• Aucun résultat trouvé

3.1 Introduction

Ce chapitre aborde dans un premier temps la définition du problème inverse en géophysique. Ensuite, nous présentons les méthodes d'inversion dites des moindres-carrés les plus utilisées en géophysique dans un second temps. Sans toutefois rentrer dans une description exhaustive de ces méthodes, nous en présentons quelques solutions. Le lecteur intéressé peut consulter la littérature géophysique suivante (Jackson, 1972; Tarantola & Valette, 1982; Lines & Treitel, 1984; Constable et al., 1987; Meju, 1994a) et aussi des livres de référence (Menke, 1989; Parker, 1994; Kirsch, 2011). Nous terminons ce chapitre en abordant les notions d'inversion séparée et conjointe.

3.2 Définition du problème inverse

La définition du problème inverse en géophysique implique la définition de trois notions fondamentales, les données (d), le modèle (m) et la relation mathématique g(m) reliant d à m. Ces notions seront abordées dans le cadre de l'inversion des données TEM et se traduisent comme suit :

 Les données sont les courbes de décroissance de la dérivée du champ magnétique secondaire mesurées sur le terrain :

𝒅 = 𝜕𝒃1 𝜕𝑡 , 𝜕𝒃2 𝜕𝑡 , … 𝜕𝒃𝑛 𝜕𝑡 𝑇 (3.1)  Le modèle est défini par la conductivité électrique (σ) et l'épaisseur (l) des couches :

𝒎 = 𝜎1, 𝜎2, … , 𝜎𝑖, 𝑙1, 𝑙2, … , 𝑙𝑖−1 𝑇 (3.2)

 La relation mathématique représente les lois de l'électromagnétisme permettant de construire la matrice g(m) reliant le modèle aux données.

L'inversion consiste alors à minimiser l'écart entre g(m) et d. Mathématiquement l'écart s'écrit comme suit :

𝒆𝒓 = 𝒅 − 𝑔 𝒎 (3.3) Le plus souvent, la réponse g(m) est non-linéairement liée aux paramètres du modèle m. Afin de minimiser l'écart entre les observations et la réponse du modèle, on émet l'hypothèse que g(m) est une fonction linéaire autour d'un modèle initial m0 de sorte qu'une petite perturbation de la

réponse du modèle au voisinage de m0 peut être représentée par la série de Taylor de premier

ordre : 𝑔 𝒎 = 𝑔 𝒎𝟎 + 𝑱𝜹𝒎 (3.4) 𝑱𝒊𝒋= 𝜕𝑔𝒊 𝒎𝟎 𝜕𝒎𝒋 (3.5) 𝜹𝒎 = 𝒎 − 𝒎𝟎 (3.6) g(m0) : Réponse du modèle initial.

J : Matrice de sensibilité (matrice jacobienne) dont les éléments représentent la contribution de

chaque paramètre à la réponse calculée.

δm : Vecteur de perturbation des paramètres.

L'équation (3.4) substituée dans l'équation (3.3) donne une nouvelle expression de l'erreur qui est :

𝒆𝒓 = 𝒆𝒓𝟎− 𝑱𝜹𝒎 (3.7) Avec er0 =d - g(m0); représente l'erreur entre la réponse du modèle initial et les observations.

Minimiser l'équation (3.7) revient à déterminer δm.

3.3 Méthodes d'inversion par les moindres-carrés

Dans ces méthodes d'inversions, on recherche une solution stable au sens des moindres-carrés à l'équation 3.7. C'est-à-dire qui minimise la norme des écarts entre les données observées et calculées (Eq. 3.8).

𝜱 = 𝒆𝒓𝑇𝒆

Ce problème est résolu par itération à partir d'un modèle initial m0 en utilisant plusieurs

algorithmes. La solution donnée par la méthode classique de Gauss-Newton est donnée par l'équation 3.9.

𝜹𝒎 = 𝑱𝑇𝑱 −1𝑱𝑇𝒆

𝒓𝟎 (3.9) En remplaçant (Eq. 3.9) dans (Eq. 3.6), le modèle à l'itération k+1 s'écrit :

𝒎 = 𝒎𝟎+ 𝑱𝑇𝑱 −1𝑱𝑇𝒆

𝒓𝟎 (3.10) L'équation 3.10 est la solution des moindres carrés non-contrainte (Lines & Treitel, 1984). Cependant, il peut arriver que JTJ n'existe pas ou soit singulière. Dans ce cas, Levenberg (1944)

et Marquardt (1963) proposent d'ajouter une contrainte additionnelle à l'équation 3.8 pour résoudre le problème de singularité. La nouvelle approche est connue sous le nom de méthode de Marquardt-Levenberg ou des moindres carrés amortis. La fonction à minimiser et la solution sont données par les équations 3.11 et 3.12.

𝜱 = 𝒆𝒓𝑇𝒆

𝒓+ 𝛽 𝜹𝒎𝑇𝜹𝒎 − 𝜹𝟎2 (3.11) 𝜹𝒎 = 𝑱𝑇𝑱 + 𝛽𝑰 −1𝑱𝑇𝒆

𝒓𝟎 (3.12) β est appelé facteur d'atténuation et I est la matrice identité. βI est négligeable si β est petit, on se retrouve alors dans le cas de la méthode des moindres-carrés non-contrainte (Eq. 3.8). Lorsque β est grand, la méthode est semblable à la méthode de la plus grande pente car δm est proportionnel à‎−JT

er0.

Les solutions (Eqs. 3.9 et 3.12) nécessitent le calcul de JTJ et JTer0 ce qui peut entrainer des

instabilités numériques. Afin d'éviter ces instabilités numériques, plusieurs auteurs proposent la méthode de décomposition en valeurs singulières (SVD) (Golub & Reinsch, 1970; Jupp & Vozoff, 1975; Chen & Raiche, 1998). Cette méthode consiste à factoriser la matrice J en un produit de trois autres matrices U, Λ et V tel que :

𝑱 = 𝑼𝜦𝑽𝑇 (3.13)

Unxp et Vnxp sont respectivement les matrices de vecteurs propres des données et des paramètres.

Λpxp une matrice diagonale dont les éléments λj sont les valeurs propres non nulles de J (Lanczos, 1961; Lawson & Hanson, 1974). Ainsi, en utilisant la méthode SVD, la solution δm dans les équations 3.9 et 3.12 est donnée respectivement par les équations 3.14 et 3.15.

𝜹𝒎 = 𝑱𝑇𝑱 −1𝑱𝑇𝒆 𝒓𝟎 = 𝑽𝜦−1𝑼𝑇𝒆𝒓𝟎 (3.14) 𝜹𝒎 = 𝑱𝑇𝑱 + 𝛽𝑰 −1𝐽𝑇𝒆 𝒓𝟎 = 𝑽𝑑𝑖𝑎𝑔 1 λ𝑗2 + 𝛽 𝑼𝑇𝒆𝒓𝟎 (3.15)

3.4 Inversion séparée

L'inversion des données TEM consiste à obtenir la distribution de la résistivité et l'épaisseur des couches du sous-sol. Au cours de l'inversion, chaque sondage est interprété individuellement. Le sous-sol est simulé par un milieu tabulaire 1D dans lequel la résistivité de chaque couche est supposée constante et isotrope (Huang & Palacky, 1991; Chen & Raiche, 1998; Farquharson et al., 1999). En pratique, on cherche le modèle le plus simple possible (5 couches au maximum) pouvant expliquer les données. Les résultats obtenus dépendent du nombre de couches et du modèle de départ utilisés lors de l'inversion (Farquharson & Oldenburg, 1993). Lorsqu'on désire un modèle avec une variation lisse de la résistivité, le sous-sol peut être discrétisé en un nombre plus important de couches (Vallée & Smith, 2009). Dans ce cas, les couches ont des épaisseurs fixes et seules les résistivités des couches peuvent varier (Christensen et al., 2010). Lorsque des informations a priori fournies par la géologie ou l'interprétation d'autres méthodes géophysiques existent à proximité des sondages, celles-ci peuvent servir à contraindre l'épaisseur et/ou la résistivité des couches. Si la densité spatiale des données le permet et que les stations de mesures sont le long d'un profil, les modèles obtenus pour chaque station peuvent être juxtaposés pour des besoins de représentation afin de fournir une image multi-1D ou pseudo-2D du sous-sol, mais qui peuvent montrer un comportement variable d'un sondage à l'autre. Des méthodes telles que la LCI (Auken & Christiansen, 2004; Viezzoli et al., 2008) appliquent des contraintes sur des sondages contigus permettant ainsi d'obtenir un modèle lisse 2D du sous-sol. Très souvent, le modèle 1D obtenu par inversion est assez représentatif du milieu investigué. Néanmoins, celui-ci devient insuffisant dans un contexte géologique complexe avec de fortes variations latérales de résistivité. Des artéfacts peuvent être créés dans le modèle de résistivité final, le rendant plus ou moins imprécis, voir faux (Ley-Cooper et al., 2010). Dans ces contextes géologiques complexes, le sous-sol est approché par des modèles discrétisés en cellules 2D (Wolfgram et al., 2003; Guillemoteau et al., 2012), voire 3D de résistivité électrique (Cox et al., 2010).

3.5 Inversion conjointe

Le développement de l'inversion en géophysique a permis de proposer divers schémas afin d'inverser deux ou plusieurs ensembles de données distinctes. L'ensemble de ces méthodes est connu sous le vocable d'inversion conjointe (Vozoff & Jupp, 1975).

En effet, l'inversion séparée de deux ensembles de données mesurant la même propriété physique peut produire deux modèles individuels qui pourraient ne pas être corrélés (Christiansen et al., 2007). Initialement, il s'agissait de combiner des méthodes géophysiques différentes mais permettant d'estimer des propriétés physiques identiques dans une certaine mesure. Cependant, le concept a été étendu à l'inversion simultanée de deux ensembles de données obtenues par la même méthode géophysique, avec le même système, mais avec des dispositifs de mesure différents sur le terrain (Krivochieva & Chouteau, 2001). Certains auteurs tels que Raiche et al. (1985), Schmutz et al. (2000) et Albouy et al. (2001) et Bała‎ et‎ Pięta‎ (2010) proposent une combinaison de la TEM avec les méthodes de résistivité DC pour résoudre les ambigüités liées à la résolution de chaque technique. Par exemple, les méthodes EM peuvent bien résoudre une couche si celle-ci n'est pas mince ou résistive par rapport au milieu encaissant (Verma, 1980). Les méthodes de résistivité DC ne peuvent résoudre une couche conductrice mince située entre deux terrains résistifs que par le rapport épaisseur/résistivité, et une couche résistante mince située entre deux terrains conducteurs que par le rapport épaisseur/conductivité.

Lors de l'inversion conjointe, si les paramètres recherchés du sous-sol sont identiques pour les différents jeux de données, une seule matrice jacobienne permettant de calculer le terme de correction des paramètres à chaque itération est à estimer. Dans le cas de paramètres totalement dissemblables, Haber et Oldenburg (1997) font l'hypothèse que les modèles sous-jacents aux ensembles de données ont une structure commune. Dans ce cas, on utilise une fonction-objectif commune qui minimise la différence de structure entre les modèles obtenus par l'inversion individuelle de chaque ensemble de données.