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CHAPITRE 5 ANALYSE ET DISCUSSION DES RÉSULTATS

5.2 Macroporosité des stériles

Comme on l’a mentionné auparavant, les résultats de la présente étude indiquent que la conductivité hydraulique saturée des stériles serait peu influencée par la présence des différentes proportions de graviers et de cailloux. Toutes les fractions granulométriques des stériles testées ont menées à des valeurs pratiquement similaires de ksat. Les valeurs de ksat prédites selon les

modèles de Kozeny-Carman (KC) et Kozeny-Carman modifié (KCM) sous-estiment systématiquement la conductivité des stériles de 1 à 2 ordres de grandeur (par rapport aux mesures). La raison de cet écart entre les valeurs prédites et les valeurs observées semble due (en partie) à la nature très hétérogène des stériles. On peut supposer que pour ce type de matériau à granulométrie très étalée (avec cailloux), il existe d’autres caractéristiques qui contrôlent les propriétés hydriques. Les résultats des essais de traceur et des essais d’infiltration suggèrent la présence de voies d’écoulement préférentiel qui seraient formées par un système de macropores interconnectés.

Par exemple, lors des essais de traceur, on a noté un écart considérable entre le temps de la première arrivée du traceur et le temps d’arrivée du front advectif, soit 4 min et 21 min respectivement pour l’échantillon QIT1_P50_lâche, et 22 min et 71 min pour l’échantillon QIT1_P5_f (tableaux 4.11 et 4.12). Ceci pourrait être relié à la présence des voies d’écoulement préférentiel dans les stériles testés.

Les valeurs de la dispersivité longitudinale ( ) déterminées lors des essais de traceurs dans la présente étude (et les travaux antérieurs) sont présentées dans le tableau 5.8. On peut voir que les valeurs du coefficient obtenues par différentes méthodes varient entre 10 et 20 cm. Selon les données de Gelhar et al. (1992), la dispersivité longitudinale pour cette échelle, c’est-à-dire pour des échantillons dont la longueur est d’environ 100 cm, serait de 5 cm ou moins (selon la granulométrie ; figure 5.8). Les valeurs relativement élevées des coefficients déduites des essais en colonnes témoignent d’une grande hétérogénéité et pourraient être dues à des voies d’écoulement préférentiel, qui contribuent aux processus de dispersion dans les stériles miniers.

Tableau 5.8 : Valeurs de la dispersivité longitudinale αL des stériles obtenues dans la présente

étude et les études antérieurs.

Source Méthode utilisée Matériaux αL [cm]

Présente étude Méthode de paramètres adimensionnées

de Sauty (1980) (voir section 4.4) QIT1_P50_lâche QIT1_P5_f 15 12

Bui (2007) POLLUTE et l’équation d’advection-

dispersion d’Ogata-Banks (1961) QIT Passant 10 mm QIT Passant 50 mm 10 10

Intissar (2009) Solution d’Ogata-Banks (1961) QIT2 Passant 10 mm 20

Figure 5.8 : Lien entre la dispersivité longitudinale αL et l’échelle des essais de terrain (tiré de

Gelhar et al., 1992).

En ce qui concerne les résultats des essais d’infiltration, on peut remarquer que les valeurs minimales du taux d’infiltration I (de 0,01 cm/s à 0,04 cm/s pour les deux matériaux testés, QIT1_P10_f et QIT1_P50_lâche, voir figures 4.21 et 4.22) sont significativement inferieures aux valeurs de ksat mesurées lors des essais de perméabilité du matériau saturé, soit 0,11 cm/s et 0,43

cm/s respectivement (voir tableau 4.8). Cet écart pourrait être expliqué, en partie, par la présence d’un système de macropores interconnectés dans les matériaux testés. A l’état complètement saturé, ces macropores pourraient jouer un rôle comme voies d’écoulement préférentiel, responsables des valeurs élevées de ksat. Dans les conditions non-saturées qui prévalent lors des

essais d’infiltration (de courte durée), ces macropores ne seraient pas entièrement remplis d’eau (certains seraient même presque vides). Dans ce cas-là, les macropores ne pourraient pas contribuer de manière significative à l’écoulement de l’eau et contribuer à l’infiltration dans le matériau, ce qui expliquerait les valeurs réduites du taux d’infiltration I (par rapport à ksat).

Il est possible d’estimer approximativement le diamètre des macropores, qui pourraient former les voies d’écoulement préférentiel dans les stériles, en prenant en considération les dimensions des particules lessivées lors des essais de perméabilité. Afin de traverser un échantillon de roche stérile, une particule solide doit passer par un système des pores interconnectés dont le diamètre minimal doit être plus grand que la taille de la particule déplacée. Dans la présente étude, la taille des plus grandes particules récupérées serait d’environ 250 µm (ce diamètre correspond à 3-4% des particules en suspension dans l’eau récupérée et à plus de 15% des particules retenues par le géotextile au bas des colonnes QIT1_P50_f1,f2,lâche). Une certaine quantité de particules plus grandes que 250 µm (0,25 mm), mais plus petites que 400 µm (0,4 mm) ont également été lessivées au cours des essais (identifié par l’analyse laser des particules récupérées ; voir figures 4.7, 4.8 et 4.10). On n’a pas observé des particules plus grandes que 400 µm parmi les particules recueillis à la sortie des colonnes expérimentales. On peut donc conclure que la taille maximale des macropores conducteurs pourrait être supérieure à 250 µm, sans dépasser trop 400 µm. Il est possible que des macropores plus grands que 400 µm soient présents dans la matrice de la roche stériles, surtout dans les fractions plus grossières des stériles (p. ex. dans les échantillons QIT1_P50_f1,f2,lâche,l et QIT1_P28_f,l). Cependant, ces pores seraient isolés dans la matrice, c’est-à-dire ils ne seraient pas rattachés au système des macropores interconnectés qui forment les voies d’écoulement préférentiel. Ceci influence les dimensions des pores conducteurs ainsi que la taille des particules mobiles.

À partir de ces déductions, il est possible d’estimer la valeur de la porosité "effective" des macropores en utilisant les données obtenues lors de l’essai combiné «infiltration/traceur». Cet essai a été effectué sous une charge variable. Le débit d’eau a été mesuré à la sortie de la colonne pour divers intervalles de temps (tableau 5.9).

En sachant le débit d’eau (Q) et la section de la colonne expérimentale (A), nous pouvons déduire la vitesse de Darcy (Va) selon les équations 2.3 et 2.4 (Va=Q/A). Nous pouvons ensuite calculer la

porosité effective (ne) par itérations en utilisant l’équation de la vitesse linéaire Vx=Va/ne. Pour

cela, il faut définir la valeur de ne qui permettrait au traceur d’arriver à la sortie de la colonne au

bout d’environ 2 minutes, soit le temps de la première apparition du traceur dans l’eau recueillie lors de l’essai «infiltration/traceur». Les résultats de ces calculs sont montrés dans le tableau 5.9.

Tableau 5.9 : Eléments utilisés pour estimer la porosité "effective" des macropores d’après les

résultats de l’essai combiné «infiltration/traceur» pour la colonne QIT1_P50_lâche.

Temps, s Masse d’eau récupérée à la sortie, g C/Co dans l’eau récupérée Vα (Darcy), (Vα =Q/A*), cm/s Vx (=Vα/ne), cm/s (ne=0,0782)**

Distance parcourue par le traceur à chaque intervalle

de temps, (L=Vx×∆t), cm 20 543,1 0,0015 0,040 0,518 10,36 30 287,3 0,0018 0,043 0,548 5,48 40 287,4 0,0020 0,043 0,548 5,48 50 279,6 0,0021 0,042 0,533 5,33 60 263,1 0,0021 0,039 0,502 5,02 70 275,3 0,0020 0,041 0,525 5,25 80 250,5 0,0020 0,037 0,478 4,78 90 254 0,0020 0,038 0,484 4,84 100 247,1 0,0019 0,037 0,471 4,71 110 243,8 0,0021 0,036 0,465 4,65 120*** 233,8 0,0025 0,035 0,446 4,46

∑ (parcours) = longueur de l’échantillon = 60,35 cm * Q – débit d’eau à la sortie de la colonne expérimental; A – section de la colonne

** valeur de ne déduite pour obtenir le temps de la première arrivée du traceur

*** temps de la première arrivée du traceur à la sortie de la colonne (2 min)

La valeur de la porosité "effective" ne due aux macropores ainsi obtenue s’élèverait alors à

environ 8 %. Rappelons toutefois que l’échantillon considéré pour cette analyse (QIT1_P50_lâche) est caractérisé par un état lâche (pas de compactage lors de son montage). La porosité totale déterminée au démontage de l’échantillon en question est d’environ 30 %. Lors

des essais de traceur sur cet échantillon, on a noté un écart considérable entre le temps de la première arrivée du traceur et le temps d’arrivée du front advectif, soit 4 et 21 min, ce qui pourrait refléter la présence des voies d’écoulement préférentiel. Il est probable que la porosité ″effective″ due aux macropores serait plus faible dans les échantillons plus denses.