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Malheureusement, nous n'avons pu nous procurer que deux

fœtus éclamptiqueset avec des pièces si peu nombreuses, nous

ne pouvons avoir la prétention de trancher une si difficile question.

pour avoir un point de comparaison, il nous paraît utile de passer

en revue les lésions jusqu'ici signalées dans l'éclampsie, de

rechercher celles de ces lésions les plus fréquemment obser¬

vées, celles qu'on pourrait regarder peut-'tre comme pathogno-moniques, l'anatomie pathologique de cette affection étant

encore fort obscure.

Cette étude a jusqu'ici passé par bien des phases diverses.

Tout d'abord frappés par le symptôme le plus apparent de l'éclampsie, les accès convulsifs et leur ressemblance avec

l'épilepsie, les premiers observateurs en firent une maladie

nerveuse. Ce fut, en effet, l'opinion de Borsieri et de Mauriceau.

D'après ce dernierauteur, l'éclampsie était due : « 1» à la trop

» grande abondauce du sang extrêmement échauffé parl'action

)> du travail; 2° à raison de la grande quantité qui s'en est

éva-» cuée par une perte de sang; 3°à cause de la grande douleur

» que la matrice, qui est toute nerveuse, ressent, quiest excitée

y> par l'extrême distension qu'en fait l'enfant, laquelle douleur

)> se communiquant au crrveau avec le sang échauffé qui s'y

» porte aussi en abondance, cause par sa compassion ces

con-» vulsions.» Cohen faisait de l'éclampsie une névrose ayant

pour point de départ l'utérus ou le .cerveau; mais bientôt

Schrœder etMarchai deCalvi, localisant ces lésions attribuaient l'éclampsie, l'un à des lésions des centres nerveux, l'autre à des

lésions fixes des méninges. Enfin Broussais, limitant toujours

ses recherches au système nerveux central, constatait de la congestion spinale et des épanchements sanguins dans l'arach¬

noïde ei la Fubstance cérébrale.

Mais après la découverte de l'albuminurie par Cotugno, en 1770, la question entra dans une èrenouvelle; la théorie ner¬

veuse se vit réléguée au second plan, et ce fut dans les reins qu'on rechercha les lésions de l'éclampsie. Blackell et Wells en

1818 avaient signalé la présence de l'albumine dans les urines

de bon nombre de femmes enceintes, et Lever en 1843 démon¬

trait la relation de cette albuminurie avec féclampsie. Traube

admettait un spasme rénal réflexe, d'origine utérine, spasme

qui devait produire l'anurie et les convulsions. Puis en 1850,

Braun déclare que les lésions rénales de l'éclampsie sont iden¬

tiques à celles du mal de Bright; il s'étend longuement

sur-leur description, qu'il divise en trois stades : le premier, ou stade d'hvperliémie, est caractérisé par des épanchements hémorrhagiques provenant des glomérules des plexus

vascu-laires, des tubuli, ou des veines répandues à la surface corti¬

cale. L'épitliélium des tubes urinifères ne présente aucune altération, mais se détache facilement; dans les tubuli on peut voir des cylindres transparents et quelquefois des corpus¬

cules sanguin. Au deuxième stade, état d'exsudation, le

glo-mérule est couvert de granulations on observe un exsudât épais et solide entre le glomérule et sa capsule. L'épithélium

des tubes urinifères est trouble et présente quelquefois de la dégénérescence graisseuse. Enfin à la troisième période, le rein atrophié n'a souvent plus que le poids d'une once, les glomé¬

rules sont rétractés, leur trame vasculaire oblitérée, les tubuli

détruits etleur couche essentielle et fondamentale ridée et rata¬

tinée. Malgré une description si complète, la question était loin

d'êtrerésolue, et tandis que pour Imbert Courbeyre les lésions

rénales semblaient être la cause de l'albuminurie, Gluber et bien d'autres auteurs avec lui prétendaient que l'albuminurie

était le point de départ de ces lésions.

Mais les derniers progrès de la médecine et les grandes

théories d'infection et d'auto-intoxication vinrent modifier considérablement les donnéesjusques-là en honneur.

L'infection qui rendrait bien comptedes phénomènes observés

ne peut encore être considérée comme la vraie théorie. Doleris

et Poney avaient bien découvert en 1883 dans les organes des éclamptiques des microbes pathogènes; Doleris et Butte pro¬

voquèrent même des accidents convulsifs par injection à des

animaux de bouillons de culture ensemencés avec l'urine d'une éclamptique. Mais des recherches ultérieures démontrè¬

rentque les bacilles constatés manquaient fort souvent; dans

bien des cas, on n'avait affaire qu'au bacterium coli commune;

et enfin Doleris lui-même put reproduire les accidents convul¬

sifs observés par lui avec du bouillon stérilisé. Cependant, en avril 1894, MM. les docteurs Rappin et Monnier, professeurs à

l'école de Nantes, constatèrent dans quatre cas d'éclampsie la présence d'un bacille semblable à celui décrit par Blanc en 1889. Ce bacillelong de 3 à 5 \>-, étranglé à sa partie moyenne, à extrémités arrondies, est animé de mouvements rapides. Il

cultive bien sur les milieux connus, et ne liquéfie pas la géla¬

tine. On peut le colorer avec les couleurs d'aniline, il prend parfaitement le Gram. Les inoculations intra-veineuses des

bouillons de culture amènent de l'engourdissement, de la torpeur et la mort en vingt-quatre heures, des souris, rats et cobayes en expérience. Enfin, l'inoculation faite dans la jugu¬

laire d'une femelle de cobaye pleine produisit l'avortement et

la mort en vingt-quatre heures; il fut même possible de retrou¬

ver le microorganisme dans le foie et le placenta de deux

fœtus.

Quant à l'auto-intoxication, bien que les auteurs soient divi¬

sés en plusieurs camps,à l'effet de savoir

qu'elle

en est

l'agent

principal, que ce soit l'excès

d'albumine (Wilson) le carbonate

d'ammoniaque (Testut), la créatine, la créatinine

(Frérish), la

leucine (Scholtin), l'acide oxalique (B.

Jones), les sels de

potasse ou tous les éléments

de l'urine (Peter)

etc..,

les expé¬

riences que nous venons de rapporter dans le

précédent

para¬

graphe nepermettent plus

de la nier. En

tous cas

c'est à

un

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obstacle quelconque à l'élimination qu'il faut attribuer cette auto-intoxication et rechercher les lésions du côté des émonc-toires et surtout dans ie foie et les reins qui sont les deux plus importants. C'est aussi du côté de ces organes, et en particu¬

lier du foie, que se sont concentrées les recherches dans ces

dernières années.

Déjà en 1849, Blot signalait, comme lésions macroscopiques

du foie éclamptique, de petites hémorrhagies, de la grosseur d'une tête d'épingle, situées à la surface, et qu'on pouvait apercevoirégalement sur des sections de l'organe. Molas les

constatait également, ainsi que Vincent, dans ces cterniers temps.

Mais les travaux les plus importants sur ces hémorrhagies hép tiques datent de quatre ou cinq ans à peine. Ces recher¬

ches,dues à M. Pilliet, aide préparateurd'histologieà la Faculté

de Paris, furent successivementpubliées dans la Gazette hebdo¬

madaire et dans la thèse de de Lauradour. Sur onze cas, M. Pilliet put toujours constater les mêmes lésions caractéris¬

tiques: on y rencontrait de petites taches ecchymotiques du

volume d'une tête d'épingle et plus, sauf sous la capsule où

elles pouvaient former une ecchymose en nappe. L'abondance

de ces taches variait sur les sections du foie. Lorsque ces tacheshémorrhagiques manquaient, il put néanmoins toujours

les retrouver à l'examen microscopique, et une étude appro¬

fondie lui permit d'en décrire trois stades différents :

«. Au premier stade, dit il, on constate une dilatation spéciale

» des capillaires intra-lobulaires situés au voisinage immédiat

» de l'espace porte; au début, il n'existe donc que des

capil-» laires ectasiés, disséminés irrégulièrement autour des espaces

)> portes et non de tous et greffés excentriquement sur l'espace

)> de Kiernan, comme s'il yavait thrombose capillaire péri-porte

» etnonthrombose porte proprementdite. La forme de chacune

)> de ces dilatations capillaires est tout à fait typique; elle est

)) parfaitement circulaire, en sorte que les foyers d'ectasie

pré-» sentent un contour découpé et formé d'une série de

eonvexi-» tés semblables à celles que donnerait le contour d'une grappe

» de raisin. C'est là le premier stade.

» Le second est celui qu'on observe le plus fréquemment. Les

» foyers se sont agrandis, la périphérie est toujours formée

)) par les dilatations vasculaires, puis le centre est composé

» d'une série d'éléments en voie de nécrose; ce sont les cellules

» du parenchyme hépatique, refoulées et

aplaties

par

les

dila-» tations vasculaires, ayant perdu les granulatious de

leur

)) protaplasma et n'ayant plus que des noyaux

irréguliers,

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