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CHAPITRE I – PROBLEMATIQUE

3. Les stents coronariens

3.3 Matériau utilisé pour l’étude : l’acier inoxydable 316L

Compte tenu de l’importante commercialisation des stents fabriqués en acier inoxydable 316L, une attention particulière sera portée sur ce matériau. Pour cette même raison, l’acier 316L a été choisi comme substrat pour cette étude.

3.3.1. Propriétés physico-chimiques

L’acier inoxydable 316L fait partie de la famille des aciers austénitiques qui sont caractérisés par une structure cubique à faces centrées. La composition chimique de ce type d’acier est resumée au Tableau I.1. L’acier 316L est caractérisé par un faible taux de carbone, ce qui permet d’augmenter sa résistance à la corrosion en milieu chloré en limitant la précipitation de carbures métalliques aux joints de grain. Outre le fer, le principal composant de cet alliage est le chrome qui confère lui aussi une augmentation de la résistance à la corrosion grâce à la formation en surface d’une couche de passivation à base d’oxyde de chrome (Cr2O3). L’épaisseur de cette couche est

généralement comprise entre 1 et 10 nm [36]. La présence de nickel sert également à augmenter la résistance à la corrosion et aussi à stabiliser la phase austénitique à température ambiante [36]. Finalement, le molybdène et l’azote sont présents afin

d’augmenter la résistance à la corrosion par piqûres et crevasses, qui sont des types de corrosion [36]. Eléments C Mn Si P S Cr Mo Ni Fe Composition (% massique) < 0,03 2,0 1,0 0,04 0,03 16,0- 18,0 2,00- 3,00 10,0- 14,0 Balance

Tableau I.1 : Composition massique de l’acier inoxydable 316L [35]

Les propriétés mécaniques de l’acier inoxydable 316L varient en fonction du procédé de fabrication (à chaud ou à froid). Généralement, l’acier est durci à froid avec des étapes intermédiaires de chauffage thermique afin d’éviter toute formation de carbure de chrome aux joints de grain. Ces zones sont, en effet, des sites préférentiels pour le début des phénomènes de corrosion [37]. Ses principales caractéristiques, en plus d’une bonne résistance à la corrosion, sont une excellente formabilité, une bonne résistance à la traction et à la rupture à haute température, ainsi qu’une haute résistance au fluage (Tableau I.2).

Propriété Valeur

Densité 7,9 g/cm3 Module élastique 190-210 GPa Résistance à la traction 460-860 MPa Allongement à la rupture <60%

Dureté (Brinell) 160-190

Tableau I.2: Propriétés volumiques de

l’acier inoxydable 316L [37]

3.3.2. Performances biologiques

La biocompatibilité, définie comme la capacité d’un matériau à être utilisé avec une réponse appropriée de l’hôte pour une application spécifique, est une caractéristique fondamentale pour un stent [38]. Une autre caractéristique importante qu’un stent doit satisfaire est l’hémocompatibilité, c’est-à-dire la biocompatibilité vis-à-vis du milieu sanguin.

Bien que les stents permettent de réduire le taux de resténose par rapport à l’angioplastie, plusieurs complications peuvent survenir à la suite de leur implantation

[12, 13]. Certaines complications cliniques peuvent se manifester à court terme. Par exemple, suite à l’endommagement des parois artérielles lors de l’implantation du dispositif, l’inflammation, qui peut avoir lieu à partir de la zone endommagée, peut être suivie par la formation d’un thrombus qui peut obstruer totalement le flux sanguin. D’autres complications, comme la resténose, peuvent également survenir [39]. Le taux de resténose peut atteindre 30% après trois mois d’implantation, même si les causes responsables de ce type de complication demeurent encore incomprises dans leur totalité et parfois les études se révèlent contradictoires [40-42]. Le travail de Köster et al. [41] démontre que les patients possédant une hypersensibilité aux métaux, plus particulièrement au nickel, sont plus susceptibles de développer une resténose, tandis que trois ans plus tard, les études d’Iijima concluent que les allergies aux métaux ne sont pas corrélées au taux de resténose survenant immédiatement après l’implantation, mais qu’elles sont corrélées avec la resténose qui survient de manière récurrente [42].

D’autres complications cliniques se manifestent à plus long terme, en général plusieurs mois après l’implantation du dispositif, principalement à cause d’une dégradation des propriétés de surface de l’acier 316L. En effet, malgré les bonnes propriétés de résistance à la corrosion de ce matériau, le sang peut déstabiliser la couche de passivation de Cr2O3 [43, 44]. De plus, des hétérogénéités locales (introduites lors du

processus de fabrication) ou des fissurations (provoquées lors du déploiement dans l’artère) peuvent rendre la surface de l’acier plus sensible aux phénomènes de corrosion [45]. Des études ont montré que des phénomènes de corrosion localisée sur les stents métalliques peuvent entraîner le relargage d’ions potentiellement toxiques (nickel, chrome, fer) ou, moins fréquemment, des fractures du dispositif (Figure I.6) [41, 43, 46].

Les produits de corrosion peuvent réagir avec l’organisme, donnant naissance à des réponses défavorables dans la plupart des cas. En s’accumulant sur le site d’implantation, les ions de nickel et de fer peuvent endommager les tissus environnants et entraîner la formation d’un tissu fibreux [44, 47]. De plus, ces éléments, transportés par le sang, peuvent migrer et s’accumuler sous forme de complexes organométalliques, d’ions métalliques libres, de sels ou d’oxydes métalliques dans des organes comme la rate, les poumons, le foie et les reins. Plusieurs études in vitro et in vivo ont été réalisées pour comprendre les effets d’une telle accumulation sur le milieu biologique [42, 48- 53]. Les résultats obtenus pour chaque élément sont résumés au Tableau I.3.

Elément Effet Conséquences Références

Fe Accumulation en grande quantité dans la rate

Modification du métabolisme des cellules (chez les

souris)

[42]

Cr

1. Liaison aux protéines du plasma sanguin (ions Cr3+)

2. Liaison aux globules rouges et blancs (ions Cr6+)

3. Accumulation dans la rate, les poumons, le foie et les reins

Réactions allergiques, cytotoxicité, mutagenicité, cancérinogénicité [48-52]

Ni Faible accumulation dans la rate

Réactions allergiques, cytotoxicité, mutagenicité, cancérinogénicité [49, 50]

Mo Rejeté dans les urines - [53]

Tableau I.3: Effets des éléments constituant l’acier inoxydable 316L sur le milieu

biologique

Le nickel et le chrome (sous ses formes oxydées Cr3+ et Cr6+) peuvent provoquer des réactions allergiques, c’est-à-dire une augmentation de la réponse immunitaire de l’organisme [54]. En particulier, entre 13 et 17% de la population est allergique au nickel. Cela fait du nickel l’élément le plus allergène qui existe [55]. Le fer par contre

n’a pas d’effets allergiques répertoriés. Le pouvoir cytotoxique (capacité d'une substance à détruire une cellule) du nickel, sous sa forme oxydée Ni2+, est directement proportionnel à sa concentration [56]. En ce qui concerne le chrome, sa forme oxydée Cr6+ est réconnue pour être cytotoxique vis-à-vis de nombreux types de cellules tandis que sa forme Cr3+ est 10 à 100 fois moins cytotoxique [54, 57]. De plus, le chrome et le nickel, sous leur forme Cr6+ et Ni2+, sont identifiés comme deux éléments mutagènes, c’est-à-dire capables d’induire des modifications de la molécule d’ADN [58]. Enfin, les formes oxydées Cr6+ et Ni2+ sont aussi classées comme cancérigènes lorsque leurs poussières sont inhalées.

En conclusion, même si l’acier inoxydable 316L présente des bonnes propriétés de résistance à la corrosion, des phénomènes de corrosion localisée peuvent avoir lieu à la surface des stents après exposition à long terme en milieu biologique. En général, les ions largués dans l’organisme ont généralement un caractère toxique. Le dépôt d’un revêtement protecteur à la surface des stents représente une solution prometteuse afin de limiter les complications cliniques associées aux phénomènes de corrosion.