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Maman (M)

Entretien téléphonique réalisé par Valérie (V) V : Question initiale puis journée type.

M : Alors Laurence a d'abord une atteinte pancréatique importante, beaucoup plus digestive en fait que pulmonaire, donc la journée type elle va plus à l'école parce qu'elle est en attente de greffe du foie, donc elle a des professeurs qui viennent à domicile par le biais d'une assoc qu'on a, nous, à domicile, à Montluçon, donc ils se sont proposés de venir l'aider. Donc le matin généralement, elle a des cours, elle se lève un peu tard parce qu'elle est quand même très fatiguée, les après-midi, elle fait son aérosol, elle va chez le kiné environ une demi-heure par jour, et puis à côté de ça, elle a une vie qui est tout à fait normale outre la fatigabilité qui est quand même de plus en plus importante. Donc elle va avoir 18 ans et elle a été diagnostiquée à 3 ans et demi. Voilà. Donc après la semaine est rythmée par les prises de sang évidemment, parce que elle est suivie de très près par rapport à son foie, donc elle a une prise de sang toutes les semaines, une injection de vitamine k toutes les semaines, des visites régulière chez le médecin, et elle est suivie dans 3 hôpitaux différents. En pédiatrie, à M, Dr. Martin a pris le relais pour tous les problèmes hépatho, et donc elle est en attente de greffe sur Cochin, à Paris. Voilà.

V : Et ça fait longtemps qu'elle est déscolarisée?

M : C'est la première année. Cette année elle est au CNED, et c'est la première année. L'an dernier elle était inscrite en LEP et elle a débuté seulement l'année et elle a commencé a avoir des gros soucis en décembre, donc elle a été beaucoup hospitalisée, donc elle a arrêté sa scolarisation en cours d'année l'année dernière.

V : Et sinon il y avait des choses particulières à organiser avec l'école?

M : C'est-à-dire que le LEP on avait fait… On n'avait pas fait d'horaires particuliers et tout, mais effectivement les profs étaient au courant de sa maladie donc quand elle a été arrêtée les 2 premiers mois où vraiment ça a été très mal, les profs sont venus… Y a 4 profs qui sont venus à la maison, pour qu'elle rattrape, qu'elle ait ses cours. Et puis après, comme elle a été hospitalisée longtemps et qu'elle était plus en état de suivre ses cours, ben on a arrêté l'année en cours en fait. Mais on n'avait pas mis au point de mi-temps thérapeutique ou de choses comme ça. On commence à y penser parce que moi je voudrais qu'elle retourne au lycée parce que je trouve que les cours par correspondance sont très difficiles et en plus de ça socialement c'est pas très, très bon de rester tout le temps à la maison non plus. Donc il est question, là, avec le conseiller d'orientation du LEP, de faire un contrat et qu'elle puisse avoir

les cours techniques au LEP, et qu'elle puisse avoir les cours importants à la maison avec les profs du LEP et les profs de l'école à l'hôpital qui sont prêts à continuer leur aide à domicile.

V : D'accord… Donc c'est une organisation qui est en cours.

M : Voilà, c'est un peu compliqué, mais je veux qu'elle ait une vie sociale ordinaire et des projets.

V : Et sinon vous me parliez de la kiné, elle se déplace tous les jours à un cabinet de kiné? M : Oui, le cabinet est à 1,5 km de chez nous donc moi je l'emmène et puis je l'attends là- bas ou bien je retourne la chercher, enfin on s'organise quoi. Bon, je sais qu'on aurait droit à un VSL ou un taxi, mais étant donné que c'est tout près, on s'organise comme ça. De temps en temps, quand elle va bien elle a qu'une journée sur 2 avec la kiné, donc c'est vraiment gérable, quoi. Bon moi j'ai pris un congé sans solde pour rester auprès d'elle, l'an dernier comme elle allait mal, au départ, elle était sur liste prioritaire, donc j'avais pas vraiment le choix… Donc j'ai pris l'année de congé pour maladie d'enfant, et donc là, j'ai la chance de pouvoir obtenir plus longtemps, mon employeur accepte de me donner un congé sans solde de 3 mois renouvelable en cas de besoin donc en attendant la greffe.

V : Et sinon autour de chez vous, vous avez tout ce qu'il faut? Vous êtes livrée pour le matériel?

M : Oui, c'est X qui s'occupe de nous, quand on a des perfs on fait tout à domicile, pour les aérosols c'est pareil, pour l'oxygène pareil… Les aérosols c'est pareil… Par contre, on gère tout nous-mêmes parce que y a rien de prévu à l'hôpital de M pour l'instant, y a pas d'infirmière qui s'occupe de tout ça, donc en fait c'est nous qui nous débrouillons par nos propres moyens quoi…

V : C'est de l'organisation…

M : Oui, mais en fait ça fait partie de l'organisation du quotidien… En fait comme tout n'arrive jamais en même temps, ben petit à petit, ben on s'habitue, le pulmozyme, puis ensuite les cures à domicile, on s'habitue… C'est un peu difficile pour les cures à domicile parce que pour avoir tout ce qu'il faut pour les 3 semaines ça fait beaucoup d'allers-retours parce que y a jamais tout d'un coup, bon, moi j'ai choisi d'aller chercher mais je pourrais aussi me faire livrer, c'est un choix personnel. Moi je travaille pas, je considère que j'ai du temps pour ça, donc je le fais personnellement. Sinon c'est vrai qu'on peut se faire livrer. Mais généralement les 2 premiers jours de perfs sont un peu lourds à gérer. Et nous on manque d'infirmière coordinatrice, on n'en a pas. Je pense que ça devrait se faire mais…

V : Et est-ce que vous avez eu une consultation de génétique?

M : Non, ce qui s'est passé c'est que je suis divorcée du papa de Laurence, et quand je me suis remariée et que j'ai voulu un autre enfant, on a fait à l'hôpital de M des prises de sang pour trouver la mutation de Laurence et on a eu un test génétique, mon mari et moi, pour heu s'assurer que lui ne soit pas porteur de la muco et donc on a eu ça. Et puis la petite a eu à la naissance pour confirmer un simple test à la sueur, mais sinon y a pas eu du tout de consultation génétique et ma famille se sent a priori pas concernée par ça parce que j'ai des neveux et des nièces, donc qui en plus maintenant sont adultes, et je leur en ai parlé mais ça a pas été plus loin. Donc j'avais proposé mais après c'est chacun qui voit, nous on a fait ce qu'il fallait, mais le reste de la famille a pas demandé à rencontrer un généticien quoi que ce soit. Donc on en est resté là.

V : Et est-ce que vous avez fait appel aux associations?

M : Non, pas du tout… Moi j'ai fait appel une ou 2 fois à VLM l'an dernier quand on a monté le dossier de pré-greffe, j'avais eu un contact avec l'assistante sociale parce que c'est à Paris et comme on est à 400 km ça me semblait un peu compliqué, mais sinon…Je me suis pas adressée à des assocs…Les profs qui viennent à la maison font partie d'une assocs mais c'est dans le cadre de l'hospitalisation qu'ils nous l'ont proposé donc bon. Après on a continué mais moi j'avais pas fait la demande, c'est eux qui se sont proposé. Et sinon niveau assocs, je suis adhérente à SOS muco et avant à VLM mais je suis pas très branchée assocs, ça prend beaucoup de temps, et c'est quand même particulier de vivre tout le temps avec ça aussi. Moi j'ai besoin de faire autre chose à côté de la muco quand même.

V : Et sinon est-ce que vous parlez de la maladie autour de vous?

M : Oui, ça fait partie de notre quotidien heu…J'en parle heu… Ca dépend en fait, c'est pas quelque chose qui revient systématiquement dans la discussion… Les gens qu'on fréquente sont au courant de notre situation, heu j'en parle quand les gens savent pas du tout ce que c'est, je leur explique un peu… On en parle plus forcément au moment des virades parce que les gens en entendent parler, donc ils sont plus demandeurs… En fait, je me rends pas compte si on en parle ou pas, parce que c'est tellement ordinaire pour nous que je peux pas vous dire si j'en parle beaucoup ou pas. Ca fait tellement partie de ma vie! C'est pas évident.

V : Et votre fille, elle en parle autour d'elle?

M : Oui… Ben disons que elle a eu une période où elle voulait pas du tout que les gens sachent parce qu'elle voulait pas être regardée différemment des autres, et puis heu… Maintenant ben, elle a pas mal d'amis qui le savent, qui l'aident quand elle est hospitalisée, qui la soutiennent… Moi je trouvais que c'était important que les plus proches soient au

courant, donc bon… Elle, elle a eu un moment où vraiment elle voulait pas en parler du tout, et puis là elle va avoir 18 ans, donc je pense qu'elle a fait aussi du chemin avec ça, elle est très ouverte par rapport à ça, elle en parle bien… Bon, elle s'étend pas. Elle donne pas des gros détails, elle donne pas les perspectives et tout, mais les gens savent qu'elle est suivie pour une maladie assez lourde et puis là, les gens savent qu'elle est en attente de greffe, donc là, ils sont un peu au courant de sa situation, oui. Mais c'est vrai qu'elle aime pas trop en parler, c'est pas son truc, elle aime pas trop ramener les choses à elle, donc elle aime pas trop en parler.

V : Et est-ce que vous verriez des choses à améliorer dans la prise en charge?

M : Ben nous pour elle… Elle, elle a une très bonne prise en charge, le pédiatre qui la suit depuis toute petite à l'hôpital de M est très, très concerné par la muco, et elle est très bien suivie. Donc nous, personnellement, on n'a vraiment pas à se plaindre quoi, on a vraiment une super prise en charge. Je sais pas, y a forcément des choses à améliorer, nous on est allés dans un service à C, un service de muco qui est petit, sombre, ancien… Je pense que les problèmes viennent de là, qu'au niveau de la prise en charge des malades qui sont souvent hospitalisés, c'est quand même important qu'ils aient un environnement plus attrayant que ça quoi. Sinon ben nous, on a la chance de… Laurence a pas une grosse atteinte au niveau pulmonaire, elle a pas, sauf l'année dernière, sinon elle a pas été hospitalisée trop souvent et on n'a pas eu comme certaines familles des hospitalisations tous les 2 ou 3 mois. Donc c'est vrai que je suis un peu mal placée pour parler de ça parce que nous, on l'a très peu vécu et elle a été très vite en perfusion à domicile quand elle a eu besoin, donc en fait on n'a pas été dérangés par les problèmes d'intendance et de prise en charge.

Moi je pense que ce qu'est bien c'est aussi que les kinés puissent venir à la maison… Ça on l'a vécu pendant des années, la première kiné qu'on a eue venait à la maison et ça c'était bien quoi, parce que pour un tout petit, c'est quand même important d'avoir quelqu'un qui vient plutôt que de devoir le sortir par tous les temps. Et puis pour l'organisation familiale aussi quoi.

Mais non, sinon d'amélioration… Vous savez Laurence a un porta-cath maintenant, donc on n'est pas embêtés par les prises de sang et tout ça, pour les perfs je pense que ça lui facilite beaucoup la vie et je pense que c'est important dans la vie de quelqu'un qui est souvent sous traitements quoi. Sinon au niveau de la prise en charge nous, on a tout ce qu'il nous faut.

V : Et est-ce que vous voyez des choses à ajouter?

M : Ben écoutez… J'y ai pas trop réfléchi parce que j'ai été pas mal débordée ces derniers jours, non… J'ai connu votre enquête par médicaliste et ça c'est génial, ça nous a beaucoup apporté et je trouve que pour elle comme pour moi ça a été une vraie ouverture, et ça c'est très important… Ça permet d'en parler à des gens qui sont comme nous et de pas rester seuls dans notre coin et de pas oser en parler aux autres quoi. Donc ça je trouve que c'est une

bonne idée. Pour nous ça a vraiment été une bouffée d'air et ça continue de l'être, c'est vraiment important dans notre vie. Sinon non, moi j'ai une fille très bien prise en charge, on attend la greffe! Je pense qu'il faudrait plus en parler de ça, parce que les gens ont vraiment des idées préconçues! Là, je parlais avec quelqu'un et il me disait qu'il voulait pas être donneur d'organe parce qu'il pensait qu'en réa, si on était donneur d'organe, on avait moins de chances de s'en sortir! (Rires) J'ai trouvé ça aberrant et je pense que les gens sont pas assez informés par rapport à vraiment comment ça se passe, quoi. Ils ont vraiment des peurs ridicules par rapport à ça quoi.

V : Ça, c'est un point à améliorer?

M : Oui, moi je pense qu'on explique pas suffisamment aux gens que c'est vraiment… Que le jour où on propose à une famille que la personne soit donneuse, c'est que vraiment la personne est plus là et qu'on peut plus rien faire pour elle quoi. Ça c'est quelque chose, je l'ai écouté souvent cette réflexion parce que les médecins font tout pour sauver quelqu'un avant de prendre une décision comme celle-là donc… C'est dommage que les gens soient pas assez informés, parce que c'est vraiment des vieux tabous et puis ça joue aussi dans le manque d'organes, quoi. Et puis bon, c'est une décision qu'il faut prendre souvent très vite donc… l'aide aux familles est pas forcément facile dans ces cas-là…

V : Et vous, pour cette attente, vous vous sentez soutenus?

M : Ben nous, on se soutient nous-mêmes, je dirais…De toute façon, moi j'ai un caractère assez fort et je le vis bien, parce que je sais que ma fille est entre de très bonnes mains à Cochin… Je sais que les gens susceptibles d'intervenir sur elle sont vraiment des pros, donc j'y vais vraiment très tranquille… Sinon, on est soutenus par d'autres gens qui sont aussi en attente de greffes et qui nous aident beaucoup, qu'on a rencontré par l'intermédiaire de la liste et puis ensuite réellement, et là, on est soutenus. Niveau familial, c'est pas évident, les grands-parents vivent ça très, très mal, mes frères ont leur vie à eux et on en parle très peu, on n’est pas très famille. Bon, on a des amis qui savent et qui sont là pour nous aider en cas de souci, mais on en parle pas plus que ça. Les gens savent qu'on attend et c'est tout quoi.

V : En tout cas, pour vous les point à améliorer c'est l'information.

M : Oui, c'est ça. Bon, c'est vrai que nous on est très concerné mais c'est vrai que… Et puis aussi par rapport aux maladie génétique en général, c'est vrai que les gens confondent souvent avec la myopathie, et c'est vrai que y a des jours où ça prend un peu la tête. C'est vrai que si les gens étaient un peu mieux informés sur la muco ce serait bien mieux!

M : Non, je crois que je vous ai tout dit! (Rires) V : Arrêt et remerciements.