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Les manipulations syntaxiques utilisées par les élèves durant l’activité 2

CHAPITRE 4 : PRÉSENTATION ET ANALYSE DES RÉSULTATS

4.4 Description des interactions durant l’activité 2

4.4.1 Les manipulations syntaxiques utilisées par les élèves durant l’activité 2

Cette deuxième activité a favorisé davantage les échanges sur l’orthographe lexicale et grammaticale des mots. Toutefois, le recours aux manipulations syntaxiques s’est fait plus rare. Sur les 16 séquences analysées en détail, les élèves ont eu recours aux manipulations syntaxiques à seulement huit reprises. Pourtant, ces manipulations sont d’importants outils quand vient le temps de vérifier une hypothèse grammaticale.

L’extrait 14 présente une interaction entre les élèves de l’équipe 5 au sujet de la terminaison du verbe foulé dans la phrase Des personnages curieux, loufoques et volubiles ont foulé les planches des petits théâtres de la région. Malgré le fait que cet extrait ne concerne pas précisément un GN, il permet de soulever un questionnement quant à l’utilisation de certaines manipulations syntaxiques par les élèves. Ainsi, si l’on se questionne dans l’extrait 4 de la page 81 sur la compréhension des élèves lorsqu’ils ajoutent l’adverbe très devant un mot, on peut également se poser des questions sur leur compréhension du remplacement d’un verbe par mordre et mordu pour trouver la terminaison. Dans l’extrait 14, on remarque que les élèves utilisent le remplacement d’un verbe par un autre au même temps pour vérifier la terminaison. É3 explique qu’il a écrit le verbe fouler avec la terminaison er parce qu’il peut le remplacer par le participe passé mordu. É1 reprend la réflexion de É3 en lui expliquant que s’il peut remplacer foulé par mordu, la terminaison sera plutôt é. On remarque ainsi un manque de compréhension derrière cette manipulation qui, dans ce contexte, s’apparente davantage à une procédure mise en œuvre par É3 sans toute la réflexion nécessaire. Les manipulations syntaxiques appliquées comme des procédures apprises par cœur sont donc aussi utilisées par les élèves dans d’autres contextes que celui d’un GN. Cet extrait présente bien les limites d’une manipulation syntaxique qui est utilisée de cette manière. D’un autre côté, l’extrait 14 est intéressant parce qu’il fait ressortir qu’un élève peut changer d’idée après avoir reçu des explications de l’un de ses pairs. La construction d’une compréhension commune est l’une des forces du travail collaboratif.

Extrait 14

(Équipe 5 – Séquence 23 – 39 :20 / 61 :39)

Remplacement d’un verbe en -er par mordre et mordu

É1 : C’est bien. Foulé c’est f-o-u-l-é.

É3 : Moi j’ai écrit f-o-u-l-e-r parce qu’on peut dire ont mordu. É1 : Bien ont mordre, bien en fait mordu c’est é et mordre c’est er. É3 : Ah, c’est ont mordu.

L’absence de compréhension derrière l’utilisation du remplacement par mordre ou mordu va encore plus loin pour certains élèves. Dans l’extrait 15, des élèves de l’équipe 4 ne s’entendent pas sur l’orthographe du mot métier. É3 l’a écrit avec un é et il explique à ses coéquipiers qu’il l’a écrit ainsi parce que « les mordus ça se dit mieux que les mordre ». Il généralise donc l’utilisation de cette procédure à un nom qui termine par le son é. Il est possible de se questionner sur l’enseignement de cette procédure, soit de remplacer un verbe par mordre ou mordu pour choisir la bonne terminaison du verbe remplacé. Est-ce que les élèves comprennent bien qu’ils remplacent un verbe par un autre au même temps et que c’est pour cette raison qu’ils sont en mesure de choisir la bonne terminaison selon ce qui se dit le mieux? Les extraits présentés portent à croire que malgré le fait que les élèves utilisent le remplacement, qui est une manipulation syntaxique, cette utilisation n’est pas accompagnée d’une réflexion adéquate et dans ce contexte, elle ne saurait être plus efficace qu’une simple procédure comme celles proposées en grammaire traditionnelle.

Extrait 15

(Équipe 4 - Séquence 23 – 52 :57 / 62 :03)

Remplacement erroné par mordre et mordu avec un nom en -er

Les élèves discutent de l’orthographe du mot métier. É1 : Métiers, m-é-t-i-e-r-s.

É2 : Non, moi j’ai écrit m-é-t-i-é-s. É1 : Les métiers, un métier, c’est… É3 : Les mordre ou les mordu ? É2 : Les mordus.

É1 : Ce n’est pas un verbe, les métiers, des métiers, un métier, un travail, un job. Un métier ce n’est pas un verbe, donc ça ne marche pas avec mordre et mordu.

É2 : Moi je dis que c’est é, mais je ne suis pas sûre. É1 : Toi tu dis quoi?

É3 : é-s.

É1 : Ok, pourquoi?

É2 : Parce que les mordus ça se dit mieux que les mordre.

É1 : Ok, mais, la règle mordre et mordu c’est pour quoi? Les verbes, c’est pour les verbes. É2 : Non parce que les verbes en e-r, c’est juste e-r les verbes.

É1 : Un métier, un métier, c’est un métier. Métier c’est le mot métier, c’est un nom, donc ce n’est pas le… mordre ou mordu c’est pour les verbes conjugués ou pas conjugués. Donc métier est-ce que c’est un verbe? Non, donc ce n’est pas é parce que le mot métier c’est m- é-t-i-e-r.

É3 : Ok, c’est correct là. É1 : Bon.

Force est de constater que le recours aux manipulations syntaxiques se fait plus rare durant la deuxième activité, mais les élèves discutent tout de même de l’orthographe grammaticale des mots à plusieurs reprises. Comment s’y prennent-ils alors? Le questionnement d’un élève et la réponse d’un autre est souvent la méthode employée. En fait, ce qui se passe le plus souvent lorsque les élèves discutent de l’orthographe grammaticale est qu’un élève demande aux membres de son équipe comment ils ont accordé ou conjugué un mot en particulier et un élève de l’équipe lui répond. À la suite de cette interaction, les élèves réussissent habituellement à s’entendre et ils ne ressentent pas le besoin d’expliciter davantage les raisons de leur choix de graphie. Dans l’extrait 16, il aurait été intéressant de constater que les élèves qui répondaient à la question de É1 utilisaient un métalangage précis pour formuler une explication complète à leur coéquipier qui n’était pas certain de l’accord à faire pour l’adjectif riche. Pourtant, ce n’est pas ce qu’on observe, car les élèves n’utilisent que le contexte de la phrase pour répondre à la question posée. D’un autre côté, on peut penser que cet extrait témoigne qu’il y a des accords qui semblent bien compris pour certains élèves et qu’ils ne ressentent pas le besoin d’expliquer à leur équipe une notion qui est si simple pour eux.

Extrait 16

(Équipe 5 – Séquence 22 - 03 :20 / 65 :31) Discussion à propos de l’accord du mot riches

Les élèves discutent de l’accord du mot riches dans la phrase Longtemps abandonnée, cette gigantesque salle de spectacle est aujourd’hui rénovée par les plus riches entrepreneurs. É1 : À riches est-ce qu’on va mettre un s?

[…]

É2 : Quoi?

É1 : On n’en mettait pas? On n’en mettait pas en de s à riches? É3 : Oui, oui.

É2 : Par les plus riches. É4 : Il y en a plusieurs.