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Un marché mondialisé : les roses coupées

Préparez le commentaire de chacun des documents de ce dossier à l’aide du tableau d’observation/analyse (cf méthodologie TD1) et en cherchant les définitions des notions clés. Puis proposez une problématique et un plan permettant d'y répondre. Les questions suivantes peuvent vous guider dans la réflexion :

1) Quelles sont les caractéristiques de l’organisation spatiale des échanges de fleurs coupées ? 2) Quelle est la place des Pays-Bas dans ce marché mondial ? Comment pouvez-vous l’expliquer ?

Quelle est la place du Kenya dans ce marché ? Comment pouvez-vous l’expliquer ?

3) Qui sont les principaux acteurs de ces échanges ? En quoi peut-on parler de l’existence d’une filière productive des roses coupées à l’échelle mondiale ?

4) Quelles sont les caractéristiques du bassin de production de Navaïsha, au Kenya ? Quelles sont les conséquences de cette spécialisation économique sur le développement local ?

Notions-clés : filière productive, facteurs de localisation, avantages comparatifs, firmes transnationales, division internationale du travail, spécialisation, cluster, externalités positives/négatives.

Sauf mention contraire, les documents sont extraits de deux sources principales :

Calas B., 2013, « Mondialisation, Clusterisation et recyclage colonial », EchoGéo [En ligne], 26.

Calas B., 2013, « Le marché florissant et mondialisé de la rose », Carto, n°17, mai-juin 2013.

Document 1 : Producteurs et importateurs de fleurs coupées dans le monde

Source : Benoît L, Calas B, Racaud S, Ballesta O, Drevet-Demettre L, 2017 « Roses d'Afrique, roses du monde », Géoconfluences.

25 Document 2 : Le Kenya et le marché de la rose

Document 3 – Coûts de production et avantages comparatifs de la Hollande et de l’Éthiopie*

Hollandaise Ethiopienne Unité

sweetheart (enchères 2009) 0,09 0,1 Euros/Tige

Investissement 75-100 25 Euros/m2

Coûts de production (hors main-d’œuvre)

0,16 0,044 Euros/Tige

Coûts de transport 0,0055 0,06 Euros/Tige

Salaire horaire moyen 30 0,5 Euro/heure

Main-d’œuvre 1,7 8 Heures/m2/an

Coût total de la main-

d’œuvre 0,165 0,016 Euros/tige

Dépenses énergétiques

19,25 MJ (1/3 pour le chauffage et 2/3 pour éclairage) = 100 m3 de gaz

moyenne 250-300 250-260 En tiges/m2

Chiffre d’affaire 80-100 30-35 Euros/m2/an

*Faute de données disponibles sur le Kenya, c’est la situation de l’Ethiopie qui est décrite, mais les ordres de grandeur de ces deux pays sont comparables

Source : De Viers M., mai 2010. Cité par Calas, 2013.

26 Document 4 : Sur les rives du lac Naïvasha

Source : www.lemonde.fr/planete/visuel/2015/02/14/au-kenya-les-roses-epineuses-de-la-saint-valentin

Document 5a et 5b : Une serre et un entrepôt de la ferme horticole Wildfire (lac Naïvasha)

Source : www.lemonde.fr/planete/visuel/2015/02/14/au-kenya-les-roses-epineuses-de-la-saint-valentin

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Document 6 : Une salle de vente du marché d’Aalsmer

https://thomasweillphotographie.wordpress.com/2013/04/11/aalsmeer-plaque-tournante-du-marche-des-fleurs/

Document 7 : Le marché des roses dans la mondialisation

Le coup d’envoi de la tropicalisation de la floriculture européenne mais aussi américaine a été donné en 1973, quand l’augmentation des prix de l’énergie a été répercutée sur le prix des fleurs. A la même date, les Pays-Bas ont autorisé la vente des fleurs coupées non hollandaises sur le marché d’Aalsmeer, au sud d’Amsterdam, où transitent 60% des fleurs mondiales. La conjonction de ces deux événements (…) a donné le signal de la délocalisation, qu’il faut considérer ici comme une innovation en réponse au problème de la cherté des prix de l’énergie et du renchérissement de la main-d’oeuvre. Les délocalisations se sont accélérées dans les années 1990 quand la multiplication des prescriptions environnementales contraignantes pour l’agriculture et la floriculture hollandaises a encore augmenté les coûts de production aux Pays-Bas.

Par ailleurs, autorisée par la révolution technique du fret des années 1980, la dérégulation du transport aérien des années 1990 a permis aux perishables, dont les fleurs, de rejoindre très rapidement et à faible coût les rayonnages des supermarchés et les étals des marchés des pays du Nord. Chez le producteur, les fleurs sont conditionnées dans des boites de 12 à 16 kg : 150 roses de haute qualité (les plus lourdes) ou 300-400 roses ordinaires. Des camions réfrigérés les transportent à l’aéroport de Nairobi où elles sont prises en charge par des transitaires locaux ou internationaux.

Sauf pour les roses de grande qualité (qui peuvent voyager dans des avions de ligne), des avions cargo les emmènent : un Boeing 747 transporte 110 tonnes de roses (contre 12 tonnes de passagers).

Il y a jusqu’à 6 vols par nuit, qui arrivent le matin à Amsterdam (…). Du point de vue écologique, le transport en avion des fleurs kenyane émet moins de C0² que les serres hollandaises.

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Document 8 : 500 hectares de serres au sud du lac Naivasha, Kenya

Le Kenya exporte d’abord vers les Pays-Bas (90% des fleurs coupées transitent par Amsterdam) (…). Au Kenya, 500 ha de serres sont regroupées au sud du lac Naivasha, en exploitation de 15 à 100 ha appartenant à plusieurs entreprises différentes. Les aménités physiques de la situation équatoriale d’altitude constituent une première série de ressources attractives pour les investisseurs : saisons égales, contre-saisonnalité parfaite (Février y est sec et lumineux), lumière verticale, températures entre 8° et 25° à 1800 m d’altitude (comme en Equateur ou en Ethiopie), pluies faibles (climat d’abri au fond du Rift), réservoir d’eau douce pour l’irrigation. De plus, la région du lac de Naivasha se trouve dans les hautes « terres blanches » : colonisation ancienne, grands domaines de la bourgeoisie blanche ou noire (non démantelés par l’indépendance), régime politique stable acquis au libéralisme, main d’œuvre peu chère.

Le bassin de production de Naivasha compte ainsi une soixantaine de fermes de fleurs, de taille et de statut très variables (…). Il s’agit d’abord d’une agglomération d’unités de production de fleurs coupées (…). Officiellement, les liens qui unissent ces unités productives sont plus ceux de la concurrence que de la complémentarité. Cependant, les liens sont multiples. Par exemple, certaines de ces entreprises ont organisé un service de covoiturage des fleurs de Naivasha à l’aéroport de Nairobi afin de mutualiser les coûts et d’améliorer les cadencements. Des échanges de matériels, des dépannages, ont lieu qui renforcent les liens organisationnels. De plus (…), la production de fleurs a induit l’installation d’entreprises travaillant soit à l’amont, soit à l’aval de la production. En effet, la floriculture constitue une culture capitalistique (la construction d’une serre demande 100 000 euros par ha pour une serre moyenne, 400 000 euros pour une serre de très haute qualité), à haute intensité de main-d’œuvre (…), à haute intensité technologique (une variété de rose demande 7 ans de recherche pour être brevetée, nommée et avant d’être proposée aux producteurs), fortement consommatrice d’eau et d’intrants, très encadrée par les prescriptions d’un aval commercial situé au Nord et intraitable sur la qualité, la fraîcheur et de plus en plus la responsabilité écologique et éthique (…). Aujourd’hui, autour du lac se pressent les propriétaires ou exploitants-gérants de fermes, obtenteurs*, multiplicateurs, distributeurs d’intrants, représentants et vendeurs de serres, de systèmes automatisés de production, de systèmes d’irrigation, promoteurs de système de lutte biologique intégrée, consultants, auditeurs, certificateurs, grossistes, etc.

* Les obtenteurs inventent des variétés de roses. Le marché mondial est dominé par une vingtaine d’obtenteurs, hollandais et allemands au premier chef. Les multiplicateurs sont les entrepreneurs qui multiplient les pieds de roses, vendus aux fermiers.

Document 9 : Types de roses et localisation des productions

Pour le moment, la valeur de la production hollandaise résiste, ce qui prouve que les délocalisations participent pleinement à la stratégie d’adaptation des producteurs hollandais. Dans le contexte d’un accroissement de la demande et de la production, ces délocalisations se combinent à une intensification des unités hollandaises en partie basée sur des ententes avec les obtenteurs qui, souvent en raison non pas de contrats formels mais de liens interpersonnels forts, réservent aux producteurs hollandais et européens les variétés les plus récentes, les plus appréciées et de meilleure qualité quand les producteurs d’Afrique sont contraints de se tourner vers des variétés plus productives mais plus anciennes ou de moins bonne qualité, qui se vendent donc moins cher. Cette différenciation/spécialisation passe parfois à l’intérieur d’une même société, entre fermes hollandaises et fermes tropicales. Ainsi la ferme Bila Shaka appartient-elle à l’entreprise hollandaise Van Kleef détenue par deux sœurs, dont l’une gère la maison-mère en Hollande et l’autre les unités africaines, dont Bila Shaka

29 Document 10 : « L’éclatant commerce des fleurs »

Qu'ils soient implantés aux Pays-Bas (…), au Kenya, en Ethiopie, en Israël, en Belgique, en Equateur, en Allemagne ou ailleurs (…), les horticulteurs sont tenus de respecter les mêmes consignes: couper les fleurs, les entreposer en chambre froide, transmettre leurs caractéristiques par courriel à FloraHolland et les livrer prêtes à la vente - mises en bottes, les bottes placées dans des bacs et les bacs rangés dans des chariots. Réceptionnées à Aalsmeer entre 16 heures et 4 heures le lendemain matin, les fleurs et plantes sont transférées en chambre froide et contrôlées par des inspecteurs. À 6 heures, et jusqu'à épuisement des stocks, les gerberas, lys, orchidées, anthuriums, etc. sont achetés selon l'expertise d'un commissaire-priseur. Dans la salle des ventes principale, deux écrans géants projettent le nom des producteurs, l'appellation, la qualité, les particularités, la quantité ainsi qu'une photo des fleurs et des plantes que des employés font défiler devant les acheteurs présents. Rivés à leur pupitre, ces derniers consultent ces mêmes informations sur ordinateur, où une troisième vente virtuelle leur est proposée. Un prix leur convient dans ces enchères dégressives ? Ils appuient sur un bouton rouge et remportent la mise ! «La tactique? indique Isabelle Jeursen,la guide. Etre ni trop rapide, au risque de payer trop cher, ni trop lent, sous peine de rentrer bredouille!» D'autant que les achats à distance ne cessent de progresser. Au rythme de l'ensemble des ventes - 48 millions d'unités par jour - et face au défi à relever - J + 2 ou 3 au maximum entre la coupe et le particulier -, toute erreur peut être préjudiciable. Spécialement à la Saint-Valentin (60 % de ventes en plus que la normale !) ou à la fête des Mères, célébrée à trois dates différentes en Grande-Bretagne, en Allemagne et en France ! «Dans votre pays, la plante la plus offerte est l'orchidée, note Jan van den Berg, acheteur chez OZ Export, une des cinq premières sociétés exportatrices au monde. Parmi les fleurs, la rose domine largement. Viennent ensuite le lys, la pivoine, le gerbera et l'œillet.» «Vous ne vous attachez pas à une seule fleur, poursuit Marcel de Romph, au service marketing. Vous vous adaptez très facilement. Nous devons donc, tout au long de l'année, vous proposer diverses variétés dont la rose blanche Avalanche, souvenir du bouquet de mariée d'antan, et la rose rouge Naomi, pourtant hérissée d'épines!»

Source : Le Figaro, 12/08/2011

Document 11 : Des roses sans épines ?

La PME Aquarelle, l’une des principales enseignes de vente de fleurs en ligne, se fournit directement auprès d’une demi-douzaine de fermes au Kenya et en Éthiopie. « Nous essayons d’être attentifs. Nous allons voir sur place. Nous travaillons avec des fermes qui tentent de ne pas utiliser de pesticides. Et quand nous ne pouvons pas rencontrer le personnel, nous ne retenons pas la ferme parmi nos fournisseurs », répond François de Maublanc, le PDG d’Aquarelle, qui reconnaît cependant ne pas avoir mis en place de charte éthique ni procéder à des évaluations objectives de ses fournisseurs. « Entre les normes objectives et ce que font les gens, il y a toujours un écart », se défend le PDG.

Plusieurs certifications existent en matière de qualité des fleurs, de critères sociaux et environnementaux, mais elles sont invisibles pour le consommateur. « Il existe plusieurs labels, qui ne sont pas valorisés par le marché. Dans ces conditions, il est difficile d’avoir un cercle vertueux qui entraînerait les producteurs de fleurs », explique Christophe Alliot. D’autant qu’il faut se méfier des « bonnes pratiques » un peu trop paternalistes. Investir dans des écoles ou des dispensaires autour des fermes, c’est bien. « Mais cela crée un phénomène de dépendance. Un salarié qui est en désaccord avec son employeur risque de tout perdre : son salaire, l’école pour ses enfants, son centre de santé, et parfois sa maison », prévient Christophe Alliot. « Ces certifications n’auront un effet levier que si elles s’accompagnent d’un véritable travail avec le producteur et les employés, et

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pas seulement d’un audit une fois dans l’année. Pour les fermes certifiées en commerce équitable, trois ans de travail ont été nécessaires pour organiser des réunions avec les salariés, leur expliquer leurs droits, leur donner envie de se syndiquer. » Aujourd’hui, 20 plantations de fleurs sont certifiées Fairtrade/Max Havelaar au Kenya, dont la ferme Oserian qui compte 4 300 salariés.

Des efforts sont donc entrepris. Mais en l’absence de labels clairs, impossible pour le consommateur de faire la différence entre une rose cultivée dans des conditions convenables et les autres. La multinationale indienne Karuturi, qui produit 580 millions de roses par an au Kenya et en Éthiopie, dont une partie est exportée vers l’Europe, a ainsi été accusée d’évasion fiscale par l’administration kényane. Depuis cet hiver, elle est aussi l’objet de grèves et de protestations de ses salariés kényans, qui dénoncent le non-paiement des salaires, l’absence de protection contre les pesticides ou le harcèlement sexuel de la part des managers. « Karuturi veille à ce que ses employés aient de bonnes conditions de travail et une rémunération équitable », a répondu la firme, par publicité interposée.

Karuturi fournit-elle le marché français ? « On ne traite pas avec eux. Ce mouvement social, c’est la meilleure nouvelle qui puisse arriver », commente François de Maublanc, pour la société Aquarelle. « Quand bien même une moitié de producteurs seraient vertueux, si l’autre moitié fait n’importe quoi, cela n’est pas suffisant. C’est l’ensemble du secteur qui doit arrêter les pratiques les plus néfastes, par la régulation publique si nécessaire », conclut Christophe Alliot.

Source : http://multinationales.org/Mais-d-ou-viennent-donc-nos-fleurs

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