement le déroulement de l’étude. C’est pourquoi une fréquence de 16.7 Hz qui correspond à 1000 tours par minute a été choisie. Il faut toutefois préciser qu’une telle fréquence, comparativement à la situation clinique, peut influencer le résultat des tests.

Procédure expérimentale et analyse des données

Durant la phase expérimentale, pour chacun des 5 types d’échantillons, le modèle d’implant ainsi que la longueur du bras de levier (11.3mm) déterminant le point d’application de la force sont restés inchangés. Le design et les spécifications des composants des structures vissées sur les implants sont les seuls paramètres variant durant la procédure.

La procédure expérimentale impose que les échantillons soient testés en série ; ces derniers ont donc été soumis à une contrainte perpendiculaire à leur axe et mis en rotation à 1000 révolutions par minutes (rpm) (=16.7Hz) pendant un maximum de 106 cycles. A la fin de cette période (106 cycles), la procédure est interrompue et les échantillons sont examinés afin de déterminer s’ils sont intacts ou fracturés. Si l’échantillon a survécu à 106 cycles il est considéré comme un « run out » (essai réussi) et l’échantillon suivant soumis à la contrainte sera chargé à la même charge que précédemment « plus » 5N. A l’inverse, si l’échantillon avait fracturé lors des 106 cycles imposés, il était considéré comme un

« échec » et l’échantillon suivant était testé avec la même charge que précédemment « moins » 5N. Au fur et à mesure que le nombre d’échantillons testés augmente, un diagramme (charge / nombre de spécimen) (figure-7) formé d’alternances « haut-et-bas » caractéristique de la « staircase analysis » (Technique de l’escalier) se développe32. Le but de cette procédure est de déterminer à quelle charge imposée 50% des échantillons survivent à 106 cycles et 50% fracturent (F50). Il est à préciser que les

« paliers de contraintes » (+/- 5N) ont été définis lors d’une précédente étude avec laquelle il est prévu de comparer nos résultats28.

Dans notre étude, 30 échantillons étaient testés en série pour chacune des 5 supra-structures. Les premiers échantillons de chaque configuration ont été utilisés pour définir le niveau d’entrée dans la procédure.

A la fin de la procédure expérimentale, les résultats ont été reportés dans un premier temps dans un diagramme (figure-7) afin d’illustrer la « staircase procédure ». Dans un deuxième temps, ils ont été tabulés de la façon illustrée dans la table-2 afin d’extraire les valeurs A et B qui seront utilisées pour le

alcul de F50. c

 

Calcul de F50 

F50 : Force avec laquelle 50% des échantillons survivent à 106 cycles et 50% fracturent.

F0 : Force la plus faible avec laquelle une fracture intervient.

Fincr : Différentiel de force appliquée (en plus ou en moins) à chaque nouvel échantillon = 5N.

n : Σni (ni : nombre d’échec à chaque niveau de force).

A : Σini (i : niveau de force).

B : Σi2ni

Table-2. Arrangement des données pour la « Staircase Analyse ».

Easy Abutment

Easy Abutment avec ablation du mécanisme anti-rotationnel

Esthetic Zirconia Abutment

Figure-7. Diagrammes illustrant la « staircase procédure » (technique de l’escalier) pour chacune des connexions testées. Les ronds représentent les essais réussis (run out) et les carrés les échecs (échantillons fracturés).

Analyse statistique

Afin de mettre en évidence des différences significatives entre les groupes, les forces moyennes obtenues (F50) ont été comparées avec un intervalle de confiance de 95% selon la méthode décrite par Collins33. Les valeurs des intervalles de confiance qui se recoupaient étaient considérées comme équivalentes.

Plus de 150 échantillons ont été produits afin d’assurer le déroulement de l’étude. En effet, il a fallu dans un premier temps « calibrer » les échantillons pour faire en sorte que le modèle expérimental fonctionne de manière adéquate, c’est-à-dire exclure un autre mode de fracture que celui observé cliniquement. Par la suite, des échantillons supplémentaires ont été nécessaires pour définir de manière optimale les niveaux de force permettant de débuter la « staircase procédure ».

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