• Aucun résultat trouvé

Matériel et méthode

La collecte des informations sur le terrain

À l’occasion de l’expédition Madibenthos, un effort particulier a été déployé pour collecter des informations complémentaires au strict travail d’inventaire multi-taxon habituel : des informations sur le biotope de chaque site et la liste des espèces vues, mais non récoltées.

Lors des opérations de collecte, la consigne a été donnée de réaliser un certain nombre de clichés photographiques permettant de rendre compte du paysage sous-marin prospecté. Ne pouvant prendre en photographie les paysages échantillonnés par la drague, nous avons photographié les bailles dans lesquelles les collectes de la drague étaient déversées.

Ces clichés fournissent des informations sur la géomorphologie, sur la nature du substrat et sur les principaux taxons structurants. Un post-traitement des photographies (Cf. ce rapport, Bouchon et col.) a permis également de fournir une évaluation de l’ « état de santé » des communautés coralliennes suivant la méthode proposée par Bouchon et al. (2004).

De plus, au retour de chaque opération, des entretiens semi-directifs ont été réalisés de manière à compléter ces informations sur les paysages et à les enrichir des espèces vues, mais non récoltées (en fonction des compétences taxinomiques des opérateurs).

Habituellement, lors des opérations de récolte à vue en plongée ou à marée, les espèces de grande taille (en particulier les espèces communes) déjà suffisamment échantillonnées pour les objectifs de l’inventaire ne sont plus récoltées et l’information de leur présence, qui peut avoir de l’importance dans le cadre d’autres objectifs (gestion, protection), est perdue. La récolte à vue requiert de la part de l’opérateur une attention très particulière focalisée sur les taxons cibles de sa récolte qui peut l’amener à avoir une attention très distraite sur les autres taxons et le paysage. En ajoutant à cela la disparité des compétences taxinomique des opérateurs, l’information collectée de cette façon sur la présence des espèces, même si elle enrichit grandement notre connaissance sur chaque site, doit être considérée comme parcellaire : chaque palanquée ne disposait pas d’une personne capable d’identifier les éponges, les algues ou les échinodermes par exemple. La liste de ces espèces est fournie fait partie des données « espèces vues » de chaque station.

119 Constitution de la base de données photographique et identifications des espèces présentes

Dans le cadre de Madibenthos, chaque station correspond à une opération de collecte sur un site à une date donnée (cf. rapport intermédiaire Madibenthos 2016) : par exemple la « station AB157 » correspond à un brossage sur le site de Pointe Lézarde (identifié par ses coordonnées géographiques), le 7 septembre 2016. AR158 est une autre station, une opération différente (récolte à vue) menée sur le même site (mêmes coordonnées géographiques), le même jour.

Sur chaque site, le paysage sous-marin prospecté se compose d’un ou plusieurs habitats, ce dernier cas étant le plus fréquent. Les photographies prises par les plongeurs sur une station ont été rassemblées dans un seul dossier, puis dans des sous-dossiers correspondant chacun à un habitat. Les photographies d’opérations différentes menées sur un même site ont été rassemblées. Les sous- dossiers ont été remaniés jusqu’à stabilisation des descriptions des habitats. Au final ce sont 8 620 photographies et films qui ont été classés dans 280 dossiers stations et 590 sous-dossiers habitats. Les identifications ont été réalisées par analyse des photos. Majoritairement ce sont les espèces macroscopiques qui ont pu être identifiées. Seules les photos ciblant des petits animaux comme les crevettes ou mollusques d’une taille de quelques centimètres ont été identifiées sur des photos en proxi ou macrophotographie. Les espèces non caractérisables par leur morphologie ou leur couleur n’ont pas été relevées.

La description des habitats

En l’absence de données quantifiables sur les espèces, c’est une approche experte qui a été envisagée pour caractériser les habitats. Il s’agit d’une approche biocénotique puisque la différence entre les habitats décrits repose in fine sur les différences du cortège d’espèces.

Sur la base des photographies collectées et des descriptions fournies lors des entretiens, les habitats de chaque station ont été caractérisés :

Les caractères du biotope considérés sont :

- L’étagement : un étage correspond à un « espace vertical du domaine benthique marin où les

conditions écologiques, fonction de la situation par rapport au niveau de la mer, sont sensiblement constantes ou varient régulièrement entre deux niveaux critiques marquant les limites de l’étage ; la définition des étages ne fait intervenir aucune notion bathymétrique ni altitudinale, mais invoque des types fondamentaux de peuplements liés aux facteurs environnementaux, notamment abiotiques. » Pérès (1982a). Pour une description plus précise des différents étages, on se réfèrera à la publication de Dauvin et al. 2008. De manière simple :

o L’étage supralittoral est la zone soumise à l’humectation par les vagues et les embruns ;

o L’étage médiolittoral correspond à la zone de balancement des marées ;

o L’étage infralittoral est la zone constamment immergée dont la limite inférieure correspond à la limite de présence des algues photophiles et magnoliophytes ; au sein de l’étage infralittoral, nous avons distingué deux sous-étages :

 L’infralittoral supérieur peut être défini comme la zone fortement soumise à l’agitation des vagues et où l’éclairement est le plus fort, limitant ou favorisant, le développement de certaines espèces des biocénoses infralittorales ;

120  L’infralittoral inférieur peut être défini comme une zone de transition avant l’étage circalittoral caractérisé dans la Caraïbe par l’arrivée d’une faune s’ajoutant aux biocénoses des fonds durs infralittoraux, d’antipathaires, hydraires et bryozoaires (Reteporellina evelinae) notamment, et la présence beaucoup plus marquée au sein des scléractiniaires des Agaricia notamment et l’absence des Acropora;

o Circalittoral : la limite inférieure est marquée par la fin de la présence des algues sciaphiles.

Figure 1 : Schéma récapitulant les étages utilisés dans la typologie des habitats.

- Le substrat traduit la nature du fond, support de la faune sessile et des macroalgues fixées :

parmi les substrats meubles nous avons distingué : vase, sable-vaseux, sable (biogène ou volcanique quand c’est possible), débris coralliens, galets et cailloutis ; et parmi des substrats durs : substrat biogène (d’origine corallienne) et substrat basaltique (roche ou bloc). On peut noter une différence importante au sein des substrats basaltiques entre des roches lisses (typiquement les mégablocs), très peu colonisées par la faune et les macroalgues, et d’autre présentant une rugosité importante (probablement du fait de leur encroutement par des organismes calcaires - algues ou coraux - morts, mais aussi par leur nature géologique) qui sont eux très densément colonisés. La distinction a été notée quand c’était possible.

- La rugosité : les photographies ne permettent pas toujours de fournir une information précise

sur l’état de surface des substrats (la rugosité à proprement parler), sur la densité des

Habitats x

In frali tto ra l Etage Supralittoral

Etage

C ir ca litto ar al M éd io litto ra l

Balancement des marées

su pé ri eur Inf ér ie ur

Substrat

Etages

121 anfractuosités pouvant servir d’abris à la macrofaune (parfois appelée habitabilité), et la complexité géomorphologique à l’échelle du site. Néanmoins, ce caractère permettant de différencier certains types d’habitats, un indice synthétique de ces différentes échelles de « rugosité » a été renseigné sur une échelle de 1 à 4. Une valeur de 1 a été attribuée à un sable nu ou une dalle corallienne par exemple, et une valeur de 4 à un tombant de récif corallien présentant une densité importante d’anfractuosités.

- L’hydrodynamisme traduit le caractère exposé aux vagues et aux courants d’un habitat. La

géographie/géomorphologie du site, la profondeur, l’écologie des espèces dominantes visibles sur les photographies nous renseigne sur ce caractère pour lequel nous avons proposé cinq classes : très faible, faible, modéré, fort, très fort.

- La faune / flore structurante : il s’agit des grands groupes taxonomiques structurants le

paysage sous-marin, formant les espèces ingénieurs de l’habitat, ou les groupes visuellement les plus représentés considérés ici comme biotope. Ce sera par exemple : coraux, éponges, gorgones, macroalgues brunes, mollusques …

Les biocénoses ont été caractérisées par :

- Les espèces de faune et flore dominantes : liste des espèces de la macrofaune benthique, des

macroalgues et magnoliophytes visuellement les plus abondantes ou structurantes du paysage.

- Les espèces de faune et flore caractéristiques : liste des espèces présentes de manières

significatives au sein de l’habitat, mais ni abondante ni structurante.

Par ailleurs, l’observation des images satellitaires a permis de renseigner pour chaque station un caractère supplémentaire :

- La géomorphologie : la géomorphologie nous informe de manière indirecte sur de nombreux

paramètres abiotiques caractérisant les habitats : le caractère d’exposition aux vagues et à la houle d’un site, la nature du substrat, ou les temps de résidence relatifs des masses d’eau par exemple. La géomorphologie à l’échelle du paysage (complexe d’habitats) et à l’échelle de l’habitat a été décrite autant que possible.

Une base de données a ainsi été constituée fournissant pour la plupart des stations de Madibenthos l’habitat ou la liste des habitats prospectés pour la collecte des spécimens et dont la présence est documentée par un photographie. Si une opération de brossage se déroule généralement sur un seul habitat, les opérations de collecte à vue se restreignent rarement à un seul habitat, les plongeurs explorant l’ensemble du complexe d’habitats (paysage) du site prospecté.

Établissement de la liste d’habitats

À mesure que le travail de caractérisation avance et que la base de données stations/habitats est constituée, des similarités apparaissent entre différents sites et habitats, permettant de constituer progressivement une première liste des habitats. Rétroactivement, cette première liste amène à modifier les descriptions et sous-dossiers photographiques constitués. Ce processus d’aller-retour se

122 poursuit jusqu’à finalement se stabiliser sur une liste d’habitat. En parallèle de ce processus analytique, les sous-dossiers ont été transmis à un spécialiste des milieux marins martiniquais pour identification des espèces dominantes et mise en débat des choix faits sur les types d’habitats.

La liste d’habitat établie est le résultat de ce processus. Des hésitations existent encore entre les statuts d’habitat et de faciès. La soumission à des experts extérieurs au cours du processus de validation de la typologie permettra de résoudre ces derniers points.

123 Figure 2 : Méthodologie pour l’établissement de la typologie des habitats.

124

Documents relatifs