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Méthodes de détection directionnelles

2.3 Description et analyse des méthodes existantes

2.3.9 Méthodes de détection directionnelles

Dans ce paragraphe nous avons regroupé quelques méthodes d’identification de la variable responsable du déréglage basées sur le décryptage de la "signature" caractérisant d'une manière unique chaque cause assignable. Par "signature" on doit comprendre le regroupement des points observations, caractérisant la présence d'une cause assignable, dans une certaine zone bien définie dans l'espace multidimensionnel.

Lafaye de Micheaux [68, 69] affirme que les points associés à une cause assignable s'organisent autour d'une direction privilégiée passant par le centre de gravité du nuage des points caractérisant le fonctionnement sous contrôle du processus (figure II.8). Lafaye de Micheaux [68, 69] propose une méthode qui consiste à identifier à quelle direction peut être associé un point hors contrôle (détecté par la carte de contrôle T² de Hotelling).

La proximité entre un point hors contrôle et une certaine direction peut être évaluée de deux façons:

1 par l'abscisse du point projeté sur cette direction;

1 par l'angle au centre C que forme le point avec cette direction;

Le premier indice de proximité donne lieu à une "variable cause" qui peut être suivie à l'aide d'une carte de contrôle classique.

Le deuxième indice de proximité peut être exprimé en unités d'angle (degré, radian,…) ou par le cosinus de l'angle. Un inconvénient de cette démarche est que la distribution des valeurs de l'angle ou du cosinus de l'angle n'est pas gaussienne d'où une certaine difficulté pour établir les limites de contrôle sur la carte. Pour remédier à cet inconvénient Lafaye de Micheaux donne les valeurs des limites de contrôle pour un nombre de variables compris entre 2 et 100 et pour différents risques de première espèce

6 entre 0.0001 et 0.1. Un autre inconvénient lié à l'utilisation de l'angle C (ou son cosinus) pour la détection des points hors contrôle est que l'efficacité de la détection est fonction de la dimension de l'espace des variables.

figure II.8 - Directions "spécifiques" dans l'espace multivarié

La mise en œuvre de la méthode commence par une analyse historique des données afin d'identifier les directions des causes assignables. Cette analyse comporte trois étapes:

1 on établit d'abord une distinction entre les points sous contrôle et les points hors contrôle (pour cela on peut utiliser une procédure itérative basée sur l'élimination des points jugés hors contrôle par une carte T² de Hotelling);

1 on regroupe ensuite par causes les observations déclarées hors contrôle (ce regroupement s'appuie à la fois sur la connaissance pratique du processus et sur une méthode de classification adaptée);

1 on détermine enfin la direction "moyenne" à associer à chaque groupe défini à l'étape précédente.

Les directions propres aux causes assignables étant identifiées, on dispose des coefficients (abscisses de projection ou des cosinus d'angle) utilisables pour la détection. Dans la phase opérationnelle de contrôle, ces coefficients sont utilisés pour chaque nouvelle observation déclarée hors contrôle par la carte T² de Hotelling. L'identification de la cause assignable associée à un point hors contrôle se fait de la manière suivante:

1 si une seule "variable cause" déclare le point hors contrôle alors la cause assignable est identifiée;

1 si plusieurs variables cause sont candidates, on retient la (ou les) cause(s) associée(s) à la valeur d'angle la plus significative;

1 si aucune variable cause n'est pas candidate, il s'agit sans doute d'une nouvelle cause qui n'a pas encore été répertoriée. L'identification se fera dans ce cas par tâtonnement. Cette observation permettra de définir une nouvelle direction de cause à intégrer au système de reconnaissance. Ainsi cette cause pourra être reconnue par la suite.

X1 X2 Direction cause 1 Direction cause 2 Direction cause 3 θ

Parfois, néanmoins, il est difficile de distinguer ces directions dans le plan des variables originales. En plus, quand le nombre de variables est supérieur à trois il est impossible d'envisager une inspection visuelle. Pour remédier à cet inconvénient Lafaye de Micheaux [68] propose l'utilisation de l'espace des composantes principales.

Yoon et MacGregor [133] proposent une méthodologie de contrôle basée sur le changement, enregistré dans la présence d'une cause assignable, de l'orientation du vecteur d'observation dans l'espace ACP (l'espace du modèle et l'espace résiduel). La méthode peut s'utiliser conjointement avec les diagrammes de contribution des variables et aide à améliorer l'identification de la variable responsable du déréglage. Yoon et MacGregor considèrent que les causes assignables sont de deux types: les causes assignables simples (leur effet se manifeste au niveau d'une seule variable et il ne se propage pas dans les autres variables) et les causes assignables complexes (sont causées par une certaine variable mais leur effet se propage et perturbe aussi les autres variables). L'identification de la variable responsable pour une cause assignable est relativement facile à l'aide des diagrammes de contributions. Par contre, l'identification de la variable responsable du déréglage dans le cas des causes assignables complexes est plus difficile car sur le diagramme de contributions beaucoup de variables présentent de valeurs importantes. Pour remédier à cette situation, il est nécessaire d'avoir plus d'information sur la nature des causes assignables ou sur les relations entre les variables. Cette information est extraite d'une base de données où l'historique de l'évolution du processus se trouve enregistré.

Le principe de construction de la méthode de Yoon et MacGregor est très simple. Ils partent de l'hypothèse qu'une cause assignable complexe a une "signature" initiale (ou caractéristique lui étant propre et l'identifiant d'une manière unique), une trajectoire d'évolution temporelle et finalement une deuxième "signature" dans un état d'équilibre stable (figure II.9).

figure II.9 - Evolution de la "signature" de la cause assignable

La "signature" initiale de la cause assignable peut donner une indication précieuse au sujet de la variable responsable du déréglage car elle n'est pas affectée par la propagation d'erreurs. Malheureusement, en pratique, il arrive qu'elle n'est pas détectée à temps et, par conséquent, la trajectoire de la transition et l'état final

"Signature" initiale de la cause assignable Trajectoire "Signature" à l'équilibre de la cause assignable Var 1 Var 2 Var 3 O

d'équilibre sont utilisés comme une alternative pour caractériser les causes assignables complexes.

Si on note par xn le vecteur d'observations juste avant l'apparition de la cause assignable, alors la présence d'une cause assignable i peut être modélisée par l'équation suivante: x = xn + fi (où x est le nouveau vecteur d'observations et fi est le vecteur de la cause assignable). Le vecteur de la cause assignable peut être décomposé en utilisant l'approche ACP en deux parties: le vecteur fˆ qui se trouve dans l'espace réduit définit i par l'ACP et le vecteur f~iqui se trouve dans l'espace des résidus. Ces deux vecteurs sont, par la suite, normalisés pour qu'ils ne soient pas influencés par leurs amplitudes:

i i 0 i = i i 0 i f ~f ~ f ~ = , avec ~fi ≠0 et i ≠0 (2.35)

Une base de données qui regroupe tous les vecteurs de "signature" pour tout i = 1, 2,…,r est construite de la manière suivante:

[

0

]

r 0 2 0 1,fˆ , ,fˆ Fˆ = 4 et

[

0

]

r 0 2 0 1 ,~f , ,f~ f ~ F ~= 4 (2.36)

Les deux matrices dans l'équation (2.36) contiennent toute l'information disponible concernant les r causes assignables dans les deux espaces (l'espace du modèle et l'espace résiduel).

Une fois qu'on a identifié ces deux matrices, la procédure de contrôle est très simple: on décompose tout nouveau vecteur d'observation xnouveau en deux composantes

nouveau

et x~nouveau qui seront, par la suite, normalisées:

nouveau nouveau 0 xˆ xˆ xˆ = et nouveau nouveau 0 x ~ x ~ x ~ = (2.37)

et ensuite on mesure l'angle entre les vecteurs "signatures" de la base de données (les colonnes des matrices Fˆ et F~) et le nouveau vecteur d'observations (xˆ et 0 x~ ) pour 0 identifier la cause de l'anomalie. La figure II.10 illustre la relation existante entre le nouveau vecteur d'observations (xnouveau) et le vecteur "signature" f1 correspondant à une cause assignable antérieurement détectée dans la variable x1.

Le cosinus de l'angle (C) formé entre le nouveau vecteur d'observations et un parmi les vecteurs "signature" donne une mesure de la colinéarité existante entre eux. Dans l'espace des résidus on a:

0 1 T 0 1 (x~ ) f~ ~ cosθ = , où −1≤(~x0)Tf~10 ≤1 (2.38) Si la valeur de cosinus s'approche de 1 cela veut dire que le nouveau vecteur d'observations est presque colinéaire avec la direction de la cause assignable. Par conséquent, quand la carte T² ou la carte Q signalent une anomalie, la nature de la cause assignable peut être identifié comme celle pour laquelle la valeur du cosinus est proche de 1, ou comme étant celle pour laquelle on a la valeur maximale du cosinus:

( )

[ ] [

( ) ( ) ( )

0

]

r T 0 0 2 T 0 0 1 T 0 i T 0 i ~x F~ max x~ ~f , x~ ~f , , ~x f~ max = 4 (2.39)

figure II.10 -Décomposition de la cause assignable et du nouveau vecteur d'observations La composante cosinus du modèle ACP est calculée d'une manière similaire. L'identification de la cause assignable est faite par l'utilisation conjointe des diagrammes pour les valeurs cosinus dans l'espace de résidus et dans l'espace du modèle. L'avantage de la méthode est la détection non seulement des causes assignables simples mais aussi des causes assignables complexes. L'inconvénient de la méthode est que l'utilisation de la "signature" de la cause assignable dans un état d'équilibre induit inévitablement un certain retard entre le moment de l'apparition de la cause et l'identification.

2.4 Conclusion

Il est difficile de dire quelle est, parmi toutes ces techniques, la meilleure. Chacune a des avantages et des inconvénients. Certaines techniques, même si elle ne sont pas très performantes dans la localisation de la source d’un déréglage, sont intéressantes parce qu’elles ont ouvert le chemin vers d'autres approches plus complexes et plus pratiques. On peut mentionner ici, à titre d’exemple, la méthode de régression multiple de Hawkins [46] et la méthode de calcul de la contribution des variables à la statistique T2 Hotelling utilisant le test t (Student) – proposée par Doganaksoy, Faltin et Tucker [2] - qui ont permis à Mason, Tracy et Young [80-82] d’élaborer une méthode plus complexe et performante. Comme nous avons vu dans les paragraphes précédents, les techniques statistiques de régression linéaire multiple, d’analyse en composantes principales, sont les plus souvent utilisées pour localiser la source d’un déréglage sur les cartes multivariées. Ces deux techniques sont très complexes et peuvent donner lieu à beaucoup d’interprétations. Les statisticiens ont toujours trouvé des cas pratiques particuliers qui sont solutionnés d’une façon plus adéquate avec une méthode ou avec

f1 Composante principale Nouvelle observation Cause assignable connue x1 x2 xnouveau xn 1 f~1 x~ θ

une autre. Parmi les techniques basées sur la régression multiple, la méthode MYT de décomposition de la statistique T2 est, sans aucun doute la plus performante, si l’hypothèse de distribution normale multiple pour les variables est respectée. Dans le cas des processus en cascade la méthode de sélection de la cause de Zhang donne également de bons résultats. Il nous semble utile de préciser que les techniques de régression multiple ne sont pas très efficaces quand la corrélation entre les variables est forte. Dans ce cas, la méthode d’analyse en composantes principales (ACP) et la méthode des projections dans les structures latentes (PLS) donnent de meilleurs résultats. En plus, l’analyse en composantes principales a l’avantage de nécessiter un nombre réduit de cartes de contrôle ce qui facilite l'analyse.

Malgré la diversité des concepts statistiques utilisés, presque toutes les méthodes présentées dans ce chapitre ont un point en commun. Elles sont des méthodes "off-line", c'est-à-dire qu'elles ne peuvent pas être utilisées en temps réel pour le diagnostic du processus. Quand une situation hors contrôle est détectée dans un processus multivarié, une analyse complexe et détaillée doit être effectuée afin de déterminer la variable ou les variables responsable(s) de cette situation. Généralement, cette analyse ne peut pas être effectuée en temps réel.

La plupart des méthodes font appel à des représentations graphiques des caractéristiques univariées indépendantes comme les résidus ou les composantes principales par exemple. Ces variables indépendantes sont ensuite représentées sur des cartes de contrôle de type Shewhart. Quand le nombre de variables est très élevé il devient difficile d'analyser simultanément toutes ces cartes.

Dans la plupart des cas, l'opérateur doit être formé avant d'utiliser la méthode et ses conclusions dépendent, dans beaucoup de cas, de ses connaissances statistiques et parfois de son intuition. Après avoir détecté la source de la situation hors contrôle, l'expérience acquise par l'analyse du processus n'est pas valorisée d'une manière efficace, c'est-à-dire qu'une nouvelle analyse sera effectuée pour chaque situation hors contrôle comme si aucune connaissance du processus n'était disponible.

Nous proposons une nouvelle méthodologie de contrôle de processus basée sur le filtrage numérique et sur l'analyse discriminante afin de remédier à ces inconvénients. Nous allons décrire plus en détail cette méthodologie dans le chapitre 3.

1

1

1

1

1

1

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3.1 Introduction

Nous avons présenté dans le chapitre 2 un panorama non-exhaustif des méthodes de détection de la variable responsable d'une situation hors-contrôle dans le cas multivarié. Nous avons analysé les avantages et les inconvénients de ces méthodes dans le paragraphe 2.4.

Dans ce chapitre nous proposons une nouvelle méthodologie pour la détection de la source d'un déréglage dans un processus multivarié. Notre méthode repose principalement sur l'utilisation de l'analyse discriminante (AD) et du filtrage numérique de signal (FN). Par conséquent, nous aborderons au début de ce chapitre quelques notions de base concernant l'analyse discriminante. Les deux principaux aspects théoriques de la méthode, l'aspect descriptif et l'aspect décisionnel, seront exposés. Quelques remarques concernant les caractéristiques qualitatives des règles de classement seront énoncées. Dans le deuxième paragraphe de ce chapitre, nous allons donner une définition du signal numérique et du filtre numérique de signal. Ensuite, nous allons passer en revue les différents types de filtres numérique et nous allons préciser les équations récurrentes qui les caractérisent. Finalement, dans le dernier paragraphe, nous allons donner une description détaillée de la méthodologie de contrôle FNAD (Filtrage Numérique et Analyse Discriminante) et un exemple d'application pratique basé sur des données simulées sera analysé.