4.11 Analyse d’erreur
4.11.2 M´ethode du compl´ement singulier : convergence
Nous avons ´etabli que pour le cas statique, la λ-approche et la m´ethode compl´ement singulier orthogonale sont identiques d’un point de vue probl`eme continu (section 2.4), formulation variation- nelle (proposition 2.47) et probl`eme discret (th´eor`eme 4.11). Nous nous contentons donc d’´etudier la convergence de la λ-approche.
L’analyse de la convergence de la m´ethode du compl´ement singulier a ´et´e r´ealis´ee par C. Hazard et S. Lohrengel dans [68]. Elle utilise le lemme de C´ea 4.1, et l’´equivalence des normes de H1 et de X0E pour les vecteurs de X
0 , R
E (th´eor`eme 2.25). La preuve de convergence que nous pr´esentons ici
est l´eg`erement diff´erente car nous n’utilisons pas de fonction de troncature, mais nous obtenons le mˆeme taux de convergence, de l’ordre 2α− 1 − . Nous allons montrer le th´eor`eme suivant : Th´eor`eme 4.12 On suppose qu’il existe > 0 tel que 2α− 1 − > 0 et f, g ∈ H2α−1−(ω), e ∈ H2α−1/2−(∂ω). Alors il existe une constante C
> 0 qui ne d´epend que telle que :
|| E − Eh||XE ≤ Ch2 α − 1 − . (4.52)
Pour prouver ce th´eor`eme, nous avons besoin de la proposition suivante : Proposition 4.13 On a l’estimation d’erreur suivante sur le calcul des λi :
Il existe une constante Cλ ne d´ependant que du domaine et des donn´ees telle que :∀i ∈ {1, ..., Ncr} :
| λi − λih| < Cλh2 α.
D´emonstration. La preuve de cette proposition est faite par P. Ciarlet, Jr. et J. He dans [41] pour obtenir un taux de 2α− , et grˆace aux r´esultats de M. Amara et M. Moussaoui dans [4], on obtient le taux optimal.
Pour tout i ∈ {1, ..., Ncr}, xPi , h d´esigne l’approximation num´erique de xPi choisie pour la
repr´esentation. En pratique, on prend souvent : xP
i , h = Πk(xPi ). D´ecomposons E et Eh ainsi : E = eE0 + eλ + Ncr X i=1 λixPi , Eh = eE0h + eλ , h + Ncr X i=1 λihxPi , h.
Posons z0 = eE0 − eE0
h, zλ = eλ − eλ , h et zP = Ncr
X
i=1
( λixPi − λihxPi,h). D’apr`es l’in´egalit´e de Cauchy-Schwarz, on a donc :
|| E − Eh||2XE ≤ 3 ( || z0||2XE + || zλ||2XE + || zP ||2XE) .
Pour montrer le th´eor`eme 4.12, il s’agit alors d’estimer les trois termes du second membre de l’in´egalit´e ci-dessus.
Lemme 4.14 On suppose qu’il existe > 0 tel que 2α − 1 − > 0 et f, g ∈ H2α−1−(ω),
e ∈ H2α−1/2−(∂ω). Alors il existe une constante C0
> 0 qui ne d´epend que telle que :
|| z0||X0 E = || eE 0 − eE0h||X0 E ≤ C 0 h2α−1−|| eE0||H2α−. (4.53)
D´emonstration. La preuve de cette proposition, que nous reprenons de [68] se fait en trois ´etapes :
• D’apr`es le lemme de C´ea 4.1, comme A0 est coercitive, il existe une constante C0 > 0 telle que :
|| eE0 − eE0h||X0
E ≤ C0 F inf h∈ X0 , RE , k
|| eE0 − Fh||X0
E, (4.54)
• D’apr`es le th´eor`eme 2.25, il existe une constante C1 > 0 telle que :
|| eE0 − eE0h||X0
E ≤ C0C1 F inf h∈X0 , RE , k
|| eE0 − Fh||H1. (4.55)
• Or, d’apr`es le th´eor`eme 2.31, pour le nombre consid´er´e, eE0 ∈ H2α−(ω). Comme 2α− > 1, l’analyse d’erreur standard des ´el´ements finis s’applique [33, 66] :
inf
Fh∈X0 , RE , k|| e
E0 − Fh||H1 ≤ C00h2α−1−|| eE0||H2α−.
En prenant, C0 = C0C1C00, on obtient (4.53).
Lemme 4.15 Il existe une constante C∂ω > 0 telle que :
|| zλ||XE ≤ C∂ωh2α−. (4.56)
D´emonstration. Notons que pour e∈ H2α−1/2−(∂ω) avec tel que 2α− 1 − > 0, il existe un rel`evement e∈ H2α−1−(ω) de e, et comme H2α−1−(ω)⊂ C0(ω), Π
k(e) est bien d´efini.
Pour tout i ∈ {1, ..., Ncr}, on pose xRi ∈ H1+s(ω), s > 0, un rel`evement r´egulier de xPi . τ| ∂ω.
Comme H1+s(ω)⊂ C0(ω), Π
k(xRi ) est bien d´efini.
On a : eλ = e − Ncr X i=1 λixRi , et eλ,h = Πk(e) − Ncr X i=1
λihxRi,h. D´ecomposons zλ de la fa¸con suivante :
zλ = e − Πk( e ) + Ncr X i=1 ( λih − λi) Πk( xRi ) + Ncr X i=1 λi( Πk( xRi ) − xRi ).
4.11. Analyse d’erreur 119
D’apr`es l’in´egalit´e de Cauchy-Schwarz, en d´ecomposant cette somme en 2 Ncr + 1 termes, on a
l’in´egalit´e suivante : || zλ||2XE ≤ (2 Ncr+ 1) || e − Πk( e )||2XE + Ncr X i=1 | λih − λi|2|| Πk( xRi )||2XE + Ncr X i=1 | λi|2|| xRi − Πk( xRi )||2XE . ´
Evaluons les trois ensembles de termes du second membre de cette in´egalit´e. • Comme e ∈ H2α−(ω), il existe une constante C
e, > 0 telle que :
|| e − Πk( e )||XE ≤ Ce,h2α−|| e ||H2α−.
• Comme Πk est continue de C0(ω) dans H1(ω), on a pour tout i :
|| Πk( xRi )||XE ≤ ||| Πk||| || xRi ||H1+s, avec :||| Πk||| = sup F∈X0 , RE,k : ||F||X0 E =1 Πk( F ).
En utilisant ce r´esultat ainsi que celui de la proposition 4.13, on arrive `a :
Ncr X i=1 | λi − λih|2|| Πk( xRi )||2XE ≤ C 02 λ ( h2α)2, avec Cλ02 = NcrCλ2||| Πk|||2 max i (|| x R i ||2H1+s).
• Comme ∀i, xRi ∈ H1+s(ω), il existe une constante Cs0 > 0 telle que ∀i :
|| xRi − Πk( xRi )||XE ≤ Cs0hk|| xRi ||H1+s, d’o`u : Ncr X i=1 | λi|2|| xRi − Πk( xiR)||2XE ≤ Cs2h2k, avec C2 s = Ncr max i (|λ i|2) C02 s || xRi ||2H1+s.
Finalement, en prenant C∂ω = max(Ce,|| e ||H2α−, Cλ0 , Cs, )
|| zλ||XE ≤ C∂ωhmin(2α−,2α,k),
≤ C∂ωh2α−,
o`u C∂ω d´epend de|| e ||H2α− et des|| xRi ||H1,s.
• Enfin, r´e´ecrivons zP de la fa¸con suivante :
zP =
Ncr
X
i=1
d’o`u : || zP|| XE ≤ Ncr X i=1 | λi − λih| || xPi ||XE + | λih| || xPi − xPi , h||XE , ≤ CP0 h2α + Ncr X i=1 | λih| || xPi − xPi , h||XE,
o`u CP est une constante qui d´epend des|| xPi ||XE et de Cλ. Or, les erreurs|| xPi − xPi , h||XE sont des
erreurs de repr´esentation et d´ependent du nombre de quadratures p utilis´e pour faire les int´egrations num´eriques. D’o`u : || xPi − xPi , h||XE = O( hφ(p)). Cette erreur est n´egligeable par rapport `a celle
faite sur les λi. D’o`u :
|| zP ||XE ≤ CPh2α.
On est alors en mesure de montrer le th´eor`eme 4.12 :
D´emonstration du th´eor`eme 4.12. Nous avons ´etabli que l’erreur || z0||XE est en h2α−1−.
Les erreurs || zP ||
XE et || zλ||XE sont plus faibles. D’o`u, en regroupant les r´esultats des lemmes
4.14 et 4.15, on obtient la majoration (4.52).
Nous allons maintenant ´etudier l’erreur en norme L2(ω). Pour montrer le th´eor`eme 4.17 ci- dessous, obtenu en utilisant l’astuce d’Aubin-Nitsche, on a besoin du lemme suivant, prouv´e dans la section 14.4 de la partie IV :
Lemme 4.16 Soit f ∈ L2(ω). Consid´erons le probl`eme variationnelle suivant :
Trouver G ∈ X0E tel que :
∀ F ∈ X0E, A0(G , F) = (f , F)0. (4.57)
D’apr`es le th´eor`eme de Lax-Milgram, ce probl`eme admet une unique solution qui d´epend continˆument de f . Soit Gh l’approximation de G par la λ-approche. On a alors l’approximation d’erreur suivante
sur le calcul de Gh : ∀ > 0 tel que 2 α − 1 − > 0 et 2 ( α − 1 ) − > 0 :
|| G − Gh||XE ≤ CG|| f ||0h2 α − 1 − pour α≤ 3/4 ,
|| G − Gh||XE ≤ CG|| f ||0h2 ( 1 − α ) − pour α≥ 3/4 .
Th´eor`eme 4.17 On suppose qu’il existe > 0 tel que 2 ( 2 α − 1 ) − > 0, 1 − ε > 0, f, g ∈ H2α−1−(ω) et e ∈ H2α−1/2−(∂ω). Alors, il existe une constante C0
> 0 qui ne d´epend que
de telle que :
|| E − Eh||0 ≤ C0h2 (2 α − 1 ) − pour α≤ 3/4 ,
|| E − Eh||0 ≤ C0h1 − pour α≥ 3/4 .
(4.58)
D´emonstration.
• Consid´erons tout d’abord le probl`eme suivant : Trouver G ∈ X0
E tel que :
∀ F ∈ X0E, A0( G , F ) = ( E − Eh, F )0. (4.59)
Comme (E− Eh)∈ L2(ω), on est dans le cadre du lemme 4.16. Soit > 0 tel que 2 α− 1 − > 0
et 2 ( 1 − α ) − > 0. L’approximation de G par la λ-approche est telle que : || G − Gh||XE ≤ CG|| E − Eh||0h2 α − 1 − pour α≤ 3/4 ,
|| G − Gh||XE ≤ CG|| E − Eh||0h2 ( 1 − α ) − pour α≥ 3/4 .
4.11. Analyse d’erreur 121
• Maintenant, nous allons majorer || E − Eh||0 `a l’aide de || G − Gh||X0
E. Notons d’abord
qu’en prenant comme fonction test Gh dans (2.43) et dans (4.41)-(4.42), on a l’´egalit´e suivante :
( E , Gh)X0
E = ( Eh, Gh)X0E, (4.61)
ce qui nous permet d’obtenir que : ( E − Eh, Gh)X0
E = 0. C’est la propri´et´e d’orthogonalit´e de
Galerkin. D´ecomposons|| E − Eh||20 ainsi :
|| E − Eh||20 = A0( G , E − Eh) = A0( E − Eh, G ) , = ( E − Eh, G )X0 E − ( E − Eh, Gh)X0E, = ( E − Eh, G − Gh)X0 E, ≤ M || E − Eh||X0
E|| G − Gh||X0E, o`u M est la constante de coercivit´e de A0;
≤ M Ch2 α − 1 − || G − Gh||X0 E, d’apr`es le th´eor`eme 4.12, ≤ M CCGh2 ( 2 α − 1 ) − || E − Eh||0, pour α≤ 3/4 , M CCGh2 α − 1 + 2 ( 1 − α ) − || E − Eh||0, pour α≤ 3/4 , d’apr`es (4.60).
Posons C0 = M CCG. En divisant la derni`ere in´egalit´e par || E − Eh||0, on obtient (4.58).
Remarque 4.18 Si n´ecessaire (en particulier, dans le cas o`u α est proche de 1/2), il est possible d’am´eliorer la vitesse de convergence : en raffinant localement le maillage, ou en calculant explicite- ment les termes singuliers suivants du champ [86], ou encore en calculant avec pr´ecision la solution au voisinage des coins de ∂ω `a l’aide d’op´erateurs Dirichlet-Neumann [8].